Responsabilité contractuelle et preuve des défauts d’exécution dans un contrat de sous-traitance.

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Responsabilité contractuelle et preuve des défauts d’exécution dans un contrat de sous-traitance.

Règle de droit applicable

Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, conformément à l’article 1103 du Code civil. Cet article établit le principe fondamental de la force obligatoire des contrats, stipulant que les parties doivent respecter les engagements qu’elles ont pris.

Obligation de résultat

L’article 1231-1 du Code civil précise que le débiteur est condamné au paiement de dommages et intérêts en cas d’inexécution de l’obligation, sauf s’il prouve que l’exécution a été empêchée par un cas de force majeure. Cela implique que le sous-traitant, en l’occurrence la société Marcillac, est tenu à une obligation de résultat concernant la qualité des travaux réalisés.

Responsabilité contractuelle

L’article 1231-2 du Code civil indique que les dommages et intérêts dus au créancier sont généralement constitués de la perte subie et du gain manqué, sauf exceptions. Cette disposition est pertinente pour évaluer les conséquences d’une inexécution contractuelle et les réparations dues au créancier.

Charge de la preuve

La charge de la preuve incombe à celui qui allègue un fait, conformément aux principes généraux du droit. Dans le cadre de la responsabilité contractuelle, il appartient à la société Atemco de prouver que les désordres constatés résultent d’une inexécution de la part de la société Marcillac, et non d’autres causes.

Normes contractuelles et délais

Les parties peuvent convenir de délais et de normes spécifiques dans le cadre de leur contrat, et ces éléments peuvent acquérir valeur contractuelle. En l’espèce, la société Marcillac n’a pas été tenue de respecter des normes qui auraient été rendues applicables au marché de travaux, ce qui souligne l’importance des stipulations contractuelles.

Conséquences de l’inexécution

En cas d’inexécution, le créancier peut demander des dommages et intérêts, mais cela ne peut pas conduire à un rejet pur et simple de la demande en paiement. La jurisprudence indique que des défauts d’exécution peuvent donner lieu à des réparations, mais ne justifient pas nécessairement le refus de paiement pour des travaux réalisés, conformément aux articles 1231-1 et 1231-2 du Code civil.

L’Essentiel : Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, établissant ainsi la force obligatoire des engagements. En cas d’inexécution, le débiteur est condamné au paiement de dommages et intérêts, sauf preuve d’un cas de force majeure. La charge de la preuve incombe à celui qui allègue un fait, et les parties peuvent convenir de délais et de normes spécifiques. En cas d’inexécution, le créancier peut demander des dommages et intérêts sans rejeter la demande en paiement.
Résumé de l’affaire : La communauté de communes et la commune ont confié à une société de construction la réalisation de bâtiments modulaires pour une école. Cette société a sous-traité à une autre entreprise la fourniture et la pose de revêtements de sols. Un devis a été accepté, et un bon de commande a été émis pour un montant total de 17’323,70 euros TTC. Après l’émission d’une situation de travaux, des défauts ont été constatés dans la pose des revêtements, entraînant une mise en demeure de la société de construction pour fournir des documents techniques.

Suite à une réunion, la société de construction a proposé de refaire une salle avec un nouveau produit. Cependant, par lettre recommandée, elle a ensuite refusé l’ensemble des travaux réalisés par le sous-traitant, invoquant la non-conformité des revêtements. Le sous-traitant a répliqué en affirmant que les désordres provenaient de la pose des plaques, qui relevaient de la responsabilité de la société de construction.

Un constat a été réalisé par un commissaire de justice, qui a noté que les revêtements posés par le sous-traitant ne présentaient pas d’anomalies. Après des travaux de remplacement, la réception des travaux a eu lieu avec des réserves non liées au litige. Le sous-traitant a ensuite assigné la société de construction pour obtenir le paiement des travaux réalisés.

Le tribunal de commerce a débouté le sous-traitant de ses demandes, ainsi que la société de construction de sa demande reconventionnelle. Le sous-traitant a fait appel, demandant l’infirmation du jugement et le paiement de sa facture. La société de construction a également formé un appel incident, demandant des indemnités pour préjudice matériel et des dommages-intérêts pour procédure abusive.

La cour d’appel a déclaré recevable l’appel du sous-traitant, a infirmé le jugement initial et a condamné la société de construction à payer une somme pour les travaux, tout en rejetant les demandes de la société de construction. Les frais de justice ont été mis à la charge de la société de construction.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la responsabilité contractuelle dans cette affaire ?

La responsabilité contractuelle est régie par les articles 1103 et 1231-1 du Code civil.

L’article 1103 stipule que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». Cela signifie que les parties sont tenues de respecter les engagements pris dans le cadre de leur contrat.

L’article 1231-1 précise que « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure ».

Ainsi, en cas de manquement à une obligation contractuelle, la partie lésée peut demander des dommages et intérêts pour compenser le préjudice subi.

Quel est le rôle des comptes-rendus de chantier dans l’évaluation de la conformité des travaux ?

Les comptes-rendus de chantier, bien qu’ils n’aient pas de valeur contractuelle, peuvent servir de preuve dans l’évaluation de la conformité des travaux réalisés.

Dans cette affaire, la société Atemco a soutenu que les défauts des sols PVC avaient été constatés dans ces comptes-rendus, qui doivent être opposés à la société Marcillac en raison de leur concordance sur les défauts constatés.

Il est important de noter que l’article 1231-2 du Code civil indique que « les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé ». Cela implique que la société Marcillac doit prouver que les travaux étaient conformes pour éviter d’être tenue responsable des défauts constatés.

Quel est l’impact de la mise en demeure sur les obligations contractuelles des parties ?

La mise en demeure est un acte juridique qui a pour effet de rappeler à une partie ses obligations contractuelles.

Dans cette affaire, la société Atemco a mis en demeure la société Marcillac de fournir des documents attestant de la conformité des installations.

Selon l’article 1231-1 du Code civil, cette mise en demeure est essentielle car elle marque le début du délai pour l’exécution de l’obligation. Si la société Marcillac ne répond pas à cette mise en demeure, elle pourrait être considérée comme ayant manqué à ses obligations contractuelles, ce qui pourrait entraîner des conséquences financières.

Quel est le principe de l’obligation de résultat dans le cadre de la sous-traitance ?

L’obligation de résultat est un principe fondamental dans le cadre des contrats de sous-traitance.

La société Atemco a soutenu que la société Marcillac avait manqué à son obligation de résultat en ne fournissant pas des travaux conformes aux règles de l’art.

L’article 1231-1 du Code civil stipule que le débiteur est responsable de l’inexécution de son obligation, sauf s’il prouve que l’exécution a été empêchée par un cas de force majeure.

Ainsi, la société Marcillac doit démontrer qu’elle a respecté ses obligations contractuelles pour éviter d’être tenue responsable des défauts constatés.

Quel est le rôle des frais irrépétibles dans le cadre de cette procédure ?

Les frais irrépétibles, régis par l’article 700 du Code de procédure civile, sont des frais que la partie perdante peut être condamnée à payer à la partie gagnante.

Dans cette affaire, la société Atemco a été condamnée à payer des frais irrépétibles à la société Marcillac, ce qui souligne l’importance de ces frais dans le cadre des litiges commerciaux.

L’article 700 précise que « le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles ». Cela permet de compenser les frais engagés par la partie gagnante pour faire valoir ses droits en justice.

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 11 MARS 2025

N° RG 23/01161 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NEZH

SARL ETS MARCILLAC ET FILS

c/

S.A.S.U. ATEMCO

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 janvier 2023 (R.G. 2021.02776) par le Tribunal de Commerce de PERIGUEUX suivant déclaration d’appel du 09 mars 2023

APPELANTE :

SARL ETS MARCILLAC ET FILS, inscrite au RCS de Bergerac sous le numéro 409 566 304, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 4]

Représentée par Maître Lucie ROZENBERG, avocat au barreau de BERGERAC

INTIMÉE :

S.A.S.U. ATEMCO, inscrite au RCS d’Orléans sous le numéro B 533 925 517, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]

Représentée par Maître Bénédicte DELEU, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Michel Louis COURCELLE, avocat au barreau d’ORLEANS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 février 2025 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,

Madame Sophie MASSON, Conseiller,

Madame Anne-Sophie JARNEVIC,Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE

La communauté de communes [Localité 3] et la commune de [Localité 2] (maîtres d’ouvrage) ont confié à la SAS Atemco la construction de bâtiments modulaires visant à accueillir une école à [Localité 2].

La société Atemco a conclu un contrat de sous-traitance avec la SARL Etablissements Marcillac et Fils (ci-après désignée société Marcillac) afin de fournir et poser les revêtements de sols à l’intérieur des modulaires.

Le 23 avril 2020, la société Marcillac a émis un devis pour un montant de 17’323,70 euros TTC, accepté le 28 avril 2020 par la société Atemco, qui prévoyait au titre de la phase 1 la fourniture et la pose de revêtement thermoplastique de classement U4P3 pour un montant de 14’248,40 euros HT et, en phase 2, celle de plinthes PVC pour un montant de 3075.30 euros HT.

Le 13 mai 2020, la société Atemco a émis un bon de commande sous-traitant correspondant au devis, pour un montant de 17323.70 euros TTC, puis elle a fait signer le 14 mai 2020 à la société Marcillac une déclaration de sous-traitance (formulaire DC4).

Le 27 juillet 2020, la société Marcillac a émis une situation de travaux n°1 pour un montant de 13’033,73 euros (autoliquidation de la TVA).

A partir du 17 août 2020, le maître d’ouvrage et le maître d’oeuvre ont constaté des désaffleurements entre les plaques posées par la société Atemco et l’ont mise en demeure le 07 septembre 2020 de leur fournir les fiches et avis techniques des produits constituant le plancher attestant de la conformité des installations.

Le 17 septembre 2020, hors la présence du sous-traitant, une réunion a lieu et la société Atemco a proposé de refaire la salle 02 avec un nouveau produit.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 septembre 2020, valant mise en demeure, la société Atemco a informé la société Marcillac qu’elle refusait la totalité de ses travaux, compte tenu de la non-conformité du revêtement posé et de la mauvaise qualité des prestations réalisées, et qu’elle procèderait au remplacement du sol à sa charge.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 octobre 2020, la société Marcillac a répliqué que les désordres avaient pour seule origine la pose des plaques, relevant du lot réalisé par la société Atemco.

Selon procès-verbal du 21 octobre 2020, un commissaire de justice a constaté que les pièces avaient été refaites et que les parties de revêtements conservées et posées par la société Marcillac dans les placards ne présentaient aucune anomalie.

Après réalisation de travaux de remplacement des revêtements de sols, la réception est intervenue le 30 novembre 2020, avec des réserves sans rapport avec le présent litige.

Par lettre recommandée du 20 janvier 2021, la société Marcillac a notifié à la société

Atemco son décompte général définitif d’un montant de 15’170,99 euros HT.

Par acte du 03 août 2021, la société Marcillac a assigné la société Atemco devant le tribunal de commerce de Périgueux aux fins d’obtenir le paiement des travaux réalisés.

Par jugement du 23 janvier 2023, le tribunal de commerce de Périgueux a :

– débouté la SARL Etablissements Marcillac & Fils de l’ensemble de ses demandes ;

– débouté la SAS Atemco de sa demande reconventionnelle ;

– dit que les frais et dépens de la présente instance restent à la charge de la partie qui les a engagés ;

– les frais de greffe sont liquidés à la somme de 69,59 euros TTC.

Par déclaration au greffe du 09 mars 2023, la SARL ETS Marcillac et Fils a relevé appel du jugement énonçant les chefs expressément critiqués et intimant la SAS Atemco.

L’ordonnance de clôture a été reportée au jour des plaidoiries.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières écritures notifiées par message électronique le 27 janvier 2025, auxquelles la cour se réfère expressément, la SARL Etablissements Marcillac et Fils demande à la cour de :

Vu les articles 1104, 1194, 1231-1 et suivants du code civil,

– Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Périgueux le 23

janvier 2023 en ce qu’il a :

Débouté la SARL Etablissements Marcillac et Fils de l’ensemble de ses demandes,

Dit que les frais de greffe et les dépens resteront à la charge de la partie qui les engagés.

Statuant à nouveau :

– juger que la SAS Atemco échoue à rapporter la preuve d’une inexécution imputable à la SARL Marcillac et Fils,

– condamner la SAS Atemco à payer à la SARL Marcillac et Fils la somme de 15’170,99 euros HT au titre des travaux exécutés, avec intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 janvier 2021,

A titre subsidiaire et pour conclure à toutes fins, si la Cour considérait que la SARL Marcillac et Fils avait commis une faute, condamner la SAS Atemco à payer à la société Marcillac et Fils 80% de sa facture, soit 12’136,89 euros HT.

– condamner la SAS Atemco à payer à la SARL Marcillac et Fils la somme de 5’000

euros sur le fondement de l’article 1231-1 du code civil et 32-1 du code de procédure

civile au titre de sa résistance abusive

– condamner la SAS Atemco au paiement de la somme de 3’500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles

de première instance,

En toutes hypothèses,

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la SAS Atemco de l’intégralité de ses demandes,

– condamner la SAS Atemco au paiement de la somme de 3’500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d’appel,

– débouter la SAS Atemco de l’intégralité de ses demandes et contestations comme mal fondées,

– condamner la SAS Atemco aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par dernières écritures notifiées par message électronique et formant appel incident le 16 janvier 2025, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Atemco demande à la cour de :

Vu les articles 1101 et suivants, 1231-1 et suivants du code civil

Vu la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance

– déclarer irrecevable et à tout le moins mal fondée la société Etablissements Marcillac & Fils en son appel d’un jugement prononcé le 23 janvier 2023 par le tribunal

de commerce de Périgueux (RG N°21/02776) ; l’en débouter.

– déclarer la société Atemco recevable et bien fondée en son appel incident,

– condamner la Société Etablissements Marcillac & Fils à verser à la société Atemco :

11 367,52 euros HT à titre d’indemnisation pour préjudice matériel.

2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant le tribunal de commerce

3 500 euros sur le même fondement pour la procédure devant la cour d’appel.

– condamner la société Etablissements Marcillac & Fils aux dépens d’instance et

d’appel.

– débouter la société Etablissements Marcillac & Fils de toutes demandes plus amples ou contraires.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il est, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux derniers conclusions écrites déposées.

Lors de l’audience du 4 février 2025, les parties ont été autorisées à communiquer une note en délibéré sur le moyen relevé d’office, tiré de l’éventuelle irrégularité de l’appel incident formé par la société Atemco.

Vu les notes en délibéré communiquées par:

-la société Atemco, selon message électronique du 11 février 2025,

-la société etablissements Marcillac et fils, selon message électronique du 14 février 2025,

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur l’appel principal:

Sur la recevabilité de l’appel:

1- Au dispositif de ses conclusions notifiées le 16 janvier 2025, la société Atemco demande à la cour, en premier lieu, de déclarer l’appel irrecevable.

2- En l’absence de moyen développé dans la discussion au soutien de cette fin de non-recevoir, comme de moyens d’irecevabilité susceptibles d’être relevés d’office par la cour, il convient de déclarer l’appel recevable.

Sur la demande d’infirmation du jugement:

Moyens des parties:

3- A l’appui de sa demande d’infirmation du jugement, et de condamnation de la société Atemco au paiement de sa facture, la société Marcillac souligne que le tribunal a inversé la charge de la preuve, et que son donneur d’ordre, qui échoue à rapporter la preuve d’un défaut dans la réalisation des travaux de revêtement de sol, a rendu toute mesure d’expertise amiable ou judiciaire impossible en procédant par voie de fait à l’arrachage du revêtement.

Elle soutient que les compte-rendus de chantier (dépourvus de valeur contractuelle) ne permettent pas de conclure à une défaillance de sa part dans la pose des revêtements de sol.

Elle précise qu’elle n’avait pas à vérifier la structure ou la solidité du support, ni à le reprendre, et qu’elle n’est pas comptable des manquements d’autres intervenants.

Elle conteste avoir été tenue d’un quelconque devoir de conseil ou d’information à l’égard de l’entrepreneur principal, en ce qui concerne le montage, la structure ou la solidité de l’ouvrage de la société Atemco.

4- La société Atemco réplique que les défauts des sols PVC ont été constatés dans les comptes-rendus, qui ont valeur contractuelle en l’absence de contestation dans le délai de 7 jours visé aux conditions générales du contrat de sous-traitance.

Elle considère ainsi que la société Marcillac a manqué à son obligation de résultat d’exécuter des travaux conformes à la commande comme aux règles de l’art, et exempts de vices, tant avant qu’après la réception de l’ouvrage.

Elle précise qu’elle est par principe responsable de l’acceptation du support dépourvu de ragréage, manquant de planéité et non repris, sur lequel elle a réalisé ses travaux.

Réponse de la cour:

5- Selon les dispositions de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

6- Selon les dispositions de l’article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

7- L’article 1231-2 du code civil dispose que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après.

8- En l’espèce, il n’est pas contesté que la société Marcillac a effectué des travaux de fourniture et pose de revêtements thermoplastiques et de plinthes en PVC dans les salles de l’école de [Localité 2], en exécution du devis accepté le 28 avril 2020.

Elle n’a pas entendu se prévaloir de normes qui auraient été rendues applicables au marché de travaux, et qui auraient donc acquis valeur contractuelle, en ce qui concerne le délai accordé au donneur d’ordre pour établir son décompte général définitif.

9- La situation de travaux n°1 d’un montant de 13003.73 euros HT (en auto-liquidation de la TVA) établie le 27 juillet 2020 par la société Marcillac est conforme au devis en ce qui concerne les prix unitaires, et il n’existe aucune contestation sur les métrés réalisés, ni sur la phase d’avancement du chantier à la date du 27 juillet 2020 (85% du poste revêtement de sols et 30 % du poste Plinthes).

Au demeurant, la société Atemco a admis expressément qu’il existait de ce chef une créance du sous-traitant puisqu’en page 16 de ses conclusions, elle demande à la cour, dans le cadre d’un compte entre les parties, de déduire la somme de 13 033.71 euros HT de sa propre créance au titre des travaux de reprise (soit 12363 euros pour les travaux réalisés en interne par les équipes Atemco et 12038.23 euros pour les travaux de pose des nouveaux revêtements de sols).

En revanche, il n’est pas établi que la société Marcillac ait terminé entièrement la pose du revêtement après le 27 juillet 2020, lui permettant d’atteindre 100 % de ce poste du devis, puisque dès le 17 aout 2020, le maître d’oeuvre a fait le constat d’un défaut des sols PVC, entraînant un refus des travaux par le maître d’ouvrage, puis l’envoi par la société Atemco, le 22 septembre 2020, d’une mise en demeure portant refus de la totalité des travaux, et annonce du remplacement du sol posé.

Il sera relevé que selon les comptes-rendus de chantier régulièrement versés au débat, en date des 31 aout 2020, 7 septembre 2020, 21 septembre 2020, qui peuvent être opposés à la société Marcillac en raison de leur concordance sur ce point, les sols étaient toujours considérés par le maître d’oeuvre comme non-achevés et non-acceptés.

10- Contrairement à ce que le tribunal a retenu dans son jugement, l’existence éventuelle de défauts d’exécution ne pouvait donner lieu à un rejet pur et simple de la demande en paiement de la facture émise au titre de la situation n°1 soit la somme de 13003.73 euros et ne pouvait être sanctionnée que par l’octroi de dommages-intérêts, conformément aux dispositions des articles 1231-1 et 1231-2 précités, dans le cadre de la responsabilité contractuelle du sous-traitant, pour manquement à son obligation de résultat.

11- Il convient donc d’infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de condamner la société Atemco à payer à la société Marcillac la somme de 13003.73 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 3 aout 2021, date de l’assignation (en l’absence d’acte précédent valant mise en demeure).

Le surplus de la demande principale fondée sur le décompte général définitif du 20 janvier 2021 sera rejeté.

Sur l’appel incident:

Sur la recevabilité :

12- A l’audience du 4 février 2025, les parties ont été invités par le président d’audience à faire valoir, sous forme de note en délibéré, leurs éventuelles observations sur le moyen soulevé d’office tiré de l’irrecevabilité encourue de l’appel incident de la société Atemco, en l’absence de demande d’infirmation du jugement, en ce qu’il a rejeté ses demandes au titre des frais de reprise des revêtements de sol.

Moyens des parties:

13- Par note en délibéré du 14 février 2025, la société Marcillac a fait valoir qu’en s’abstenant de solliciter l’infirmation du chef de jugement l’ayant déboutée de sa demande reconventionnelle, dans un délai de trois mois à compter du dépôt des conclusions de l’appelant, la société Atemco n’avait pas valablement formé appel incident.

14- Par note en délibéré du 11 février 2025, la société Atemco a fait valoir que que dès lors qu’un appel incident était diligenté à l’encontre du jugement qui avait ‘débouté SAS Atemco de sa demande reconventionnelle’, il s’entend que cette dispositions devait nécessairement être annulée et/ou réformée, en tout état de cause infirmée, et qu’il soit statué sur ledit appel incident.

Réponse de la cour:

15- L’appel incident n’étant pas différent de l’appel principal par sa nature ou son objet, les conclusions de l’appelant, qu’il soit principal ou incident, doivent déterminer l’objet du litige porté devant la cour d’appel.

16- L’étendue des prétentions dont est saisie la cour d’appel étant déterminée dans les conditions fixées par l’article 954 du code de procédure civile, le respect de la diligence impartie par l’article 909 du code de procédure civile est nécessairement apprécié en considération des prescriptions de cet article 954.

17- Il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions, ni l’annulation du jugement, ni l’infirmation des chefs du dispositif du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement (En ce sens, Cour de cassation, 2 ème chambre civile, 29 juin 2023, pourvoi n° 22-14.432).

18- En l’espèce, dans ses premières conclusions notifiées le 24 aout 2023, dans le délai de l’article 909 du code de procédure civile, la société Atemco a demandé à la cour de:

‘déclarer irrecevable et à tout le moins mail fondée la société Etablissements Marcillac & Fils en son appel d’un jugement prononcé le 23 janvier 2023 par le tribunal de commerce de Périgueux (RG N°21/02776) ; l’en débouter.

-déclarer la société Atemco recevable et bien fondée en son appel incident.

-condamner la société Etablissements Marcillac & Fils à verser à la société Atemco :

-12 375.38 euros HT à titre d’indemnisation pour préjudice matériel.

-2 000.00 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

– 3 500.00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant le tribunal de commerce

-3 500.00 euros sur le même fondement pour la procédure devant la cour d’appel.

-aux dépens d’instance et d’appel.

-débouter la société Etablissements Marcillac & Fils de toutes demandes plus amples ou contraires.’

19- Conformément aux dispositions de l’article 910-4 du code de procédure civile, les prétentions figurant au dispositif des conclusions postérieures de la société Atemco, en date des 26 février 2024 et 16 janvier 2025 sont demeurées identiques, dans leur dispositif.

20- Il convient de constater que les conclusions notifiées le 24 aout 2023, qui ne contiennent en leur dispositif aucune prétention aux fins d’annulation, réformation ou d’infirmation du jugement, ne constituent pas un appel incident valable de la part de la société Atemco, quelle que soit par ailleurs leur recevabilité en la forme, du fait du respect du délai de trois mois énoncé à l’article 909.

En l’absence d’appel incident régulièrement formé, à l’encontre du chef du jugement ayant rejeté ses demandes de dommages-intérêts, la société Atemco doit en conséquence être déclarée irrecevable à présenter ces mêmes demandes devant la cour; étant précisé qu’il ne pouvait être valablement remédié à cette irrégularité par l’ajout de la demande d’annulation/et ou de réformation du jugement dans le corps de la note en délibéré du 11 février 2024.

Sur les demandes accessoires:

Sur la demande de dommages-intérêts:

21- La société Marcillac ne démontre pas avoir subi un préjudice en lien de causalité avec l’arrachage des revêtements de sols avant expertise, dès lors qu’en définitive, il est fait droit à sa demande en paiement de la situation de travaux numéro 1, et que les pièces régulièrement versées au débat suffisent à établir que le marché de travaux n’était pas totalement achevé lors de l’enlèvement des revêtements.

Par ailleurs, il n’est pas prouvé que la société Atemco ait abusé de son droit de défendre en justice, ni que la société Marcillac ait subi, du fait de la durée de la procédure, un préjudice financier distinct de celui qui est réparé par les intérêts moratoires au taux légal.

La société Marcillac sera donc déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

22- Le caractère abusif de l’action engagée par la société établissements Marcillac & Fils n’est nullement établi, puisque celle-ci obtient définitive partiellement gain de cause.

Dès lors, la demande de dommages-intérêts formée par la société Atemco doit être rejetée.

Sur la demande au titre des frais irrépétibles:

23- Partie perdante au terme de l’instance, la société Atemco supportera les dépens de première instance et d’appel.

24- La société Atemco sera condamnée à payer la somme de 4000 euros à la société Marcillac & Fils, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile; et elle supportera ses propres frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:

Sur l’appel principal:

Déclare recevable l’appel principal de la société Marcillac & Fils,

Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Périgueux le 23 janvier 2023,

Statuant à nouveau,

Condamne la société Atemco à payer à la société Marcillac & Fils la somme de 13003.73 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 3 aout 2021,

Rejette le surplus de la demande principale de la société Marcillac & Fils,

Sur l’appel incident:

Dit que la société Atemco, intimée sur l’appel principal de la société Marcillac & Fils, n’a pas valablement formé appel incident à l’encontre du jugement du tribunal de commerce de Périgueux du 23 janvier 2023,

Déclare en conséquence irrecevable la demande de la société Atemco, tendant à voir condamner la société Marcillac & Fils à lui payer la somme de 11 367,52 euros HT à titre d’indemnisation de son préjudice matériel,

Y ajoutant,

Rejette la demande de dommages-intérêts formée par la société établissements Marcillac & Fils sur le fondement des articles 1231-1 du code civil et 32-1 du code de procédure civile au titre de sa résistance abusive,

Rejette la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par la société Atemco,

Condamne la société Atemco aux dépens de première instance et d’appel,

Condamne la société Atemco à payer à la société établissements Marcillac & Fils la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


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