Requalification des contrats de travailL’article L. 3123-6 du Code du travail stipule que le contrat de travail à temps partiel doit être écrit et mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail, ainsi que la répartition de cette durée. En l’absence de ces précisions, le contrat est présumé à temps complet. Il incombe à l’employeur de prouver que le salarié n’était pas dans l’impossibilité de prévoir son rythme de travail. Indemnités de petits déplacementsL’article 8.11 de la convention collective des ouvriers du bâtiment prévoit des indemnités pour les frais supplémentaires liés aux déplacements. Ces indemnités incluent l’indemnité de repas, de frais de transport et de trajet, qui sont versées sous forme forfaitaire. L’indemnité de trajet est due indépendamment de la rémunération du temps de trajet inclus dans l’horaire de travail. Obligation de sécurité de l’employeurLes articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail imposent à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs. L’employeur doit prouver qu’il a respecté cette obligation, notamment en établissant un document unique d’évaluation des risques. Sanctions disciplinairesL’article L. 1333-2 du Code du travail permet au conseil de prud’hommes d’annuler une sanction jugée irrégulière, injustifiée ou disproportionnée. L’article L. 1333-1 précise que le juge doit apprécier la régularité de la procédure et la justification des faits reprochés au salarié. Résiliation judiciaire du contrat de travailConformément aux articles 1184 et 1224 du Code civil, un salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat en cas d’inexécution par l’employeur de ses obligations. Si les manquements sont établis et suffisamment graves, la résiliation est prononcée aux torts de l’employeur, produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuseL’article L. 1235-3 du Code du travail prévoit qu’un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse peut prétendre à une indemnité comprise entre trois et huit mois de salaire brut, en tenant compte de son ancienneté et de sa rémunération. |
L’Essentiel : L’article L. 3123-6 du Code du travail stipule que le contrat de travail à temps partiel doit être écrit et mentionner la durée de travail. En l’absence de ces précisions, le contrat est présumé à temps complet. L’article 8.11 de la convention collective des ouvriers du bâtiment prévoit des indemnités pour les frais de déplacements, incluant l’indemnité de repas et de trajet. Les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 imposent à l’employeur de garantir la sécurité des travailleurs.
|
Résumé de l’affaire : Un salarié a été engagé par une société de construction en tant que chauffeur, évoluant vers un poste d’opérateur amiante après un changement de dénomination sociale. En 2018, il a démissionné tout en continuant à travailler, ce qui a conduit à des tensions avec l’employeur. Ce dernier a notifié des avertissements pour insubordination, tandis que le salarié a réclamé des paiements pour heures supplémentaires et primes. En juin 2019, il a été convoqué pour un entretien préalable à un licenciement, qui a été effectif le 28 juin 2019.
Le salarié a contesté son licenciement et a saisi le conseil de prud’hommes, demandant l’annulation des avertissements, la résiliation judiciaire de son contrat et le paiement de diverses sommes. Le tribunal a débouté le salarié de ses demandes, considérant que le licenciement était justifié. En appel, le salarié a demandé la requalification de ses contrats à temps plein et le paiement de sommes dues, tout en contestant les pièces présentées par l’employeur. Les sociétés ont demandé la confirmation du jugement initial, tout en contestant les demandes du salarié. Le tribunal a examiné les éléments de preuve, notamment les contrats de travail, les horaires de travail, et les obligations de l’employeur en matière de sécurité. Il a conclu que le salarié avait effectivement travaillé des heures complémentaires et a ordonné le paiement de certaines indemnités, tout en annulant un des avertissements pour irrégularité. Finalement, le tribunal a prononcé la résiliation judiciaire des contrats de travail aux torts des employeurs, condamnant les sociétés à verser des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des rappels de salaires pour heures complémentaires et indemnités de préavis. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la requalification des contrats de travail à temps partiel en contrats à temps complet ?La requalification des contrats de travail à temps partiel en contrats à temps complet est fondée sur l’article L. 3123-6 du code du travail, qui stipule que le contrat de travail à temps partiel doit être écrit et mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail ainsi que la répartition de cette durée entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. L’absence d’écrit mentionnant la répartition des horaires fait présumer que l’emploi est à temps complet. Il incombe à l’employeur de prouver que le salarié n’était pas dans l’impossibilité de prévoir son rythme de travail et qu’il n’était pas tenu de se tenir constamment à sa disposition. En l’espèce, les contrats de travail ne précisaient pas la répartition des horaires, ce qui a conduit à la présomption de temps complet. Quel est le régime des indemnités de petits déplacements selon la convention collective ?Le régime des petits déplacements est régi par l’article 8.11 de la convention collective, qui prévoit des indemnités forfaitaires pour les ouvriers travaillant dans le bâtiment. Ces indemnités comprennent : – L’indemnité de repas, qui compense le supplément de frais occasionné par la prise du déjeuner en dehors de la résidence habituelle de l’ouvrier. – L’indemnité de frais de transport, qui indemnise les frais engagés pour se rendre sur le chantier et en revenir. – L’indemnité de trajet, qui compense la sujétion de se rendre quotidiennement sur le chantier. Ces indemnités sont journalières, forfaitaires et fixées en valeur absolue. Quel est le cadre juridique des heures complémentaires et leur preuve ?Les heures complémentaires sont régies par les articles L. 3171-2, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail. En cas de litige sur l’existence ou le nombre d’heures de travail, il appartient au salarié de fournir des éléments précis sur les heures non rémunérées qu’il prétend avoir effectuées. L’employeur doit alors répondre en produisant ses propres éléments. Le juge évalue les preuves fournies par les deux parties pour déterminer la réalité des heures complémentaires. Dans cette affaire, le salarié a présenté des éléments suffisants pour prouver qu’il avait effectué des heures complémentaires, ce qui a conduit à la reconnaissance de sa créance. Quel est le manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur ?L’obligation de sécurité de l’employeur est définie par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, qui imposent à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs. Cela inclut des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail. L’employeur doit prouver qu’il a respecté cette obligation. En l’espèce, bien que l’employeur ait présenté des éléments de protection, il n’a pas démontré le caractère systématique de ces mesures vis-à-vis du salarié, ce qui a conduit à la reconnaissance d’un manquement à son obligation de sécurité. Quel est le cadre juridique des avertissements et leur validité ?La validité des avertissements est régie par l’article L. 1333-2 du code du travail, qui permet au conseil de prud’hommes d’annuler une sanction irrégulière, injustifiée ou disproportionnée. L’article L. 1333-1 précise que le juge doit apprécier la régularité de la procédure et la justification des faits reprochés. Dans cette affaire, le premier avertissement a été jugé justifié en raison des éléments probants fournis par l’employeur, tandis que le second avertissement a été annulé en raison de l’absence de preuve suffisante des faits reprochés. Quel est le principe de la résiliation judiciaire du contrat de travail ?La résiliation judiciaire du contrat de travail est prévue par l’article 1184 ou 1224 du code civil, permettant au salarié de demander la résiliation en cas d’inexécution par l’employeur de ses obligations contractuelles. Si les manquements sont établis et suffisamment graves, la résiliation est prononcée aux torts de l’employeur. Dans ce cas, la cour a constaté que les manquements de l’employeur justifiaient la résiliation judiciaire des contrats de travail, produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. |
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre sociale
ARRET DU 02 AVRIL 2025
Numéro d’inscription au répertoire général :
F N° RG 21/03135 – N° Portalis DBVK-V-B7F-O76D
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 MAI 2021
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PERPIGNAN – N° RG F 19/00545 – 19/305
APPELANT :
Monsieur [I] [Z]
né le 26 Mai 1981 à [Localité 5] (MAROC)
de nationalité Marocaine
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté sur l’audience par Me Laurent COMANGES, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
INTIMEES :
S.A.R.L. [Localité 3] CONSTRUCTION
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis
[Adresse 1]
[Localité 3]
et
S.A.R.L. STC AMIANTE
Prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social, sis
[Adresse 1]
[Localité 3]
Toutes deux représentées sur l’audience par Me Alexia ROLAND de la SELARL VPNG, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant,
Toutes deux représentées par Me Dominique FALANDRY de la SELAS RAYNAUD-FALANDRY-CODOGNES-BOTTIN, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
Ordonnance de clôture du 27 Janvier 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 FEVRIER 2025, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre
Madame Véronique DUCHARNE, Conseillère
Madame Magali VENET, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER
ARRET :
– contradictoire ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.
* *
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
M. [I] [Z] a été engagé le 2 novembre 2011 par la S.A.R.L. [Localité 3] Constructions (n° de siret 529 393 399 00017) en qualité de chauffeur dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à temps partiel à raison de 20 heures hebdomadaires. Par un avenant du 7 avril 2014, il a été recruté à temps complet.
Au cours de l’année 2017, la société [Localité 3] Constructions a changé sa dénomination sociale pour devenir STC Amiante (n° de siret 529 393 399 00017).
Parallèlement, une nouvelle société S.A.R.L. unipersonnelle [Localité 3] Constructions (n° de siret 822 367 421 00028) a été constituée par le gérant, M. [V] [Z], cousin du salarié.
Par un contrat à durée indéterminée à temps partiel, M. [Z] a été engagé à compter du 1er novembre 2017 par la société STC Amiante en tant qu’opérateur amiante, à raison de 8 heures hebdomadaires, le salarié conservant son ancienneté au 2 novembre 2011.
Par un deuxième contrat à durée indéterminée à temps partiel du même jour, M. [Z] a été engagé par la S.A.R.L. unipersonnelle [Localité 3] Constructions en tant que chauffeur, à raison de 31 heures hebdomadaires, le salarié conservant son ancienneté au 2 novembre 2011.
Par lettre datée du 30 octobre 2018, M. [Z] a démissionné de ses deux emplois en précisant qu’il respecterait un préavis de deux semaines la fin de son contrat étant effective au 12 novembre 2018. Nonobstant, les relations contractuelles se poursuivaient.
Le 13 novembre 2018, l’employeur convoquait le salarié à un entretien fixé au 21 novembre suivant en vue de conclure une rupture conventionnelle du contrat de travail.
Reprochant à son salarié des faits d’insubordination, la société [Localité 3] Constructions a notifié à M. [Z] deux avertissements par des lettres du 7 décembre 2018 et du 19 février 2019.
Par lettre du 4 mars 2019, le salarié réclamait le paiement de la prime de panier et d’heures supplémentaires au titre de l’heure accomplie au dépôt de 7H à 8H sur les 3 dernières années.
Le 31 mai 2019, M. [Z] a été convoqué par les 2 sociétés à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 14 juin 2019.
M. [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Perpignan le 7 juin 2019, aux fins de voir annuler ses avertissements, prononcer la résiliation judiciaire de son contrat et condamner la société au paiement de diverses sommes de nature salariale.
Il a été licencié pour motif personnel par une lettre du 28 juin 2019.
M. [Z] a alors saisi une nouvelle fois le conseil de prud’hommes de Perpignan le 29 juin 2019 aux fins de contester son licenciement.
Après avoir considéré qu’il n’avait pas à examiner la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail au motif que ce dernier avait été rompu par le licenciement, prononcé avant qu’il ne statue, et considéré que celui-ci était fondé, le conseil de prud’hommes a, par jugement du 5 mai 2021, statué comme suit :
Déboute M. [Z] de l’ensemble de ses demandes,
Dit n’y avoir lieu à l’application des demandes formulées par les deux parties sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [Z] aux entiers dépens.
Le 12 mai 2021, M. [Z] a relevé appel de tous les chefs de ce jugement l’ayant débouté de ses demandes.
Par une ordonnance rendue le 25 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a vainement enjoint aux parties de rencontrer un médiateur, afin de recevoir l’information sur les modalités d’une médiation judiciaire et envisager de recourir à ce processus afin de rechercher, par elles-mêmes, sous l’égide d’un médiateur indépendant, une solution au litige qui les oppose.
Suivant décision en date du 27 janvier 2025, la procédure a été clôturée par le conseiller de la mise en état et l’affaire fixée à l’audience du 3 février suivant.
‘ Aux termes de ses conclusions n°V, remises au greffe le 21 janvier 2025, M. [Z] demande à la cour d’écarter des débats les pièces n°65-1, 66 et 67-1 adverses, de réformer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
Ordonner la requalification à temps plein des deux contrats de travail,
Condamner la société STC Amiante à lui verser la somme brute de 55 188,23 euros,
Condamner la société [Localité 3] Constructions à lui verser la somme de 5 859, 95 euros bruts,
Condamner solidairement les deux sociétés à lui verser les sommes de :
– 13 735, 87 euros au titre des heures complémentaires et des indemnités de panier,
– 664, 62 euros brut d’indemnité de trajet,
Condamner la société STC Amiante à lui verser la somme de 15 000 euros au titre du manquement à l’obligation de sécurité,
Annuler les avertissements et condamner solidairement les deux sociétés à lui verser la somme de 2 000 euros de dommages-intérêts,
Prononcer la résiliation judiciaire de ses contrats de travail à titre principal, à défaut, juger le licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire,
Condamner la société STC Amiante à lui verser :
– 6 596 euros bruts au titre de l’indemnité légale de licenciement,
– 7 654, 26 euros bruts au titre de l’indemnité de préavis et des congés payés sur préavis,
– 20 875, 26 euros au titre de l’indemnité pour absence de cause réelle et sérieuse,
Condamner la société [Localité 3] Construction à lui verser :
– 6 596 euros bruts au titre de l’indemnité légale de licenciement,
– 7 654, 26 euros bruts au titre de l’indemnité de préavis et des congés payés sur préavis,
– 20 875, 26 euros au titre de l’indemnité pour absence de cause réelle et sérieuse,
– 263, 13 euros d’indemnité de préavis,
A titre subsidiaire, prononcer également l’irrégularité des procédures de licenciement et condamner :
– la société [Localité 3] Construction à lui verser 2 848, 54 euros bruts pour irrégularité de procédure,
– la société STC Amiante à lui verser la somme de 3 469,21 euros de licenciement,
Condamner encore la société [Localité 3] Construction à lui verser 1 660,25 euros bruts d’indemnité de préavis, et la société STC Amiante la somme de 263,13 euros bruts d’indemnité de préavis.
Condamner solidairement les deux sociétés à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
‘ Aux termes de ses conclusions récapitulatives, remises au greffe par voie de RPVA le10 janvier 2025, les sociétés STC Amiante et [Localité 3] Constructions demandent à la cour de confirmer le jugement, de débouter M. [Z] de toutes ses demandes et de le condamner à leur verser la somme de 2 000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel.
Pour l’exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.
Sur la demande tendant à voir écarter des pièces :
Si le processus de médiation repose sur deux principes fondamentaux, à savoir la confidentialité et la liberté d’y recourir ou non, dans la mesure où les parties n’ont pas unanimement consenti à recourir à ce mode de résolution alternative des litiges, l’employeur n’a pas violé le principe de confidentialité de ce processus qui n’a pas débuté.
Aucun motif ne justifie que l’attestation de la mère du gérant soit écartée des débats, qu’il appartiendra à la cour d’apprécier la force probante.
Enfin, M. [Z] ne saurait invoquer à son profit la confidentialité dont bénéficie la correspondance entre l’employeur et son conseil, que la société intimée est libre de lever.
La demande tendant à voir écarter des débats ces 3 pièces sera rejetée.
Sur la requalification des contrats de travail à temps partiel :
Aux termes de l’article L. 3123-6 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 applicable à la cause, le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit qui mentionne notamment la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d’aide à domicile et les salariés relevant d’un accord collectif de travail conclu en application de l’article L. 3121-44, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification, les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié, les horaires de travail étant communiqués dans les associations et entreprises d’aide à domicile par écrit chaque mois au salarié, et les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.
L’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’était pas tenu de se tenir constamment à la disposition de son employeur.
En l’espèce, il est constant que le salarié qui travaillait à temps complet pour la première société [Localité 3] Construction à raison de 39 heures par semaine, a conclu le 23 novembre 2017, deux contrats à temps partiel pour le compte des sociétés gérées par son cousin M. [V] [Z] :
– l’un avec la société STC Amiante en tant qu’opérateur amiante, à raison de 8 heures hebdomadaires,
– le second avec la société [Localité 3] Constructions en tant que chauffeur, à raison de 31 heures hebdomadaires.
Si les durées hebdomadaires convenues sont bien fixées par chacun des contrats, en revanche ceux-ci ne prévoient pas de répartition des horaires selon les jours de la semaine ou les semaines du mois. Faute de comporter ces précisions, le contrat est présumé à temps complet.
Par suite, il incombe à l’employeur d’établir que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’était pas tenu de se tenir constamment à la disposition de son employeur.
Or, il ressort des propres pièces communiquées par le salarié et de la réclamation qu’il formule par ailleurs au titre des heures complémentaires/supplémentaires en demandant la condamnation solidaire des deux employeurs, qu’il travaillait pour le compte de ces deux sociétés, gérées par M. [Z], lesquelles partageaient les même locaux, du lundi au vendredi de 8 heures à 17 heures sauf le vendredi de 8 heures à 16 heures, M. [Z] réclamant néanmoins le paiement d’heures complémentaires/supplémentaires à raison d’une heure par jour travaillé au motif, soutient-il, qu’il était tenu, comme ses collègues, de prendre son service à 7 heures au dépôt commun de ces deux entreprises, de sorte que l’activité exercée par l’intéressé pour leur compte, s’accomplissait dans ces créneaux parfaitement identifiés, ce qu’il concédait expressément dans sa correspondance du 27 février 2019 où il affirmait en réponse à un avertissement avoir toujours respecté ses horaires de travail, à savoir du lundi au jeudi de 7H00 à 12H / 13H à 17H le vendredi de 7H00 à 12H / 13H à 16H.
En outre, pour renverser la présomption de temps complet, l’employeur verse aux débats les témoignages de MM. [O] et [N] qui attestent que les plannings individuels sont dans les bannettes et les plannings horaires affichés dans la cafétéria commune des deux sociétés, plusieurs plannings mensuels étant communiqués, ainsi que des clichés photographiques illustrant la présentation de ces horaires sur un mur des locaux.
Au vu de ces éléments, les employeurs rapportent pas la preuve que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler au profit de ces deux sociétés selon une amplitude horaire et une répartition des jours travaillés lui permettant de connaître son rythme de travail et de ne pas être à la disposition constante des employeurs.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ce chef.
Sur les indemnités conventionnelles de petits déplacements :
L’article 8.11 dispose :
« Le régime des petits déplacements a pour objet d’indemniser forfaitairement les ouvriers travaillant dans les entreprises du bâtiment des frais supplémentaires qu’entraîne pour eux la fréquence des déplacements, inhérente à la mobilité de leur lieu de travail.
Le régime d’indemnisation des petits déplacements comporte les 3 indemnités professionnelles suivantes :
– indemnité de repas ;
– indemnité de frais de transport ;
– indemnité de trajet,
qui sont versées aux ouvriers bénéficiaires.
Ces indemnités de remboursement de frais sont journalières, forfaitaires et fixées en valeur absolue. »
L’indemnité de repas a pour objet, aux termes de l’article 8.15, « d’indemniser le supplément de frais occasionné par la prise du déjeuner en dehors de la résidence habituelle de l’ouvrier ». Elle n’est pas due par l’employeur lorsque :
– l’ouvrier prend effectivement son repas à sa résidence habituelle ;
– un restaurant d’entreprise existe sur le chantier et le repas est fourni avec une participation financière de l’entreprise égale au montant de l’indemnité de repas ;
– le repas est fourni gratuitement ou avec une participation financière de l’entreprise égale au montant de l’indemnité de repas.
Il est de droit que l’indemnité de repas ayant pour objet d’indemniser le supplément de frais occasionné par la prise du déjeuner en dehors de la résidence habituelle de l’ouvrier, la preuve de ce supplément de frais incombe au salarié. (Soc., 4 mars 2003, pourvoi n 00-46.679, Bull. 2003, V, n 81 ; Soc., 20 janvier 2016, pourvoi n 14-15.687).
S’agissant des déplacements, la convention collective prévoit deux modalités d’indemnisation.
L’article 8.12 dispose :
« Bénéficient des indemnités de petits déplacements, dans les conditions prévues au chapitre Ier du présent titre, les ouvriers non sédentaires du bâtiment pour les petits déplacements qu’ils effectuent quotidiennement pour se rendre sur le chantier avant le début de la journée de travail et pour en revenir, à la fin de la journée de travail.
Sont considérés comme ouvriers non sédentaires du bâtiment ceux qui sont occupés sur les chantiers et non pas ceux qui travaillent dans une installation fixe permanente de l’entreprise.
Les indemnités de petits déplacements instituées par le chapitre Ier du présent titre ne se cumulent pas avec les indemnités de grands déplacements prévues au chapitre VIII.2. L’ouvrier occupé dans les conditions définies au chapitre II ci-dessous bénéficie exclusivement du régime d’indemnisation des grands déplacements. »
Le montant de cette indemnité, comme celui des indemnités de repas, dépend de la zone concentrique, dans laquelle se situe le chantier sur lequel est affecté le salarié, dont le centre est le siège social de l’entreprise, son agence régionale ou, sous certaines conditions, le bureau local de l’agence (articles 8.13 et 8.14).
Suivant l’article 8.16, l’indemnité de frais de transport a pour objet « d’indemniser forfaitairement les frais de transport engagés quotidiennement par l’ouvrier pour se rendre sur le chantier avant le début de la journée de travail et pour en revenir à la fin de la journée de travail, quel que soit le moyen de transport utilisé ». « Cette indemnité étant un remboursement de frais, elle n’est pas due lorsque l’ouvrier n’engage pas de frais de transport, notamment lorsque l’entreprise assure gratuitement le transport des ouvriers ou rembourse les titres de transport. »
A ce titre, le salarié, qui utilise son véhicule personnel avec l’accord de son employeur pour se rendre, dans le cadre de petits déplacements, de son domicile sur des chantiers et en revenir, engage de ce fait des frais de transport et est dès lors en droit de bénéficier de l’indemnité forfaitaire prévue par l’article 8.16 (Soc., 25 mai 2005, pourvoi n 02-45.423, Bull. 2005, V, n 182)
Aux termes de l’article 8.17, l’indemnité de trajet a pour objet « d’indemniser, sous une forme forfaitaire, la sujétion que représente pour l’ouvrier la nécessité de se rendre quotidiennement sur le chantier et d’en revenir ». Elle « n’est pas due lorsque l’ouvrier est logé gratuitement par l’entreprise sur le chantier ou à proximité immédiate du chantier ».
Notre chambre juge que cette indemnité de trajet est due indépendamment de la rémunération par l’employeur du temps de trajet inclus dans l’horaire de travail et du moyen de transport utilisé (Soc., 6 mai 1998, pourvoi n 94-40496, Bull. 1998, V, n° 232 ; Soc. 29 novembre 2006, pourvoi n° 05-41.390 ; Soc. 6 octobre 2010, pourvoi n° 09-40.456 ; Soc., 19 juin 2013, pourvoi n° 12-13.245 ; Soc., 20 décembre 2017, pourvoi n° 16-22.388 ; Soc., 7 mars 2018, pourvoi n° 17-12.586).
La convention collective distingue donc l’indemnité pour frais de transport, qui a pour objet d’indemniser forfaitairement les frais de transport engagés quotidiennement par l’ouvrier pour se rendre sur le chantier avant le début de la journée de travail et pour en revenir à la fin de la journée de travail, quel que soit le moyen de transport utilisé, de l’indemnité de trajet qui a pour objet d’indemniser, sous une forme forfaitaire, la sujétion que représente pour l’ouvrier la nécessité de se rendre quotidiennement sur le chantier et d’en revenir.
Enfin, l’article 8-18 dispose que les montants des indemnités journalières de petits déplacements sont forfaitaires et fixés en valeur absolue selon les règles suivantes :
« 8.181. Indemnité de repas
Le montant de l’indemnité de repas qui est le même quelle que soit la zone concentrique dans laquelle se situe le chantier est fixé par accord paritaire régional.
Si l’entreprise utilise un système de titres-restaurants, le montant de sa participation est déduit du montant de l’indemnité de repas.
8.182. Indemnité de frais de transport
Son montant journalier qui est un forfait doit être fixé en valeur absolue de telle sorte qu’il indemnise les frais d’un voyage aller et retour du point de départ des petits déplacements au milieu de la zone concentrique dans laquelle se situe le chantier. Pour déterminer ce montant il doit être tenu compte du tarif voyageur des différents modes de transport en commun existant localement et du coût d’utilisation des moyens de transport individuels.
8.183. Indemnité de trajet
Son montant doit être fixé en valeur absolue de telle sorte que le forfait, qui indemnise la sujétion que représente pour l’ouvrier la nécessité de se rendre quotidiennement sur le chantier et d’en revenir, soit évalué en fonction de la distance entre le point de départ des petits déplacements et la circonférence supérieure de la zone où se situe le chantier. »
Sur les indemnités de panier :
Faute pour le salarié de communiquer le moindre élément probant de nature à caractériser qu’il n’a pu se rendre à son domicile lors des pauses méridiennes et qu’il a concrètement exposé des frais complémentaires de repas, le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a débouté de ce chef.
Sur les indemnités de trajet :
M. [Z] sollicite le paiement de cette indemnité pour la période antérieure au 1er novembre 2017, date à partir de laquelle il indique que l’employeur a régularisé son obligation de ce chef. Il présente le décompte suivant pour les années 2016 et 2017 : 22 mois travaillés avec une moyenne de 19 jours par mois travaillés soit 418 indemnités à 1,59 euros bruts, valorisée à 664,62 euros. Alors que le principe de la réclamation est acquis et que la société soutient s’en être libérée en visant ses pièces n°20 et 21, force est de relever à l’examen comparé de ses pièces n°19 (bulletin de paye d’octobre 2017) et 20 et 21 (bulletins de salaire des deux sociétés du mois de novembre 2017) que l’employeur ne s’est acquitté de cette indemnité de trajet qu’à compter de novembre 2017.
Au vu du décompte communiqué sous pièce n°12, qui débute à la 9ème semaine de 2016, dont il convient de déduire les 11 semaines non travaillés y mentionnées, la réclamation au titre des indemnités de trajet sera accueillie à hauteur de 513,57 euros.
Le jugement sera réformé en ce qu’il a débouté M. [Z] de ce chef.
Sur les heures complémentaires :
Au soutien de sa réclamation, qu’il chiffre selon le décompte communiqué à 2 343,66 euros pour l’année 2016, 3 067,81 euros pour l’année 2017, 2 844 euros pour 2018 et 505,60 euros pour 2019, M. [Z] se borne à préciser qu’il débutait sa journée de travail non pas à 8 heures comme indiqué par ses employeurs, mais à 7 heures, l’employeur exigeant de ses salariés qu’ils se présentent au siège de l’entreprise à cette heure là.
Les sociétés contestent leur obligation de ce chef. Elles font valoir que si certains salariés arrivent au dépôt avant 8 heures, ce n’est pas à leur demande, mais pour convenance personnelle ainsi qu’en atteste M. [O]. Les employeurs opposent les horaires de travail affichés lesquels mentionnent 8H l’heure de prise de service. Ils ajoutent que s’ils ont réglé un rappel de salaire a été réglé à deux salariés calculé sur la même base, ils l’ont fait tout en contestant leur obligation de ce chef, et indiquent qu’il conviendra de ne pas tenir compte de l’attestation de M. [U], contraire à l’attestation rédigée pour leur compte, cet ancien salarié étant devenu le nouvel employeur de M. [Z].
Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1er du code du travail, L. 3171-3 et L. 3171-4 du même code, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments, rappel fait que si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’ heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
M. [Z] verse aux débats les éléments suivants :
– une réclamation détaillée reposant sur la base d’une heure complémentaire/supplémentaire par jour, soit 5 heures hebdomadaires, travaillée de 7 à 8 heures,
– les attestations de 3 collègues exposant que l’employeur exigeait de ses salariés qu’ils débutent leur journée de travail en se présentant au siège à 7H, à savoir MM. [B] [J], [T] [J], et [W] [P],
– le fait constant que l’employeur a régularisé sur cette base la réclamation présentée par l’un de ces 3 témoins, M. [B] [J], l’employeur ayant indiqué à ce salarié, accepter de régler les sommes réclamées ‘compte tenu de la rupture de nos relations contractuelles et de la modicité de la somme’ tout en contestant devoir ces sommes.
Alors que ces éléments sont suffisamment précis pour lui permettre de répondre, l’employeur se borne à opposer les plannings, lesquels ne sont pas contresignés par M. [Z] faisant état d’une prise de service à 8 heures, et l’attestation de M. [O], chef de chantier, qui affirme qu’il pouvait se présenter au siège à 7H30 mais pour prendre le café et discuter de la journée à venir. Il n’est pas communiqué notamment de fiches horaires contresignées par M. [Z].
Au vu de l’ensemble des éléments produits par l’une et l’autre partie, il apparaît que M. [Z] a bien exécuté des heures complémentaires à compter du 1er novembre 2017, et supérieures aux 39 heures hebdomadaires accomplies pour son seul employeur avant cette date, la société [Localité 3] Construction, improprement qualifiées de complémentaires, mais dans une proportion moindre que celle indiquée.
La créance en résultant sera fixée comme suit :
– vis-à-vis de la société [Localité 3] Construction à hauteur de la somme de 2 750 euros bruts,
– vis-à-vis de la société STC Amiante, qui vient aux droits du premier employeur du salarié, à hauteur de la somme de 2 580 euros bruts.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur le manquement à l’obligation de sécurité :
Ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
En vertu de ces textes, l’employeur est tenu à l’égard de son salarié d’une obligation de sécurité. Il doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, actions d’information et de formation, mise en place d’une organisation et de moyens adaptés) en respectant les principes généraux de prévention suivants : éviter les risques, évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités, combattre les risques à la source, adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé, tenir compte de l’état d’évolution de la technique, remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux, planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle, donner les instructions appropriées aux travailleurs.
L’obligation de sécurité pesant sur l’employeur comporte deux volets : le premier consistant mettre en oeuvre les dispositions de nature à prévenir la réalisation du risque, le second à prendre les mesures appropriées lorsque celui-ci survient.
Dès lors que le salarié invoque précisément un manquement professionnel en lien avec le préjudice qu’il invoque, il appartient à l’employeur de rapporter la preuve du respect de son obligation de sécurité à l’égard du salarié.
L’article R. 4121-1 prévoit que l’employeur transcrit et met à jour dans un document unique les résultats de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs à laquelle il procède en application de l’article L. 4121-3, et l’article R. 4121-2 précise que la mise à jour du document unique d’évaluation des risques est réalisée 1° au moins chaque année 2° lors de toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail 3° lorsqu’une information supplémentaire intéressant l’évaluation d’un risque dans une unité de travail est recueillie.
Le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante générant un risque élevé de développer une pathologie grave peut être admis à agir contre son employeur, sur le fondement des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de ce dernier, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 modifiée.
Selon les articles R.4412-97 et suivants du code du travail, l’employeur doit mettre en place un plan de prévention à partir des éléments de repérage de la présence d’amiante, estimer pour l’évaluation des risques le niveau d’empoussièrement correspondant à chacun des processus de travail selon 3 niveaux, et retranscrire les résultats de son évaluation pour chaque processus dans le document unique d’évaluation des risques professionnels qu’il met à jour à chaque modification du processus entraînant un changement de niveau d’empoussièrement ou lors de l’introduction de nouveaux processus. La réglementation détaille les principes et moyens de prévention, l’information et la formation des travailleurs dédiés à ces travaux, ainsi que l’organisation du travail en définissant la durée de chaque vacation, le nombre de vacations quotidiennes, le suivi de l’exposition des salariés précisant la nature du travail réalisé, les dates et résultats des contrôles de l’exposition, les procédés utilisés et les moyens de protection collective et les équipements de protection individuelle utilisés.
En l’espèce, selon les contrats de travail signés, le salarié n’était censé travailler pour le compte de la société STC Amiante, spécialisée dans le traitement de l’amiante qu’à raison d’un jour par semaine au traitement de l’amiante. Il affirma par ailleurs ne plus avoir été affecté à un de ces chantiers à compter de juillet 2018.
Le salarié affirme que l’employeur l’a fait travailler sur les chantiers sans respecter ses obligations et notamment qu’il n’a pas établi sa fiche individuelle d’exposition à l’amiante, qu’il n’a pas déclaré l’ensemble des chantiers de désamiantage ; il fournit sur ce point une liste des chantiers sur lesquels il est intervenu sur la base de ses souvenirs. Il ajoute que l’attestation de M. [U] est inopérante dans la mesure où ce salarié n’a pris la direction du service de désamiantage qu’au mois d’octobre 2018 alors que le dernier chantier sur lequel il est intervenu dans ce cadre remonte au mois de juillet de la même année.
La société STC amiante, sur qui incombe la charge de la preuve du respect de son obligation de sécurité, qui réfute tout manquement à ce titre, verse aux débats les éléments suivants :
– la certification Qualobat qui atteste de sa capacité technique à réaliser des travaux de désamiantage dans le respect de la norme NF X46-010,
– le plan de formation pluriannuel externe de ses salariés à l’amiante,
– les attestations de suivi des formations signées par M. [Z],
– l’attestation à l’utilisation des moyens de protection collective et équipements de protection individuelle, (pièce n°35) signée par M. [Z],
– le tableau de programmation des visites auprès de la médecine du travail,
– les attestations de suivi de M. [Z] par le médecin du travail,
– ‘un échantillon’ de fiches de suivi journalier d’exposition individuelle aux poussières d’amiante établis pour M. [Z] lesquelles détaillent les heures d’entrée et de sorti et la durée des vacations, l’utilisation d’ EPI, les outils, contresignées par le salarié concernant les journées des 16 avril et 25 mai 2015 (pièce n°48),
– à titre d’exemples, une quinzaine d’analyses de la concentration de fibres d’amiante de novembre 2015 à juillet 2018 (pièce n°50) précisant les dates et lieux de prélèvements, la nature des travaux et, sur l’analyse la plus récente, le nom de l’opérateur,
Il n’est en revanche pas versé aux débats le document unique d’évaluation des risques professionnels.
En l’état de ces éléments, la société STC amiante justifie mettre en oeuvre des mesures de protection de ses salariés à l’égard de ce risque, mais ne démontre pas le caractère systématique de ces mesures vis-à-vis de M. [Z].
Pour apprécier le préjudice d’anxiété dont se prévaut M. [Z], qui par les formations suivies et la mise en oeuvre par l’entreprise de dispositifs de protection collective et des équipements de protection individuelle n’a pu qu’avoir une parfaite connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave dans un poste le mettant au contact de l’amiante, il convient de tenir compte, d’une part, du fait que M. [Z] n’exerçait ces fonctions le mettant en contact avec l’amiante qu’à titre partiel, et qu’il indique lui-même ne plus avoir travaillé sur de tels chantiers à compter du mois de juillet 2018, près d’une année avant la rupture du contrat de travail.
Le préjudice subi par M. [Z] sur ce point sera réparé par l’allocation de la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts.
Sur les avertissements :
Selon l’article L.1333-2 du code du travail, le conseil de prud’hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme, ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
Conformément aux dispositions de l’article L. 1333-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction, forme sa conviction au vu des éléments retenus par l’employeur pour prendre la sanction et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
La lettre d’avertissement du 7 décembre 2018 est ainsi motivée :
« En date du 8 octobre 2018, nous avons été contraints de payer une facture de 1320 euros pour le déplacement de la grue dont vous avez pris l’initiative de l’installation En effet, cette grue n’a pas été installée au bon endroit, car celle-ci ne nous permettait pas de man’uvrer sur l’ensemble du chantier. Vous auriez dû contacter votre supérieur hiérarchique, le chef de chantier.
La faute professionnelle est caractérisée, de par votre négligence et non-respect des consignes ayant pour conséquence un surcoût non négligeable, en date du 16 novembre 2018, nous avons eu le regret de constater que vous avez refusé les consignes de travail de votre supérieur [O] [E], chef de chantier. Vous avez manqué de respect à son égard. Vos agissements retardent les chantiers et les délais qui nous sont impartis. Nous ne pouvons accepter ce comportement. Nous vous adressons un avertissement afin que ces faits ne se reproduisent plus. En cas de nouvel incident, nous serions dans l’obligation de prendre des sanctions plus sévères à votre encontre ».
Cet avertissement a été contesté par M. [Z], par lettre du 10 décembre 2018, dans laquelle il indique ne pas comprendre le premier grief au motif que M. [U] était présent sur le chantier le jour de l’installation de la grue, réfutant avoir pris une initiative sur l’emplacement de celle-ci, et conteste le second grief en exposant n’avoir pas vu de la journée M. [O] et ne pas comprendre quelles consignes il n’aurait pas respectées.
En l’espèce, il est constant que la société s’est vu facturer le déplacement de la grue pour le montant indiqué dans l’avertissement.
Au vu de l’attestation circonstanciée de M. [U] exposant que M. [Z] n’a pas respecté les informations transmises concernant l’implantation de la grue, de la facture supportée par l’employeur pour ce déplacement imprévu, et des attestations concordantes de MM. [O] et et [M] sur le comportement adopté par l’intéressé vis-à-vis du chef de chantier, le jugement sera confirmé en ce qu’il a jugé les griefs établis et débouté le salarié de sa demande d’annulation de cette sanction non disproportionnée.
Par ailleurs, M. [Z] a été averti une seconde fois, le 19 février 2019, pour avoir quitté, le 14 février 2019, son poste à 16h45, au lieu de 17 heures, l’employeur faisant valoir que le maître d’oeuvre a signalé le retard d’un mois sur le chantier sur lequel il intervient ce qui engendre un préjudice financier correspondant à des pénalités de retard, et le fait que le salarié persiste à ne pas respecter les consignes de son supérieur hiérarchique, cette attitude engendrant des malfaçons non négligeables et des retards.
Le salarié a contesté les faits reprochés en réfutant avoir quitté le chantier avant l’heure de fin de service.
L’employeur ne communique pas d’élément probant sur le seul grief précis selon lequel l’intéressé aurait quitté le lieu de travail avant l’heure. Pour le surplus, en raison de l’imprécision du grief qui lui est fait sur le lien entre son attitude et les malfaçons et retards occasionnés sur le chantier sur lequel il est affecté, et au bénéfice du doute qui lui profite, cette sanction n’est pas justifiée.
Le préjudice moral subi par le salarié sera réparé par l’allocation de la somme de 300 euros de dommages-intérêts.
Sur la rupture du contrat de travail :
C’est par des motifs contraires à la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation que les premiers juges ont considéré qu’ils n’avaient pas à apprécier la demande de résiliation au motif que le contrat de travail était rompu au jour de l’audience.
En effet, il est de droit que lorsqu’un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, tout en continuant de travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d’autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée et dans le cas contraire, il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l’employeur.
Conformément aux dispositions de l’article 1184 ou 1224 du code civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le salarié peut demander la résiliation judiciaire du contrat de travail en cas d’inexécution par l’employeur de ses obligations contractuelles. Il lui appartient alors de rapporter la preuve des faits qu’il allègue.
Si les manquements invoqués par le salarié au soutien de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail sont établis et d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de ce contrat, la résiliation judiciaire est prononcée aux torts de l’employeur et produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse au jour de la décision qui la prononce dès lors que le contrat n’a pas été rompu avant cette date
Il suit de ce qui précède que la cour considère établie le fait que la société STC Amiante ne justifiait pas s’être complètement libérée de son obligation de sécurité à l’égard de M. [Z] et que les deux sociétés étaient tenus de payer des heures complémentaires, la société [Localité 3] Construction étant également tenu au paiement d’un rappel d’indemnités de trajet,
Alors que le salarié a régulièrement mis en demeure l’employeur de régulariser sa situation à ces titres, réclamation partiellement fondée, les sociétés ont rejeté toute demande du salarié.
Les manquements de l’employeur ci-dessus caractérisés, revêtant une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail, il sera prononcé la résiliation judiciaire de ces deux contrats lesquels produisent les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse au jour du prononcé des licenciements.
Partant, le jugement sera infirmé de ces chefs.
Sur l’indemnisation des licenciements :
Au jour de la rupture, M. [Z] , âgé de 38 ans détenait une ancienneté de :
– 7 ans et 8 mois au sein de la société [Localité 3] Constructions, sa rémunération s’établissant à la somme de 1 781,68 euros.
– 7 ans et 8 mois au sein de la société au sein de la société STC Amiante, sa rémunération s’établissant à la somme de 444,99 euros bruts.
M. [Z] formule une demande de rappel au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et de l’indemnité légale de licenciement fondée, ce à quoi l’employeur s’oppose en objectant que le salarié, licencié pour cause réelle et sérieuse a été dispensé d’effectuer son préavis et a reçu une indemnité compensatrice de préavis, régulièrement versée par les deux sociétés avec ses indemnités de licenciement.
Cette demande en ce qu’elle repose sur des salaires reconstitués de 2 848,59 euros pour [Localité 3] constructions et de 3 469,21 euros pour STC Amiante, dont le salarié concède qu’il conviendra de déduire les sommes d’ores et déjà perçues, basées sur une requalification à temps plein laquelle n’est pas fondée.
En revanche, cette réclamation est fondée en ce qu’elle est fondée sur les heures complémentaires allouées ; il sera alloué au salarié un rappel de ces chefs sur la base de 4,33 heures complémentaires concernant la société STC Amiante, et 17,32 heures complémentaires concernant la société [Localité 3] Construction, en retenant pour l’indemnité légale une ancienneté au terme du préavis de 7 ans et 10 mois.
Par ailleurs, en vertu de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, le salarié peut prétendre de la société [Localité 3] Construction au paiement d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un montant minimal de 3 mois de salaire brut et un montant maximal de 8 mois de salaire brut.
M. [Z] justifie de son inscription à pôle emploi et de son indemnisation en 2019 et 2020.
Les sociétés intimées objectent l’imprécision des éléments communiqués par le salarié et le fait qu’il ressort des attestations de MM. [G] et [E] [O] qu’il travaille, a minima depuis juin 2021, avec M. [U] pour le compte de sa société BPTO66, ce que l’intéressé réfute partiellement en indiquant ne pas être intervenu sur le chantier situé à [Localité 4], où il a été vu par ses anciens collègues, avant novembre 2022.
Compte tenu des dispositions légales, de l’ancienneté, de la rémunération, M. [Z] est bien fondé à percevoir :
‘ de la société [Localité 3] Construction, le paiement des sommes suivantes :
– un rappel d’indemnité compensatrice de préavis à hauteur de 497,25 euros bruts outre 48,72 euros au titre des congés payés afférents,
– un rappel d’indemnité de licenciement de 486,87 euros,
– à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 9 000 euros bruts,
‘ de la société STC Amiante, le paiement des sommes suivantes :
– un rappel d’indemnité compensatrice de préavis à hauteur de 120,37 euros bruts, outre 12,03 euros au titre des congés payés afférents,
– un rappel d’indemnité de licenciement de 117,84 euros
– à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 3 000 euros bruts.
La cour,
Rejette la demande de M. [Z] tendant à voir écarter des débats les pièces référencées n° 65-1, 66 et 67 des intimées,
Confirme le jugement entrepris, en ses dispositions soumises en la cour, en ce qu’il a :
– débouté M. [Z] de sa demande de requalification des deux contrats de travail à temps partiel en contrats à temps complet et les demandes de rappels de salaires subséquentes,
– débouté M. [Z] de sa demande en paiement d’indemnités conventionnelles de panier,
– débouté M. [Z] de sa demande d’annulation de l’avertissement du 7 décembre 2018 et de la demande de dommages-intérêts associée,
L’infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Annule l’avertissement du 19 février 2019,
Condamne la société [Localité 3] Construction à payer à M. [Z] la somme de 2 750 euros bruts de rappel de salaire au titre des heures complémentaires,
Condamne la société STC Amiante à payer à M. [Z] la somme de 2 580 euros bruts de rappel de salaire au titre des heures complémentaires, outre celle de 513,57 euros au titre des indemnités de trajet antérieures au 1er novembre 2017,
Condamne la société [Localité 3] Construction à verser à M. [Z] la somme de 300 euros pour avertissement injustifié en date du 19 février 2019,
Prononce la résiliation judiciaire des contrats de travail aux torts des employeurs,
Condamne la société [Localité 3] Construction à payer à M. [Z] les sommes suivantes :
– 497,25 euros bruts à titre de rappel d’indemnité compensatrice de préavis, outre 48,72 euros au titre des congés payés afférents,
– 486,87 euros à titre de rappel d’indemnité de licenciement,
– 9 000 euros bruts à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne la société STC Amiante à payer à M. [Z] les sommes suivantes :
– 120,37 euros bruts à titre de rappel d’indemnité compensatrice de préavis, outre 12,03 euros au titre des congés payés afférents,
– 117,84 euros à titre de rappel d’indemnité de licenciement de
– 3 000 euros bruts à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Condamne chacune des sociétés [Localité 3] Construction et STC Amiante à verser à M. [Z] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Les condamne aux entiers dépens.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Votre avis sur ce point juridique ? Une actualité ? Une recommandation ?