Reportages télévisés et réputation des personnes 

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Reportages télévisés et réputation des personnes 

L’Essentiel : Un fonctionnaire a intenté une action en justice contre M6 après avoir été filmé en caméra cachée pour l’émission CAPITAL. Le reportage, intitulé « Fonctionnaires : prêts à tout pour être mutés en province », le montrait proposant à une journaliste infiltrée de conclure un PACS pour faciliter sa mutation. Le tribunal a requalifié l’action en diffamation, constatant que le fonctionnaire cherchait à réparer une atteinte à son honneur plutôt qu’une violation de sa vie privée. En conséquence, l’assignation a été déclarée nulle en raison du non-respect des dispositions légales relatives à la diffamation.

Affaire Capital

Un fonctionnaire filmé en caméra cachée pour l’émission CAPITAL, a poursuivi la chaîne M6 au titre de la diffusion de son image et d’une conversation privée avec une journaliste (violation de sa vie privée et de son droit à l’image). Le reportage intitulé « Fonctionnaires : prêts à tout pour être mutés en province »  montrait le fonctionnaire proposant à une journaliste « infiltrée » de conclure un PACS et de prendre en charge le paiement de ses impôts, aux fins d’obtenir plus facilement une mutation dans le Sud de la France.

Obligation de requalification des juges

En application de l’article 12 du code de procédure civile, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.  Lorsque le dommage invoqué trouve sa cause dans l’une des infractions définies par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, le demandeur ne peut, notamment pour échapper aux contraintes procédurales de cette loi, se prévaloir pour les mêmes faits de qualifications juridiques distinctes restreignant la liberté protégée par cette loi dans des conditions qu’elle ne prévoit pas.

Réputation n’est pas droit à l’image

Il a été jugé que le fonctionnaire, sous couvert d’une action fondée sur les dispositions des articles 9 et 1240 du code civil, cherchait en réalité à voir réparer une atteinte à son honneur et à sa réputation. L’assignation ne se limitait pas à faire état d’atteintes portées à son droit au respect à la vie privée ou à son droit à l’image, mais visait bien à réparer un préjudice de réputation lié au fait que le reportage en cause le présenterait comme un « fraudeur » au comportement à la limite de légalité, soit, à tout le moins, un comportement moralement condamnable, une telle allégation jetant sur lui un discrédit évident. La réparation d’un tel préjudice correspond à la réparation d’une atteinte à l’honneur et à la considération, soit une diffamation au sens de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Le tribunal a donc requalifié l’action entreprise en action en diffamation.  Les dispositions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 applicables n’ayant pas été respectées, la nullité de l’assignation a été prononcée.

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Q/R juridiques soulevées :

Quel est le contexte de l’affaire Capital ?

L’affaire Capital concerne un fonctionnaire qui a été filmé en caméra cachée pour un reportage diffusé sur la chaîne M6. Ce reportage, intitulé « Fonctionnaires : prêts à tout pour être mutés en province », a montré le fonctionnaire proposant à une journaliste infiltrée de conclure un PACS et de prendre en charge ses impôts.

Cette proposition visait à faciliter sa mutation vers le Sud de la France. Le fonctionnaire a ensuite poursuivi M6 pour violation de sa vie privée et de son droit à l’image, arguant que la diffusion de son image et de ses propos constituait une atteinte à sa vie privée.

Quelles sont les obligations des juges en matière de requalification des faits ?

Selon l’article 12 du code de procédure civile, les juges ont l’obligation de requalifier les faits et actes litigieux sans se limiter à la dénomination proposée par les parties. Cela signifie qu’ils doivent examiner les faits sous un angle juridique approprié, même si les parties impliquées les qualifient différemment.

Dans le cas où le dommage invoqué est lié à des infractions définies par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, le demandeur ne peut pas utiliser des qualifications juridiques distinctes pour contourner les contraintes procédurales de cette loi. Cela garantit que la liberté d’expression est protégée dans le cadre des litiges liés à la presse.

Comment la réputation est-elle distincte du droit à l’image ?

Dans cette affaire, il a été jugé que le fonctionnaire cherchait à obtenir réparation pour une atteinte à son honneur et à sa réputation, plutôt que pour une violation de son droit à l’image. Bien que l’assignation mentionne des atteintes à la vie privée, elle visait principalement à réparer un préjudice de réputation.

Le reportage le présentait comme un « fraudeur », ce qui a eu pour effet de lui porter un discrédit évident. La réparation d’un tel préjudice est considérée comme une diffamation au sens de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Le tribunal a donc requalifié l’action en diffamation, entraînant la nullité de l’assignation en raison du non-respect des dispositions légales applicables.


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