Récupération des salaires impayés : enjeux de notification et de procédure.

·

·

Récupération des salaires impayés : enjeux de notification et de procédure.

Nullité de l’assignation

L’assignation en justice doit respecter les exigences formelles prévues par l’article 54 du code de procédure civile, qui stipule que la demande initiale doit mentionner, entre autres, les nom, prénoms, profession, domicile et date de naissance des demandeurs. En cas de non-respect de ces dispositions, l’assignation peut être déclarée nulle, sauf si la nullité n’est pas expressément prévue par la loi, conformément à l’article 114 du même code.

Grief causé par l’irrégularité

La nullité d’un acte de procédure ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief causé par l’irrégularité. En l’espèce, l’assignation a été signifiée à une adresse erronée, privant ainsi M. [U] de la possibilité de se défendre, ce qui constitue un grief évident et justifie la nullité de l’acte.

Effet dévolutif de l’appel

Selon l’article 562 du code de procédure civile, l’appel tendant à l’annulation d’une décision entraîne la dévolution de l’affaire pour le tout. Toutefois, si l’appel est fondé sur une irrégularité affectant l’acte introductif d’instance, l’effet dévolutif est exclu, empêchant la cour d’évoquer l’affaire et de statuer sur les demandes présentées par l’appelant.

Condamnation aux dépens

La partie qui succombe en justice est généralement condamnée aux dépens, conformément aux dispositions du code de procédure civile. Dans le cas présent, l’association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA, ayant perdu le litige, est condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

L’Essentiel : L’assignation en justice doit respecter les exigences formelles de l’article 54 du code de procédure civile. En cas de non-respect, elle peut être déclarée nulle, sauf si la nullité n’est pas expressément prévue par la loi. La nullité d’un acte de procédure ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire de prouver le grief causé par l’irrégularité. L’assignation signifiée à une adresse erronée prive M. [U] de la possibilité de se défendre, justifiant ainsi la nullité de l’acte.
Résumé de l’affaire : La S.A.S. CLC, entreprise de plâtrerie et peinture, a engagé un peintre en mars 2020 avec un salaire mensuel brut de 2.892 euros. En raison de salaires non payés, le peintre a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon en avril 2023. Le 5 juillet 2023, le conseil a ordonné à la S.A.S. CLC de verser 41.370 euros au peintre, de fournir ses bulletins de salaire depuis novembre 2022, et a condamné la société à payer 1.800 euros pour frais de justice.

L’ordonnance a été signifiée en août 2023. En décembre 2023, le Tribunal de Commerce de Lyon a fixé la date de cessation des paiements et a nommé un liquidateur judiciaire. En mai 2024, l’association AGS CGEA a formé une tierce-opposition contre l’ordonnance de juillet 2023, assignant le liquidateur et le peintre.

Le 26 juin 2024, le conseil de prud’hommes a jugé recevable la tierce opposition, rétractant l’ordonnance de juillet 2023 et fixant le passif de la S.A.S. CLC à 34.704 euros pour le peintre. Le liquidateur a été ordonné de remettre les bulletins de salaire sous astreinte. L’AGS a été déclarée opposable à cette décision, mais ne garantissait pas les frais de justice.

Le peintre a interjeté appel en juillet 2024, demandant l’annulation de l’ordonnance de juin 2024 pour vice de forme, arguant qu’il n’avait pas été informé de la procédure. L’AGS a contesté cette demande, soutenant que l’assignation avait été correctement délivrée.

La cour a finalement annulé l’assignation en raison d’une adresse erronée, entraînant la nullité de l’ordonnance de juin 2024. L’AGS a été condamnée aux dépens, soulignant l’importance des notifications correctes dans les procédures judiciaires.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la demande de nullité de l’assignation ?

La demande de nullité de l’assignation est fondée sur l’article 54 du code de procédure civile, qui stipule que la demande initiale en justice doit être formée par assignation ou par requête.

Cet article précise que, pour les personnes physiques, l’assignation doit mentionner les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs.

En l’espèce, l’assignation a été signifiée à l’adresse du siège social de la société CLC, et non à l’adresse personnelle de l’ouvrier, ce qui constitue une irrégularité.

De plus, l’article 114 du même code indique qu’aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

Cette irrégularité a causé un grief à l’ouvrier, car il n’a pas pu faire valoir ses droits en première instance.

Quel est l’impact de la nullité de l’assignation sur l’ordonnance du 26 juin 2024 ?

La nullité de l’assignation entraîne ipso facto la nullité des dispositions de l’ordonnance rendue le 26 juin 2024 par la formation de référé du conseil de prud’hommes de Lyon.

En effet, selon l’article 562 du code de procédure civile, la dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel tend à l’annulation de la décision.

Dans ce cas, la demande d’annulation, sollicitée par l’ouvrier, découle d’une irrégularité affectant l’acte introductif d’instance, ce qui signifie que l’appel est dépourvu d’effet dévolutif.

Ainsi, la cour ne peut pas évoquer l’affaire et statuer sur les demandes présentées par l’ouvrier, car l’irrégularité de l’assignation a privé ce dernier d’un débat au fond.

Quel est le rôle de l’AGS dans cette procédure ?

L’AGS, en tant qu’association garantissant les créances salariales, a formé une tierce opposition à l’ordonnance du 5 juillet 2023.

Cependant, elle a été critiquée pour avoir délivré l’assignation à une adresse erronée, ce qui a conduit à la nullité de l’assignation.

L’article L. 3253-6 du code du travail précise que l’AGS garantit les créances salariales dans la limite des dispositions légales.

Néanmoins, l’AGS ne peut pas se prévaloir de l’erreur d’adresse contenue sur l’ordonnance du 5 juillet 2023 pour justifier la validité de l’assignation.

Elle n’a pas été destinataire de l’ordonnance de référé aux fins d’exécution, ce qui limite sa capacité à connaître l’adresse réelle de l’ouvrier.

Quel est le sort des dépens dans cette affaire ?

Concernant les dépens, l’ordonnance du 26 juin 2024 a été infirmée, et l’association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

L’article 696 du code de procédure civile stipule que la partie perdante est généralement condamnée aux dépens.

Ainsi, la cour a décidé de laisser les dépens à la charge de l’association, en raison de sa position dans le litige.

Cette décision est conforme aux principes de la procédure civile, qui visent à garantir l’équité entre les parties en matière de frais de justice.

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 24/05633 – N° Portalis DBVX-V-B7I-PY6T

[U]

C/

SELARL [R] [F]

Association L’AGS (CGEA [Localité 8])

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 26 Juin 2024

RG : 24/00273

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 28 MARS 2025

APPELANT :

[V] [U]

né le 14 Avril 1988 à [Localité 7] (KOSOVO)

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Stéphanie BARADEL de la SELARL STEPHANIE BARADEL AVOCAT, avocat au barreau de LYON

INTIMÉES :

SELARL [R] [F], représentée par Maître [R] [F], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société CLC CONSTRUCTIONS, (dont le siège social était [Adresse 2] [Localité 11])

[Adresse 10],

[Adresse 4]

[Localité 5]

non comparante

Association L’AGS (CGEA [Localité 8]),

[Adresse 3] –

[Adresse 9]

[Localité 8]

représentée par Me Charles CROZE de la SELARL AVOCANCE, avocat au barreau de LYON substituée par Me Evanna IENTILE, avocat du même cabinet

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 06 Mars 2025

Présidée par Agnès DELETANG, Présidente magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Fernand CHAPPRON, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Agnès DELETANG, présidente

– Yolande ROGNARD, conseillère

– Régis DEVAUX, conseiller

ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 28 Mars 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Agnès DELETANG, Présidente et par Fernand CHAPPRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

La S.A.S. CLC est une entreprise de plâtrerie et peinture, créée en 2017, dont le siège est situé à [Localité 11] (69), [Adresse 2].

M. [V] [U] a été engagé par la société CLC le 18 mars 2020, en qualité de Peintre (ouvrier professionnel niveau 2 coefficient 185), moyennant une rémunération mensuelle brute de 2.892 euros pour 169 heures.

Invoquant le non-paiement de ses salaires, M. [V] [U] a, par acte du 19 avril 2023, saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes de Lyon de plusieurs demandes.

Par ordonnance de référé du 5 juillet 2023, la formation de référé du conseil de prud’hommes de Lyon a :

– condamné la S.A.S. CLC à payer à M. [V] [U] la somme de 41.370 euros à titre de provision sur paiements de salaires ;

– condamné la S.A.S à la remise de l’ensemble des bulletins de salaire depuis le mois de novembre 2022 sous astreinte de 30′ par jour de retard au-delà du 15ème jour après le prononcé, le Conseil se réservant le droit de liquider ladite astreinte

– condamné la S.A.S CLC au paiement de 1.800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la partie défenderesse qui succombe aux entiers dépens.

L’ordonnance a été signifiée le 17 août 2023 par voie d’huissier.

Par jugement du 12 décembre 2023, le Tribunal de Commerce de Lyon a notamment:

– fixé provisoirement au 5 juillet 2023, la date de cassation des paiements ;

– nommé la Selarl [R] [F], représentée par Maître [R] [F], en qualité de liquidateur.

Par acte du 31 mai 2024, l’association AGS CGEA de [Localité 8] a formé tierce-opposition à l’ordonnance du 5 juillet 2023 et a, par actes en date du 25 avril 2024, fait assigner la Selarl [R] [F], représentée par Maître [R] [F], et M. [V] [U].

Suivant ordonnance en date du 26 juin 2024, la formation de référé du conseil de prud’hommes de Lyon a :

– dit et jugé recevable la tierce opposition formée par l’association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de Chalon-Sur-Saône à l’encontre de l’ordonnance du 5 juillet 2023 rendu par le conseil de prud’hommes de Lyon ;

– rétracté l’ordonnance rendue par conseil de prud’hommes de Lyon le 5 juillet 2023 ;

Et, statuant de nouveau,

– fixé au passif de la S.A.S. CLC, représentée par la Selarl [R] [F], représentée par Maître [R] [F], ès qualité de liquidateur judiciaire, la somme de 34.704 ‘ bruts à titre de rappel de salaire de M. [V] [U] pour la période de mai 2022 à fin avril 2023 ;

– ordonné à la Selarl [R] [F], représentée par Maître [R] [F], ès qualité de liquidateur judiciaire de la S.A.S. CLC de remettre à M. [V] [U] ses bulletins de salaire du mois de novembre 2022 à fin avril 2023, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du 15ème jour de la présente notification, le Conseil se réservant le droit de liquider ladite astreinte ;

– rappelé qu’en application de l’article 515-1 du code de procédure civile, l’ordonnance de référé est exécutoire de droit ;

– déclaré la présente ordonnance opposable à l’association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de [Localité 8] sur la base des indemnités salariales brutes garanties par l’AGS dans la limite des dispositions des articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail ;

– dit et jugé que les intérêts légaux sont arrêtés au jour du jugement d’ouverture ;

– dit et jugé que la garantie de l’AGS ne pourra s’exercer que dans la limite des plafonds légaux et notamment des articles L. 3253-10, L. 3253-11, L. 3253-12, L. 3253-13, L. 3253-17, D. 3253-5 et D. 3253-2 du code du travail ;

– précisé que l’AGS ne garantit pas l’indemnité fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– laissé les dépens de l’instance à la charge de la liquidation judiciaire de la S.A.S. CLC, représentée par la Selarl [R] [F], représentée par Maître [R] [F].

Par déclaration du 08 juillet 2024, M. [V] [U] a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 28 novembre 2024, M. [V] [U] demande à la cour de :

– annuler l’ordonnance de référé du Conseil de Prud’hommes de Lyon rendue le 26 juin 2024, sur la base d’une assignation nulle parce qu’atteinte d’un vice de forme qui a porté grief à M. [U], puisqu’il a été tenu dans l’ignorance de la procédure et empêché de faire valoir sa défense, et en violation du principe du contradictoire que le Conseil de Prud’hommes n’a pas fait respecter ;

A titre subsidiaire,

– infirmer l’ordonnance de référé du 26 juin 2024 en ce qu’elle a :

* rétracté l’ordonnance rendue le 5 juillet 2023,

* fixé au passif de la liquidation la somme de 34.704 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de mai 2022 à fin avril 2023,

* ordonné à Maître [F] de remettre à M. [U] ses bulletins de salaire depuis novembre 2022 jusqu’à fin avril 2023 seulement ;

En tout état de cause, statuant à nouveau en évoquant l’entier litige :

– juger que M. [U] reste créancier de salaires impayés antérieurs au jugement de liquidation judiciaire :

– pour la période de mars 2020 à avril 2022 durant laquelle la société CLC Construction ne réglait pas le salaire contractuel ;

– pour la période de mai 2022 jusqu’au jugement du Tribunal de Commerce durant laquelle la société CLC Construction ne réglait aucun salaire alors que M. [U] se tenait à disposition de son employeur ;

– fixer au passif de la liquidation de la société CLC Construction une somme de 64.506,16 euros à titre de rappel de salaire outre une somme de 6.450,62 euros au titre des congés payés afférents ;

– laisser les dépens au passif de la liquidation.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 août 2024, l’association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de [Localité 8] demande à la cour de :

– juger que l’ordonnance rendue le 26 juin 2024 n’encourt pas la nullité ;

– débouter M. [U] de sa demande d’annulation de l’ordonnance rendue le 26 juin 2024 ;

– confirmer la rétractation de l’ordonnance du 5 juillet 2023 prononcée par l’ordonnance du 26 juin 2024 ;

– reformer l’ordonnance en ce qu’elle n’a pas rétracté la demande de rappels de salaire de M. [U] ;

statuant à nouveau,

– rétracter l’ordonnance en ce qu’elle a fait droit aux demandes de rappels de salaire de M. [U] et débouter M. [U] de l’intégralité de ses demandes ;

en tout état de cause,

– dire et juger que l’AGS-CGEA de [Localité 8] ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-8 du code du travail que dans les termes et conditions résultant des articles L. 3253-20, L. 3253-19 et L. 3253-17 du code du travail;

– dire et juger que l’obligation de l’AGS CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des éventuelles créances garanties, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé de créance par le mandataire judicaire,

– dire et juger que l’AGS-CGEA de [Localité 8] ne garantit pas les sommes allouées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et ne garantit pas les créances d’astreinte ;

– dire et juger l’AGS-CGEA de [Localité 8] hors dépens.

La Selarl [R] [F], représentée par Maître [R] [F], ès qualité de liquidateur judiciaire de la S.A.S. CLC, n’a pas constitué avocat.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

La clôture de la procédure a été ordonnée le 11 février 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité de l’assignation :

M. [U] soutient que l’ordonnance de référé du 26 juin 2024 doit être annulée dès lors que l’acte introductif d’instance était entaché de nullité, et qu’elle a été rendue en violation du principe du contradictoire. Il fait à cet égard valoir que l’AGS a fait délivrer une assignation à l’adresse du siège social de la société CLC Construction et non à son adresse personnelle, alors que celle-ci est demeurée inchangée et figurait notamment sur ses bulletins de salaire. Il n’a donc pas été informé de la procédure initiée par l’AGS et n’a pu faire valoir aucun argument pour s’opposer à la demande de l’AGS. Il en conclut qu’il en est résulté pour lui un grief évident né de cette méconnaissance des règles de procédure.

En réplique, l’AGS conclut au rejet de la demande de nullité, faisant valoir qu’elle a formé une tierce-opposition à l’adresse qui figurait sur l’ordonnance de référé rendue le 5 juillet 2023 qui lui a été communiquée. N’étant pas l’employeur, l’AGS CGEA n’a été destinataire que de l’ordonnance de référé aux fins d’exécution et n’avait donc aucun moyen de connaître l’adresse réelle de M. [U], ni aucune raison de soupçonner que l’adresse figurant sur l’ordonnance de référé rendue par le Conseil de Prud’hommes serait une adresse erronée. Elle en conclut qu’il ne peut donc lui être reproché une erreur qui a été commise par la juridiction prud’homale.

Sur ce,

Aux termes de l’article 54 du code de procédure civile, ci-après reproduit jusqu’au a) du 3° invoqué, la demande initiale en justice est formée par assignation ou par requête remise ou adressée au greffe de la juridiction. La requête peut être formée conjointement par les parties.

A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L’objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

Par ailleurs, selon l’article 114 du même code, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

En l’espèce, l’assignation en date du 25 avril 2024, dont il est sollicité la nullité, a été signifiée selon les formes prescrites à l’article 659 du code de procédure civile, à l’adresse du siège social de la société CLC avant sa liquidation ([Adresse 2] à [Localité 11]), à laquelle M. [U] n’a jamais été domicilié, ce dernier demeurant à [Localité 12] ([Adresse 1]), à l’adresse mentionnée tant dans sa requête initiale que sur les pièces de la procédure et plus particulièrement sur ses bulletins de paie qui ont été transmis au mandataire judiciaire de la société CLC, ainsi que sur le jugement du 12 décembre 2023 rendu par du tribunal de commerce de Lyon.

L’AGS ne peut valablement se prévaloir de l’erreur d’adresse contenue sur l’ordonnance du 5 juillet 2023 pour considérer que l’assignation a été valablement délivrée à M. [U].

L’assignation est ainsi entachée d’une irrégularité qui est susceptible d’entraîner la nullité de l’acte dès lors que dès lors qu’il est justifié d’un grief, par application de l’article 114 du code de procédure civile.

Cette irrégularité a nécessairement causé un grief à M. [U] puisqu’il a été privé d’un débat au fond qui lui aurait permis en première instance de faire valoir ses droits. En effet, ce dernier qui n’était ni comparant ni représenté en première instance, n’a pu bénéficier d’un double degré de juridiction.

Il convient en conséquence de prononcer la nullité de l’acte introductif d’instance à son égard.

Cette nullité entraîne ipso facto la nullité des dispositions de l’ordonnance rendue le 26 juin 2024 par la formation de référé du conseil de prud’hommes de Lyon le concernant.

Sur la demande de réformation de l’ordonnance

S’il résulte du dernier alinéa de l’article 562 du code de procédure civile que la dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel tend à l’annulation de la décision, il est admis que, dès lors que la demande d’annulation, sollicitée par l’appelant, procède d’une irrégularité affectant l’acte introductif d’instance devant le premier juge, l’appel est, en principe, dépourvu d’effet dévolutif. Cette exclusion de l’effet dévolutif concerne tous les actes d’irrégularité de l’acte introductif d’instance.

Subséquemment, la cour ne peut évoquer l’affaire et statuer sur les demandes présentées par M. [U].

Sur les dépens :

L’ordonnance querellée sera infirmée sur les dépens.

L’association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de [Localité 8], qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,

Annule l’acte introductif d’instance délivré à M. [V] [U] par l’association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de [Localité 8] le 25 avril 2024 ;

Annule en conséquence l’ordonnance rendue le 26 juin 2024 par la formation de référé du conseil de prud’hommes de Lyon en ses dispositions relatives à M. [V] [U] ;

Dit n’y avoir lieu à évocation,

Condamne l’association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de [Localité 8] aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier La présidente


Votre avis sur ce point juridique ? Une actualité ? Une recommandation ?

Merci pour votre retour ! Partagez votre point de vue, une info ou une ressource utile.

Chat Icon