Recevabilité du recours et contestation des honoraires d’avocat

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Recevabilité du recours et contestation des honoraires d’avocat

Recevabilité du recours

L’article 176 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 stipule que la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, saisi par l’avocat ou la partie, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le délai de recours est d’un mois. En l’espèce, l’ordonnance du bâtonnier a été notifiée le 3 juin 2024, et le recours a été formé le 26 juin 2024, respectant ainsi le délai imparti.

Motivation de la décision du bâtonnier

L’article 175 du même décret précise que le bâtonnier doit motiver sa décision et informer les parties des modalités de recours. En l’espèce, l’absence de motivation sur les causes de prorogation du délai de quatre mois, contraire aux exigences de ce texte, entraîne l’annulation de plein droit de la décision du bâtonnier.

Vices du consentement

L’article 1130 du code civil énonce que l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement. Pour qu’un vice du consentement soit reconnu, il doit être démontré que, sans ce vice, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. En l’espèce, Mme [U] [P] n’a pas apporté de preuves suffisantes pour établir le caractère frauduleux de la convention d’honoraires.

Fixation des honoraires

La loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, en son article 10, alinéa 1er, et le décret du 10 juillet 1991, article 72, prévoient que les honoraires de l’avocat sont librement discutés avec son client et doivent faire l’objet d’une convention. L’article 1134 du code civil confère à cette convention la force obligatoire. Le juge peut réduire les honoraires convenus si ceux-ci apparaissent exagérés au regard du service rendu, mais uniquement si le client a accepté le principe et le montant des honoraires après service rendu.

Honoraires de résultat

La convention d’honoraires signée entre Mme [U] [P] et M. [E] [S] prévoyait un honoraire de résultat de 12% HT sur le gain pécuniaire obtenu. La jurisprudence (2e Civ., 18 septembre 2003, pourvoi n° 01-16.013) indique que le pouvoir du juge de modérer les honoraires ne s’applique pas lorsque le client a librement accepté les honoraires après service rendu. En l’espèce, les diligences de M. [E] [S] ont permis à Mme [U] [P] d’obtenir un gain substantiel, justifiant ainsi le montant des honoraires demandés.

Dépens et frais de justice

L’article 696 du code de procédure civile prévoit que la partie perdante supporte les dépens. En conséquence, Mme [U] [P], ayant succombé dans ses demandes, est condamnée à payer les dépens de la procédure. De plus, l’article 700 du même code permet au juge de condamner la partie perdante à verser à l’autre partie une somme au titre des frais non compris dans les dépens, ce qui justifie la condamnation de Mme [U] [P] à verser 1 000 euros à M. [E] [S].

L’Essentiel : L’article 176 du décret n°91-1197 stipule que la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, saisi par l’avocat ou la partie, par lettre recommandée. Le délai de recours est d’un mois. En l’espèce, le recours a été formé le 26 juin 2024, respectant ainsi le délai imparti. L’absence de motivation sur les causes de prorogation du délai de quatre mois entraîne l’annulation de plein droit de la décision du bâtonnier.
Résumé de l’affaire : En mai 2020, une cliente a mandaté un avocat pour défendre ses intérêts dans le cadre d’une rupture unilatérale de PACS et des conséquences sur la succession. Le tribunal judiciaire de Vannes a rendu une décision le 13 septembre 2022. En octobre 2023, l’avocat a demandé la taxation de ses honoraires, et le bâtonnier a fixé le montant dû à 16 253,08 € TTC, après déduction de paiements antérieurs. Cette décision a été notifiée à la cliente le 3 juin 2024.

La cliente a contesté cette ordonnance par un recours déposé le 26 juin 2024, qui a été jugé recevable. Lors de l’audience du 8 janvier 2025, elle a demandé la réformation de l’ordonnance, arguant que la convention d’honoraires était frauduleuse et que le bâtonnier n’était pas un tribunal impartial, violant ainsi ses droits à un procès équitable. Elle a également soulevé des questions sur la motivation de la prorogation du délai de décision du bâtonnier.

L’avocat a, de son côté, demandé la confirmation de l’ordonnance du bâtonnier et le paiement du solde restant dû, tout en rappelant les diligences effectuées pour annuler la rupture du PACS et obtenir un remboursement substantiel de l’administration fiscale.

Le tribunal a examiné la recevabilité du recours et a constaté que la décision du bâtonnier n’était pas motivée concernant la prorogation du délai, ce qui a conduit à son annulation. Concernant la contestation des honoraires, le tribunal a noté que la convention d’honoraires était valide et que les services rendus par l’avocat justifiaient le montant demandé. Finalement, la cliente a été condamnée à payer le solde des honoraires dus, ainsi que des frais de justice.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le cadre juridique du recours contre la décision du bâtonnier ?

Le cadre juridique du recours contre la décision du bâtonnier est défini par l’article 176 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991. Cet article stipule que « la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, qui est saisi par l’avocat ou la partie, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le délai de recours est d’un mois. »

En l’espèce, l’ordonnance rendue le 27 mai 2024 par le bâtonnier a été notifiée à la partie concernée par lettre recommandée avec avis de réception le 3 juin 2024.

La partie a formé un recours par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 26 juin 2024, respectant ainsi le délai d’un mois prévu par la loi.

Par conséquent, le recours est déclaré recevable.

Quel est le fondement de la contestation de la décision du bâtonnier ?

La contestation de la décision du bâtonnier repose sur plusieurs arguments, notamment la violation de l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et de l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Ces articles garantissent le droit à un procès équitable, à savoir que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial. »

La partie soutient que le bâtonnier n’est pas un tribunal indépendant et impartial, ce qui constitue une violation de ses droits.

De plus, elle invoque l’article 4 du code civil, qui stipule que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. » Elle prétend que le bâtonnier n’a pas tenu compte de ses écritures, ce qui pourrait constituer une violation de ses droits.

Enfin, elle demande la constatation de la forclusion de la décision du bâtonnier, arguant que ce dernier s’est référé à des lois abrogées et n’a pas motivé la prorogation du délai pour rendre sa décision.

Quel est le caractère frauduleux de la convention d’honoraires ?

Le caractère frauduleux de la convention d’honoraires est examiné à la lumière de l’article 1130 du code civil, qui précise que « l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. »

La partie conteste la convention d’honoraires en affirmant qu’elle était frauduleuse, en raison de promesses non tenues par l’avocat concernant des déplacements.

Cependant, il est noté que cette affirmation n’est pas corroborée par des éléments factuels. La partie n’a pas établi avoir émis des réserves lors de la signature de la convention, qui ne mentionne pas d’engagement de trajet de la part de l’avocat.

Ainsi, ce moyen est rejeté, car il ne repose pas sur des preuves suffisantes.

Quel est le cadre légal pour la fixation des honoraires d’avocat ?

La fixation des honoraires d’avocat est régie par plusieurs dispositions légales, notamment l’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, qui stipule que « les honoraires de l’avocat sont librement discutés avec son client. »

Ces honoraires doivent faire l’objet d’une convention, conformément à l’article 1134 du code civil, qui affirme que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. »

Il est également précisé que l’existence d’une convention ne fait pas obstacle au pouvoir du juge de réduire les honoraires convenus lorsque ceux-ci apparaissent exagérés au regard du service rendu.

Cependant, ni le bâtonnier ni le premier président ne peuvent réduire l’honoraire dont le principe et le montant ont été acceptés par le client après service rendu, ce qui est le cas ici.

Quel est le montant des honoraires dus par la partie à l’avocat ?

Le montant des honoraires dus par la partie à l’avocat est établi à partir de la convention d’honoraires signée.

Cette convention prévoyait un honoraire de base de 3 600 € TTC et un honoraire complémentaire de résultat de 12 % HT sur le gain pécuniaire obtenu.

L’avocat a demandé un total de 16 253,08 € TTC, comprenant les honoraires fixes et l’honoraire de résultat, ainsi que 72,25 € TTC de débours avancés.

Après déduction des paiements déjà effectués par la partie, le solde restant dû est de 13 025,33 € TTC.

La partie a reconnu devoir la somme de 4 060 € TTC, mais n’a pas justifié des paiements intervenus, ce qui a conduit à retenir le montant dû de 13 025,33 € TTC.

Quels sont les frais du procès et les conséquences pour la partie perdante ?

Les frais du procès sont généralement à la charge de la partie qui succombe, conformément à l’article 696 du code de procédure civile, qui stipule que « la partie perdante supporte les dépens. »

Dans cette affaire, la partie a été condamnée à payer les dépens, ainsi qu’une somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qui permet de condamner la partie perdante à verser une somme à l’autre partie pour couvrir les frais non compris dans les dépens.

Cette décision vise à garantir une certaine équité dans la prise en charge des frais de justice, en tenant compte des circonstances de l’affaire.

COUR D’APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7

Code nac : 97J

N° RG 24/04603 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WU3S

Du 19 MARS 2025

Copies

délivrées le :

à :

Mme [P] ccc

Me [S] ccc

Me SUMAY exe

Bât 95 ccc

ORDONNANCE

LE DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT CINQ

prononcé par mise à disposition au greffe,

Nous, Nathalie BOURGEOIS-DE RYCK, Première présidente de chambre à la cour d’appel de VERSAILLES, déléguée par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière de contestations d’honoraires et de débours relatifs à la profession d’avocat ; vu les articles 176 et 178 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, assistée de Rosanna VALETTE, Greffière, avons rendu l’ordonnance suivante :

ENTRE :

Madame [U] [P]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparante

DEMANDERESSE

ET :

Maître [E] [S]

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparant, assisté de Me Sylvain DUMAY de l’AARPI AGYS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 135

DEFENDEUR

à l’audience publique du 08 Janvier 2025 où nous étions Nathalie BOURGEOIS-DE RYCK, Première présidente de chambre assisté de Hélène AVON, adjoint administratif faisant fonction de greffier, avons indiqué que notre ordonnance serait rendue ce jour ;

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

En mai 2020, Mme [U] [P] a confié à M. [E] [S], avocat au barreau du Val d’Oise, AARPI [S] & Soubre associés, la défense de ses intérêts dans le cadre d’une rupture unilatérale de PACS et des effets sur la succession. Une décision a été rendue le 13 septembre 2022 par le tribunal judiciaire de Vannes.

M. [E] [S] a saisi le bâtonnier du barreau du Val d’Oise d’une demande de taxation de ses honoraires le 25 octobre 2023.

Par ordonnance du 27 mai 2024, le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau du Val d’Oise a fixé les honoraires dus par Mme [U] [P] à M. [E] [S], avocat de ce barreau, à la somme de 16 253,08 € TTC outre 72,25 € TTC de débours avancés, sous déduction des sommes versées à hauteur de 3300 € TTC, soit un solde restant dû de 13 025,33 € TTC.

Cette décision a été notifiée par lettre recommandée avec avis de réception du 3 juin 2024 à Mme [U] [P].

Mme [U] [P] a formé un recours contre cette ordonnance par lettre recommandée avec accusé de réception, expédiée le 26 juin 2024.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 8 janvier 2025 à laquelle Mme [U] [P] a comparu ainsi que M. [E] [S], assisté par Me Sylvain Dumay.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

À l’appui de son recours, Mme [U] [P] demande la réformation de l’ordonnance du bâtonnier et la fixation des honoraires à la somme de 4060 euros déjà versée.

D’une part, elle soutient que la convention d’honoraires était frauduleuse. D’autre part, elle énonce que le bâtonnier a violé l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) consacrant un droit à un procès équitable ‘ droit à ce que sa cause soit entendu par un tribunal indépendant et impartial – et l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politique consacrant le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, car le bâtonnier n’est pas un tribunal indépendant et impartial. Elle ajoute qu’a également été violé l’article 4 du code civil en ne tenant pas compte de ses écritures. Elle demande également de constater la forclusion de la décision du bâtonnier et son annulation en l’absence de motivation de la prorogation du délai pour rendre cette décision. Elle prétend que le bâtonnier s’est référé à des lois abrogées.

A l’audience, elle s’en remet oralement à ses demandes écrites auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens.

M. [E] [S] demande d’une part, la confirmation de l’ordonnance de taxation du bâtonnier du Val d’Oise en date du 27 mai 2024, d’autre part, la condamnation de l’appelante à lui verser la somme de 13 025,33€ TTC restant due et les intérêts à compter de la mise en demeure et, enfin, la condamnation de l’appelante à la somme de 1 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civil et le rejet de ses demandes. Il rappelle les diligences accomplies qui ont permis d’une part de faire annuler la rupture unilatérale du PACS et d’autre part de percevoir une somme de 87 868,66 euros en remboursement des sommes prélevées à tort par l’administration fiscale.

Il convient de se reporter à ses pièces écrites pour un plus ample exposé des moyens et prétentions.

SUR CE

Sur la recevabilité du recours

L’article 176 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 prévoit que la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, qui est saisi par l’avocat ou la partie, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le délai de recours est d’un mois.

En l’espèce, l’ordonnance rendue le 27 mai 2024 par le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau du Val d’Oise a été notifiée à Mme [U] [P] par lettre recommandée avec avis de réception le 3 juin 2024. Cette dernière a formé un recours contre cette ordonnance par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 26 juin 2024.

Le recours a été formé dans le délai d’un mois.

En conséquence, le recours de Mme [U] [P] est déclaré recevable.

Liminaire

Les ‘constater’ figurant au dispositif des conclusions de Mme [P], ne sont pas des prétentions, mais des moyens, voire des arguments au soutien de ses prétentions qui portent principalement sur la réformation et l’annulation de la décision du bâtonnier et la diminution des honoraires. Ces sollicitations seront, le cas échéant, examinées dans les motifs du présent arrêt.

Sur la décision du bâtonnier

L’article 175 prévoit que « Les réclamations sont soumises au bâtonnier par toutes parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise contre récépissé. Le bâtonnier accuse réception de la réclamation et informe l’intéressé que, faute de décision dans le délai de quatre mois, il lui appartiendra de saisir le premier président de la cour d’appel dans le délai d’un mois.

L’avocat peut de même saisir le bâtonnier de toute difficulté.

Le bâtonnier, ou le rapporteur qu’il désigne, recueille préalablement les observations de l’avocat et de la partie. Il prend sa décision dans les quatre mois. Cette décision est notifiée, dans les quinze jours de sa date, à l’avocat et à la partie, par le secrétaire de l’ordre, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La lettre de notification mentionne, à peine de nullité, le délai et les modalités du recours.

Le délai de quatre mois, prévu au troisième alinéa, peut être prorogé dans la limite de quatre mois par décision motivée du bâtonnier. Cette décision est notifiée aux parties, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dans les conditions prévues au premier alinéa. »

En l’espèce, l’appelante soutient que le bâtonner n’a pas motivé sa décision de prorogation du délai de sorte que sa décision doit être censurée et annulée.

La lettre du bâtonnier du 29 janvier 2024 informe Mme [P] d’une prorogation du délai de 4 mois et de la date d’expiration du nouveau délai mais ne motive pas la raison de cette prorogation.

Cette absence de motivation sur les causes de prorogation du délai de 4 mois, contraire au texte spécifique prévu pour cette procédure de contestation des honoraires d’avocat, implique que le bâtonnier ne pouvait pas rendre de décision. La décision du bâtonnier encourt l’annulation de plein droit.

Sur le caractère frauduleux de la convention

L’article 1130 du code civil prévoit que : « L’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.

Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné ».

En l’espèce, Mme [U] [P] explique que la convention d’honoraires a un caractère frauduleux. Elle énonce que M. [E] [S] avait fait la promesse de faire des allers-retours entre [Localité 5] et [Localité 6].

L’affirmation du caractère frauduleux invoqué, qui pourrait s’interpréter en un vice du consentement, outre que l’appelante n’en tire aucune conséquence de droit, n’est corroborée par aucun élément factuel. Mme [U] [P] n’établit pas avoir émis une quelconque réserve lors de la signature de la convention d’honoraires laquelle ne mentionne pas d’engagement de trajet de la part de l’avocat.

En conséquence, ce moyen ne peut qu’être rejeté.

Sur la fixation des honoraires

Il est rappelé que la procédure spécifique de contestation des honoraires est limitée à la fixation des honoraires.

Les honoraires de l’avocat sont librement discutés avec son client (Loi n°71-1130 du 31 déc. 1971, art. 10, al. 1er, mod. L. no 91-647, 10 juill. 1991, art. 72) et ils doivent faire l’objet d’une convention d’honoraires qui, en vertu de l’article 1134 du code civil, est revêtue de la force obligatoire attachée à tout acte juridique.

L’existence d’une convention entre l’avocat et son client ne fait pas obstacle au pouvoir du juge, statuant sur une contestation en matière d’honoraires, de réduire les honoraires convenus lorsque ceux-ci apparaissent exagérés au regard du service rendu.

Cependant, ni le bâtonnier, ni le premier président ne sont fondés à réduire l’honoraire dont le principe et le montant ont été acceptés par le client après service rendu, que celui-ci ait ou non été précédé d’une convention (2e Civ., 18 septembre 2003, pourvoi n° 01-16.013, Bull. 2003, II, n° 279 ; 2e Civ., 6 mars 2014, pourvoi n° 13-14.922, Bull. 2014, II, n° 62), dès lors que le paiement est intervenu librement et en toute connaissance de cause (2e Civ., 3 mars 2011, pourvoi n° 09-72.968). Cette solution procède de l’idée que le pouvoir modérateur du juge ne se justifie plus lorsque le client est en mesure d’apprécier le travail effectué.

En l’espèce, le Mme [U] [P] considère n’avoir à régler que la somme de 4060 euros correspondants aux honoraires fixes et aux honoraires de l’avocat postulant à [Localité 6]. Elle ajoute ne pas comprendre comment la somme à régler est aussi élevée et que son avocat n’a pas fait de recherches car son affaire n’était pas compliquée.

M. [E] [S], avocat, a été saisi par Mme [U] [P] de la défense de ses intérêts dans le cadre d’une procédure d’annulation de PACS et de ses conséquences sur la succession.

Une convention d’honoraires a été régularisée, le 19 mai 2020, confiant à M. [E] [S] AARPI [S] & Soubre associés la défense des intérêts de Mme [U] [P].

Elle prévoyait, dans l’annexe, en son article 1 que l’avocat percevrait 3 000 € HT, soit 3 600 € TTC, somme forfaitaire qualifiée « d’honoraires de base fixés en fonction de la difficulté prévisible du dossier au vu des éléments communiqués par la cliente au cours de la consultation préalable à l’engagement de la procédure » dans le cadre de la succession de M. [B] dont elle est l’héritière. L’article 2 de l’annexe précisait que les parties convenaient d’un honoraire complémentaire de résultat de 12% HT appliqué en fonction du gain pécuniaire obtenu, précisant que ce gain est constitué des sommes allouées à Mme [U] [P] au titre des sommes reçues lors de la succession de M. [B]. Il est précisé que ce gain s’applique autant aux montants attribués en numéraires que sur ceux prenant la forme d’une attribution de droits, d’abandon de soultes ou d’usufruit etc’

M. [E] [S] demande le paiement de la somme de 16 253,08€ TTC correspondant aux honoraires fixes de 3600 euros et à l’honoraire de résultat de 12 653,08 euros TTC outre 72,25 € TTC de débours avancés, sous déduction des sommes versées à hauteur de 3300€ TTC, soit un solde restant dû de 13 025,33€ TTC. Mme [P] reconnaît devoir la somme de 4060 euros TTC qu’elle prétend avoir réglé.

Mme [P] ne justifie pas des paiements intervenus de sorte que sera retenu un paiement reconnu de 3300 euros TTC. Ces paiements sont intervenus après service rendu et conformément à la convention d’honoraires.

Il ressort des débats et des pièces versées au dossier, et notamment la note d’honoraires rappelant les prestations de M.[E] [S], avocat, que ce dernier a accompli de nombreuses diligences pour sa cliente, Mme [U] [P], dans ce dossier.

En particulier, M. [E] [S] a fixé trois rendez-vous en cabinet à Mme [U] [P]. Après avoir pris contact avec l’étude notariale responsable de la succession de M. [B], une assignation a été délivrée afin de faire annuler la rupture du PACS et l’avocat a suivi la mise en état du dossier.

Une décision était rendue le 13 septembre 2022, favorable à l’appelante.

L’intimé a procédé à une étude approfondie du dossier afin de lui permettre l’obtention de l’annulation de la rupture du PACS et ainsi bénéficier de l’abattement fiscal qui en découle, plus avantageux au regard des dispositions testamentaire de M. [B]. Il a poursuivi les démarches après la décision et obtenu le certificat de non appel, délivré une mise en demeure au trésor public etc.

M. [E] [S] a lui-même procédé au paiement des frais d’huissier. Il a envoyé divers courriers dans l’intérêt de Mme [U] [P]. Elle a ainsi bénéficié d’un remboursement de la somme de 87 868,66€.

Il résulte en outre des échanges de courriels et courrier que Mme [P] était tenue informée de l’évolution du dossier et ne contestait pas les diligences accomplies notamment en lien avec l’avocat postulant compte tenu de l’éloignement de la juridiction compétente.

L’essentiel de la contestation concerne l’honoraire de résultat. Or, les diligences accomplies par le conseil de Mme [P] lui ont permis d’obtenir le versement de la somme de 87 868,66 euros le 21 mars 2023. La convention d’honoraires, qui est la loi entre les parties, prévoyait un honoraire de résultat de 12% HT sur le gain pécuniaire obtenu. C’est pourquoi M. [S] est fondé à solliciter les sommes sus rappelées.

Mme [U] [P] sera donc condamnée à payer à M. [E] [S] la somme de 13 025,33 euros TTC. Cette somme produira intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure reçue par l’appelante le 20 juillet 2023.

Sur les frais du procès

Mme [U] [P] qui succombe supportera la charge des dépens.

Il ne serait pas équitable de laisser à la charge de M. [E] [S] la part des frais non compris dans les dépens. En conséquence, Mme [U] [P] sera condamnée à payer à M. [E] [S] la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe et par ordonnance contradictoire,

Le magistrat délégué par le premier président,

– Déclare Mme [U] [P] recevable en son recours,

– Annule l’ordonnance du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau du Val d’Oise taxant les honoraires dus à M. [E] [S], avocat, à la somme de 16 253,08€ TTC outre 72,25€ au titre des débours avancés par M. [E] [S], constatant que Mme [U] [P] a réglé la somme de 3 300€ TTC et condamnant Mme [U] [P] à payer à M. [E] [S] la somme de 13 025,33€ TTC,

Statuant à nouveau,

– Fixe les honoraires dus par Mme [U] [P] à M. [E] [S] à la somme de 16 253,08 euros TTC outre 75,25 euros de frais d’huissier dont à déduire la somme de 3300 euros versée par l’appelante,

– Condamne Mme [U] [P] à payer à M. [E] [S], avocat AARPI [S] & Soubre associés, la somme de 13 025,33 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2023,

– Dit que les dépens de la présente procédure seront supportés par Mme [U] [P],

– Condamne Mme [U] [P] au paiement à M. [E] [S], avocat, AARPI [S] & Soubre associés de la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Rejette le surplus des demandes,

– Dit qu’en application de l’article 177 du décret du 27 novembre 1991, la présente décision sera notifiée aux parties par le greffe de la cour par lettre recommandée avec avis de réception.

Prononcé par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Et ont signé la présente ordonnance :

La Greffière, La Première présidente de chambre,

Rosanna VALETTE Nathalie BOURGEOIS-DE RYCK


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