Réception des travaux : enjeux de la garantie de parfait achèvement et réserves postérieures.

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Réception des travaux : enjeux de la garantie de parfait achèvement et réserves postérieures.

Règle de droit applicable

La garantie de parfait achèvement, prévue par l’article 1792-6 du Code civil, impose à l’entrepreneur de réparer tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage dans un délai d’un an à compter de la réception des travaux. Cette garantie s’applique tant aux réserves mentionnées dans le procès-verbal de réception qu’à celles notifiées par écrit après la réception.

Textes législatifs pertinents

L’article 1792-6 du Code civil stipule que « l’entrepreneur est tenu de garantir le maître de l’ouvrage contre tous les désordres qui affectent la construction pendant un délai d’un an à compter de la réception des travaux ». De plus, l’article L.231-8 du Code de la construction et de l’habitation précise que le maître d’ouvrage peut formuler des réserves dans un délai de huit jours suivant la réception des travaux, ce qui permet de prolonger la possibilité de signaler des désordres apparents.

Conditions de mise en œuvre

Pour bénéficier de la garantie de parfait achèvement, le maître d’ouvrage doit respecter les procédures de dénonciation des réserves, comme le stipule l’article L.231-8. La notification des réserves doit être effectuée par écrit et dans le délai imparti, ce qui a été respecté dans le cas présent, les réserves ayant été formulées par lettre recommandée dans les huit jours suivant la réception des travaux.

Conséquences juridiques

En cas de non-respect de la garantie de parfait achèvement, l’entrepreneur peut être tenu de réparer les désordres signalés, et le maître d’ouvrage peut demander des indemnités pour les préjudices subis. La décision de justice a confirmé que les maîtres d’ouvrage avaient respecté les procédures de dénonciation, ce qui leur permet de revendiquer des réparations au titre de cette garantie.

L’Essentiel : La garantie de parfait achèvement impose à l’entrepreneur de réparer tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage dans un délai d’un an après la réception des travaux. Cette garantie s’applique aux réserves mentionnées dans le procès-verbal de réception et à celles notifiées par écrit. Pour en bénéficier, le maître d’ouvrage doit respecter les procédures de dénonciation des réserves, effectuées par écrit dans le délai imparti, ce qui a été respecté dans le cas présent.
Résumé de l’affaire : Dans le cadre d’un contrat de construction de maison individuelle signé le 7 mai 2020, un acheteur et une acheteuse ont confié à la société INTER CONSTRUCTION 03, opérant sous l’enseigne DEMEURES RÉGIONALE, la construction de leur maison sur une parcelle située dans le Puy-de-Dôme. Le contrat stipulait que les maîtres d’ouvrage réaliseraient certains travaux eux-mêmes, et a été suivi de plusieurs avenants. Un procès-verbal de réception des travaux a été signé le 27 juin 2022, mais les maîtres d’ouvrage contestent les conditions de cette réception, affirmant que le représentant de la société a refusé de consigner des réserves.

Suite à l’absence de réponse à une lettre recommandée envoyée à la société le 29 juin 2022, dans laquelle les maîtres d’ouvrage énuméraient des réserves, ceux-ci ont assigné la société devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand. Le jugement rendu le 19 juin 2023 a reconnu que les maîtres d’ouvrage avaient respecté les procédures de dénonciation des réserves, mais a débouté leurs demandes de réparation et de remboursement, tout en les condamnant à verser une indemnité à la société.

Les maîtres d’ouvrage ont interjeté appel, demandant la confirmation de la reconnaissance de leurs réserves et la condamnation de la société à des réparations financières. En réponse, la société a demandé la confirmation du jugement initial et a réclamé des dommages-intérêts pour procédure abusive.

Lors de l’audience du 13 janvier 2025, les parties ont réitéré leurs demandes. La cour a finalement infirmé le jugement de première instance, condamnant la société à verser des indemnités aux maîtres d’ouvrage pour les travaux de reprise relevant de la garantie de parfait achèvement, ainsi qu’une somme pour préjudice de jouissance et des frais irrépétibles. La société a été déboutée de ses demandes.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le cadre juridique de la garantie de parfait achèvement ?

La garantie de parfait achèvement est régie par l’article 1792-6 du Code civil, qui stipule que « La garantie de parfait achèvement, à laquelle l’entrepreneur est tenu pendant un délai d’un an, à compter de la réception [des travaux], s’étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception. »

Cette disposition souligne l’obligation de l’entrepreneur de remédier à tous les désordres signalés dans le délai d’un an suivant la réception des travaux, qu’ils soient apparents ou cachés.

Il est également important de noter que l’article L.231-8 du Code de la construction et de l’habitation précise les modalités de dénonciation des réserves, permettant ainsi au maître d’ouvrage de faire valoir ses droits en cas de non-conformité des travaux.

Quel est l’impact de la réception des travaux sans réserves sur les droits du maître d’ouvrage ?

La réception des travaux sans réserves, comme stipulé dans l’article 1792-6 du Code civil, ne prive pas le maître d’ouvrage de son droit de signaler des désordres ultérieurs. En effet, la jurisprudence a établi que même en cas de réception sans réserves, le maître d’ouvrage peut notifier des désordres dans un délai de huit jours suivant la réception, conformément à l’article L.231-8 du Code de la construction et de l’habitation.

Ainsi, la société INTER CONSTRUCTION 03 ne peut pas se prévaloir de la réception sans réserves pour écarter les demandes de réparation formulées par le maître d’ouvrage, dès lors que ces réserves ont été notifiées dans le respect des délais légaux.

Quel est le rôle des constats d’huissier dans la procédure de contestation des travaux ?

Le constat d’huissier, comme celui réalisé le 7 juillet 2022, joue un rôle crucial dans la preuve des désordres allégués par le maître d’ouvrage. Selon l’article 9 du Code de procédure civile, « chacun a droit au respect de sa vie privée », et le constat d’huissier permet de documenter de manière objective l’état des lieux et les désordres constatés.

Ce document a une force probante, sauf preuve du contraire, et peut être utilisé pour étayer les demandes de réparation. Dans le cas présent, le constat a permis de confirmer les réserves formulées par le maître d’ouvrage et de justifier les demandes de réparation au titre de la garantie de parfait achèvement.

Quel est le fondement des demandes de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance ?

Les demandes de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance sont fondées sur le principe de réparation du préjudice, tel que prévu par l’article 1240 du Code civil, qui stipule que « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Dans le cadre de la construction, le préjudice de jouissance peut être évalué en fonction de la durée et de l’impact des désordres sur l’utilisation normale de l’immeuble. Dans cette affaire, le tribunal a arbitré le préjudice de jouissance à la somme de 8.000,00 €, tenant compte des désagréments subis par le maître d’ouvrage en raison des défauts de construction.

Quel est le régime des frais irrépétibles en matière de procédure civile ?

Les frais irrépétibles sont régis par l’article 700 du Code de procédure civile, qui dispose que « Le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. »

Dans cette affaire, le tribunal a jugé qu’il serait inéquitable de laisser à la charge du maître d’ouvrage les frais qu’ils ont dû engager pour leur défense, en raison de la nature des demandes et de la situation litigieuse. Ainsi, une indemnité de 5.000,00 € a été accordée au titre des frais irrépétibles, tenant compte des frais engagés tant en première instance qu’en appel.

COUR D’APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 11 mars 2025

N° RG 23/01177 – N° Portalis DBVU-V-B7H-GBD4

-PV- Arrêt n° 127

[X] [B], [M] [D] / S.A.S. INTER CONSTRUCTION 03

Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CLERMONT FERRAND, décision attaquée en date du 19 Juin 2023, enregistrée sous le n° 22/02802

Arrêt rendu le MARDI ONZE MARS DEUX MILLE VINGT CINQ

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de :

Mme Céline DHOME, greffier lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

Mme [X] [B]

[Adresse 4]

[Localité 2]

et

M. [M] [D]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentés par Maître François Xavier DOS SANTOS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

APPELANTS

ET :

S.A.S. INTER CONSTRUCTION 03

exerçant sous l’enseigne LES DEMEURES REGIONALES

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Maître Thierry GESSET de la SELARL AUVERJURIS, avocat au barreau de MONTLUCON

Timbre fiscal acquitté

INTIMEE

DÉBATS : A l’audience publique du 13 janvier 2025

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 11 mars 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme DHOME, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant un Contrat de construction de maison individuelle (CCMI) avec fourniture de plans et régularisation du permis de construire conclu sous seing privé le 7 mai 2020, Mme [X] [B] et M. [M] [D] ont confié à la SAS INTER CONSTRUCTION 03, exerçant à l’enseigne DEMEURES RÉGIONALE, la construction d’une maison d’habitation sur une parcelle située [Adresse 5] à [Localité 6] (Puy-de-Dôme). Les parties ont par ailleurs convenu que les maîtres d’ouvrage se chargeaient eux-mêmes réaliser un certain nombre de travaux, notamment l’étanchéité, les garde-corps extérieurs, la main courante de l’escalier intérieur, les peintures, l’assainissement, les raccordements, la pose et la fourniture est sanitaire comprenant la pose et la fourniture d’une baignoire droite, d’une douche italienne et des wc. Ce contrat de construction a été conclu moyennant le prix total de 195.200,00 € outre un volume de travaux à hauteur de 41.390,00 € à la charge du maître d’ouvrage. Ce contrat initial de construction a été suivi de six avenants le 2 septembre 2020, le 8 septembre 2020, le 25 janvier 2021, le 27 juin 2021, le 20 juillet 2021 et le 4 novembre 2021.

Un procès-verbal de réception des travaux a été signé sur le site de construction le 27 juin 2022 dans des conditions aujourd’hui contestées par Mme [B] et M. [D] qui affirment que le représentant de la société INTER CONSTRUCTION 03 aurait refusé de consigner la moindre réserve. Le prix de ce marché de travaux a été entièrement réglé. Le conseil de Mme [B] et M. [D] a adressé le 29 juin 2022 à la société INTER CONSTRUCTION 03 une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, réceptionnée le 30 juin 2022, comprenant notamment une liste de nombreuses réserves avec injonction d’y remédier.

Aucune suite n’ayant été donnée à ce courrier, Mme [B] et M. [D] ont, après avoir fait dresser le 7 juillet 2022 un constat d’huissier de justice sur leurs allégations de désordres de construction et de conformité, assigné le 18 juillet 2022 la société INTER CONSTRUCTION 03 devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand qui, suivant un jugement n° RG-22/02802 rendu le 19 juin 2023, a :

– dit que Mme [B] et M. [D] ont respecté les procédures de dénonciation prévues à l’article L.231-8 du code de la construction et de l’habitation et à l’article 1792-6 du Code civil ;

– débouté Mme [B] et M. [D] de l’intégralité de leurs demandes], ceux-ci ayant réclamé :

* la somme totale de 33.925,27 € au titre de la prise en charge de l’ensemble des travaux de reprise des réserves, outre revalorisation en rapport à la variation de l’indice du coût de la construction entre l’indice du 2ème trimestre 2022 et le dernier indice connu au jour de la décision à intervenir ;

* la somme de 10.343,10 € à titre de remboursement de la retenue de garantie ;

* la somme de 7.500,00 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance et de leurs préjudices financiers ;

* une indemnité de 3.600,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné in solidum Mme [B] et M. [D] à payer au profit de la société INTER CONSTRUCTION 03 une indemnité de 2.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné in solidum Mme [B] et M. [D] aux dépens de l’instance ;

– rappelé l’exécution provisoire de droit de la décision.

Par déclaration formalisée par le RPVA le 19 juillet 2023, le conseil de Mme [B] et M. [D] a interjeté appel du jugement susmentionné, l’appel portant sur le rejet de l’ensemble de leurs demandes et sur leurs condamnations pécuniaires aux frais irrépétibles et aux dépens de l’instance.

‘ Par dernières conclusions d’appelant notifiées par le RPVA le 11 décembre 2024, Mme [X] [B] et M. [M] [D] ont demandé de :

‘ au visa des articles 1792 et suivants du Code civil, notamment de l’article 1792-6 du Code civil, des articles L.231-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation, notamment de l’article L231-8 du code de la construction et de l’habitation, et des articles 1221 et 1222 du Code civil ;

‘ confirmer le jugement du 19 juin 2023 du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand en ce qu’il a jugé qu’ils ont respecté les procédures de dénonciation prévues à l’article L.231-8 du code de la construction et de l’habitation ainsi qu’à l’article 1792-6 du Code civil ;

‘ infirmer ce même jugement dans les limites de leur déclaration d’appel et statuer à nouveau ;

‘ [à titre principal] ;

‘ condamner la société INTER CONSTRUCTION 03 à leur payer :

* la somme totale [actualisée] de 37.201,09 € au titre de la prise en charge de l’ensemble des travaux de reprise des réserves, outre revalorisation en rapport à la variation de l’indice du coût de la construction entre l’indice du 2ème trimestre 2024 et le dernier indice connu au jour de la décision à intervenir ;

* la somme de 10.343,10 € à titre de remboursement de la retenue de garantie ;

* la somme totale de 24.750,00 € [actualisée] à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance et de leurs préjudices financiers ;

‘ à titre subsidiaire, ordonner une mesure d’expertise judiciaire sur les désordres de construction dénoncés, avec mission complète d’usage en la matière ;

‘ [en tout état de cause], condamner la société INTER CONSTRUCTION 03 :

* à leur payer une indemnité de 5000,00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

* au paiement des entiers dépens de l’instance, avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Me François-Xavier Dos Santos, avocat au barreau de Clermont-Ferrand.

‘ Par dernières conclusions d’intimé notifiées par le RPVA le 13 janvier 2025, la SAS INTER CONSTRUCTION 03 (IC 03) a demandé de :

‘ au visa des articles 6 et 9 du code de procédure civile et des articles 1792-6 et suivants du Code civil ;

‘ ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture rendue le 19 décembre 2024 ;

‘ confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

‘ débouter Mme [B] et M. [D] de l’intégralité de leurs réclamations pécuniaires ainsi que de leur demande d’expertise judiciaire ;

‘ condamner Mme [B] et M. [D] à lui payer :

* la somme de 5.000,00 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

* une indemnité de 4.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ condamner Mme [B] et M. [D] aux entiers dépens de l’instance, avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Me Thierry Gesset, avocat au barreau de Montluçon.

Par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, les moyens développés par les parties à l’appui de leurs prétentions sont directement énoncés dans la partie MOTIFS DE LA DÉCISION.

Par ordonnance rendue le 19 décembre 2024, le Conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de cette procédure. Lors de l’audience civile collégiale du 13 janvier 2024 à 14h00, au cours de laquelle cette affaire a été évoquée, chacun des conseils des parties a réitéré et développé ses moyens et prétentions précédemment énoncés. La décision suivante a été mise en délibéré au 11 mars 2024, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1/ Questions préalables

Lors de l’audience de plaidoirie du 13 janvier 2025, le conseil de Mme [B] et M. [D] a exprimé son accord pour déclarer recevables les dernières conclusions d’intimé du 13 janvier 2025 de la société IC 03 et sur le rabat en conséquence de l’ordonnance de clôture. Il y a lieu dans ces conditions de rabattre l’ordonnance de clôture du 19 décembre 2024, de fixer la date de clôture des débats au 13 janvier 2025 et de déclarer dès lors recevables les dernières conclusions du 13 janvier 2025 de la société IC 03.

Il convient de rappeler que la société IC 03 n’a formé aucun appel incident sur le chef de décision de première instance suivant lequel Mme [B] et M. [D] ont respecté les procédure de dénonciation des réserves prévue à l’article L.231-8 du code de la construction et de l’habitation en application de la garantie de parfait achèvement prévue à l’article 1792-6 alinéa 3 du Code civil. La demande formée par ces derniers aux fins de confirmation de ce chef de décision de première instance est donc sans objet.

Sur le point qui précède, la société IC 03 développe dans le corps de ses conclusions d’intimé que la réception prononcée sans réserves le 27 juin 2022 couvrirait l’intégralité des vices apparents en termes de défauts de construction ou de conformité à l’exception des vices cachés alors qu’elle demande dans le dispositif de ces mêmes conclusions de confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions. En application dès lors des dispositions de l’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, suivant lesquelles notamment « La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif [des prétentions] (‘) », il y a lieu d’examiner toutes les réserves, même apparentes, formulées par Mme [B] et M. [D] postérieurement au procès-verbal de réception des travaux sans réserves du 27 juin 2022 dans leur lettre recommandée avec avis demande d’avis de réception du 30 juin 2022, au demeurant récapitulées dans le constat d’huissier de justice ci-après mentionné du 7 juillet 2022.

Par voie de conséquence, les allégations de Mme [B] et M. [D] suivant lesquelles ils auraient signé sous la pression du constructeur le procès-verbal de réception des travaux sans réserves du 27 juin 2022 ainsi que les objections opposées à ce sujet par la société IC 03 sont sans incidence sur la solution du litige, les maîtres d’ouvrage pouvant en tout état de cause bénéficier en matière de garantie de parfait achèvement du délai supplémentaire et du dispositif de formulation de réserves prévus par les dispositions combinées des articles L.231-8 du code de la construction et de l’habitation et 1792-6 alinéa 3 du Code civil. Il convient ici de rappeler que la société IC 03 a acquiescé au jugement de première instance sur ce point.

2/ Sur les réparations

Après avoir récupéré les clés de leur maison d’habitation lors de la réception des travaux du 27 juin 2022, Mme [B] et M. [D] ont fait établir sur leur maison le 7 juillet 2022 un constat d’huissier de justice faisant mention d’un certain nombre de désordres de construction, de conformité et de finition qui reprennent sans différences la liste des griefs exprimés par leur conseil dans la lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée le 29 juin 2022 à la société IC 03, reçue par cette dernière le 30 juin 2022. Ces griefs sont les suivants :

* absence de pose du lambris en PVC blanc en sous-face du porche constituant l’accès au garage en sous-sol ;

* porte-fenêtre accès sous-sol trop haute par rapport à la maçonnerie, celle-ci pénétrant dans la maçonnerie derrière le linteau supérieur de la porte-fenêtre, avec isolant sous dalle en plafond dans le garage découpé à cet endroit pour permettre le passage de la porte ;

* porte sectionnelle d’accès au garage avec moteur électrique situé à droite de la porte et non dans l’axe de la porte, avec par ailleurs le fils d’alimentation du moteur qui pend ;

* escalier d’accès à l’étage ayant une largeur de 101 cm au lieu de la largeur prévue de 90 cm ;

* plusieurs traces noires et de brûlures sur l’aspect extérieur des huisseries des deux baies vitrées de l’espace cuisine/salon/séjour, en leur extrémité en partie basse au niveau des appuis ;

* rayures sur la fenêtre en aluminium au niveau du coin cuisine ;

* visibilité et distension des joints entre les deux battants de la baie vitrée de l’espace cuisine/salon/séjour ;

* traces noirâtres sur la peinture, outre une rayure apparente, sur la porte d’accès au sous-sol ;

* muret d’entourage de la terrasse recouvert d’une couvertine en métal sans joints ou protection entre les plaques de cette couvertine ;

* absence de pente avec présence d’eau stagnante à l’extérieur de la terrasse selon les dires propriétaires ;

* absence de serrure sur la porte donnant vers l’extérieur dans la chambre n° 3 ;

* dégradation au niveau du dormant de la porte d’accès à la chambre n° 3, outre traces noirâtres sur la peinture ;

* nourrices d’alimentation du chauffage réversible non fixées et bougeant fortement dans la chambre n° 1 ;

* porte-fenêtre très sale, comportant des traces de ciment au niveau du seuil, outre porte d’entrée sale et traces noirâtres ainsi que boiseries dégradées dans la chambre n° 2 ;

* à l’extérieur, gouttière est tachée en sa partie basse et bosselée, les gouttières étant de forme rectangulaire et pénétrant dans un dauphin cylindrique sans réduction en liaison entre le dauphin et la gouttière ;

* en périphérie de l’ensemble présence de polyuréthane et de films plastique dépassant de la dalle ;

* absence totale de nettoyage du chantier, du ciment s’étant accumulé sur les seuils des ouvertures et n’ayant pas été retiré.

Mme [B] et M. [D] demandent la reprise d’une partie de ces désordres au titre de la garantie annale de parfait achèvement en application des dispositions de l’article 1792-6 alinéa 2 du Code civil, suivant lesquelles « La garantie de parfait achèvement, à laquelle l’entrepreneur est tenu pendant un délai d’un an, à compter de la réception [des travaux], s’étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception. ». Compte tenu de la chronologie résultant respectivement de la date du 27 juin 2022 de réception des travaux sans réserves et de la date des 29 et 30 juin de formulation et de réception de réserves en application des dispositions spécifiques de l’article L.231-8 du code de la construction, il y a lieu d’examiner le bien-fondé de ces réserves ainsi que l’applicabilité de la garantie annale de parfait achèvement. Cet examen peut dès lors être opéré sur la base du constat d’huissier de justice du 7 février 2022 qui reprend l’ensemble des griefs exprimés par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 29 juin 2022 dans le respect du délai prévu à l’article L.231-8 du code de la construction et de l’habitation, soit moins de huit jours après le procès-verbal de réception des travaux sans réserves du 27 juin 2022.

En l’occurrence, la société IC 03 ne conteste pas totalement la matérialité de ces griefs, organisant en premier lieu sa demande de rejet au fond des prétentions de Mme [B] et M. [D] sur des allégations d’immixtion de ces derniers dans la réalisation de l’ouvrage. À ce sujet, les six avenants conclus le 2 septembre 2020, le 8 septembre 2020, le 25 janvier 2021, le 27 juin 2021, le 20 juillet 2021 et le 4 novembre 2021 ne peuvent en soi, en dépit de leur pluralité et quelle que soit la nature ou les causes des travaux supplémentaires qui ont été convenus et engagés, caractériser une situation d’immixtion du maître de l’ouvrage dans les opérations de construction. De plus, il n’est pas allégué que les incidents d’intervention du maître de l’ouvrage vis-à-vis de trois sous-traitants en matière de cloisons interne, d’électricité et de maçonnerie, relatés dans un courrier de rappel à l’ordre du 6 décembre 2021 du constructeur au maître d’ouvrage, n’aient pas été abandonnés ou n’aient pas été suivis de contractualisations sous forme d’avenants. Par ailleurs, la société IC 03 ne précise pas la nature et les circonstances d’autres interventions qui pourraient être fautives en termes d’immixtion du maître de l’ouvrage indépendamment de la formalisation des avenants dont il importe peu en définitive de déterminer s’ils relèvent de comportements le cas échéant versatiles du maître de l’ouvrage dès lors qu’ils ont été dûment contractualisés entre les parties. La société IC 03 ne précise enfin aucunement si elle a accepté ou non la proposition de M. [D] ou si elle a été perturbée par cette proposition dans la technologie employée pour la réalisation du plancher de la terrasse, ce fait apparaissant dès lors sans incidence sur ses imputations d’immixtion du maître de l’ouvrage.

En tout état de cause, une partie de ces désordres de construction, de non-conformité ou de non-finition dont il est demandé réparation apparaissent effectivement caractérisés en lecture, non pas des simples clichés photographiques ayant été présentés en première instance par Mme [B] et M. [D] mais du procès-verbal de constat d’huissier de justice qu’ils ont fait réaliser le 7 juillet 2022, ce constat d’officier ministériel reprenant les réserves dûment communiquées dans le respect du délai des articles L.231-8 du code de la construction et de l’habitation et 1792-6 du Code civil par courrier précité du 29 juin 2022 du conseil de ces derniers. S’il y a lieu effectivement de s’étonner que ce constat d’huissier de justice n’ait pas été produit en première instance, il n’en demeure pas moins que cet acte d’officier ministériel fait foi jusqu’à inscription de faux sur l’ensemble des désordres constatés. La société IC 03 ne disconvient d’ailleurs pas de la force probatoire de ce document nouvellement produit en cause d’appel. Tous les constats effectués visuellement par cet officier ministériel, simplement factuels et exclusifs de toute immixtion technique, apparaissent donc conformes à la réalité des réserves exprimées par Mme [B] et M. [D] en réception des travaux litigieux et donnant lieu à demandes de réparation, à l’exception de l’allégation d’absence de pente avec présence d’eau stagnante à l’extérieur de la terrasse qui ne repose que sur des dires transmis à l’huissier de justice par les maîtres de l’ouvrage.

En ce qui concerne la réparation de ces préjudices relevant de la garantie de parfait achèvement, il convient en lecture de ce constat d’huissier de justice et des devis d’entreprises produits par Mme [B] et M. [D] de se prononcer dans les conditions suivantes :

– demande de prise en charge au titre du nettoyage des lieux à hauteur de 534,00 € devant être rejetée, faute de communication d’un devis à ce sujet ;

– demande de remplacement des menuiseries extérieures en aluminium avec reprise des plâtreries concernant deux coulissants à deux vantaux, une porte-fenêtre à deux vantaux et une porte-fenêtre à un vantail, sur la base d’un devis ISO AUVERNE du 17 janvier 2024 pour un montant total de 24.549,60 € TTC, effectivement nécessaire pour remplacer les deux baies vitrées comportant notamment des traces de brûlures sur leur aspect extérieur et la porte-fenêtre à deux vantaux du sous-sol, sans nécessité toutefois de travaux de reprise en ce qui concerne la porte-fenêtre à un vantail qui ne fait l’objet d’aucun renseignement de dégradation ou de non-conformité d’installation dans le constat d’huissier de justice, ce qui amène à arbitrer ce poste de demande à la somme de 20.458,00 € HT dont à déduire la somme de 5.912,00 € HT, soit la somme totale de 14.546,00 € HT, outre TVA applicable ;

– demande de reprise de la chape, des solins et des crépis, sur la base d’un devis EURL MAÇONNERIE VIEIRA du 9 janvier 2024 pour un montant total de 3.174,00 € devant être rejetée, faute de constatations sur ces postes de chantier dans le constat d’huissier de justice ;

– demande de reprise de l’étanchéité de la toiture, sur la base d’un devis ÉTANCHEURS AUVERGNATS du 8 janvier 2024 pour un montant total de 8.943,49 € TTC, devant être rejetée, faute de constatation de problèmes d’étanchéité au niveau de la toiture accessible.

Dans ces conditions la réparation du préjudice au titre de la garantie de parfait achèvement sera fixée à la somme totale de 14.546,00 € HT, outre TVA applicable et application du dispositif d’indice sur le coût de la construction, les autres chefs de demande devant être rejetés pour les motifs précédemment énoncés.

Le jugement de première instance sera dès lors infirmé en ce qu’il a débouté Mme [B] et M. [D] de l’intégralité de leurs demandes.

3/ Sur les autres demandes

Les réparations obtenues partiellement par Mme [B] et M. [D] en ce qui concerne leurs préjudices allégués en matière de garantie de parfait achèvement donnant lieu à des indemnisations pécuniaires et non à des obligations d’exécution en nature des travaux de reprise, la demande tendant à obtenir le remboursement de la retenue de 5 % du montant du marché à hauteur de la somme de 10.343,10 € sera rejetée.

En conséquence les motifs qui précèdent à titre principal, la demande d’expertise judiciaire formée à titre subsidiaire par Mme [B] et M. [D] devient sans objet.

Le préjudice de jouissance, indéniable dans son principe et dans sa durée, doit être arbitré à la somme de 8.000,00 €, étant précisé que l’allégation de préjudice financier qui lui est adjoint ne donner lieu à aucune proposition de décompte récapitulatif de créance et sera donc rejetée.

Il serait effectivement inéquitable, au sens des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, de laisser à la charge de Mme [B] et M. [D] les frais irrépétibles qu’ils ont été contraints d’engager à l’occasion de cette instance d’appel et qu’il convient d’arbitrer à la somme de 5.000,00 €, en tenant compte également des frais afférents à la procédure de première instance.

Enfin, succombant à l’instance, la société IC 03 sera purement et simplement déboutée de sa demande de dommages-intérêts en allégation de procédure abusive ainsi que de sa demande de défraiement formée au visa de l’article 700 du code procédure civil et en supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

ORDONNE le rabat l’ordonnance de clôture des débats du 19 décembre 2024.

FIXE la clôture des débats au 13 janvier 2025.

DÉCLARE RECEVABLES les dernières conclusions d’intimé notifiées par le RPVA le 13 janvier 2025 par la SAS INTER CONSTRUCTION 03.

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement n° RG-22/02802 rendu le 19 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand.

Statuant de nouveau.

CONDAMNE la SAS INTER CONSTRUCTION 03 à payer au profit de Mme [X] [B] et M. [M] [D] les sommes suivantes :

– 14.546,00 € HT, outre TVA applicable au jour du paiement, en réparation de leur préjudice de travaux de reprise relevant de la garantie de parfait achèvement au titre des travaux susmentionnés, avec revalorisation en rapport avec la variation de l’indice du coût de la construction entre l’indice du 2ème trimestre 2024 et le dernier indice connu au jour de la présente décision ;

– 8.000,00 €, en réparation de leur préjudice de jouissance ;

CONDAMNE la SAS INTER CONSTRUCTION 03 à payer au profit de Mme [X] [B] et M. [M] [D] une indemnité de 5.000,00 €, en dédommagement de leurs frais irrépétibles prévus à l’article 700 du code de procédure civile.

REJETTE le surplus des demandes des parties.

CONDAMNE la SAS INTER CONSTRUCTION 03 aux entiers dépens de l’instance avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Me François-Xavier Dos Santos, avocat au barreau de Clermont-Ferrand.

Le greffier Le président


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