Radiation et exécution : enjeux d’une saisie contestée

·

·

Radiation et exécution : enjeux d’une saisie contestée

L’Essentiel : La société BPCE Factor a interjeté appel d’un jugement du 15 mars 2023 condamnant la société Viaren à lui verser une somme d’argent. Viaren a ensuite demandé la radiation de l’affaire, arguant que BPCE Factor n’avait pas exécuté le jugement. En réponse, BPCE Factor a affirmé que le jugement du 12 octobre 2022 était définitif et que la saisie en exécution avait été effectuée. Le tribunal a constaté que le jugement du 15 mars 2023 avait annulé la condamnation de Viaren, entraînant la restitution des sommes saisies, et a ordonné la radiation de l’affaire.

Contexte de l’affaire

La société BPCE Factor a interjeté appel d’un jugement rendu le 15 mars 2023, en lien avec une condamnation de la société Viaren à lui verser une somme d’argent. Ce jugement a été précédé d’une décision du Tribunal de commerce de Paris datée du 12 octobre 2022, qui avait déjà condamné la société Viaren à verser 166 950,83 euros à BPCE Factor.

Demandes de la société Viaren

Dans ses conclusions notifiées le 2 mai 2024, la société Viaren a soulevé un incident aux fins de radiation de l’affaire, arguant que BPCE Factor n’avait pas exécuté le jugement du 15 mars 2023. Viaren a demandé la radiation du rôle de l’affaire, le déboutement de BPCE Factor de toutes ses demandes, ainsi qu’une condamnation de BPCE Factor à verser 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Réponse de la société BPCE Factor

En réponse, BPCE Factor a soutenu, dans ses conclusions du 5 juin 2024, que le jugement du 12 octobre 2022 était définitif et que la condamnation de Viaren n’avait pas été annulée par le jugement du 15 mars 2023. BPCE Factor a également affirmé avoir effectué une saisie en exécution de ce jugement et a demandé le déboutement de Viaren de sa demande de radiation, ainsi qu’une condamnation de Viaren à verser 5 000 euros au titre de l’article 700.

Motifs de la décision

Le tribunal a constaté que BPCE Factor avait effectivement pratiqué une saisie en exécution du jugement du 12 octobre 2022. Cependant, il a également noté que le jugement du 15 mars 2023 avait retiré la condamnation de Viaren à verser la somme à BPCE Factor, ce qui a conduit à l’obligation de restitution des sommes saisies. En conséquence, le tribunal a décidé de faire droit à la demande de radiation de l’affaire.

Dispositif final

Le conseiller de la mise en état a ordonné la radiation de l’affaire, précisant que le rétablissement au rôle pourrait intervenir après justification de l’exécution du jugement déféré. BPCE Factor a été condamnée aux dépens, et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ont été rejetées.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les implications de l’article 524 du code de procédure civile dans le cadre de l’appel ?

L’article 524 du code de procédure civile stipule que lorsque l’exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou le conseiller de la mise en état peut, à la demande de l’intimé, décider de la radiation du rôle de l’affaire si l’appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d’appel.

Cet article précise que cette radiation peut être ordonnée après avoir recueilli les observations des parties.

Il est également mentionné que l’appelant peut éviter cette radiation en prouvant qu’il a exécuté la décision ou qu’il a procédé à la consignation autorisée selon les conditions prévues à l’article 521.

En l’espèce, la société BPCE Factor a été confrontée à une demande de radiation en raison de son incapacité à justifier l’exécution du jugement du 15 mars 2023, ce qui a conduit à la décision de radiation.

Comment le jugement du 15 mars 2023 affecte-t-il les droits de la société BPCE Factor ?

Le jugement du 15 mars 2023 a pour effet de retirer du dispositif du jugement du 12 octobre 2022 toutes les mentions n’ayant pas trait au sursis à statuer, y compris la condamnation de la société Viaren à verser à la société BPCE Factor la somme de 166 950,83 euros.

Ce jugement constitue un titre exécutoire qui oblige la société BPCE Factor à restituer les sommes qu’elle a perçues en exécution du jugement antérieur.

Ainsi, la société BPCE Factor, bien qu’elle ait initialement saisi des fonds sur la base d’un titre exécutoire, se trouve dans l’obligation de restituer ces sommes suite à la décision du tribunal de commerce.

Cela illustre comment un jugement modificatif peut avoir des conséquences significatives sur les droits des parties, en particulier en matière d’exécution des décisions judiciaires.

Quelles sont les conséquences de la décision de radiation sur les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ?

L’article 700 du code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement de ses frais d’instance, lorsque la justice a été saisie.

Cependant, dans le cas présent, le tribunal a décidé de rejeter les demandes au titre de cet article, en considérant que l’équité commandait un tel rejet.

Cela signifie que, malgré les demandes formulées par la société Viaren et la société BPCE Factor, aucune des parties n’a été indemnisée pour les frais engagés dans le cadre de cette procédure.

Cette décision souligne l’importance de la situation de chaque partie dans le cadre de l’affaire, et comment les circonstances peuvent influencer l’octroi de frais d’instance, même lorsque la demande est fondée sur un article législatif.

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

N° RG 23/18664 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CIR34

Nature de l’acte de saisine : Déclaration d’appel valant inscription au rôle

Date de l’acte de saisine : 22 Novembre 2023

Date de saisine : 06 Décembre 2023

Nature de l’affaire : Demande en paiement relative à un autre contrat

Décision attaquée : n° 2022052048 rendue par le Tribunal de Commerce de Paris le 15 Mars 2023

Appelante :

S.A. BPCE FACTOR, représentée par Me Florent LOYSEAU DE GRANDMAISON, avocat au barreau de PARIS, toque : E2146

Intimée :

S.A.S. VIAREN représentée par son représentant légal représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020 – N° du dossier 22448821

ORDONNANCE SUR INCIDENT

DEVANT LE MAGISTRAT CHARGÉ DE LA MISE EN ÉTAT

(n° , 2 pages)

Nous, Marilyn RANOUX-JULIEN, magistrat en charge de la mise en état,

Assistée de Mianta ANDRIANASOLONIARY, greffière,

Par jugement du 12 octobre 2022, le tribunal de commerce de Paris a :

‘Débouté la société Viaren de sa demande de sursis à statuer,

‘Condamné la société Viaren à régler à la société BPCE Factor la somme de 166 950,83 euros, majorée des intérêts légaux à compter du 3 février 2021, date de la mise en demeure avec anatocisme,

‘Condamné la société Viaren à verser la somme de 2.000 euros à la société BPCE Factor au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

‘Débouté les Parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

‘Condamné la société Viaren aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquides à la somme de 70,86 euros dont 11,60 euros de TVA.

Ce jugement a été signifié à la Société Viaren le 18 octobre 2022.

Le 27 octobre 2022, la société Viaren a déposé auprès du tribunal de commerce une requête en retranchement du jugement.

La société Viaren a par ailleurs interjeté appel du jugement par déclaration du 23 décembre 2022, avant de s’en désister.

Par jugement du 15 mars 2023, le tribunal de commerce, au visa de l’article 464 du code de procédure civile, a :

Dit qu’il convenait de rectifier le jugement prononcé le 12 octobre 2022, en modifiant le dispositif :

‘Débouté la société Viaren de sa demande de sursis à statuer,

‘Renvoyé la cause au fond à l’audience collégiale du 11 avril 2023 à 14 heures, sur convocation préalables et individuelles du greffe,

‘Réservé l’article 700 du code de procédure civile,

‘Réservé les dépens,

‘Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration enregistrée le 6 décembre 2023, la société BPCE Factor a interjeté appel du jugement.

Par conclusions notifiées par RPVA le 2 mai 2024, la Société Viaren a soulevé un incident aux fins de radiation.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 6 novembre 2024, la société Viaren demande, au visa de l’article 524 du code de procédure civile, de :

Juger que la société BPCE Factor n’a pas exécuté le jugement du 15 mars 2023 dont elle a formé appel ;

Prononcer en conséquence la radiation du rôle de l’affaire ;

Débouter la société BPCE Factor de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Condamner la société BPCE Factor à verser la somme de 2 000 euros à la société Viaren au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 5 juin 2024, la société BPCE Factor demande, au visa des articles 5, 463, 464, 481 et 524 du code de procédure civile, de :

Constater que le jugement rendu le 12 octobre 2022 par le Tribunal de commerce de Paris est définitif ;

Constater que la condamnation de la société Viaren à verser à la société BPCE Factor la somme de

166 950,83 euros en principal n’a pas été supprimée par la décision modificative du 15 mars 2023 ;

Constater que la société BPCE Factor a saisi les sommes en exécution du jugement du 12 octobre 2022 et n’est pas tenue de les restituer à la société Viaren ;

En conséquence :

Débouter la société Viaren de sa demande de radiation de rôle de l’affaire ;

Débouter la société Viaren de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Renvoyer l’affaire devant la cour d’appel de Paris statuant au fond de l’appel interjeté par la société BPCE Factor à l’encontre du jugement de retranchement rendu le 15 mars 2023 par le tribunal de commerce de Paris.

En tout état de cause :

Condamner la Société Viaren au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens.

MOTIFS

En vertu de l’article 524 du code de procédure civile, lorsque l’exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu’il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d’appel, décider, à la demande de l’intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l’affaire lorsque l’appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d’appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l’article 521, à moins qu’il lui apparaisse que l’exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l’appelant est dans l’impossibilité d’exécuter la décision.

En l’espèce, il est constant que la société BPCE Factor a fait pratiquer en exécution du jugement du 12 octobre 2022 une saisie attribution signifiée le 8 décembre 2022 qui a permis d’appréhender un montant total de 169 021,69 euros.

La société BPCE Factor soutient que le dispositif du jugement du 15 mars 2023 ne supprime pas la condamnation de la société Viaren à lui verser 166 950,83 euros. Elle affirme avoir fait pratiquer la saisie sur le fondement d’un titre exécutoire et que le jugement du 15 mars 2023 ne peut avoir pour effet de porter atteinte à ses droits reconnus par la décision du 12 octobre 2022, devenue définitive. Elle ajoute que la société Viaren multiplie les moyens de défense dans un but dilatoire, afin de se soustraire à ses obligations.

Cependant, par son jugement de retranchement du 15 mars 2023, le tribunal de commerce a retiré du dispositif du jugement du 12 octobre 2022 toutes les mentions n’ayant pas trait au sursis à statuer, dont la condamnation de la société Viaren à verser à la société BPCE Factor la somme de 166 950,83 euros.

Ce jugement du 15 mars 2023 constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement. Il est exécutoire par provision, et entraîne pour la société BPCE Factor l’obligation de restituer la somme appréhendée.

Il sera en conséquence fait droit à la demande de radiation, étant observé que le rétablissement au rôle pourra intervenir après justification de l’exécution du jugement déféré.

La société BPCE Factor sera condamnée aux dépens.

L’équité commande de rejeter les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

DISPOSITIF

Par ces motifs, le conseiller de la mise en état :

Statuant par mesure d’administration judiciaire ;

– Ordonne la radiation de l’affaire ;

– Rappelle que le rétablissement au rôle pourra intervenir après justification de l’exécution du jugement déféré.

– Condamne la société BPCE Factor aux dépens ;

– Rejette les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ordonnance rendue par Marilyn RANOUX-JULIEN, magistrat en charge de la mise en état assisté de Mianta ANDRIANASOLONIARY, greffier, présente lors du prononcé de l’ordonnance au greffe de la cour.

Paris, le 16 janvier 2024

Le greffier Le magistrat en charge de la mise en état


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon