Prorogation des délais et irrecevabilité de la saisine : rappel des règles procédurales.

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Prorogation des délais et irrecevabilité de la saisine : rappel des règles procédurales.

Règle de droit applicable

La contestation des honoraires d’un avocat est régie par les dispositions des articles 175 et 176 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991. Selon l’article 175, toute réclamation relative aux honoraires doit être soumise au bâtonnier par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le bâtonnier a un délai de quatre mois pour statuer sur cette réclamation, délai qui peut être prorogé d’une durée maximale de quatre mois par décision motivée. La décision du bâtonnier doit être notifiée aux parties dans un délai de quinze jours, et cette notification doit mentionner les modalités de recours, à peine de nullité.

Conditions de recours

L’article 176 précise que la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, qui doit être saisi par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans un délai d’un mois. Si le bâtonnier n’a pas pris de décision dans les délais impartis, la partie concernée doit également saisir le premier président dans le mois suivant l’expiration de ce délai.

Irrecevabilité de la saisine

Dans le cas présent, M. [G] a été informé de la décision du bâtonnier le 21 février 2024, et sa saisine directe de la première présidente le 11 mars 2024 est déclarée irrecevable. Cette irrecevabilité est fondée sur le fait que M. [G] n’a pas exercé le recours prévu contre la décision du bâtonnier, qui avait été rendue dans le délai légal. Ainsi, la seule voie de contestation ouverte à M. [G] était celle du recours contre la décision ordinale, qu’il n’a pas utilisée.

Conséquences juridiques

En conséquence, la demande de M. [G] est déclarée irrecevable pour défaut de droit d’agir, ce qui entraîne sa condamnation aux dépens de la présente instance. Cette situation souligne l’importance de respecter les procédures et délais prévus par la réglementation en matière de contestation des honoraires d’avocat.

L’Essentiel : La contestation des honoraires d’un avocat doit être soumise au bâtonnier par lettre recommandée. Ce dernier a quatre mois pour statuer, délai prorogeable. La décision doit être notifiée dans les quinze jours, mentionnant les modalités de recours. Si le bâtonnier ne décide pas dans les délais, un recours peut être fait auprès du premier président de la cour d’appel dans un mois. M. [G] a été informé le 21 février 2024, mais sa saisine du 11 mars 2024 est irrecevable.
Résumé de l’affaire : En août 2022, un acheteur a sollicité les services d’un avocat pour défendre ses intérêts dans une procédure judiciaire ouverte devant un juge d’instruction. Aucune convention d’honoraires n’a été établie entre l’acheteur et l’avocat. Le 14 juin 2023, l’acheteur a contesté les honoraires auprès du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon. Le 14 février 2024, le bâtonnier a rendu une décision qui a débouté l’acheteur de sa demande de réduction des honoraires, fixant le montant dû à 1800 € TTC, somme que l’acheteur a déjà versée.

Le 11 mars 2024, l’acheteur a saisi la première présidente de la cour d’appel de Lyon, arguant qu’il n’avait pas reçu de réponse du bâtonnier dans le délai imparti. Lors de l’audience du 12 novembre 2024, les parties ont présenté leurs observations, notamment sur la question de l’irrecevabilité de la saisine directe de la cour d’appel par l’acheteur, étant donné que la décision du bâtonnier avait été notifiée dans les délais légaux.

L’acheteur a exprimé son intention d’envisager d’autres actions contre l’avocat si sa contestation n’était pas examinée. L’avocat a soutenu que la saisine de la cour d’appel était irrecevable, car la décision du bâtonnier avait été rendue dans le délai prévu et notifiée à l’acheteur. Sur le fond, l’acheteur a demandé le remboursement intégral de la provision versée, arguant que le travail de l’avocat avait été insuffisant et qu’il avait abandonné le dossier sans préavis.

L’avocat a, quant à lui, justifié son travail en indiquant qu’il avait consacré un temps significatif à la préparation du dossier et à la communication avec l’acheteur. En conclusion, le délégué de la première présidente a déclaré la demande de l’acheteur irrecevable et l’a condamné aux dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le cadre juridique de la contestation des honoraires d’un avocat ?

La contestation des honoraires d’un avocat est régie par le décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, notamment par l’article 175 qui précise que les réclamations doivent être soumises au bâtonnier par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise contre récépissé.

Le bâtonnier doit accuser réception de la réclamation et informer l’intéressé que, faute de décision dans un délai de quatre mois, il pourra saisir le premier président de la cour d’appel dans un délai d’un mois.

Il est également stipulé que le bâtonnier, ou le rapporteur qu’il désigne, doit recueillir les observations de l’avocat et de la partie avant de prendre sa décision dans les quatre mois. Cette décision doit être notifiée dans les quinze jours suivant sa date, en mentionnant les modalités de recours.

Quel est le délai de recours contre la décision du bâtonnier ?

Le délai de recours contre la décision du bâtonnier est prévu par l’article 176 du même décret, qui stipule que la décision est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel.

Ce recours doit être effectué par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans un délai d’un mois. Si le bâtonnier n’a pas pris de décision dans les délais prévus à l’article 175, le premier président doit être saisi dans le mois qui suit.

Dans le cas présent, le bâtonnier a rendu sa décision dans le délai imparti, et la notification a été faite à M. [G] le 21 février 2024. Par conséquent, le délai de recours était d’un mois à compter de cette notification.

Quel est l’impact de la notification de la décision du bâtonnier sur la saisine de la cour d’appel ?

La notification de la décision du bâtonnier a un impact direct sur la possibilité de saisir la cour d’appel. En effet, comme le stipule l’article 175, la décision du bâtonnier doit être notifiée à la partie concernée, et à partir de cette notification, la partie a un mois pour contester cette décision.

Dans le cas présent, M. [G] a été notifié de la décision le 21 février 2024 et a saisi la première présidente de la cour d’appel le 11 mars 2024, soit après avoir pris connaissance de la décision.

Cela entraîne l’irrecevabilité de sa demande, car il aurait dû exercer son recours contre la décision du bâtonnier plutôt que de saisir directement la cour d’appel.

Quel est le fondement de l’irrecevabilité de la demande de contestation des honoraires ?

L’irrecevabilité de la demande de contestation des honoraires repose sur le fait que M. [G] a saisi la cour d’appel après avoir été informé de la décision du bâtonnier, ce qui constitue un défaut de droit d’agir.

L’article 175 du décret précise que la seule voie de contestation ouverte à M. [G] était le recours contre la décision ordinale du bâtonnier, qu’il ne justifie pas avoir exercé.

Ainsi, la saisine directe de la première présidente, opérée après la notification de la décision, est déclarée irrecevable, car elle ne respecte pas les procédures établies par le décret.

Quels sont les effets de la décision sur les dépens ?

La décision de la cour d’appel a également des conséquences sur les dépens, qui sont les frais de justice. Selon le principe général, la partie qui succombe dans ses prétentions doit supporter les dépens de l’instance.

Dans ce cas, M. [G], ayant vu sa demande déclarée irrecevable, est condamné à supporter les dépens de la présente instance. Cela signifie qu’il devra payer les frais engagés par la procédure, ce qui est une conséquence classique en matière de contentieux.

N° R.G. Cour : N° RG 24/02222 – N° Portalis DBVX-V-B7I-PRF3

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DU 11 Mars 2025

contestations

d’honoraires

DEMANDEUR :

M. [K] [G]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant

DEFENDEUR :

Me [O] [N]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Catherine BOURGADE (toque 118)

Audience de plaidoiries du 12 Novembre 2024

DEBATS : audience publique du 12 Novembre 2024 tenue par Marianne LA MESTA, Conseillère à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 septembre 2024, assistée de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée le 11 Mars 2025 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;

signée par Marianne LA MESTA, Conseillère et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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EXPOSE DU LITIGE

En août 2022, M. [K] [G] a pris attache avec Maître [O] [N] pour assurer la défense de ses intérêts en tant que partie civile dans le cadre d’une procédure d’information ouverte devant un juge d’instruction du tribunal judiciaire de Lyon.

Aucune convention d’honoraires n’a été régularisée entre les parties.

Par déclaration enregistrée le 14 juin 2023, M. [G] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon d’une demande de contestation d’honoraires.

Celui-ci, par décision du 14 février 2024, notifiée à M. [G] par lettre recommandée dont l’avis de réception a été signé le 21 février 2024, a :

– débouté M. [G] de ses prétentions visant à réduire le montant des honoraires réglés,

– fixé le montant des honoraires dus par M. [G] à Me [N] à la somme de 1800 € TTC,

– constaté que la somme a été versée en totalité par M. [G] à Me [N].

Suivant courrier recommandé du 11 mars 2024, reçu au greffe le 12 mars 2024, M. [G] a saisi la première présidente de la cour d’appel de Lyon pour qu’elle statue sur sa réclamation, en faisant valoir qu’il n’a reçu aucune réponse de la part du bâtonnier au 14 février 2024, date qui correspond à l’expiration du délai pour rendre sa décision après prorogation.

A l’audience du 12 novembre 2024, devant le délégué de la première présidente, les parties s’en sont remises à leurs écritures, qu’elles ont soutenues oralement après avoir été invitées à faire valoir leurs observations sur le moyen soulevé d’office par le conseiller tenant à l’irrecevabilité de la saisine directe de la première présidente par M. [G] compte tenu de ce que la décision du bâtonnier a été rendue dans le délai prévu par l’article 175 du décret et qu’elle a été portée à sa connaissance le 21 février 2024.

M. [G] n’a pas émis d’observations particulières sur cette fin de non-recevoir, sauf à préciser qu’il envisagera d’autres actions à l’encontre de Me [N] si sa contestation n’est pas examinée en raison de cette difficulté juridique.

Me Bourgade, conseil de Me [N], a indiqué qu’il y avait effectivement lieu de retenir l’irrecevabilité de la saisine directe de la première présidente opérée le 11 mars 2024 par M. [G] puisque le bâtonnier a statué sur sa contestation le 14 février 2024 et que la décision lui a été notifiée le 21 février suivant.

Sur le fond, dans son courrier précité, complété par un mémoire transmis au greffe le 21 septembre 2024, M. [G] sollicite le remboursement intégral de la provision versée à Me [N], soit 1.800 € TTC, en raison de l’insuffisance de son travail et de ses manquements professionnels.

Il estime ainsi que le travail sur son dossier et le suivi de l’affaire effectués par Me [N] ont été trop indigents pour justifier de conserver la provision versée, ce d’autant que ce dernier a abandonné son dossier en cours de route sans l’avertir à compter de fin décembre 2022, de sorte qu’il a été contraint de chercher un autre avocat pour le remplacer, la révocation étant intervenue le 31 janvier 2023.

Il soutient en particulier que lors du deuxième entretien du 28 octobre 2022, il a eu la désagréable impression que Me [N] n’avait pas examiné le dossier. Il précise également n’avoir jamais reçu le compte-rendu dudit entretien alors qu’il l’a réclamé plusieurs fois. Il a constaté qu’il n’y en avait aucune trace dans les pièces justificatives envoyées par Me [N] au bâtonnier, mais s’est en revanche aperçu que celui-ci s’est contenté de communiquer l’exacte copie du compte-rendu réalisé par Me [U], l’avocat de son ex-épouse, avec les mêmes fautes de frappe, ce qui établit que tout le travail a été fait en amont par ce dernier et que Me [N] s’est contenté de facturer tout ce qu’il pouvait, même un échange informel avec le juge ou les échanges téléphoniques avec lui-même, sans fournir un quelconque effort d’analyse du dossier ni formuler une seule demande d’acte. Il relève encore qu’il n’a pas non plus été informé du rapport balistique déposé chez la juge d’instruction ni du délai de 15 jours à respecter pour apporter des remarques, ce qui l’a empêché de pouvoir émettre toutes les critiques nécessaires.

Dans son mémoire déposé au greffe le 30 octobre 2024, Me [N] demande au délégué de la première présidente de confirmer la décision du bâtonnier.

Il expose que trois rendez-vous ont eu lieu avec son client M. [G] pour lui expliquer les enjeux de la procédure ainsi que ses droits, pour évoquer le contenu du dossier et préparer son audition de partie, puis pour l’informer des derniers développements de l’affaire.

Il évalue à une douzaine d’heures au total le temps consacré aux diligences réalisées avant son dessaisissement, outre une heure trente pour son secrétariat interne, celles-ci ayant principalement consisté à régulariser une constitution de partie civile, se rendre à plusieurs reprises au cabinet du juge d’instruction afin de prendre des notes détaillées sur le dossier suite au refus du magistrat de lui en délivrer une copie, en rendre compte à M. [G] lors d’un entretien le 28 octobre 2022 à l’occasion duquel il a également préparé ce dernier à son audition de partie civile programmée le 21 novembre suivant. Il précise avoir ensuite évoqué avec M. [G] la raison pour laquelle il lui était finalement impossible de l’assister lors de cette audition et assure que la décision de se faire substituer par Me [U] a été prise d’un commun accord avec ce dernier.

Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux mémoires et courriers régulièrement déposés ci-dessus visés.

MOTIFS

L’article 175 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 énonce que ‘les réclamations sont soumises au bâtonnier par toutes parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise contre récépissé. Le bâtonnier accuse réception de la réclamation et informe l’intéressé que, faute de décision dans le délai de quatre mois, il lui appartiendra de saisir le premier président de la cour d’appel dans le délai d’un mois.

L’avocat peut de même saisir le bâtonnier de toute difficulté.

Le bâtonnier, ou le rapporteur qu’il désigne, recueille préalablement les observations de l’avocat et de la partie. Il prend sa décision dans les quatre mois. Cette décision est notifiée, dans les quinze jours de sa date, à l’avocat et à la partie, par le secrétaire de l’ordre, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La lettre de notification mentionne, à peine de nullité, le délai et les modalités du recours.

Le délai de quatre mois prévu au troisième alinéa peut être prorogé dans la limite de quatre mois par décision motivée du bâtonnier. Cette décision est notifiée aux parties, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dans les conditions prévues au premier alinéa.’

L’article 176 du décret précité prévoit quant à lui que ‘la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, qui est saisi par l’avocat ou la partie, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le délai de recours est d’un mois.

Lorsque le bâtonnier n’a pas pris de décision dans les délais prévus à l’article 175, le premier président doit être saisi dans le mois qui suit.’

En l’occurrence, il y a lieu d’observer que par courrier recommandé du 12 octobre 2023, dont M. [G] a accusé réception le 13 octobre 2023, le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon a informé ce dernier qu’il prorogeait de 4 mois le délai pour rendre sa décision et que ledit délai expirerait en conséquence le 14 février 2024, précisant à cette occasion qu’à défaut de décision rendue d’ici cette date, M. [G] avait la faculté de saisir le premier président de la cour d’appel de Lyon de sa réclamation dans le délai d’un mois conformément à l’article 175 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.

Or, M. [G] ne discute pas le fait que la décision rendue par le bâtonnier le 14 février 2024, soit dans le délai qui lui était imparti pour statuer en application de l’article 175 précité, lui a régulièrement été notifiée au moyen d’une lettre recommandée, dont il a signé l’avis de réception le 21 février 2024.

Sa saisine directe de la première présidente, opérée le 11 mars 2024 soit après avoir pris connaissance de la décision du bâtonnier, doit en conséquence être déclarée irrecevable pour défaut de droit d’agir, puisque la seule voie de contestation qui lui était alors ouverte était le recours à l’encontre de cette décision ordinale, dont il ne peut qu’être constaté qu’il ne justifie pas en avoir fait usage.

M. [V], qui succombe devra supporter les dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

Le délégué de la première présidente, statuant publiquement et par ordonnance contradictoire,

Déclare irrecevable la demande formée le 11 mars 2024 par M. [K] [G] en contestation des honoraires de Me [O] [N],

Condamne M. [K] [G] aux dépens.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


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