Prolongation de la rétention administrative : conditions et garanties insuffisantes pour une assignation à résidence.

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Prolongation de la rétention administrative : conditions et garanties insuffisantes pour une assignation à résidence.

Recevabilité de l’appel

L’appel est recevable conformément aux articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui précisent les conditions de forme et de délai pour la formation d’un appel en matière de rétention administrative.

Compétence du signataire de la requête

L’article R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile impose que la déclaration d’appel soit motivée, sous peine d’irrecevabilité. La simple mention de la compétence du signataire de la requête ne constitue pas une motivation suffisante, à moins que l’appelant ne prouve l’irrégularité alléguée par des éléments circonstanciés.

Diligences de l’administration

Selon l’article L. 741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, et l’administration doit exercer toute diligence à cet effet. L’accord bilatéral de 2005 entre la France et l’Albanie permet le retour d’un ressortissant albanais avec une simple carte d’identité, ce qui justifie les démarches effectuées par l’administration.

Assignation à résidence judiciaire

L’article L. 743-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile stipule que le juge peut ordonner l’assignation à résidence d’un étranger s’il dispose de garanties de représentation effectives. Toutefois, en l’absence de telles garanties, notamment en raison de précédentes obligations de quitter le territoire non respectées, la demande d’assignation à résidence ne peut être acceptée.

L’Essentiel : L’appel est recevable selon les articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11, qui précisent les conditions de forme et de délai. La déclaration d’appel doit être motivée, la simple mention de la compétence du signataire ne suffisant pas. Un étranger ne peut être maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, et l’administration doit agir avec diligence. Le juge peut ordonner l’assignation à résidence si des garanties de représentation effectives sont présentes.
Résumé de l’affaire : Dans l’affaire N° RG 25/00273, un étranger de nationalité albanaise a été placé en rétention administrative par le préfet de l’Aube. Ce dernier a pris cette décision en raison de la situation irrégulière de l’individu sur le territoire français. L’intéressé a contesté cette décision en introduisant un recours en annulation, arguant que les conditions de sa rétention n’étaient pas justifiées.

Le préfet a ensuite saisi le tribunal judiciaire de Metz pour demander la prolongation de la rétention. Le juge a rendu une ordonnance le 18 mars 2025, rejetant la demande d’annulation de l’étranger et prolongeant sa rétention jusqu’au 11 avril 2025. En réponse, une association, agissant pour le compte de l’étranger, a interjeté appel de cette décision.

Lors de l’audience, l’étranger, assisté d’un avocat et d’un interprète, a présenté ses observations. Le préfet, représenté par son avocat, a demandé la confirmation de l’ordonnance initiale. L’appel a été jugé recevable, mais la contestation de la compétence du signataire de la requête a été déclarée irrecevable, car l’appelant n’a pas fourni de motivation suffisante.

Concernant les diligences de l’administration, l’étranger a soutenu que celle-ci n’avait pas pris les mesures nécessaires pour organiser son retour en Albanie. Cependant, il a été établi qu’un accord bilatéral permettait le retour avec une simple carte d’identité, ce qui a été respecté par l’administration. De plus, la demande d’assignation à résidence judiciaire a été rejetée, l’étranger n’ayant pas respecté des obligations de quitter le territoire dans le passé.

Finalement, l’ordonnance du juge a été confirmée, et l’appel a été partiellement accueilli, mais sans effet sur la prolongation de la rétention.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la recevabilité de l’acte d’appel ?

L’acte d’appel est jugé recevable car il a été formé dans les formes et délais prévus par les articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

L’article L. 743-21 stipule que « l’appel est ouvert contre les décisions rendues en matière de rétention administrative ».

De plus, l’article R. 743-10 précise que « l’appel doit être formé dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision ».

Enfin, l’article R. 743-11 indique que « la déclaration d’appel doit être motivée à peine d’irrecevabilité ».

Ainsi, la conformité de l’acte d’appel aux exigences légales a été vérifiée, ce qui en assure la recevabilité.

Quel est le rôle du juge judiciaire concernant la compétence du signataire de la requête ?

Le juge judiciaire a pour rôle de vérifier la compétence du signataire de la requête, comme le soutient l’appelant.

Cependant, l’article R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile précise que « la déclaration d’appel doit être motivée à peine d’irrecevabilité ».

Dans ce cas, l’appelant n’a pas fourni de motivation suffisante pour justifier son argument selon lequel le signataire de la requête n’était pas compétent.

Il est également rappelé qu’aucune disposition légale n’impose à l’administration de justifier de l’indisponibilité du délégant ou des empêchements des délégataires.

Ainsi, l’absence de motivation adéquate a conduit à la déclaration d’irrecevabilité de l’appel sur ce point.

Quel est le cadre légal concernant les diligences de l’administration en matière de rétention ?

L’article L. 741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile stipule qu’un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ.

Il est également précisé que « l’administration doit exercer toute diligence à cet effet ».

Dans cette affaire, l’appelant a soutenu que l’administration n’avait pas justifié de diligences suffisantes, notamment en ce qui concerne la demande de vol à destination de l’Albanie.

Cependant, il a été établi qu’un accord bilatéral de 2005 permettait le retour en Albanie avec une simple carte d’identité.

Ainsi, l’administration a agi conformément aux exigences légales en sollicitant une demande de vol dès le 12 mars 2025, ce qui a été jugé suffisant pour réduire le temps de rétention.

Quel est le cadre juridique pour une demande d’assignation à résidence judiciaire ?

L’article L. 743-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit que le juge du tribunal judiciaire peut ordonner l’assignation à résidence de l’étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

Il est également stipulé que « l’assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu’après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité ».

Dans le cas présent, bien que l’appelant possède une carte d’identité nationale albanaise en cours de validité, il n’a pas respecté deux précédentes obligations de quitter le territoire français.

De plus, il a exprimé son refus de retourner en Albanie.

Ces éléments ont conduit à la conclusion que les garanties de représentation n’étaient pas suffisantes pour justifier une assignation à résidence judiciaire, entraînant le rejet de sa demande.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

ORDONNANCE DU 20 MARS 2025

1ère prolongation

Nous, Géraldine GRILLON, conseillère, agissant sur délégation de M. le premier président de la cour d’appel de Metz, assistée de Sarah PETIT, greffière ;

Dans l’affaire N° RG 25/00273 – N° Portalis DBVS-V-B7J-GK3Z ETRANGER :

M. [T] [X]

né le 1er janvier 1980 à [Localité 2] (Albanie)

de nationalité Albanaise

Actuellement en rétention administrative.

Vu la décision de M. LE PREFET DE L’AUBE prononçant le placement en rétention de l’intéressé ;

Vu le recours de M. [T] [X] en demande d’annulation de la décision de placement en rétention ;

Vu la requête de M. LE PREFET DE L’AUBE saisissant le juge du tribunal judiciaire de Metz tendant à la prolongation du maintien de l’intéressé dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une première prolongation ;

Vu l’ordonnance rendue le 18 mars 2025 à 10h26 par le juge du tribunal judiciaire de Metz déboutant l’intéressé de sa demande d’annulation de l’arrêté de rétention et ordonnant la prolongation de la rétention dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire jusqu’au 11 avril 2025 inclus ;

Vu l’acte d’appel de l’association ASSFAM ‘ groupe SOS pour le compte de M. [T] [X] interjeté par courriel du 18 mars 2025 à 17h01 contre l’ordonnance rejetant la demande d’annulation de la décision de placement en rétention et ayant statué sur la prolongation de la mesure de rétention administrative ;

Vu l’avis adressé à Monsieur le procureur général de la date et l’heure de l’audience ;

A l’audience publique de ce jour, à 14 H 30, en visioconférence se sont présentés :

– M. [T] [X], appelant, assisté de Me Caroline RUMBACH, avocate de permanence commise d’office, présente lors du prononcé de la décision et de M. [W] [U], interprète assermenté en langue albanaise, présent lors du prononcé de la décision

– M. LE PREFET DE L’AUBE, intimé, représenté par Me Bettina DORFMANN, avocate au barreau de Paris substituant la SELARL Centaure avocats du barreau de Paris, présente lors du prononcé de la décision

Me Caroline RUMBACH et M. [T] [X], par l’intermédiaire de l’interprète ont présenté leurs observations ;

M. LE PREFET DE L’AUBE, représenté par son avocat a sollicité la confirmation de l’ordonnance entreprise ;

M. [T] [X], par l’intermédiaire de l’interprète, a eu la parole en dernier.

SUR CE,

– Sur la recevabilité de l’acte d’appel :

L’appel est recevable comme ayant été formé dans les formes et délai prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

– Sur la compétence de l’auteur de la requête :

Dans son acte d’appel, M. [T] [X] soutient qu’il appartient au juge judiciaire de vérifier la compétence du signataire de la requête mais également qu’il est effectivement fait mention des empêchements éventuels des délégataires de signature et que si le signataire de la requête en prolongation n’est pas compétent, il appartient au juge judiciaire d’en tirer les conséquences et de prononcer sa remise en liberté.

Toutefois, l’article R 743-11 du dode de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dispose que la déclaration d’appel doit être motivée à peine d’irrecevabilité. Or le seul moyen soulevé selon lequel « il appartient au juge judiciaire de vérifier la compétence du signataire de la requête mais également qu’il est effectivement fait mention des empêchements éventuels des délégataires de signature », ne constitue pas une motivation d’appel au sens de l’article précité, à défaut pour l’appelant de caractériser par les éléments de l’espèce dûment circonstanciés, l’irrégularité alléguée. Par ailleurs, il est rappelé qu’aucune disposition légale n’oblige l’administration à justifier de l’ indisponibilité du délégant et des empêchements éventuels des délégataires.

Il y a donc lieu de déclarer l’appel irrecevable sur ce point.

– Sur l’absence de diligences :

M. [T] [X] soutient que l’administration ne justifie pas de diligences suffisantes dans la mesure où une simple demande de vol à destination de l’Albanie a été faite le 12 mars 2025 alors qu’il ne dispose pas d’un passeport mais d’une simple carte nationale d’identité qui requiert qu’une demande de laissez-passer consulaire soit faite ; il ajoute que l’ensemble des documents que l’administration a à sa disposition n’ont pas été transmis au consulat pour permettre son identification et en particulier carte d’identité albanaise. Il ajoute qu’aucune diligence n’a été faite depuis son placement en rétention ; la demande de routing a été faite un jour avant son placement en rétention.

A l’audience, l’avocat de la préfecture fait valoir qu’il existe un accord bi-latéral de 2005 pour permettre un retour avec une simple carte d’identité en Albanie.

Aux termes de l’article L. 741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ ; l’administration doit exercer toute diligence à cet effet.

Le 14 avril 2005 (décret n° 2016-322 du 17 mars 2016 portant publication du protocole entre le Gouvernement de la République française et le conseil des ministres de la République d’Albanie portant sur l’application de l’accord entre la Communauté européenne et la République d’Albanie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier signé le 14 avril 2005 à Luxembourg signé à Tirana le 8 avril 2013), la Communauté européenne et l’Albanie ont signé un accord permettant que les personnes munis d’une carte nationale d’identité ou d’un passeport individuel en cours de validité sont dispensés de visa pour se rendre en Albanie pour un séjour ne dépassant pas 90 jours.

En conséquence, dans la mesure où M. [X] dispose d’une carte nationale d’identité albanaise en cours de validité, l’administration n’avait pas à solliciter une demande de laissez-passer consulaire mais simplement une demande de vol ce qui a été effectué dès le 12 mars 2025 pour permettre de réduire au minimum le temps de rétention. Ainsi, les formalités sont effectives et adaptées pour permettre un retour le plus rapidement possible vers l’Albanie.

Ainsi, les moyens relatifs aux diligences sont écartés.

– Sur la demande d’assignation à résidence judiciaire :

M. [T] [X] demande à bénéficier d’une assignation à résidence judiciaire.

L’article L743-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose que le juge du tribunal judiciaire peut ordonner l’assignation à résidence de l’étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives. L’assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu’après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d’un récépissé valant justification de l’identité et sur lequel est portée la mention de la décision d’éloignement en instance d’exécution. Lorsque l’étranger s’est préalablement soustrait à l’exécution d’une décision mentionnée à l’article L. 700-1, à l’exception de son 4°, l’assignation à résidence fait l’objet d’une motivation spéciale.

Si l’appelant possède une carte d’identité nationale albanaise en cours de validité, il ne possède en revanche pas de garanties suffisantes pour bénéficier d’une assignation à résidence judiciaire en ce que il n’a pas respecté deux précédentes obligations de quitter le territoire français qui lui avait été notifiées (23 juillet 2018 et 20 janvier 2020) ; par ailleurs, il a déclaré dans le cadre du formulaire administratif qu’il ne voulait pas retourner en Albanie.

En conséquence, la demande ne peut qu’être rejetée.

L’ordonnance entreprise est confirmée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,

DÉCLARONS recevable l’appel de M. [T] [X] à l’encontre de la décision du juge du tribunal judiciaire de Metz ayant statué sur la demande d’annulation de la décision de placement en rétention et sur la prolongation de la mesure de rétention administrative ;

DECLARONS irrecevable la contestation de la compétence du signataire de la requête saisissant le juge du tribunal judiciaire ;

REJETONS la demande d’assignation à résidence judiciaire ;

CONFIRMONS l’ordonnance rendue par le juge du tribunal judiciaire de Metz le 18 mars 2025 à 10h26 ;

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d’une expédition de la présente ordonnance ;

DISONS n’y avoir lieu à dépens.

Prononcée publiquement à Metz, le 20 mars 2025 à 15h12.

La greffière, La conseillère,

N° RG 25/00273 – N° Portalis DBVS-V-B7J-GK3Z

M. [T] [X] contre M. LE PREFET DE L’AUBE

Ordonnnance notifiée le 20 Mars 2025 par courriel, par le greffe de la chambre des libertés de la cour d’appel à :

– M. [T] [X] et son conseil, M. LE PREFET DE L’AUBE et son représentant, au cra de [Localité 1], au juge du tj de Metz, au procureur général de la cour d’appel de Metz


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