L’Essentiel : Dans l’affaire Jean Giraud, la prestation compensatoire a été stipulée dans le cadre d’une convention de divorce, permettant à l’ex-épouse de percevoir des droits d’auteur générés par les œuvres de l’auteur. Ce versement, limité à la durée de vie de Giraud, était fixé à un maximum de 500 000 francs par an, avec un plancher garanti de 400 000 francs. Les éditions Dargaud ont versé ces montants annuellement, mais l’ex-épouse a réclamé un arriéré, arguant que le minimum n’avait pas été atteint. La juridiction a confirmé que la prestation était déterminable et ne devait pas être versée après le décès de l’auteur.
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Affaire Jean GiraudUne convention de divorce peut prévoir la possibilité que la prestation compensatoire soit payée au moyen des droits d’auteur générés par l’exploitation des œuvres de l’auteur. Sauf volonté contraire de l’ex époux/épouse, ce versement est limité à la durée de vie de l’auteur. Dans l’affaire soumise, l’auteur Jean Giraud (décédé en 2012), s’est engagé à verser à son ex-épouse une prestation compensatoire, conformément aux articles 271 et 272 du code civil, dans les conditions suivantes : « La prestation compensatoire sera exécutée sous forme d’un abandon par M. Jean Giraud de la totalité des droits d’auteur que ses oeuvres éditées aux ÉDITIONS DARGAUD génèrent, étant précisé que le montant des droits versés ne saurait excéder un montant maximum de CINQ CENT MILLE (500 000) francs par an. Toutefois, à titre subsidiaire, le versement d’une rente annuelle en numéraire, d’un montant de QUATRE CENT MILLE (400 000) francs est garanti à Mme … dans le cas où le montant des droits versés par les ÉDITIONS DARGAUD viendrait à être inférieur à cette somme. Les montants numéraires de référence de cette rente, tant en ce qui concerne le plafond de CINQ CENT MILLE (500 000) francs que le plancher de QUATRE CENT MILLE (400 000) francs bénéficieront de l’indexation mensuelle des prix à la consommation des ménages urbains (série parisienne) à la date anniversaire de l’ordonnance à intervenir. Enfin cette date aura comme limite dans le temps la vie de l’époux débiteur et elle pourra, de plus, faire l’objet d’une révision, conformément à l’article 279 § 3 du code civil. » Recettes déterminables
Conformément à ces stipulations, les éditions Dargaud ont versé à l’ancienne épouse de l’auteur, chaque année depuis le prononcé du divorce, une somme correspondant à la totalité des revenus générés par l’exploitation qu’elles ont fait des oeuvres de Jean Giraud. Cette dernière a sollicité des tribunaux le règlement d’un arriéré de prestation compensatoire, le plancher annuel n’ayant pas été atteint chaque année. En application de l’article 1129 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, il faut que l’obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce ; la quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu’elle puisse être déterminée. En l’espèce, la convention définitive homologuée par le jugement de divorce stipulait expressément un abandon des droits de l’auteur. Sauf à la dénaturer, il n’y avait pas lieu d’interpréter cette clause claire et précise. La créance de l’ancienne épouse était déterminable au sens de l’article 1129 du code civil. Question des revenus complémentairesLes héritiers de l’auteur ont fait valoir sans succès qu’il convenait, pour réviser le montant de la prestation compensatoire, de tenir compte d’autres sommes perçues au titre de parts sociales dans des sociétés californiennes, acquises suite au partage des biens de la communauté. Or, que l’épouse ait ou non joui de ces parts de sociétés, ce point relève de la liquidation du régime matrimonial ayant existé entre les époux et non du règlement de la prestation compensatoire. Cette dernière problématique intéresse la liquidation de la succession et ne relève en rien du règlement de la prestation compensatoire. Prestation compensatoire limitée dans le tempsSur la durée du versement de la prestation compensatoire, la juridiction a interprété les dispositions contractuelles en analysant la volonté des parties ; le paragraphe « cette date aura comme limite dans le temps la vie de l’époux débiteur » suivait le paragraphe relatif à l’indexation des versements annuels de la prestation compensatoire. Les parties, usant de leur liberté contractuelle, ont donc décidé que la prestation compensatoire ne serait servie à l’ancienne épouse que du temps de la vie de l’auteur. Cette prestation n’était donc pas due après le décès de l’auteur. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle était la nature de la prestation compensatoire dans l’affaire Jean Giraud ?La prestation compensatoire dans l’affaire Jean Giraud était spécifiquement définie dans la convention de divorce. Elle prévoyait que Jean Giraud abandonnerait la totalité des droits d’auteur générés par ses œuvres publiées aux Éditions Dargaud. Ce versement était limité à un maximum de CINQ CENT MILLE (500 000) francs par an. En cas de revenus inférieurs à ce montant, une rente annuelle de QUATRE CENT MILLE (400 000) francs était garantie à son ex-épouse. Les montants étaient également soumis à une indexation mensuelle des prix à la consommation, ce qui permettait d’ajuster les sommes versées en fonction de l’inflation. Comment les revenus générés par les œuvres de Jean Giraud ont-ils été gérés ?Les Éditions Dargaud ont versé à l’ancienne épouse de Jean Giraud, chaque année depuis le divorce, une somme correspondant à l’intégralité des revenus générés par l’exploitation de ses œuvres. Cependant, l’ex-épouse a demandé aux tribunaux le règlement d’un arriéré de prestation compensatoire, car le montant minimum garanti n’avait pas été atteint chaque année. Cela a soulevé des questions sur la déterminabilité de la créance, qui, selon l’article 1129 du code civil, doit avoir un objet déterminé, même si sa quotité peut être incertaine. Quelles étaient les objections des héritiers de Jean Giraud concernant la prestation compensatoire ?Les héritiers de Jean Giraud ont tenté de faire valoir que le montant de la prestation compensatoire devait être révisé en tenant compte d’autres revenus perçus par l’auteur, notamment des parts sociales dans des sociétés californiennes. Cependant, cette argumentation a été rejetée, car ces revenus relevaient de la liquidation du régime matrimonial et non du règlement de la prestation compensatoire. Ainsi, la question des parts sociales était distincte et ne devait pas influencer le montant de la prestation compensatoire due à l’ex-épouse. Quelle était la durée de la prestation compensatoire selon la convention de divorce ?La durée de la prestation compensatoire était explicitement limitée à la vie de l’époux débiteur, Jean Giraud. La juridiction a interprété cette clause en tenant compte de la volonté des parties, stipulant que la prestation ne serait versée que tant que l’auteur était en vie. Ainsi, après le décès de Jean Giraud en 2012, la prestation compensatoire n’était plus due, conformément aux termes de la convention de divorce. Cette décision souligne l’importance de la liberté contractuelle des parties dans la définition des modalités de la prestation compensatoire. |
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