Obligations contractuelles et conséquences des manquements dans le cadre d’un mandat de vente

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Obligations contractuelles et conséquences des manquements dans le cadre d’un mandat de vente

L’Essentiel : Le 10 septembre 2018, la société SSDB a signé un mandat simple de vente avec le cabinet [X] pour la vente de son fonds de commerce, fixé à 160.000 euros. Ce mandat incluait un droit de suite interdisant à SSDB de traiter directement avec un acquéreur présenté par le cabinet. En janvier 2020, le cabinet a appris que SSDB avait trouvé un acquéreur, mais n’a pas été informé de son identité. Le 12 février 2020, la cession à la société LA BOURRICHE a eu lieu, entraînant une opposition du cabinet et une assignation de SSDB devant le tribunal.

Contexte de l’Affaire

Le 10 septembre 2018, la société SSDB a signé un mandat simple de vente avec le cabinet [X], dirigé par Mme [F] [X] [T], pour la vente de son fonds de commerce situé à [Adresse 3] à [Localité 5]. Le mandat avait une durée de 24 mois et un prix de vente fixé à 160.000 euros, avec une rémunération de 12 % du prix de cession.

Obligations du Mandant

Le mandat stipulait un droit de suite interdisant à la société SSDB de traiter directement avec un acquéreur présenté par le cabinet pendant la durée du mandat et deux ans après son expiration. En cas de non-respect, une clause pénale équivalente à la rémunération prévue était appliquée. De plus, la société SSDB devait informer le cabinet de toute vente sans son concours, en précisant l’identité de l’acquéreur et le prix de vente.

Visite du Local Commercial

Le cabinet [X] a fait visiter le local à M. [Y] [O], qui souhaitait ouvrir un bar à huîtres, mais ce dernier n’a pas donné suite. En janvier 2020, le cabinet a appris que la société SSDB avait trouvé un acquéreur. Le 27 janvier 2020, le cabinet a demandé à la société SSDB de confirmer la fin de sa mission et de lui communiquer le nom de l’acquéreur.

Communication de l’Acquéreur

Le 31 janvier 2020, la société SSDB a informé le cabinet qu’il pouvait clôturer le dossier, sans préciser l’identité de l’acquéreur. Le 12 février 2020, la cession du fonds de commerce à la société LA BOURRICHE a eu lieu, et le cabinet a constaté l’ouverture du bar à huîtres à l’adresse concernée.

Opposition et Assignation

Le 28 février 2020, le cabinet [X] a fait opposition sur le prix de vente du fonds de commerce. La société SSDB a alors assigné le cabinet devant le tribunal judiciaire de Nantes pour obtenir la mainlevée de cette opposition. En réponse, Mme [X] [T] a demandé des indemnités à la société SSDB et à M. [O].

Jugement du Tribunal

Le 25 mai 2023, le tribunal a confirmé la validité de l’opposition en paiement, rejeté la demande de mainlevée de la société SSDB, et condamné cette dernière à verser des indemnités à Mme [X] [T] pour défaut d’information et non-respect du droit de suite. La société SSDB a été condamnée à verser un total de 28.800 euros.

Appel et Demandes des Parties

M. [O] et la société LA BOURRICHE ont fait appel du jugement, demandant l’infirmation de la décision du tribunal. Ils ont contesté la responsabilité de M. [O] et ont demandé des indemnités pour préjudice. La société SSDB a également interjeté appel, sollicitant l’infirmation du jugement et la garantie de M. [O].

Arguments et Réponses

Les parties ont présenté des arguments concernant le respect des obligations contractuelles et la responsabilité respective. La société SSDB a soutenu qu’elle n’avait pas manqué à ses obligations, tandis que le cabinet [X] a affirmé que la société SSDB avait violé les termes du mandat. Les demandes de garantie et d’indemnisation ont été examinées en détail.

Décision Finale

La cour a infirmé certaines condamnations à l’encontre de M. [O] tout en confirmant d’autres aspects du jugement initial. La société SSDB a été condamnée à verser des indemnités à Mme [X] [T] et à payer les dépens d’appel. Les demandes des parties ont été partiellement accueillies ou rejetées selon les circonstances de l’affaire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la base légale pour demander une expertise judiciaire dans cette affaire ?

La base légale pour demander une expertise judiciaire est l’article 145 du Code de procédure civile, qui stipule :

« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Dans le cas présent, la S.C.I. CCNP a fourni plusieurs éléments à l’appui de sa demande, notamment un devis, une facture et un procès-verbal de constat.

Ces documents montrent que des travaux ont été réalisés pour remédier à des infiltrations, mais que des désordres persistent, justifiant ainsi la nécessité d’une expertise pour établir la réalité des faits et des responsabilités.

Qui supporte les frais de l’expertise judiciaire ?

Selon la décision rendue, les dépens de l’instance seront supportés par la S.C.I. CCNP, demanderesse.

Cela signifie que la S.C.I. CCNP est responsable de l’avance des frais d’expertise, comme le précise la décision :

« La S.C.I. CCNP fera l’avance des frais d’expertise et devra consigner au greffe une provision de TROIS MILLE EUROS (3.000,00 €) TTC avant le 31 janvier 2025. »

Il est également rappelé que, en cas de non-consignation dans le délai imparti, la désignation de l’expert sera caduque, sauf prorogation accordée par le juge.

Quels sont les objectifs de l’expertise judiciaire ordonnée ?

L’expertise judiciaire a plusieurs objectifs clairement définis dans la décision.

L’expert doit :

1. Se rendre sur les lieux pour constater les désordres allégués.
2. Recueillir les explications des parties et examiner les documents pertinents.
3. Établir un historique des éléments du litige, y compris les polices d’assurances.
4. Vérifier l’existence des désordres et en décrire la nature.
5. Rechercher les causes des désordres et évaluer si les travaux ont été réalisés conformément aux règles de l’art.

Ces objectifs visent à fournir au tribunal tous les éléments nécessaires pour déterminer les responsabilités et évaluer les préjudices subis par la S.C.I. CCNP.

Quelles sont les conséquences si la S.C.I. CCNP ne consigne pas la provision dans le délai imparti ?

La décision précise que si la S.C.I. CCNP ne consigne pas la provision dans le délai imparti, la désignation de l’expert sera caduque.

Cela signifie que l’expertise ne pourra pas avoir lieu, ce qui pourrait nuire à la capacité de la S.C.I. CCNP à prouver ses allégations concernant les désordres.

Le texte indique également que le juge peut, à la demande d’une des parties, décider d’une prorogation du délai ou d’un relevé de la caducité, mais cela reste à l’appréciation du juge.

Quels éléments l’expert doit-il fournir dans son rapport ?

L’expert doit fournir un rapport détaillé qui inclut plusieurs éléments essentiels :

1. Un inventaire des pièces contractuelles utiles à l’instruction du litige.
2. Une description précise des désordres constatés, y compris leur date d’apparition.
3. Une évaluation des travaux nécessaires pour remédier aux désordres, ainsi que leur coût et durée.
4. Des indications sur les responsabilités éventuelles des parties impliquées.

Ces éléments permettront au tribunal de prendre une décision éclairée sur les responsabilités et les préjudices subis par la S.C.I. CCNP.

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N°431

N° RG 23/03768 – N° Portalis DBVL-V-B7H-T3XP

(Réf 1ère instance : 20/03917)

M. [Y] [O]

S.A.S. LA BOURRICHE

C/

Mme [F] [X] [T]

S.A.R.L. SSDB

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me GAUDIN

Me BERNIER

Me VIGNERON

Copie certifiée conforme délivrée

le :

à : TJ de NANTES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 NOVEMBRE 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLÉMENT, Présidente de chambre, rapporteur

Assesseur : Madame Sophie RAMIN, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Frédérique HABARE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 01 Octobre 2024

ARRÊT :

Contradictoire prononcé publiquement le 26 Novembre 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTS :

Monsieur [Y] [O]

né le 21 Octobre 1988 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Claire GAUDIN substituant Me Mélaine TANGUY-HARDY de la SARL LAWIS & CO, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

S.A.S. LA BOURRICHE

immatriculée au RCS de NANTES sous le n°881 100 994, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Claire GAUDIN substituant Me Mélaine TANGUY-HARDY de la SARL LAWIS & CO, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉES :

Madame [F] [X] [T]

immatriculée au RCS de NANTES sous le n° 300.607.723, exerçant sous l’enseigne CABINET [X]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Joachim BERNIER de la SELARL CLARENCE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

S.A.R.L. SSDB

immatriculée au RCS de Nantes sous le numéro 530 824 309, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Jean-Louis VIGNERON de la SELARL ASKE 3, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

FAITS

Le 10 septembre 2018 la société SSDB a signé avec le cabinet [X], dirigé par Mme [F] [X] [T] un mandat simple de vente portant sur le droit au bail ou le fonds de commerce qu’elle exploitait dans le local commercial sis [Adresse 3] à [Localité 5] pour une durée de 24 mois avec un prix de vente fixée à 160.000 euros.

La rémunération prévue au mandat était fixée à 12 % de la totalité du prix de cession (TVA incluse au taux en vigueur soit 20 %).

Ce mandat prévoyait un ‘droit de suite du mandataire qui interdisait au mandant de traiter directement ou indirectement avec un acquéreur qui lui aurait été présenté par l’agence pendant le mandat et pour une certaine durée suivant l’expiration du mandat, fixée à 2 ans. Le non-respect de cette obligation était sanctionné par une clause égale à la rémunération prévue au mandat.

Le mandat prévoyait également que dans le cas de vente sans le concours du mandataire le vendeur devait informer ce dernier en précisant notamment les noms et adresses de l’acquéreur ainsi que le prix de vente final, pendant la durée du mandat et deux ans après son expiration.

Le non-respect de cette obligation était également sanctionné par une clause pénale correspondant à la moitié de la rémunération prévue au mandat.

La cabinet [X] indique qu’il a fait visiter le local commercial à M. [Y] [O] qui envisageait d’ouvrir un bar à huîtres sous l’enseigne LA BOURRICHE lequel n’a pas donné suite.

En janvier 2020 le cabinet [X] a appris que la société SSDB avait trouvé un acquéreur.

Le 27 janvier 2020 le cabinet [X] a demandé à la société SSDB de lui confirmer la fin de sa mission et de lui communiquer le nom de l’acquéreur en lui rappelant le nom des personnes à qui le bien avait été présenté par son intermédiaire, dont M. [O] et sa compagne.

La société SSDB a indiqué par un mail du 31 janvier 2020 que le cabinet pouvait clôturer le dossier en indiquant, concernant l’acquéreur qu’elle ne savait pas s’il souhaitait être nommé.

La cabinet [X] précise en outre avoir constaté qu’un bar à huîtres LA BOURRICHE ouvrait au [Adresse 3] à [Localité 5].

Par courrier en date du 7 février 2020, le cabinet [X] a indiqué à la société SSDB qu’elle n’avait respecté ni l’obligation qu’elle avait de lui communiquer le nom de l’acquéreur ni le droit de suite de sorte qu’il était bien fondé à lui demander de lui verser les indemnités compensatrices prévues au mandat soit la somme totale de 28.800 euros se décomposant comme suit :

– la moitié de la rémunération convenue en raison du refus d’informer la mandataire sur le nom de l’acquéreur : soit 6 % du prix de cession prévu au mandat (9.600 euros),

– la rémunération prévue au mandat du fait de la vente à un acquéreur ayant eu connaissance de la vente du bien par l’intermédiaire du mandataire, soit 12 % du prix de cession prévu au mandat 19.200 euros).

La société SSDB a refusé de régler aux motifs que le cabinet [X] ne l’aurait jamais informé de cette visite ni présenté M. [O], ce dernier lui ayant confirmé ne pas avoir visité le bien avec le cabinet [X].

La cession du fonds de commerce par la société SSDB à la société LA BOURRICHE est intervenue le 12 février 2020.

Le 28 février 2020 le cabinet [X] a fait opposition sur le prix de vente du fonds de commerce.

La société SSDB a fait assigner le cabinet [X] pris en la personne de Mme [X] [T] devant le tribunal judiciaire de Nantes aux fins de voir dire et juger que l’opposition sur le prix de vente du fonds de commerce est sans cause et qu’il en soit ordonné la mainlevée.

A titre reconventionnel, Mme [X] [T] a sollicité la condamnation de la société SSDB à lui verser la somme de 9.600 euros correspondant à la moitié de la rémunération convenue en raison du refus d’informer la mandataire sur le nom de l’acquéreur et la condamnation in solidum de la société SSDB et M. [O] à la somme de 19.200 euros correspondant à la rémunération prévue du fait de la vente à un acquéreur ayant eu connaissance de la vente du bien par son intermédiaire.

Par jugement en date du 25 mai 2023, le tribunal a :

-Dit que l’opposition en paiement du prix de vente du fonds de commerce régularisée par Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne cabinet [X] par acte d’huissier du 28 février 2020 repose sur une cause ;

– Rejeté en conséquence la demande formée par la SARL SSDB tendant à la mainlevée de cette opposition ;

-Déclaré recevables les demandes formées par la SARL SSDB et par Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne cabinet [X], à l’encontre de Monsieur [Y] [O], pris en son nom personnel ;

-Condamné la SARL SSDB à verser à Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne cabinet [X] la somme de 6.000 euros à titre d’indemnité compensatrice pour défaut d’information du mandataire sur l’identité de l’acquéreur ;

-Condamné in solidum la SARL SSDB et Monsieur [Y] [O] à verser à Madame [F] [X] [T] exerçant sous l’enseigne cabinet [X] la somme de 12 000 euros à titre respectivement d’indemnité compensatrice pour non-respect du droit de suite et de dommages et intérêts ;

-Rejeté la demande de garantie formée par la SARL SSDB à l’égard de Monsieur [Y] [O] et de la SAS La Bourriche ;

-Condamné la SARL SSDB à verser à Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne cabinet [X] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamné Monsieur [Y] [O] à verser à Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne cabinet [X] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Débouté la SARL SSDB de sa demande formée au titre des frais irrépétibles; -Débouté Monsieur [Y] [O] et la SAS LA BOURRICHE de leur demande formée au titre des frais irrépétibles ;

-Condamné la SARL SSDB et Monsieur [Y] [O] aux dépens.

M. [O] et la société LA BOURRICHE ont fait appel du jugement le 21 juin 2023.

L’ordonnance de clôture est en date du 19 septembre 2024.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans leurs écritures notifiées le 18 septembre 2024 la société LA BOURRICHE et M. [O] demandent à la cour au visa des articles 1240 du code civil, 32-1 et 74 du code de procédure civile, 700 du code de procédure civile, de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 du décret n°72-678 du 20 juillet 1972 de :

– Infirmer la décision rendue par le tribunal de commerce de Nantes le 25 mai 2023, sauf en ce qu’elle a rejeté la demande en garantie formée par la société SSDB à l’égard de Monsieur [Y] [O] et la SAS LA BOURRICHE ;

Et, statuant à nouveau :

– Débouter Madame [F] [X] [T] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

– Débouter la société SSDB de sa demande de garantie à l’encontre de Monsieur [Y] [O] et la SAS LA BOURRICHE ;

– Déclarer que Madame [F] [X] [T] échoue dans la charge de la preuve de la visite du bien situé [Adresse 3] à [Localité 5] à Monsieur [Y] [O] ;

– Déclarer que les éléments de preuve versés aux débats démontrent au contraire que la visite ne peut pas être intervenue ;

– Déclarer que Monsieur [Y] [O] n’était tenu d’aucun engagement au titre du bon de « reconnaissances d’indications et de visite » signé le 16 janvier 2019 s’agissant du bien situé [Adresse 3] à [Localité 5] ;

– Déclarer que les conditions de versement de la commission telles que stipulées aux termes du mandat de vente sans exclusivité signé entre la société SSDB et Madame [F] [X] [T] ne trouvaient pas à s’appliquer en l’espèce, de sorte que la commission n’était pas due ;

En conséquence,

– Déclarer que Monsieur [Y] [O] n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle ;

A titre reconventionnel,

-Débouter Madame [F] [X] [T] de son exception de procédure ou de sa fin de non-recevoir destinée à faire déclarer irrecevables les demandes reconventionnelles de Monsieur [Y] [O] et Déclarer que cette exception de procédure ou fin de non-recevoir est irrecevable car non reprise dans son dispositif ;

– Déclarer Monsieur [Y] [O] recevable et bien fondé en ses demandes reconventionnelles,

– Constater que les pièces versées aux débats démontrent que Madame [F] [X] [T] a menti sur la réalité de la visite du bien [Adresse 3] à Monsieur [Y] [O] ;

– Déclarer que Madame [F] [X] [T] responsable du fait des man’uvres frauduleuses, dilatoires et abusives, caractérisant une faute civile délictuelle au préjudice de Monsieur [Y] [O] et de la SAS LA BOURRICHE ;

– Condamner Madame [F] [X] [T] au paiement d’une amende civile de 10 000 euros ;

– Condamner Madame [F] [X] [T] à payer à Monsieur [Y] [O] et à la SAS LA BOURRICHE la somme de 10 000 euros chacun, en indemnisation de leurs préjudices du fait de la procédure abusive et dilatoire mise en ‘uvre, sauf à parfaire ;

– Décerner acte à Monsieur [Y] [O] et à la SAS LA BOURRICHE qu’ils se réservent de poursuivre l’indemnisation de leurs préjudices résultant du délit d’escroquerie au jugement si celui-ci devait être caractérisé à l’encontre de Madame [F] [X] [T] ;

En tout état de cause,

– Débouter Madame [F] [X] [T] et la société SSDB de leurs demandes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile à l’encontre de Monsieur [Y] [O] ;

– Condamner Madame [F] [X] [T] et la société SSDB, solidairement, à payer à Monsieur [Y] [O] et à la SAS LA BOURRICHE, la somme de 7000 euros chacun au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

– Condamner Madame [F] [X] [T] et la société SSDB solidairement aux entiers frais et dépens de l’instance.

Dans ses écritures notifiées le 19 décembre 2023 la société SSDB demande à la cour au visa des articles 1240 du code civil,32-1 du code de procédure civile, 700 du code de procédure civile de :

– Infirmer la décision rendue par le tribunal de commerce de Nantes du 25 mai 2023 et statuant à nouveau,

– Débouter madame [F] [X] de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions,

Subsidiairement,

– Condamner monsieur [Y] [O] à garantir et relever indemne la société SSDB de l’intégralité des condamnations relevées à son encontre ;

– Condamner solidairement Madame [F] [X], Monsieur [Y] [O] et sa société la SAS LA BOURRICHE à payer à la Société SSDB la somme de 3500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’en tous les dépens.

Dans ses écritures notifiées le 6 septembre 2024 Mme [X] [T] exerçant sous l’enseigne Cabinet [X] demande à la cour au visa des articles 1103, 1104 et 1240 du code civil, 564 du code de procédure civile, de :

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que l’opposition en paiement du prix de vente du fonds de commerce régularisée par Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne « cabinet [X] », par acte d’huissier du 28 février 2020 repose sur une cause ;

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté en conséquence la demande formée par la SARL SSDB tendant à la mainlevée de cette opposition;

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré recevables les demandes

formées par la SARL SSDB et par Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne « cabinet [X] », à l’encontre de Monsieur [Y] [O], pris en son nom personnel ;

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la SARL SSDB à verser à Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne « cabinet [X] » la somme de 6.000 euros à titre d’indemnité compensatrice pour défaut d’information du mandataire sur l’identité de l’acquéreur ;

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné in solidum la SARL SSDB et Monsieur [Y] [O] à verser à Madame [F] [X] [T] exerçant sous l’enseigne « cabinet [X] » la somme de 12.000 euros à titre respectivement d’indemnité compensatrice pour non-respect du droit de suite et de dommages et intérêts ;

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la SARL SSDB à verser à Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne « cabinet [X] », la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné Monsieur [Y] [O] à verser à Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne « cabinet [X] », la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la SARL SSDB et Monsieur [Y] [O] aux dépens ;

– Débouter Monsieur [Y] [O] et la société LA BOURRICHE de leur demande nouvelle tendant à la condamnation de Madame [F] [X] [T] d’une amende civile de 10.000 euros ;

– Débouter Monsieur [Y] [O] et la société LA BOURRICHE de leur demande nouvelle tendant à la condamnation de Madame [F] [X] [T] à leur payer la somme de 10.000 euros chacun en indemnisation de leurs préjudices.

– Condamner la société SSDB, Monsieur [Y] [O] et la SAS LA BOURRICHE à payer à Madame [F] [X] [T] la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d’appel.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.

DISCUSSION

La société SSDB

1) Le mandat

La mandat simple de vente confiée à Mme [X] [T] par la société SSDB prévoit :

Article IX ‘ DURÉE DU MANDAT ET OBLIGATIONS DU MANDANT

Nous nous interdisons de vendre sans votre concours, y compris par un autre intermédiaire, à un acquéreur qui nous aurait été présenté par vous, pendant la durée du mandat et deux ans après son expiration.

En cas de vente, pendant la durée du présent mandat et 2 ans après son expiration, nous devrons obtenir de notre acquéreur l’assurance écrite que les biens ne lui ont pas été présentés par vous.

Article XII ‘ VENTE SANS VOTRE CONCOURS

Dans le cas de vente sans votre concours, nous nous engageons à vous en informer immédiatement par lettre recommandée avec accusé de réception, en vous précisant les noms et adresses de l’acquéreur, du notaire chargé de l’acte authentique et de l’agence éventuellement intervenue, ainsi que le prix de vente final, ce, pendant la durée du présent mandat et deux ans après son expiration.

La société SSDB dément tout manquement à ses obligations.

Le fonds de commerce objet du mandant de vente, appartenant à la société SSDB a fait l’objet d’une cession par acte du 12 février 2020 à la société LA BOURRICHE représentée par M. [O] par l’intermédiaire de l’agence HBC TRANSACTION .

Le 27 janvier 2020 le cabinet [X] avait sollicité la société SSDB aux fins de lui faire confirmer que le futur acquéreur ne figurait pas dans une liste de personnes mises en rapport avec la venderesse par son intermédiaire.

M. [O] et Mme [B] son épouse figuraient sur la liste.

Le 31 janvier 2020 la société SSDB a répondu :

Madame

vous pouvez en effet clôturer votre dossier.

Concernant l’acquéreur je ne sais pas si il souhaite être nommé merci de faire la mise à jour de vos clients en les contactant directement.

Elle fait valoir qu’elle n’avait pas à informer Mme [X] [T] de l’identité de l’acquéreur puisque l’agent immobilier connaissait déjà cette identité.

Les échanges de mails entre les parties montrent que la société SSDB a informé M. [O] le 28 janvier 2020 de la réclamation de Mme [X] [T] en lui demandant de lui répondre directement. M. [O] a refusé.

Aux termes du mandat, la société SSDB était tenue d’informer Mme [X] [T]. En refusant de lui confirmer le nom de son acquéreur au seul prétexte qu’il refusait lui même de le faire elle a manqué à son obligation contractuelle.

La société SSDB ajoute que M.[O] lui a dissimulé la visite du bien.

Le 12 février 2020 à 8 h43 la jour de la vente M [O] a bien indiqué à la société SSDB que la fiche du bien lui a été envoyée mais qu’à l’époque il n’était pas intéressé. Il lui a assuré n’avoir jamais visité le bien avec la cabinet [X].

La société SSDB était donc informée avant la vente dès le 27 janvier 2020, que le bien que le bien avait été présenté à M. [O].

La société SSDB a néanmoins poursuivi la cession au mépris de ses engagements vis à vis de l’agence immobilière.

Elle a pris le risque de se voir opposer l’application des clauses pénales prévues au mandat de vente.

2) Les clauses pénales

Le mandat de vente comporte des clauses pénales à la charge du mandant :

CLAUSES PÉNALES

En cas de non respect de la clause ci dessus nous vous verserons une indemnité compensatrice forfaitaire correspondant à la moitié de la rémunération convenue.

Par ailleurs en cas de vente à un acquéreur ayant eu connaissance de la vente du bien par votre intermédiaire ou refus de vendre à un acquéreur qui nous aurait été présenté par vous nous vous verserons une indemnité compensatrice forfaite égale à la rémunération prévue au mandat.

La société SSDB considère qu’elles n’ont pas vocation à s’appliquer dans la mesure où la vente à la société LA BOURRICHE a été réalisée à des conditions différentes de celles fixées au mandat de vente pour un montant de 160 000 euros.

Le fonds de commerce a été cédé à la société LA BOURRICHE au prix de 100.000 euros mais le mandat régularisé avec Mme [X] [T] fait la loi des parties.

Il ne subordonnait pas la mise en oeuvre des clauses pénales, applicables du seul fait de la transgression par le mandant de l’interdiction qui leur était faite de traiter par l’entremise d’un autre intermédiaire avec un acquéreur qui lui aurait été préalablement présenté par l’agence [X] à l’exigence supplémentaire que la vente ait été conclue aux mêmes conditions que celles préalablement négociées par l’intermédiaire de l’agence.

Les deux clauses pénales ont donc vocation s’appliquer cumulativement.

L’indemnité due en raison du refus d’informer la mandataire sur le nom de l’acquéreur s’élève à la moitié de la rémunération prévue au contrat.

Le mandat prévoit des honoraires équivalents à 12% de la totalité du prix de cession (TVA incluse au taux en vigueur soit 20%).

Le montant de l’indemnité due à Mme [X] [T] au titre de la clause pénale pour défaut d’informer s’élève donc à la somme de 12 000 /2 , soit 6000 euros.

La SARL SSDB doit donc régler à Mme [X] [T] la somme de 6000 euros.

Le montant de l’indemnité due à Mme [X] [T] au titre de la clause pénale relative au droit de suite s’élève à la somme de 12 000 euros.

La SARL SSDB doit donc régler à Mme [X] [T] la somme de 12 000 euros.

Pour échapper à ces condamnations, la société SSDB fait valoir que Mme [X] [T] a failli à son obligation de trouver un acquéreur pour une vente à hauteur de 160 000 euros.

Mme [X] [T] justifie avoir présenté le bien à M. [O]. La société SSBD ne démontre pas sa négligence à ce titre. La vente au prix du mandant est

toujours aléatoire, les parties étant régulièrement amenées à le négocier. C’est

bien du reste ce qu’il advenu avec la société LA BOURRICHE qui a pu obtenir le fonds de commerce à un prix plus avantageux.

La demande de la société SSDB tendant à la réduction du montant des indemnités dues à Mme [X] [T] n’est pas justifiée

Le jugement est confirmé de ce chef.

M. [O]

L’acquéreur dont le comportement fautif a fait perdre à l’agent immobilier, par l’entremise duquel il a été mis en relation avec le vendeur qui l’avait mandaté, doit réparation à cet agent immobilier de son préjudice sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

En revanche, l’acquéreur qui, après s’être contractuellement engagé à ne pas s’entendre avec le vendeur pour évincer l’agent immobilier, ne peut voir sa responsabilité recherchée que sur le fondement de la responsabilité contractuelle.

Mme [X] [T] fait valoir qu’elle a fait visiter le bien à M.[O] et qu’il a traité directement avec la société SSDB, lui faisant ainsi perdre son droit à commission.

M. [O] dément catégoriquement avoir visité le bien avec le cabinet [X].

Mme [X] [T] verse aux débats un bon de reconnaissance d’indication et de visite du 16 janvier 2019 aux termes duquel le bien lui a été présenté selon ce que le document indique :

Reconnaissons : avoir demandé et reçu à l’instant de votre cabinet les noms, adresses et conditions de vente de affaires visitées désignées ci-contre et qui nous ont été présentées par votre intermédiaire;

En conséquence et à ce titre nous nous engageons expressément à ne communiquer à personne ces renseignements qui nous sont donnés à titre personnel et confidentiel, informer de notre visite de ce jour toute personne qui pourrait à l’avenir nous présenter le même bien , nous interdire toute entente avec le vendeur ayant pour conséquence de vous évincer lors de l’achat de l’une ou de plusieurs de ces affaires.

Nous déclarons avoir été informés qu’à défaut du respect de ses engagements le présent bon de visite pourra constituer une présomption de preuve de la diligence du cabinet et de l’origine du client à l’égard du vendeur afin que le professionnel de l’immobilier désigné fasse valoir ses droits à commission.

M. [O] qui n’était pas un profane en matière de commerce a donc été clairement informé des incidences de sa reconnaissance. Il ne peut soutenir que ce bon ne l’engageait que relativement au respect de la confidentialité des informations délivrées par l’agent immobilier alors qu’il lui faisait aussi interdiction de toute entente avec le vendeur sans l’intermédiaire de l’agent immobilier.

Ce bon de reconnaissance d’indication et de visite vaut bon de visite du bien litigieux à défaut pour M. [O] d’apporter des éléments de nature à établir le contraire.

Pour autant M. [O] a signé un bon de visite comportant diverses obligations. Au titre de ce bon, il était contractuellement tenu envers l’agent immobilier. Mme [X] [T] invoque à l’encontre de M. [O] une responsabilité délictuelle alors qu’elle devait agir sur le fondement de sa responsabilité contractuelle.

La demande de Mme [X] [T] à l’encontre de M. [O] est donc mal fondée.

Mme [X] [T] est déboutée de ses demandes à l’égard de M. [O]

Le jugement est infirmé de ce chef.

L’appel en garantie

La société SSDB sollicite la garantie de M. [O] et de la société LA BOURRICHE aux motifs que M. [O] lui a dissimulé la visite du bien avant la vente.

La société SSDB était tenue d’indiquer au cabinet [X] le nom de son acquéreur ce qu’elle n’a pas respecté au moment de la demande de Mme [X] [T] le 27 janvier 2019.

Elle a été informée par l’agence immobilière, avant la vente, que M. [O] et sa compagne avaient visité le bien.

Elle ne peut donc solliciter la garantie de M. [O] et de sa société pour la relever et garantir du paiement de la somme de 6 000 euros.

En outre le mandat lui faisait interdiction de vendre sans le concours de l’agence [X] à un acquéreur présenté par cette agence.

La société SSDB savait avant la cession, que le bien avait été présenté à M. [O]. Elle a poursuivi la cession à ses risques et ne peut donc se décharger de sa responsabilité en sollicitant la garantie de M. [O] et de la société LA BOURRICHE.

Ses demandes sont rejetées.

Le jugement est confirmé.

Les demandes annexes

Il n’est pas inéquitable de condamner la société SSDB à payer à Mme [X] [T] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’est pas inéquitable de rejeter la demande de M. [O] et de la société LA BOURRICHE sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société SSDB est condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ce qu’il a :

Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] à verser à Madame [F] [X] [T] exerçant sous l’enseigne cabinet [X] la somme de 12 000 euros à titre respectivement d’indemnité compensatrice pour non-respect du droit de suite et de dommages et intérêts ;

Condamné Monsieur [Y] [O] à verser à Madame [F] [X] [T], exerçant sous l’enseigne cabinet [X] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Confirme le jugement pour le surplus.

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne la société SSBD à payer à Mme [X] [T] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Rejette les autres demandes des parties.

Condamne la société SSDB aux dépens d’appel ;

Le Greffier, Le Président,


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