Règle de droit applicableLa règle de droit applicable dans cette affaire repose sur l’interprétation et l’application des référentiels GRH00910 et MRH00201, qui régissent les mesures d’accompagnement de la mobilité des agents de la SNCF. Selon l’article 4.1.1 du référentiel MRH00201, un agent qui accepte une nouvelle affectation entraînant un allongement de trajet domicile-travail de plus de 15 kilomètres ou de 30 minutes peut percevoir une indemnité forfaitaire de 4.000 euros. En cas d’allongement de plus de 70 kilomètres ou de 45 minutes, une indemnité compensatrice renforcée est prévue, dont le montant peut atteindre 35.000 euros, selon la situation familiale de l’agent. Textes législatifs et références juridiquesLes dispositions des référentiels sont complétées par le Code du travail, notamment l’article L1231-1, qui encadre les conditions de rupture du contrat de travail et les obligations de l’employeur en matière de mobilité. De plus, l’article 700 du Code de procédure civile permet d’allouer des frais de justice à la partie gagnante, renforçant ainsi la protection des droits des salariés dans le cadre de litiges liés à leur emploi. Les référentiels GRH00910 et MRH00201, bien qu’internes à la SNCF, ont valeur réglementaire et doivent être respectés par l’employeur dans le cadre de la gestion des ressources humaines. |
L’Essentiel : La règle de droit applicable repose sur l’interprétation des référentiels GRH00910 et MRH00201, qui régissent les mesures d’accompagnement de la mobilité des agents de la SNCF. Selon l’article 4.1.1 du référentiel MRH00201, un agent acceptant une nouvelle affectation avec un allongement de trajet domicile-travail de plus de 15 kilomètres peut percevoir une indemnité forfaitaire de 4.000 euros. En cas d’allongement de plus de 70 kilomètres, une indemnité compensatrice renforcée peut atteindre 35.000 euros, selon la situation familiale.
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Résumé de l’affaire : Un agent de la société SNCF Voyageurs, engagé en tant que chef de bord, a été affecté à la gare de [Localité 11]. En 2019, la société a décidé de transférer la résidence des agents conducteurs et contrôleurs de [Localité 11] à [Localité 10], effectif à partir du 1er septembre 2020. Dans le cadre d’un dispositif d’accompagnement, chaque agent a perçu diverses indemnités, dont une indemnité complémentaire de mobilité et une indemnité mensuelle pour couvrir les frais d’essence et d’éloignement.
L’agent a également demandé une indemnité compensatrice de changement d’affectation géographique, arguant que le changement de résidence entraînait un allongement significatif de son trajet domicile-travail. La société a accordé une indemnité supplémentaire de 4.000 euros aux agents dont le trajet avait été allongé d’au moins 15 kilomètres ou 30 minutes. Cependant, l’agent a estimé que son trajet avait été allongé de plus de 70 kilomètres ou 45 minutes, revendiquant ainsi une indemnité renforcée de 35.000 euros. Le conseil de prud’hommes de Nîmes a débouté l’agent de ses demandes par un jugement du 6 février 2023. L’agent a interjeté appel, demandant l’infirmation de cette décision et le versement de l’indemnité compensatrice, ainsi que des dommages-intérêts pour préjudice moral et financier. La société a contesté ces demandes, affirmant avoir appliqué les référentiels en vigueur et que l’agent ne justifiait pas des préjudices invoqués. La cour a confirmé le jugement de première instance concernant le déboutement des demandes de dommages-intérêts, tout en condamnant la société à verser à l’agent une somme de 27.321 euros au titre de l’indemnité compensatrice, après déduction des sommes déjà versées. La cour a également accordé une somme de 1.000 euros pour les frais de justice. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la demande d’indemnité compensatrice de changement d’affectation géographique ?La demande d’indemnité compensatrice de changement d’affectation géographique repose sur l’application des référentiels GRH00910 et MRH00201. L’article 4.1.1 du référentiel MRH00201 stipule que l’agent qui accepte une nouvelle affectation avec un allongement de trajet domicile-travail de plus de 15 kilomètres ou de plus de 30 minutes perçoit un forfait de 4 000 euros. En cas d’allongement de plus de 70 kilomètres ou de plus de 45 minutes, l’agent a droit à une indemnité compensatrice renforcée, dont le montant varie selon la situation familiale. Ainsi, l’indemnité compensatrice est déterminée en fonction de la distance et du temps de trajet supplémentaires, conformément aux dispositions des référentiels précités. Quel est le critère d’évaluation de l’allongement du trajet domicile-travail ?L’évaluation de l’allongement du trajet domicile-travail se base sur le « trajet le plus direct » entre le domicile de l’agent et son nouveau lieu de travail. La SA SNCF Voyageurs a calculé l’allongement du temps de trajet en tenant compte des conditions de circulation, notamment durant les heures de pointe, comme le précise la directive TTOO23. Les horaires de prise de service et de fin de service sont également pris en compte pour déterminer le temps de trajet effectif. L’article 4.1.1 du référentiel MRH00201 précise que l’indemnité compensatrice renforcée est versée en fonction de l’allongement du trajet, et les calculs doivent être effectués selon les données les plus représentatives. Quel est le rôle des référentiels GRH00910 et MRH00201 dans la détermination des indemnités ?Les référentiels GRH00910 et MRH00201 définissent les modalités d’accompagnement des salariés lors de changements d’affectation géographique. Le GRH00910 établit un dispositif d’accompagnement de la mobilité, tandis que le MRH00201 précise les conditions d’application des indemnités en cas de changement de résidence. L’article 4.1.1 du MRH00201 indique que les indemnités versées au titre de GRH00910 viennent en déduction des montants dus au titre de la mobilité, ce qui impacte le calcul final des indemnités. Ces référentiels visent à garantir une compensation équitable pour les agents affectés par des changements de lieu de travail, en tenant compte de leur situation personnelle et familiale. Quel est le fondement de la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral et financier ?La demande de dommages-intérêts pour préjudice moral et financier repose sur l’allégation d’un manquement de l’employeur à appliquer les référentiels GRH00910 et MRH00201. L’appelant soutient que l’absence de compensation adéquate pour le changement de lieu de travail a entraîné un préjudice. Cependant, le jugement souligne que l’appelant ne justifie pas d’une inégalité de traitement par rapport à ses collègues, ni d’un préjudice concret résultant de la situation. Le jugement du 30 décembre 2022 a confirmé que la SA SNCF Voyageurs a appliqué les référentiels de manière appropriée, ce qui limite la possibilité d’obtenir des dommages-intérêts. Quel est l’impact des décisions judiciaires antérieures sur la présente affaire ?Les décisions judiciaires antérieures, notamment le jugement du conseil de prud’hommes, ont un impact significatif sur la présente affaire. Le jugement du 6 février 2023 a débouté l’appelant de ses demandes, ce qui a été contesté en appel. La cour d’appel a confirmé que les référentiels avaient été appliqués correctement et que l’appelant ne justifiait pas d’un préjudice. Ainsi, les décisions antérieures établissent un cadre juridique qui limite les possibilités de succès de l’appelant dans ses nouvelles prétentions. La cour a également rappelé que les intérêts légaux courent sur les sommes à caractère salarial à compter de la demande, ce qui influence le calcul des indemnités dues. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 23/00800 – N° Portalis DBVH-V-B7H-IXRM
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION DE DEPARTAGE DE NÎMES
06 février 2023
RG :F 20/00239
[Z]
C/
S.A. SNCF VOYAGEURS
Grosse délivrée le 31 MARS 2025 à :
– Me HASSANALY
– Me VEZIAN
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 31 MARS 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de NÎMES en date du 06 Février 2023, N°F 20/00239
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 5ème chambre sociale, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l’audience publique du 28 Février 2025, où l’affaire a été mise en délibéré au 31 Mars 2025.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANT :
Monsieur [F] [Z]
né le 17 Septembre 1962 à [Localité 11]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Loubna HASSANALY de la SELEURL LOUBNA HASSANALY, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Mélissa BOUFASSA, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
S.A. SNCF VOYAGEURS
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentée par Me Aurore VEZIAN de la SELARL LEONARD VEZIAN CURAT AVOCATS, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Nicolas FRANCOIS de la SELAS FIDAL DIRECTION PARIS, avocat au barreau de MARSEILLE
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 31 Mars 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
M. [F] [Z] a été engagé par la société Sncf Voyageurs à compter du 26 février 1982, en qualité de chef de bord au sein de la Sncf Est TGV LR et affecté sur le site de la gare Sncf de [Localité 11].
La convention collective applicable est celle du ferroviaire.
En 2019, la SA SNCF Voyageurs a décidé de transférer la résidence des agents conducteurs de TGV (ADC) et contrôleurs, dont l’appelant, de [Localité 11] à [Localité 10] ce qui entraînait le transfert de leur lieu de prise de service et de fin de service de [Localité 11] à [Localité 10]. La mesure a été effective à compter du 1er septembre 2020 (au 1er décembre 2019 pour les gestionnaires de moyens).
Dans le cadre du « dispositif d’accompagnement de la mobilité résultant des mesures d’organisation et d’évolution de l’emploi », repris dans le Référentiel GRH0910, qui prévoit des mesures d’accompagnement des salariés concernés en prenant en compte leur environnement personnel et familial, chaque agent concerné a ainsi perçu au titre de ce dispositif :
– une indemnité complémentaire de mobilité d’un montant de 1.227,00 euros à 3.683,00 euros accordée sur décision du DRH conformément aux dispositions de l’annexe 6 du GRH00910 ;
– une indemnité mensuelle de 42,00 euros pendant 2 ans aux fins de couvrir les frais d’essence ;
– une indemnité de 60,00 euros pendant 2 ans au titre de l’éloignement.
Certains salariés, tel l’appelant, ont en outre sollicité l’application du référentiel MRH00201 « Mesures au soutien de la mobilité interne et externe sur la période 2019-2021 » et à ce titre une indemnité compensatrice de changement d’affectation géographique, au motif que leur
changement de résidence entraînait un allongement de leur trajet domicile-travail.
La SA SNCF Voyageur a consenti de leur verser une indemnité supplémentaire de mobilité en application de ce référentiel de 4.000 euros pour tous les personnels dont l’allongement du temps de parcours entre leur domicile et leur lieu d’affectation est au moins de 15 kilomètres ou de 30 minutes.
Toutefois, certains agents, dont l’appelant, ont estimé que cette réorganisation entraînait un allongement du trajet de plus de 70 kilomètres ou 45 minutes et ont revendiqué le paiement d’une indemnité renforcée prévue pour les agents dans cette situation, soit 35 000 euros ou plus selon la situation familiale des agents.
C’est dans ces conditions que M. [F] [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Nîmes en paiement d’indemnités lequel, par jugement de départage du 06 février 2023, a débouté le demandeur de l’intégralité de ses prétentions.
Par acte du 03 mars 2023, M. [F] [Z] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 13 février 2023.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 23 décembre 2024, M. [F] [Z] demande à la cour de :
– débouter la Sa Sncf Voyageurs de toutes ses demandes, fins et prétentions
– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes en son audience de départage du 6 février 2023 en ce qu’il a :
– débouté M. [Z] de l’ensemble de ses demandes,
– condamné M. [Z] aux entiers dépens de l’instance,
En conséquence,
– juger la nécessité d’appliquer à M. [Z] les référentiels GRH00910 et MRH00201 en raison de leur mobilité allant de [Localité 11] à [Localité 10] et ce sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard dans les 8 jours de la notification du jugement à venir,
– juger que M. [Z] remplit toutes les conditions permettant d’obtenir le versement d’une indemnité compensatrice de changement d’affectation géographique conformément à l’application du MRH00201,
– juger que M. [Z] a subi un préjudice moral, financier et une inégalité de traitement en raison de l’absence de versement de cette indemnité compensatrice de ce changement d’affectation géographique conformément à l’application MRH00201, ainsi que du manquement par sa direction à l’application intégrale des référentiels GRH00910 et GRH00936,
En conséquence,
– condamner la Sa Sncf Voyageurs au paiement de la somme de 35 000,00 euros nets à titre de rappels de salaire relatif à l’indemnité compensatrice de changement d’affectation géographique conformément à l’application du MRH00201, déduction faite de la somme de 4 000 euros bruts déjà versée, et ce sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard dans les 8 jours de la notification du jugement à venir
– condamner la Sa Sncf Voyageurs au paiement de la somme de 10 000,00 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral, financier et de la rupture d’égalité subie pour manquement à l’application des référentiels GRH00910, MRH00201 et GRH0936,
– prononcer les intérêts légaux dans les 8 jours de la notification de la décision à intervenir,
– condamner la Sa Sncf Voyageurs au paiement de la somme de 1 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Il soutient que :
– les référentiels GRH00910 et MRH00201 doivent recevoir application en raison de sa mobilité allant de [Localité 11] à [Localité 10] dès lors qu’il remplit toutes les conditions permettant d’obtenir
le versement d’une indemnité compensatrice de changement d’affectation géographique conformément à l’application du MRH00201,
– il a subi un préjudice moral, financier et une inégalité de traitement en raison de l’absence de versement de cette indemnité compensatrice de changement d’affectation géographique conformément à l’application du MRH00201, ainsi que du manquement par sa Direction à l’application intégrale des référentiels GRH00910 et GRH00936.
En l’état de ses dernières écritures en date du 27 janvier 2025 contenant appel incident, la société SNCF Voyageurs demande à la cour de :
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Nîmes (départage) en date 06 février 2023 sur les chefs de jugement critiques par l’appelant et ayant debouté M. [Z] de ses prétentions ;
Statuant à nouveau :
– dire et juger les demandes de M. [Z] non fondées ;
– débouter M. [Z] de l’ensemble de ses demandes ;
– condamner M. [Z] à payer à la Sncf la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner M. [Z] aux entiers dépens.
Elle fait valoir que :
– elle a appliqué volontairement les référentiels GRH00910 et MRH00201,
– le salarié ne justifie des préjudices qu’il invoque.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 18 octobre 2024, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 28 janvier 2025. L’affaire a été fixée à l’audience du 28 février 2025
Sur l’indemnité due en application du référentiel MRH00201
Le MRH00201 est un référentiel Voyageurs qui vient compléter les dispositions du référentiel GRH00910 (dispositif d’accompagnement de la mobilité résultant des mesures d’organisation et d’évolution de l’emploi) dans le cadre des mesures au soutien de la mobilité interne et externe sur la période 2019-2022. Ce référentiel n’est applicable qu’en présence de ‘situations d’excédents’ comme l’énonce son article 4, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, et ce que ne soutient pas l’appelant au demeurant ou, tout au moins, ne le démontre pas.
La SA SNCF Voyageurs admet que le référentiel MRH00201 a été volontairement appliqué aux personnels de l’ET TGV Sud-Est (ADC et Sédentaires) ayant vu leur résidence d’emploi transférée au service SA 2020 de [Localité 11] vers [Localité 10], fin 2019.
L’application au cas d’espèce des référentiels MRH00201 et GRH00910 n’est pas discutée.
Selon l’article 4.1.1 du référentiel MRH00201 l’agent qui accepte une nouvelle affectation qui
représente :
– un allongement de trajet domicile-travail de plus de 15 kilomètres (30 kilomètres aller-retour) ou un allongement de son temps de trajet domicile-travail de plus entre 30 et 45 minutes (60
à 90 minutes aller-retour) perçoit un forfait de 4 000 euros,
– un allongement de plus de 70 kilomètres (140 kilomètres aller-retour) ou de plus de 45 minutes (90 minutes aller-retour) entre son domicile et son nouveau lieu de travail, perçoit une indemnité compensatrice renforcée comme suit :
Forfait normal
Forfait majoré (Marié / Pacsé)
+ Par enfant à
charge
Mobilité vers l’Ile-
de-France
50.000,00 ‘
55.000,00 ‘
+ 5.000,00 ‘
Mobilité vers
d’autres régions
35.000,00 ‘
40.000,00 ‘
+ 5.000,00 ‘
Cette indemnité compensatrice renforcée de changement d’affectation géographique est ainsi versée en une seule fois ou échelonnée sur le trimestre suivant sa mutation effective, au choix discrétionnaire du salarié.
Conformément aux dispositions de l’article 4.1.1 du référentiel : ‘Le montant ainsi garanti au salarié par le dispositif cadre comprend :
– les allocations et indemnités suivantes des lors qu’elles sont acquises par le salarié au titre des référentiels GRH 00910 et GRH 00939 :
– allocation de changement de résidence,
– indemnité de changement de résidence,
– indemnité exceptionnelle de changement de résidence,
– indemnité complémentaire de mobilité,
– indemnité de changement d’emploi,
– indemnité de perte d’emploi du conjoint,
– indemnité exceptionnelle de mobilité Province vers l’Île-de-France.
auxquelles s’ajoute l’indemnité compensatrice de changement d’affectation dont le montant correspond au complement permettant d’atteindre le forfait garanti ci-dessus par le présent dispositif.’
Ainsi les sommes versées au titre du référentiel GRH00910 viennent donc en déduction des 35.000,00 euros versés au titre de la mobilité d’un agent célibataire vers une autre région.
Par contre, l’indemnité forfaitaire de 4.000,00 euros vient en sus des indemnités versées au titre du GRH00910.
Pour l’application de ce dispositif, la SA SNCF Voyageurs indique que le calcul du temps de trajet des agents commerciaux tient compte des conditions de circulation difficiles à certains créneaux horaires de la journée, notamment lorsque la prise de service (PS) ou la fin de service (FS) se situe dans les tranches horaires suivantes définies au référentiel TT00023 (‘Temps alloués au personnel de conduite pour effectuer diverses opérations au cours du service’ applicable aux agents de conduite mais pouvant être étendu aux agents commerciaux, personnel roulant) :
– entre 07h30 et 08h30 ;
– entre 11h30 et 12h30 ;
– entre 13h30 et 14h30
– entre 17h30 et 18h30.
L’appelant ne démontre pas que ces créneaux ne sont pas représentatifs.
La SA SNCF Voyageurs ajoute qu’il a ainsi été procédé au calcul du nombre de PS et FS concernées par ces horaires sur une semaine type, qu’il est ensuite effectué un calcul de la proportion de ces journées par rapport au total des journées sur le roulement, le taux de trajets effectués en période de pointe ayant été estimé à 21%, qu’enfin, une majoration de 15% sur le temps de trajet est appliquée sur ce pourcentage calculé, conformément aux dispositions de la directive TTOO23.
M. [F] [Z] conteste l’application de ce référentiel dont les pondérations sont pourtant favorables au salarié lequel ne précise pas ses horaires. Peu importe à ce titre que la SNCF ait mis en place des navettes pour desservir les gares de [Localité 11] et [Localité 10] en comptant un temps de trajet de 50 mn.
L’appelant soutient également que l’employeur aurait dû appliquer les Directives TT0026 pour les conducteurs, ou VO178 pour les contrôleurs, qui régissent le temps alloué aux agents de conduite pour effectuer diverses opérations en cours de service lesquelles fournissent le temps de marche à pied entre le point où les agents descendent du train jusqu’au point le plus extrême des quais en sorte que c’est ce temps d’allongement qui aurait dû être pris en compte par l’employeur. Or le référentiel MRH00201 en l’espèce applicable n’envisage que le trajet domicile-travail, soit le point de prise et de fin de service, étant constaté que le temps de descente du train, de marche sur le quai puis de passage par les plate formes et sortie de la gare était déjà du temps qu’accomplissait le salarié, sa nouvelle affectation n’ayant rien modifié sur ce plan.
Ainsi, pour le cas de M. [F] [Z], il convient de prendre en compte le trajet suivant :
– entre le domicile de l’agent et son ancienne résidence administrative, en l’espèce [Localité 11] au [Adresse 1] ;
– et le trajet entre le domicile de l’agent et sa nouvelle résidence administrative, en l’espèce [Localité 10] au [Adresse 2].
Sachant que la SA SNCF Voyageurs prend en charge les frais de parking sur [Localité 11], le trajet le plus direct en train ( gratuit pour les agents) occasionne, selon la SA SNCF Voyageurs, un allongement entre les gares de [Localité 11] et [Localité 10], de :
– 43 minutes en TER ;
– 33 minutes en TGV.
Pour ces raisons, la SA SNCF Voyageurs a versé à M. [F] [Z] l’indemnité de 4.000,00 euros.
La SNCF Voyageurs avance que seule la notion de ‘trajet le plus direct’ doit être retenue pour apprécier les distances. En effet, en l’absence de toute précision du référentiel, seul le trajet le plus direct doit être pris en considération indépendamment des coûts de trajet, notamment celui de l’autoroute. A ce titre, l’appelant produit un document intitulé « Précisions et préconisations
pour la mise en ‘uvre du dispositif cadre » préconisant des trajets sans péage alors que l’intimée dénie toute valeur réglementaire à ce document contrairement aux référentiels qui ont valeur réglementaire, il n’est justifié ni de l’origine ni de la mise en vigueur de ce document qui sera donc écarté des débats. Il ne saurait être pris en compte un autre trajet que celui qualifié de ‘plus direct’ sauf à tenir compte des choix personnels des agents dans la détermination de leur trajet qui échapperaient à tout contrôle et à toute analyse rationnelle. Il suffit d’imaginer un salarié qui décide d’utiliser une bicyclette pour prétendre dépasser nettement les 45 mn d’allongement de trajet requis.
Concernant M. [F] [Z], la SA SNCF Voyageurs a calculé, en application de la directive TTOO23 visée ci-dessus, que l’allongement du temps de trajet, moyenne prise entre les calculs de MAPPY et VIA MICHELIN, est de 33,5 minutes, soit 35 minutes après majoration pour tenir compte des heures de pointe et de 49,7 kilomètres par trajet, soit un seuil inférieur à celui permettant le déclenchement du paiement de l’indemnité compensatrice renforcée de changement d’affectation géographique.
La cour constate que les données résultant de la consultation des sites Mappy et Via Michelin confirment un allongement du temps de trajet ainsi que suit :
– de 7 mn sur le site de [Localité 11] selon le salarié, de 4 mn selon la moyenne des sites Mappy et ViaMichelin,
– du domicile du salarié au site montpelliérain : 50 mn et 59 mn selon les sites Mappy et ViaMichelin, soit une moyenne de 54,5 mn, soit en donnée majorée : (54.5×15%x29%) + 54,5 = 56,9 – 4 (valeur favorable à la salariée) = 52,9 mn.
M. [F] [Z] peut prétendre au paiement de l’indemnité forfaitaire de 35.000,00 euros dont il convient de déduire les indemnités versées au titre des GRH00910 et GRH00939 soit :
35.000,00 euros – 7.679,00 euros = 27.321,00 euros.
M. [F] [Z] prétend que les frais professionnels sont exclus de l’assiette des cotisations de sécurité sociale et de celle de la CSG et de la CRDS.
Or le caractère forfaitaire des sommes allouées est exclusif de toute notion de frais professionnels, l’indemnité allouée ayant pour objet d’accompagner le salarié dans le processus de mobilité géographique. Il sera à cet égard rappelé que l’indemnité est versée à l’agent ‘Qu’il choisisse de déménager ou pas’ en sorte que ces indemnités n’ont nullement pour objet de couvrir des frais réellement exposés étant au surplus rappelé que les trajets en train pour rejoindre le lieu de travail et frais de parking sont pris en charge par l’employeur. En outre, ne constituent pas des frais professionnels les frais qu’engage le salarié pour se rendre sur son lieu de travail.
C’est donc à juste titre que l’employeur a soumis l’indemnité à cotisations et contributions sociales.
Sur la demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral, financier et de la rupture d’égalité subie pour manquement à l’application des référentiels GRH00910, MRH00201 et GRH0936, reconnue par le jugement rendu le 30 décembre 2022
M. [F] [Z] expose que dans un premier temps, la société SNCF a refusé d’appliquer les dispositions fixées par les référentiels, qu’au mépris de cette opposition, la SNCF n’a prévu aucune réelle compensation pour les agents pour faire face à une telle modification de leur lieu de travail de [Localité 11] vers [Localité 10], que pour seules « compensations financières », les salariés concernés ont bénéficié :
– d’une prime unique de 1227,00 euros qui, en tout état de cause est majorée en fonction du nombre d’enfants à charge et 1227 euros d’indemnité accordé par le directeur d’établissement. – du remboursement de leurs frais d’essence à hauteur de 42,00 euros par mois pendant 2 ans et sur facture,
– d’une indemnité d’éloignement de 62 euros par mois/pendant 2 ans et proratisé en fonction du temps partiel de certains salariés.
Il considère que ces avantages sont bien insignifiants en comparaison aux incidences financières de la modification de leur lieu de travail de [Localité 11] à [Localité 10] sur le long terme et non uniquement limitée à une durée de deux ans, qu’en cours d’instance devant le conseil de prud’hommes, l’employeur a fini par reconnaître l’application du référentiel MRH00201 en versant la somme forfaitaire de 4 000 euros bruts au personnel partie à l’instance, et même, pour certains, les 45 000 euros sollicités, preuve de la réticence abusive de l’employeur et de l’inégalité de traitement subie par les salariés.
Or d’une part M. [F] [Z] ne justifie pas en quoi sa situation aurait été traitée différemment de ses collègues auxquels il se compare et qui ont rencontré les mêmes difficultés que lui avant d’obtenir, ou non, satisfaction selon leur situation personnelle, d’autre part il ne justifie d’aucun préjudice dans la mesure où la SA SNCF Voyageur a appliqué spontanément le référentiel MRH00201 que rien ne justifiait d’appliquer étant rappelé qu’il ne concerne que les ‘situations d’excédents’ dont nul ne démontre que tel était le cas en l’espèce.
En effet, concernant M. [H], l’intimée démontre que l’allongement du temps de trajet était supérieur à 45 minutes en sorte qu’il a bénéficié du versement de l’indemnité renforcée, il en allait de même concernant M. [X] ( 95 minutes A/R) et de M. [J] (93 minutes A/R). Aucune inégalité de traitement ne peut être invoquée. Pour les autres salariés que cite M. [F] [Z] ces derniers n’ont obtenu satisfaction qu’après avoir obtenu une décision en leur faveur de la part du conseil de prud’hommes, ils se trouvaient donc dans la même situation que l’appelant. La différence de traitement s’explique donc par la décision intervenue.
M. [F] [Z] évoque la situation de salariés déplacés d'[Localité 7] à [Localité 9] qui auraient perçu l’indemnité compensatrice renforcée de changement d’affectation géographique alors qu’il reconnaît lui-même que la distance entre ces deux villes est de 104 Km soit un allongement de plus de 70 kilomètres.
Enfin, concernant le préjudice moral et financier, il appert que M. [F] [Z] a fait le choix d’utiliser son véhicule personnel, que l’employeur est tenu par les seuls référentiels concernant l’indemnisation des mobilités intervenues lesquels s’imposent aux parties, M. [F] [Z] ayant fait le choix de demeurer sur [Localité 11] ( avant de déménager sur [Localité 8]) après avoir librement accepté son changement de lieu d’affectation.
Eu égard à ce qui précède, M. [F] [Z] ne rapporte pas la preuve d’une faute de la part de l’employeur à l’origine du préjudice financier et moral dont il demande réparation.
Il convient tant pour les motifs qui précèdent que ceux non contraires des premiers juges de confirmer de ce chef le jugement déféré.
L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner la SA SNCF Voyageurs à payer à M. [F] [Z] la somme de 1.000,00 euros à ce titre.
LA COUR,
Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté M. [F] [Z] de sa demande en paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, financier et de la rupture d’égalité subie pour manquement à l’application des référentiels GRH00910, MRH00201 et GRH0936,
Réforme pour le surplus et statuant à nouveau,
Condamne la SA SNCF Voyageurs à payer à M. [F] [Z] la somme de 27.321,00 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de changement d’affectation géographique,
Rappelle que les intérêts au taux légal courent sur les sommes à caractère salarial à compter de la réception par l’employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation, et à défaut de demande initiale, à compter de la date à laquelle ces sommes ont été réclamées, que s’agissant des créances salariales à venir au moment de la demande, les intérêts moratoires courent à compter de chaque échéance devenue exigible, et qu’ils courent sur les sommes à caractère indemnitaire, à compter du jugement déféré sur le montant de la somme allouée par les premiers juges et à compter du présent arrêt pour le surplus ;
Déboute pour le surplus,
Condamne la SA SNCF Voyageurs à payer à M. [F] [Z] la somme de 1.000,00 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SA SNCF Voyageurs aux dépens de première instance et d’appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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