Maintien des soins psychiatriques sous contrainte : évaluation des droits et des risques associés.

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Maintien des soins psychiatriques sous contrainte : évaluation des droits et des risques associés.

L’article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique impose que toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement soit informée de manière appropriée à son état de la décision d’admission et des raisons qui la motivent, ainsi que de sa situation juridique, de ses droits et des voies de recours qui lui sont ouvertes. En cas de contestation de la régularité des décisions administratives, l’article L. 3216-1 du même code stipule que la régularité peut être contestée devant le juge, mais que l’irrégularité n’entraîne la mainlevée de la mesure que si elle a causé une atteinte aux droits de la personne concernée. Par ailleurs, l’article L. 3213-1 précise que l’admission en soins psychiatriques doit être prononcée par arrêté du représentant de l’État, sur la base d’un certificat médical circonstancié, et que le juge doit s’assurer de l’existence d’un risque pour la sûreté des personnes ou d’une atteinte grave à l’ordre public au moment de statuer. Dans le cas présent, les certificats médicaux et les décisions administratives établissent que l’état de santé mentale de M. [D] nécessite des soins sous forme d’hospitalisation complète, justifiant ainsi la poursuite de la mesure de soins contraints.

L’Essentiel : L’article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique impose que toute personne sous soins psychiatriques sans consentement soit informée de sa situation juridique, de ses droits et des voies de recours. L’article L. 3216-1 stipule que la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge, mais l’irrégularité n’entraîne la mainlevée de la mesure que si elle a causé une atteinte aux droits de la personne. L’admission en soins psychiatriques doit être prononcée par arrêté du représentant de l’État.
Résumé de l’affaire :

Contexte de la mesure de curatelle

Le tribunal d’instance de Rennes a décidé, par jugement du 06 mars 2017, de maintenir un patient sous mesure de curatelle simple pour une durée de dix ans, avec son père désigné comme curateur.

Admission en soins psychiatriques

Le 02 août 2023, un préfet a ordonné l’admission du patient en soins psychiatriques sans consentement alors qu’il était incarcéré. Cette mesure a été prolongée le 06 septembre 2023, avec un transfert vers un centre hospitalier.

Évolution de l’hospitalisation

L’hospitalisation du patient a été modifiée à plusieurs reprises, avec des périodes d’hospitalisation complète et d’autres formes de soins. Le 24 mai 2024, le patient a fugué, mais a été retrouvé et réhospitalisé.

Suivi médical et décisions judiciaires

Des certificats médicaux ont été régulièrement établis, indiquant la nécessité de maintenir le patient en hospitalisation complète en raison de troubles psychotiques sévères. Le préfet a saisi le tribunal judiciaire de Rennes pour statuer sur la mesure d’hospitalisation complète.

Confirmation de l’hospitalisation complète

Le 27 septembre 2024, le tribunal a autorisé la poursuite de l’hospitalisation complète, décision confirmée par la cour d’appel le 15 octobre 2024. Les demandes de mainlevée de la mesure par le patient ont été rejetées.

Changements dans la prise en charge

Le 22 novembre 2024, un changement de forme de la prise en charge a été décidé, mais le 03 décembre 2024, le préfet a ordonné une réadmission en hospitalisation complète, confirmée par un certificat médical.

Appel et audience

Le patient a interjeté appel de l’ordonnance du 13 décembre 2024, et une audience a eu lieu le 26 décembre 2024, où des questions sur la régularité des notifications ont été soulevées.

Décision finale

La cour a confirmé l’ordonnance de maintien de l’hospitalisation complète, considérant que l’état de santé du patient nécessitait des soins continus et qu’il existait un risque pour la sûreté des personnes. Les dépens ont été laissés à la charge du trésor public.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

Aux termes de l’article R. 3211-18 du Code de la santé publique, le délai d’appel est de dix jours à compter de la notification de l’ordonnance.

Selon l’article R. 3211-19 dudit Code, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d’appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l’heure.

En l’espèce, le 20 décembre 2024, le patient a formé un appel de la décision du magistrat en charge du contentieux des hospitalisations sous contrainte du tribunal judiciaire de Rennes du 13 décembre 2024.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité de la procédure

La saisine du juge prévue par l’article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique doit être accompagnée des avis et pièces tel que prévu par les articles R. 3211-12, -24 et -26 du même code afin de permettre au juge judiciaire de contrôler la régularité des décisions administratives et le cas échéant de statuer sur leur contestation.

Aux termes de l’article L. 3216-1 du Code de la santé publique, la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge, et en cas d’irrégularité, celle-ci n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l’objet.

En l’espèce, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l’exposé des faits et de la procédure que celle-ci est contestée.

L’article L. 3211-3 du code de la santé publique dispose :

‘Toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état, de la décision d’admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l’admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l’article L. 3211-12-1.

L’avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible’.

La notification au patient de la décision d’admission du 3 décembre 2024 n’est en effet pas datée. Figure cependant la signature de l’intéressé ainsi que son nom de manière manuscrite dont il n’indique pas qu’elle ne provient pas de sa main.

Il sera rappelé qu’il a réintégré le CH de [Localité 5] le 3 décembre 2024 où il était en voyage pathologique et a été transféré au centre hospitalier spécialisé [2] le 4 décembre 2024.

Le certificat médical circonstancié du 3 décembre 2024 établi par le docteur [L] fait état d’un état de décompensation aigu.

Aucun élément ne permet d’affirmer que cette notification est intervenue postérieurement au 4 décembre 2024.

S’agissant de la notification de la décision de maintien du 6 décembre 2024, si celle-ci n’est pas signée par le patient, il n’allègue pas qu’il n’est pas l’auteur de la date apposée de manière manuscrite (6/12/2024) et de la croix figurant devant l’item ‘Reconnaît avoir été informé de sa situation juridique, de ses droits et voies de recours’.

Aucune atteinte aux droits du patient n’est dès lors caractérisée, étant relevé qu’il avait déjà fait l’objet d’une hospitalisation sous ce même régime antérieurement et qu’il a été utilement en mesure de faire valoir ses droits.

Sur le fond

Le contrôle de la régularité comprend notamment le contrôle du bien-fondé des décisions administratives, le juge judiciaire devant rechercher si les certificats médicaux produits sont suffisamment précis et circonstanciés au regard des conditions légales exigées pour des soins sans consentement ; cependant le juge n’a pas à se substituer à l’autorité médicale notamment sur l’évaluation du consentement, du diagnostic ou des soins.

Aux termes de l’article L. 3213-1 du Code de la santé publique, ‘le représentant de l’Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d’un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement d’accueil, l’admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l’admission en soins nécessaire.

Il en résulte qu’en cas de décision prise par le représentant de l’Etat ou par l’autorité judiciaire, le juge doit s’assurer, au moment où il statue, qu’il existe un risque pour la sûreté des personnes ou une atteinte grave à l’ordre public et il doit le faire ressortir dans sa décision.

En l’espèce, le patient est actuellement sous le coup d’un arrêté du préfet du 6 décembre 2024 qui relève que ses troubles mentaux compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

L’établissement de santé a produit un certificat médical du Dr. [H] établi le 24 décembre 2024 qui décrit les troubles suivants :

‘Patient hospitalisé dans les suites de troubles du comportement sur la voie publique. Ce jour, stabilisation précaire du trouble psychiatrique chronique pour lequel il est suivi. Maintien des soins sous la forme d’une hospitalisation complète et continue nécessaire’.

Il est dès lors établi que les soins sont indispensables, l’état de santé mentale du patient étant encore précaire, et que sans soins adaptés, il existe un risque d’atteinte à l’ordre public ou à la sûreté des personnes.

Les propos décousus du patient à l’audience sont en concordance avec les certificats et avis précités.

La mainlevée de l’hospitalisation complète du patient apparaissant prématurée, il conviendra de confirmer l’ordonnance entreprise.

Sur les dépens

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

COUR D’APPEL DE RENNES

N° 253/2024 – N° RG 24/00675 – N° Portalis DBVL-V-B7I-VPOA

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3211-12-4 du code de la santé publique

Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère à la cour d’appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l’article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assistée de Patricia IBARA, greffière,

Statuant sur l’appel transmis par courriel émanant du centre hospitalier [2] de [Localité 3] reçu le 20 Décembre 2024 et formé par :

M. [N] [D], né le 11 Juin 1968 à [Localité 3]

[Adresse 1]

actuellement hospitalisé au centre hospitalier [2] de [Localité 3]

ayant pour avocat Me Marie-laure LEVILLAIN, avocat au barreau de RENNES

d’une ordonnance rendue le 13 Décembre 2024 par le magistrat en charge des hospitalisations sous contrainte du tribunal judiciaire de RENNES qui a autorisé le maintien de son hospitalisation complète ;

En présence de Monsieur [N] [D], régulièrement avisé de la date de l’audience, assisté de Me Marie-laure LEVILLAIN, avocat

En l’absence du mandataire judiciaire à la protection des majeurs, Monsieur [D] [O], curateur, régulièrement avisé,

En l’absence de représentant du préfet d’Ille et Vilaine, régulièrement avisé, qui a fait parvenir ses observations par courriel reçu le 24 décembre 2024, lesquelles ont été mises à disposition des parties,

En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur Yves DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 23 décembre 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

En l’absence du représentant de l’établissement de soins, régulièrement avisé,

Après avoir entendu en audience publique le 26 Décembre 2024 à 11 H 00 l’appelant et son avocat en leurs observations,

A mis l’affaire en délibéré et ce jour par mise à disposition au greffe, a rendu la décision suivante :

EXPOSÉ DU LITIGE

Par jugement du 06 mars 2017, le juge des tutelles du tribunal d’instance de Rennes a maintenu M. [N] [D] sous mesure de curatelle simple pour dix ans et a maintenu son père, M. [O] [D], en qualité de curateur.

Par arrêté du 02 août 2023 du préfet d’Ille-et-Vilaine, M. [D], incarcéré au centre pénitentiaire de [Localité 6], a été admis en soins psychiatriques sans consentement.

Par arrêté du 06 septembre 2023, le préfet d’Ille-et-Vilaine, en raison de la levée d’écrou, a maintenu la mesure de soins psychiatriques de M. [D] avec transfert au centre hospitalier [2] (CH[2]) à compter du 11 septembre 2023.

L’hospitalisation de M. [D] s’est poursuivie sous une autre forme que l’hospitalisation complète.

Le patient a été réintégré en hospitalisation complète le 24 mai 2024.

Le certificat mensuel du 05 juin 2024 du Dr [U] a rapporté que M. [D] avait fugué de l’établissement de santé rennais le 26 mai 2024. Il a été retrouvé à [Localité 4] et hospitalisé au centre hospitalier de cette ville, avant d’être transféré le 04 juin 2024 au centre hospitalier [2] de [Localité 3].

L’hospitalisation de M. [D] s’est poursuivie sous une autre forme que l’hospitalisation complète, par décision du préfet d’Ille-et-Vilaine du 14 août 2024 prise au vu d’un certificat médical et d’un programme de soins du Dr [U] du 13 août 2024. Le patient est sorti effectivement en programme de soins le 21 août 2024.

Le certificat mensuel du 20 septembre 2024 du Dr [Y] [P] a expliqué que l’équipe soignante avait été informée le 16 septembre 2024 de l’hospitalisation de M. [D] au centre hospitalier de [Localité 4] dans un contexte de voyage pathologique décrit dans un certificat du Pr [W] [E] le 19 septembre 2024. Le patient a été transféré au centre hospitalier [2] et réintégré en hospitalisation complète par arrêté préfectoral du 25 septembre 2024.

Le certificat médical de saisine du magistrat en charge du contentieux des hospitalisations sous contrainte établi le 25 septembre 2024 par le Dr [U] a indiqué que M. [D] était suivi en programme de soins pour des troubles psychotiques sévères, mais avait été réintégré en hospitalisation complète suite à un voyage pathologique au centre hospitalier de [Localité 4]. Le médecin a estimé que l’état de santé de M. [D] relevait de l’hospitalisation complète.

Par requête reçue au greffe le 25 septembre 2024, le préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le tribunal judiciaire de Rennes afin qu’il soit statué sur la mesure d’hospitalisation complète.

Par ordonnance en date du 27 septembre 2024, le magistrat en charge du contentieux des hospitalisations sous contrainte du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé la poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur [D]. La cour d’appel de Rennes a confirmé la décision le 15 octobre 2024.

Par décision du 19 novembre 2024, le magistrat du tribunal judiciaire de Rennes en charge du contentieux des hospitalisations sans consentement a rejeté la requête du patient tendant à la mainlevée de la mesure de soins contraints, décision confirmée par la cour d’appel de Rennes le 3 décembre 2024.

Par arrêté préfectoral du 22 novembre 2024, M. [D] a fait l’objet d’un changement de forme de la prise en charge des soins sans consentement et été admis à compter du 22 novembre 2024 sous le régime du programme de soins.

Par arrêté du 3 décembre 2024, le préfet d’Ille-et-Vilaine a ordonné la réadmission en hospitalisation complète et continue de M. [D].

Par arrêté du 6 décembre 2024, le préfet d’Ille-et-Vilaine a maintenu la mesure de soins psychiatriques de M. [D] au centre hospitalier spécialisé [2] de [Localité 3] pour une durée de 6 mois à compter du 7 décembre 2024.

Le certificat médical de saisine du magistrat en charge du contentieux des hospitalisations sous contrainte établi le 9 décembre 2024 par le Dr [L] a décrit les troubles suivants :

‘Patient hospitalisé dans le cadre d’une décompensation de son trouble psychiatrique chronique.

Ce jour, calme et compilant à l’échange, l’humeur est basse sans idée noire ni suicidaire. Il persiste une désorganisation idéique et affective avec diffluence du discours, trouble du cours de la pensée, propos énigmatiques. L’insight est précaire de même que l’adhésion aux soins et aux traitements. L’état du patient impose un maintien de la mesure SDRE sous la forme d’une hospitalisation complète et continue’.

Par requête reçue au greffe le 9 décembre 2024, le préfet d’Illet-et-Vilaine a saisi le tribunal judiciaire de Rennes afin qu’il soit statué sur la mesure d’hospitalisation complète.

Par ordonnance en date du 13 décembre 2024, le magistrat en charge du contentieux des hospitalisations sous contrainte du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé la poursuite de l’hospitalisation complète.

M. [D] a interjeté appel de l’ordonnance du 13 décembre 2024 par email émanant du centre hospitalier spécialisé [2] contenant un courrier de M. [D], reçu au greffe de la cour d’appel de Rennes le 20 décembre 2024 à 13h02.

Le 23 décembre 2024, le ministère public, auquel la procédure et les pièces ont été communiquées, a sollicité par message porté au dossier la confirmation de l’ordonnance et il en a été donné connaissance à M. [D] ainsi qu’à son conseil qui a pu consulter le dossier préalablement.

Le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine a indiqué par courrier du 24 décembre 2024 qu’il ne serait pas présent à l’audience et a sollicité le maintien de la mesure en hospitalisation complète au regard du certificat médical mensuel du 12 décembre 2024.

Le certificat de situation daté du 24 décembre 2024 établi par le Dr [H], dont il a été donné connaissance aux parties, mentionne que le maintien des soins sous contrainte sous la forme d’une hospitalisation complète et continue de M. [D] est nécessaire et que l’intéressé se rendra seul à l’audience de la cour d’appel avant de réintégrer l’unité d’hospitalisation.

M. [O] [D], curateur, a été avisé par courrier du 23 décembre 2024 de la tenue de l’audience.

A l’audience du 26 décembre 2024, M. [D] était présent ainsi que son conseil, lequel a fait valoir que la notification de la décision d’admission du 3 décembre 2024 n’est pas datée et que la notification de la décision de maintien du 6 décembre 2024 n’est pas signée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l’appel :

Aux termes de l’article R. 3211-18 du Code de la santé publique, le délai d’appel est de dix jours à compter de la notification de l’ordonnance.

Selon l’article R. 3211-19 dudit Code, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d’appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l’heure.

En l’espèce, le 20 décembre 2024, M. [D] a formé un appel de la décision du magistrat en charge du contentieux des hospitalisations sous contrainte du tribunal judiciaire de Rennes du 13 décembre 2024.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité de la procédure :

La saisine du juge prévue par l’article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique doit être accompagnée des avis et pièces tel que prévu par les articles R. 3211-12, -24 et -26 du même code afin de permettre au juge judiciaire de contrôler la régularité des décisions administratives et le cas échéant de statuer sur leur contestation.

Aux termes de l’article L. 3216-1 du Code de la Santé publique, la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge, et en cas d’irrégularité, celle-ci n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l’objet.

En l’espèce, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l’exposé des faits et de la procédure que celle-ci est contestée.

L’article L. 3211-3 du code de la santé publique dispose :

‘Toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état, de la décision d’admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l’admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l’article L. 3211-12-1.

L’avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible’.

La notification à M. [D] de la décision d’admission du 3 décembre 2024 n’est en effet pas datée. Figure cependant la signature de l’intéressé ainsi que son nom de manière manuscrite dont il n’indique pas qu’elle ne provient pas de sa main.

Il sera rappelé qu’il a réintégré le CH de [Localité 5] le 3 décembre 2024 où il était en voyage pathologique et a été transféré au centre hospitalier spécialisé [2] le 4 décembre 2024.

Le certificat médical circonstancié du 3 décembre 2024 établi par le docteur [L] fait état d’un état de décompensation aigu.

Aucun élément ne permet d’affirmer que cette notification est intervenue postérieurement au 4 décembre 2024.

S’agissant de la notification de la décision de maintien du 6 décembre 2024, si celle-ci n’est pas signée par M. [D], il n’allègue pas qu’il n’est pas l’auteur de la date apposée de manière manuscrite (6/12/2024) et de la croix figurant devant l’item ‘Reconnaît avoir été informé de sa situation juridique, de ses droits et voies de recours’.

Aucune atteinte aux droits de M. [D] n’est dès lors caractérisée, étant relevé qu’il avait déjà fait l’objet d’une hospitalisation sous ce même régime antérieurement et qu’il a été utilement en mesure de faire valoir ses droits.

Sur le fond :

Le contrôle de la régularité comprend notamment le contrôle du bien-fondé des décisions administratives, le juge judiciaire devant rechercher si les certificats médicaux produits sont suffisamment précis et circonstanciés au regard des conditions légales exigées pour des soins sans consentement ; cependant le juge n’a pas à se substituer à l’autorité médicale notamment sur l’évaluation du consentement, du diagnostic ou des soins.

Aux termes de l’article L. 3213-1 du Code de la santé publique, ‘le représentant de l’Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d’un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement d’accueil, l’admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l’admission en soins nécessaire .

Il en résulte qu’en cas de décision prise par le représentant de l’Etat ou par l’autorité judiciaire, le juge doit s’assurer, au moment où il statue, qu’il existe un risque pour la sûreté des personnes ou une atteinte grave à l’ordre public et il doit le faire ressortir dans sa décision.

En l’espèce, M. [D] est actuellement sous le coup d’un arrêté du préfet du 6 décembre 2024 qui relève que ses troubles mentaux compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

L’établissement de santé a produit un certificat médical du Dr. [H] établi le 24 décembre 2024 qui décrit les troubles suivants :

‘Patient hospitalisé dans les suites de troubles du comportement sur la voie publique. Ce jour, stabilisation précaire du trouble psychiatrique chronique pour lequel il est suivi. Maintien des soins sous la forme d’une hospitalisation complète et continue nécessaire’.

Il est dès lors établi que les soins sont indispensables, l’état de santé mentale de M. [D] étant encore précaire, et que sans soins adaptés, il existe un risque d’atteinte à l’ordre public ou à la sûreté des personnes.

Les propos décousus de M. [D] à l’audience sont en concordance avec les certificats et avis précités.

La mainlevée de l’hospitalisation complète de M. [D] apparaissant prématurée, il conviendra de confirmer l’ordonnance entreprise.

Sur les dépens :

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Nous, Anne-Emmanuelle PRUAL, conseillère déléguée par monsieur le Premier Président de la cour d’appel de Rennes, statuant publiquement et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Reçoit M. [D] en son appel,

Confirme l’ordonnance entreprise,

Laisse les dépens à la charge du trésor public.

Fait à Rennes, le 26 Décembre 2024 à 15 heures.

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,

Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère

Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à M. [N] [D], à son avocat, au CH et ARS/tiers demandeur/curateur-tuteur,

Le greffier,

Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et magistrat en charge des hospitalisations sous contrainte,

Le greffier,


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