Règle de droit applicableLa liquidation des régimes matrimoniaux, notamment en matière de récompense due par la communauté à un époux pour des dépenses effectuées au profit de celle-ci, est régie par les dispositions des articles 1433 et suivants du Code civil. L’article 1433 précise que la preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, y compris par témoignages et présomptions. Cela signifie qu’un époux peut revendiquer une récompense pour des sommes investies dans la communauté, même en l’absence de documents formels, à condition de démontrer que ces sommes ont effectivement profité à la communauté. Textes législatifs pertinentsL’article 1433 du Code civil dispose : « La preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, même par témoignages et présomption. » De plus, l’article 1401 du même code établit que les biens acquis pendant le mariage sont présumés être des biens communs, sauf preuve du contraire. Cela implique que les dépenses effectuées par un époux pour le compte de la communauté peuvent donner lieu à une créance de récompense, à condition que l’autre époux ne puisse prouver que ces dépenses n’ont pas profité à la communauté. Application de la règle de droitDans le cadre de la liquidation du régime matrimonial, la cour a confirmé que M. [T]-[V] avait droit à une récompense de 40.000 euros pour des fonds propres investis dans la communauté, en se basant sur les déclarations de Mme [P] lors de la procédure de divorce, qui reconnaissaient l’affectation de ces fonds à des biens communs. La cour a également pris en compte les éléments de preuve fournis par M. [T]-[V], tels que des relevés de comptes, qui corroborent l’utilisation de ses deniers propres pour des dépenses au bénéfice de la communauté. En outre, la cour a statué sur les créances réciproques entre les époux, en appliquant les principes de la liquidation des comptes de la communauté, conformément aux articles 1401 et 1433 du Code civil, et a déterminé les montants dus par chaque partie en fonction des dépenses engagées et des bénéfices tirés par la communauté. |
L’Essentiel : La liquidation des régimes matrimoniaux, notamment en matière de récompense due par la communauté à un époux, est régie par les articles 1433 et suivants du Code civil. L’article 1433 précise que la preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, y compris par témoignages et présomptions. Cela permet à un époux de revendiquer une récompense pour des sommes investies dans la communauté, même sans documents formels, à condition de démontrer le bénéfice pour celle-ci.
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Résumé de l’affaire : Dans le cadre d’une procédure de divorce, une épouse a interjeté appel d’un jugement rendu par le juge aux affaires familiales concernant la liquidation et le partage des biens communs. Ce jugement a fixé la récompense due par la communauté à l’époux à 40.000 euros, a déclaré qu’il n’était redevable d’aucune somme à la communauté, et a également statué que l’épouse n’était créancière de la communauté d’aucune somme. De plus, le jugement a homologué un projet d’état liquidatif établi par un notaire et a condamné l’épouse à verser 1.000 euros à l’époux au titre des frais de justice.
L’épouse, dans son appel, conteste plusieurs points du jugement, notamment la somme de 40.000 euros fixée comme récompense, ainsi que le fait qu’elle ne soit pas considérée comme créancière de la communauté. Elle soutient que les fonds perçus par l’époux n’ont pas été investis dans la communauté et qu’elle a réglé des charges fiscales pour des biens propres de l’époux. En réponse, l’époux demande la confirmation du jugement initial, arguant que l’épouse avait reconnu la somme de 40.000 euros dans le cadre de la procédure de divorce. La cour d’appel a confirmé certains aspects du jugement, notamment la récompense de 40.000 euros, tout en infirmant d’autres points, déclarant que l’époux était redevable à la communauté pour des taxes foncières et des frais de justice. La cour a également statué sur des créances dues à l’épouse et a fixé une indemnité d’occupation pour l’usage d’un bien commun. Finalement, chaque partie a conservé la charge de ses propres dépens, et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ont été écartées. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la récompense due par la communauté à un époux ?La récompense due par la communauté à un époux est régie par l’article 1433 du Code civil, qui stipule que « la preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, même par témoignages et présomption ». Dans cette affaire, il a été établi que l’époux a investi une somme de 40.000 euros, provenant de la succession de son père, dans des biens de la communauté. Cette somme a été reconnue par l’épouse dans le cadre de la procédure de divorce, où elle a elle-même mentionné que son ex-époux avait dépensé cette somme pour le bien immobilier de la communauté. Ainsi, la cour a confirmé que la communauté devait une récompense à l’époux pour cette somme, considérant que la reconnaissance de cette créance dans le cadre de l’instance de divorce constituait une preuve suffisante de l’affectation des fonds à la communauté. Quel est le rôle des preuves dans la détermination des créances entre époux ?Les preuves jouent un rôle crucial dans la détermination des créances entre époux, comme le souligne l’article 1433 du Code civil. Cet article permet d’administrer la preuve que la communauté a tiré profit de biens propres par tous les moyens, y compris par témoignages et présomptions. Dans cette affaire, l’épouse a contesté l’affectation de la somme de 40.000 euros à la communauté, mais la cour a relevé que ses propres déclarations dans le cadre de la procédure de divorce constituaient une reconnaissance de cette créance. De plus, l’époux a fourni des relevés de comptes qui corroborent l’utilisation de ses fonds propres pour le bénéfice de la communauté. Ainsi, la cour a pu conclure que les preuves présentées justifiaient la créance de récompense due à l’époux. Quel est l’impact des circonstances du divorce sur les créances entre époux ?Les circonstances du divorce, notamment celles fondées sur des faits de violences, ne peuvent pas être utilisées pour contester des créances établies entre époux. Dans cette affaire, l’épouse a tenté d’arguer que les violences subies l’empêchaient de reconnaître la créance de récompense due à son ex-époux. Cependant, la cour a estimé que ces circonstances ne pouvaient pas valablement justifier une remise en cause de ses déclarations antérieures, faites dans le cadre de la procédure de divorce. Elle a également noté que l’épouse avait eu l’occasion de contester l’affectation de la somme au bénéfice de la communauté sans obstacle, ce qui renforce la validité des créances établies. Quel est le principe de l’indivision post-communautaire et ses implications ?L’indivision post-communautaire se réfère à la situation où les biens acquis pendant le mariage continuent d’être gérés en commun après la dissolution de la communauté. Dans cette affaire, la cour a statué que l’indivision post-communautaire était redevable à l’épouse d’une créance au titre de la prise en charge des taxes foncières des biens communs. Cela signifie que les dépenses engagées pour des biens communs doivent être remboursées par l’indivision, même après la séparation des époux. La cour a également reconnu que l’époux devait une indemnité d’occupation pour l’utilisation privative de l’immeuble indivis, ce qui souligne l’importance de la gestion des biens en indivision et des obligations qui en découlent. Quel est le rôle de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?L’article 700 du Code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement de ses frais de justice à l’autre partie. Dans cette affaire, la cour a condamné l’épouse à verser 1.000 euros à l’époux en application de cet article, mais a également débouté les parties de leurs demandes formées en application de cet article pour les frais d’appel. Cela signifie que, bien que l’époux ait obtenu une indemnité, la cour a jugé que les circonstances du litige ne justifiaient pas une compensation supplémentaire pour les frais d’appel. Cette décision souligne l’importance de la prudence dans les demandes de remboursement de frais de justice, qui doivent être justifiées par les circonstances de l’affaire. |
N° RG 24/00239 – N° Portalis DBV5-V-B7I-G635
[P]
C/
[T] [V]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
4ème Chambre Civile
ARRÊT DU 27 MARS 2025
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 24/00239 – N° Portalis DBV5-V-B7I-G635
Décision déférée à la Cour : jugement du 27 octobre 2023 rendu par le Juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de LA ROCHE SUR YON.
APPELANTE :
Madame [Z] [W] [P]
née le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 14]
[Adresse 6]
[Localité 8]
ayant pour avocat Me Hafida KHADRAOUI de la SELARL ADLIB, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-006754 du 16/01/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de POITIERS)
INTIME :
Monsieur [K] [G] [T]-[V]
né le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 13]
[Adresse 7]
[Localité 9]
ayant pour avocat Me Xavier BOREL, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 12 Février 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Denys BAILLARD, Président, qui a présenté son rapport
Madame Marie-Béatrice THIERCELIN, Conseillère
Madame Véronique PETEREAU, Conseillère
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Christine CHOPELET,
lors du prononcé : Madame Inès BELLIN,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
Dans des conditions de régularité, de forme et de délai non discutées, Mme [P] a interjeté appel le 30 janvier 2024 d’un jugement en date du 27 octobre 2023, par lequel le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de la Roche-sur-Yon a :
– fixé la récompense due par la communauté à M. [T]-[V] à la somme de 40.000 euros,
– dit qu’il n’est redevable à la communauté d’aucune somme,
– dit que Mme [P] n’est créancière de la communauté d’aucune somme,
– dit n’y avoir lieu à restitution de biens personnels au profit de Mme [P],
– homologue le projet d’état liquidatif et de partage de communauté établi par Maitre [C], notaire à [Localité 10], le 12 octobre 2022.
– condamne Mme [P] à verser 1.000 euros à M. [T]-[V] par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens, y compris les frais de partage, seront partagés par moitié entre les parties et au besoin les y condamne.
L’appelante conclut à la réformation de la décision entreprise et demande à la cour d’infirmer le jugement rendu le 27 octobre 2023 en ce qu’il a :
– fixé la récompense due par la communauté à M. [T]-[V] à la somme de 40.000 euros,
– dit qu’il n’est redevable à la communauté d’aucune somme,
– dit que Mme [P] n’est créancière de la communauté d’aucune somme,
– dit n’y avoir lieu à restitution de biens personnels au profit de Mme [P],
– homologue le projet d’état liquidatif et de partage de communauté établi par Maitre [C], notaire à [Localité 10], le 12 octobre 2022,
– condamne Mme [P] à verser 1.000 euros à M. [T]-[V] par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens, y compris les frais de partage, seront partagés par moitié entre les parties et au besoin les y condamne,
et statuant à nouveau de :
– dire que la communauté n’est redevable d’aucune créance au profit de M. [T]-[V],
– dire que M. [T]- [V] est redevable à la communauté d’une récompense au titre de la prise en charge des taxes foncières du bien sis [Adresse 12], soit la somme de 5.784, 26 euros et 1.454,79 euros pour la prise en charge des frais de justice pénale de l’intimé,
– dire que l’indivision post-communautaire est redevable à Mme [P] d’une créance au titre de la prise en charge des taxes foncières et d’habitation des biens sis à [Localité 9], soit la somme de 6.261 euros,
– dire que M. [T]-[V] est redevable à Mme [P] d’une créance au titre de l’imputation erronée des versements au titre de la taxe d’habitation de Mme [P] à hauteur de 258 euros,
– condamner M. [T]-[V] à verser 2.000 euros à Mme [P] par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– statuer ce que de droit sur les dépens.
En réponse M. [T]-[V] demande à la cour de :
– confirmer le jugement du 27 octobre 2023 en ce qu’il a fixé la récompense due par la communauté à M. [T]-[V] à la somme de 40.000 euros,
– déclarer irrecevable comme étant nouvelle devant la Cour, la demande de Mme [P] tendant à voir juger M. [T]-[V] redevable à la communauté :
– d’une somme de 5.784,26 euros au titre de la prise en charge par cette dernière des taxes foncières afférentes à son immeuble propre sis [Adresse 12] à [Localité 13],
– d’une somme de 1.454,79 euros au titre de la prise en charge de ses frais de justice pénale.
– confirmer en conséquence le jugement en ce qu’il a dit que M. [T]-[V] n’est redevable d’aucune somme à la communauté.
– déclarer irrecevable comme étant nouvelle devant la Cour, la demande de Mme [P] tendant à voir juger la communauté redevable à son égard d’une dette de récompense de 13.635 euros,
Subsidiairement,
– confirmer le jugement en ce qu’il a dit que Mme [P] n’est créancière de la communauté d’aucune somme,
– déclarer irrecevable comme étant nouvelle devant la Cour, la demande de Mme [P] tendant à voir juger l’indivision post-communautaire redevable à son égard d’une somme de 6.261 euros au titre de la prise en charge par elle des taxes foncières et d’habitation postérieurement à l’ordonnance de non-conciliation du 7 avril 2009,
Subsidiairement,
– la débouter de sa demande tendant à voir juger l’indivision post- communautaire redevable à son égard d’une somme de 580 euros au titre de la taxe d’habitation 2009,
– juger Mme [P] redevable à l’indivision post-communautaire d’une indemnité de 18.652,50 euros au titre de l’indemnité d’occupation pour jouissance privative de l’immeuble indivis sis [Adresse 1] et [Adresse 4] à [Localité 9] pour la période non prescrite du 1er juin 2019 au 28 février 2022,
– déclarer irrecevable comme étant nouvelle devant la cour, la demande de Mme [P] tendant à voir M. [T]-[V] jugé redevable à son égard d’une somme de 258 euros au titre des versements erronés de la taxe d’habitation 2010,
– confirmer le jugement du 27 octobre 2023 dans toutes ses dispositions,
– condamner Mme [P] aux dépens, ainsi qu’au paiement de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile devant la Cour.
A l’appui de ses prétentions, l’appelante soutient que M. [T]-[V] ne démontre en rien le fait que la communauté aurait tiré profit de l’argent propre dont il disposait.
Au contraire, Mme [P] démontre que c’est le patrimoine commun qui s’acquittait des charges du patrimoine propre de M. [T]-[V].
Elle conclut démontrer aujourd’hui que M. [T]-[V] a investi son argent dans différents comptes, dont elle a connaissance.
Mme [P] estime que la communauté a réglé les taxes foncières du bien propre de l’époux et pour le compte de l’indivision post communautaire, les taxes foncières des biens de [Localité 9] soit la somme de 6.261euros qu’il convient de fixer.
Elle soutient enfin avoir réglé au Trésor Public la somme de 258 euros, imputée par erreur du Trésor Public, au compte de son époux.
Il conviendra de dire qu’il existe une créance de l’époux au profit de son épouse à hauteur de 258 euros.
Au soutien de ses prétentions, M. [T]-[V] rappelle que la question de la somme propre de 40.000 euros investie par lui a été débattue et acceptée dans son principe tant dans ses conclusions aux fins d’obtention d’une prestation compensatoire et retenue par le jugement.
Mme [P] n’ignorait rien de la situation patrimoniale de son mari et de l’utilisation faite dans l’intérêt de la communauté de ses capitaux propres.
La reconnaissance de la créance de récompense de M. [T]-[V] ne peut être ‘deniée’ par Mme [P] dans le cadre de l’instance aux fins de partage judiciaire, sauf à consacrer une contradiction de positions incompatibles entre elles et qui, si elle devait être admise, induirait le co-partageant en erreur.
Sur les autres demandes elles sont selon elle irrecevables au premier chef comme n’ayant pas été soumises au premier juge et nouvelles en appel et subsidiairement infondées.
Vu les dernières conclusions de l’appelante en date du 30 avril 2024 ;
Vu les dernières conclusions de l’intimé en date du 5 juin 2024 ;
L’ordonnance de clôture a été rendue le 15 janvier 2025.
Mme [P] et M. [T]-[V] se sont mariés le [Date mariage 5] 1997 devant l’officier d’état civil de [Localité 9] (85), sans contrat préalable.
Par jugement du 17 juillet 2014, le divorce des époux a été prononcé ordonnant la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux.
Sur la récompense due par la communauté à M. [T]-[V]
Mme [P] à hauteur d’appel soutient que les fonds qu’a pu percevoir son époux durant le mariage, notamment par représentation de son père prédécédé en raison d’une donation des grands parents en 2005, pour une somme évaluable à 40.000 euros, n’ont pas été investis dans la communauté et en tout état de cause que l’intimé n’en rapporte pas la preuve.
Elle maintient devant la cour ignorer la destination d’une telle somme soulevant de nouveau l’existence de comptes ouverts par son mari dont elle ne connaissait pas les mouvements.
Elle indique que les circonstances du divorce, sur fond de violences, ne permettent pas de considérer que ses écritures dans l’instance en divorce sont des actes de reconnaissance de cette dette.
Elle estime que son ex-époux ne justifie pas en outre de l’affectation de la somme de 40.000 euros.
M. [T]-[V] estime quant à lui que Mme [P] n’ignorait rien de sa situation financière.
Rappelant que l’article 1433 du code civil dispose que la preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, même par témoignages et présomption, il se prévaut en premier lieu de la règle ‘de l’estoppel’, selon laquelle nul ne peut se contredire au détriment d’autrui.
Il fait valoir que devant le juge du divorce, Mme [P] s’était prévalue, pour obtenir une prestation compensatoire de 40.000 euros, du fait qu’après liquidation du régime matrimonial la situation de son époux serait plus favorable que la sienne en raison de l’existence d’une récompense de 40.000 euros.
Elle détaillait même dans ses écrits cette somme comme le solde de la somme perçue de 121.860 euros dans le cadre de la donation faite par les grands parents paternels à laquelle il convenait de déduire 80.000 euros correspondant au placement dans une assurance vie.
Il ressort effectivement du jugement du 17 juillet 2014 communiqué par l’intimé que, dans sa motivation sur la fixation de la prestation compensatoire à hauteur de 20.000 euros à sa charge, le tribunal reprend explicitement les explications des parties ; il est ainsi mentionné que M. [T]-[V] ‘venant par représentation de son père décédé, a reçu des donations et des fonds successoraux, à savoir un capital de 121 960 euros, investi selon la déclaration de Mme [P] à hauteur de 40 000 euros dans le bien mobilier de communauté, de sorte qu’il pourra solliciter une récompense à hauteur de ladite somme, au moins, lors de la liquidation’.
Cette même décision appréciant la nature du patrimoine immobilier des époux pour apprécier la prestation compensatoire précise :
‘les époux ont acquis pendant le mariage deux biens immobiliers(…)Les parties ne fournissent pas d’élément sur la valeur de ces deux biens.les époux ne précisent pas non plus leurs droits respectifs sur ces deux immeubles mais M.[T] [V] est susceptible de se prévaloir d’une récompense pour avoir investi dans l’un des biens une somme de 40 000 euros selon la déclaration de l’épouse précédemment évoquée et non contestée par le mari’.
C’est par conséquent à juste titre que le jugement déféré a considéré que lors de la procédure de divorce l’appelante écrivait elle-même que son ex-époux avait dépensé pour le bien immobilier de la communauté la somme de 40.000 euros qui lui était propre comme provenant, par représentation de son père, de la succession d’ascendants de ce dernier prédécédé.
Cette reconnaissance par l’appelante dans une instance judiciaire présentant un lien indivisible avec l’instance sur la liquidation des intérêts patrimoniaux du couple vaut preuve suffisante de ce versement et de la provenance des fonds.
En outre les causes et circonstances du divorce, antérieures et fondées sur des faits de violences de 2005, ne peuvent valablement être retenues par Mme [P] pour expliquer, plusieurs années après, le caractère erroné de son analyse ou constituer un élément de contrainte extérieur ; elle avait pu au demeurant, dans un dire au notaire le 10 octobre 2022, déjà contester sans obstacle l’affectation de cette somme au bénéfice de la communauté en réclamant des preuves de celle-ci.
Ce sujet était en outre précisément repris par le juge commis comme point de désaccord qui devra être tranché par le juge aux affaires familiales dans son rapport du 13 janvier 2023.
Par ailleurs au soutien du montant ainsi évalué par les parties elles-mêmes de la récompense due à l’intimé, M. [T]-[V] justifie, outre la part non affectée à sa propre épargne après donation de 2005 d’un certain nombre de relevés de comptes à son nom sur lesquels figurent notamment :
– au crédit le 10 avril 1998 un virement au crédit de 243.268 francs (37.086 euros) correspondant de la cession d’actions de la société [11] dont il était propriétaire,
– le 1er septembre 2000 un chèque de 1.000 (152 euros) francs avec mention par la banque ‘travaux’,
– le 2 novembre 2000 4.128 francs soit 629 euros,
– le 16 novembre 2000 pour 7.000 francs,
– le 13 juillet 2001 un débit de 20.000 francs (3.048 euros) avec mention par la banque ‘travaux dépendance’,
– le 17 août 2001 un nouveau débit de 20.000 francs
– le 22 septembre 2004 pour 300 euros et 1.000 euros,
– le 23 septembre 2004 pour 1.000 euros.
L’ensemble de ces dépenses corrobore l’utilisation de deniers propres pour la somme de 40.000 euros faite dans l’intérêt de la communauté à charge de récompense à hauteur de la dépense faite.
La Communauté doit donc récompense à M. [T] -[V] et la décision de première instance sera confirmée de ce chef.
Sur les demandes formulées par Mme [P] à hauteur d’appel
Sur la recevabilité des demandes en appel, il convient de rappeler que concernant la liquidation des comptes de la communauté elles ne constituent pas des demandes nouvelles et peuvent être formulées à hauteur de cour comme relevant des prétentions initiales et tendant à la même fin.
Sur les récompenses dues par la communauté à Mme [P]
Sur les taxes foncières réglées par la communauté pour un bien propre de l’époux sis [Adresse 12] à [Localité 13], Mme [P] en justifie le règlement par le compte joint des époux pour les taxes foncières acquittées en 1998, 2000, 2001, 2002, 2003 et 2004 pour un total de 5.563 euros.
Mme [P] justifie également du règlement de la somme de 1.454,79 euros au titre des frais de défense pénale de l’intimé par la communauté.
S’agissant des indemnités perçues par l’appelante à la suite du jugement des prud’hommes en 1998, ces sommes ont la nature de gains et salaires déterminés et encaissés au temps de la communauté et constituent des biens communs ; en outre Mme [P] se borne à indiquer que ces sommes auraient été employées au financement de travaux du bien commun sans en rapporter la preuve.
Sur les comptes d’administration
Mme [P] est recevable et fondée dans sa demande de voir inscrire dans les comptes d’administration sa créance qu’elle justifie pour un total de 6.261 euros du règlement des taxes foncières pour l’immeuble commun sis [Adresse 1] et [Adresse 4] à [Localité 9] qu’elle occupait consécutivement à la séparation.
De même il est justifié par l’appelante et non contesté qu’une somme de 258 euros a été imputée par erreur du Trésor Public au compte de son époux alors que Mme [P] en a fait l’avance.
En revanche elle expose sans en justifier avoir pris en charge l’ensemble des prêts relatifs à cet immeuble.
M. [T]-[V] est également recevable à solliciter, pour la période non prescrite, que soit inscrite au titre d’une créance détenue par l’indivision post-communautaire une indemnité d’occupation, s’agissant là aussi d’une prétention visant la même fin de liquidation de la communauté entre les époux admise en cause d’appel ; la demande étant formée par les premières conclusions de l’intimé cette indemnité ne peut prétendre à porter sur une période antérieure au 1er juin 2019 et excéder la date de vente de l’immeuble, soit le 28 février 2022 soit trente trois mois.
Au regard de la valeur de l’immeuble il convient de fixer cette indemnité d’occupation à la somme de 562,50 par mois soit, pour 33 mois, 18.562,50 euros.
Sur les effets personnels revendiquées par Mme [P]
Cette demande contestée par l’intimé n’est aucunement justifiée à hauteur d’appel alors qu’il appartient à celle-ci, contrairement à son affirmation, de démontrer la nature des effets personnels dont elle se dit privée par son ex époux depuis la séparation.
Chacun conserve la charge de ses propres dépens compte tenu de la nature du litige et de la succombance partielle des parties en appel.
Les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile seront écartées pour les mêmes causes.
LA COUR
Au fond,
Statuant dans les limites de l’appel,
Confirme la décision déférée en ce qu’elle a :
– fixé la récompense due par la communauté à M. [T]-[V] à la somme de 40.000 euros,
– dit n’y avoir lieu à restitution de biens personnels au profit de Mme [P],
– homologue le projet d’état liquidatif et de partage de communauté établi par Maitre [C], notaire à [Localité 10], le 12 octobre 2022,
– condamne Mme [P] à verser 1.000 euros à M. [T]-[V] par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens, y compris les frais de partage, seront partagés par moitié entre les parties et au besoin les y condamne,
Infirme la décision déférée en ce qu’elle a :
– dit que M. [T]-[V] n’est redevable à la communauté d’aucune somme,
– dit que Mme [P] n’est créancière de la communauté d’aucune somme,
Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
– dit que M. [T]-[V] est redevable à la communauté d’une récompense au titre de la prise en charge des taxes foncières du bien propre sis [Adresse 12] à [Localité 13], soit la somme de 5.563 euros, et 1.454,79 euros pour la prise en charge de ses frais de justice pénale,
– dit que l’indivision post-communautaire est redevable à Mme [P] d’une créance au titre de la prise en charge des taxes foncières des biens sis à [Localité 9], soit la somme de 6.261 euros,
– dit que M. [T]-[V] est redevable à Mme [P] d’une créance au titre de l’imputation erronée des versements au titre de la taxe d’habitation de Mme [P] à hauteur de 258 euros,
– dit que Mme [P] est redevable à l’indivision post-communautaire d’une indemnité d’occupation de l’immeuble commun sis à [Localité 9] du 1er juin 2019 au 28 février 2022 pour un montant de 18.562,50 euros,
Y ajoutant,
Dit que chaque partie conservera à sa charge les dépens d’appel par elle exposés.
Déboute les parties de leur demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Le présent arrêt a été signé par Denys BAILLARD, Président et par Inès BELLIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
I. BELLIN D. BAILLARD
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