Limitation d’indemnisation en cas de pathologies à manifestation répétitive : enjeux contractuels et interprétatifs.

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Limitation d’indemnisation en cas de pathologies à manifestation répétitive : enjeux contractuels et interprétatifs.

L’Essentiel : La SARL APPIA, dirigée par M. [U] [J], a souscrit deux polices d’assurance prévoyance auprès d’ALLIANZ VIE. Après avoir cessé son activité en janvier 2015 en raison d’une pathologie de la hanche, M. [J] a de nouveau interrompu son travail en juin 2020 à cause d’une rupture de la coiffe des rotateurs. Bien qu’ALLIANZ ait accepté de l’indemniser pour une période, la compagnie a limité la durée d’indemnisation à 365 jours. Contestant cette décision, M. [J] a assigné ALLIANZ en justice, et après son décès, ses ayants-droit ont poursuivi l’action, demandant des indemnités supplémentaires.

Contexte de l’affaire

La SARL APPIA, dirigée par M. [U] [J], a souscrit deux polices d’assurance prévoyance auprès des ASSURANCES GENERALES DE FRANCE, désormais ALLIANZ VIE. La première, police « Tonus », a été souscrite le 16 septembre 2003, offrant des indemnités journalières de 106,93 € pendant 1 095 jours. La seconde, police « Acti-Relais », a été souscrite le 18 septembre 2007, avec des indemnités journalières de 140,60 € pour 365 jours par période d’incapacité temporaire.

Interruption d’activité et demandes d’indemnisation

M. [J] a cessé son activité professionnelle le 12 janvier 2015 en raison d’une pathologie de la hanche, recevant des indemnités journalières pour 316 et 279 jours respectivement. Le 8 juin 2020, il a de nouveau interrompu son travail à cause d’une rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite, sollicitant la prise en charge de ses deux contrats d’assurance. ALLIANZ a accepté de l’indemniser pour la période du 8 juin au 25 juillet 2020, puis du 8 juin au 1er septembre 2020, tout en précisant que la durée maximale d’indemnisation de 365 jours était atteinte.

Contestation et assignation en justice

Le 23 octobre 2020, M. [J] a contesté la limitation de la durée d’indemnisation, arguant qu’il n’y avait pas de lien entre ses deux pathologies. En réponse, le 5 février 2021, il a assigné ALLIANZ VIE devant le Tribunal judiciaire de Marseille pour obtenir le paiement de 63 655,83 euros. Après son décès en 2021, ses ayants-droit ont poursuivi l’action en justice.

Demandes des consorts [J]

Les consorts [J] ont demandé au tribunal de condamner ALLIANZ à leur verser 78 159,69 euros pour les indemnités journalières, ainsi que 3 000 euros pour les frais de justice. Ils ont soutenu que les pathologies n’étaient pas liées et que les dispositions contractuelles manquaient de clarté, justifiant ainsi leur demande d’indemnisation.

Réponse d’ALLIANZ

ALLIANZ a demandé le rejet des demandes des consorts [J], affirmant que la durée maximale d’indemnisation avait été atteinte pour les pathologies à manifestation répétitive. La compagnie a également contesté le montant réclamé, précisant que les indemnités déjà versées devaient être prises en compte.

Décision du tribunal

Le tribunal a reçu l’intervention des consorts [J] et a statué en faveur de leur demande d’indemnisation. Il a condamné ALLIANZ à verser 18 264,12 euros, avec des intérêts au taux légal à compter de l’assignation, et a ordonné la capitalisation des intérêts. ALLIANZ a également été condamnée aux dépens et à verser 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La décision a été déclarée exécutoire à titre provisoire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée des contrats d’assurance en vertu de l’article 1103 du Code civil ?

L’article 1103 du Code civil stipule que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. »

Cela signifie que les parties à un contrat d’assurance, comme la SARL APPIA et ALLIANZ, sont tenues de respecter les termes et conditions convenus dans le contrat.

Dans le cas présent, les polices d’assurance souscrites par M. [J] prévoient des garanties spécifiques, notamment des indemnités journalières en cas d’incapacité de travail due à des pathologies.

Il est donc essentiel que les parties respectent les stipulations contractuelles, y compris les limitations de durée d’indemnisation pour les pathologies à manifestation répétitive, qui sont clairement énoncées dans les contrats.

Les consorts [J] soutiennent que les deux pathologies ne doivent pas être considérées comme répétitives, mais ils n’apportent pas de preuve suffisante pour contredire les termes du contrat.

Ainsi, la portée de l’article 1103 est cruciale pour déterminer les droits et obligations des parties en matière d’indemnisation.

Quelles sont les obligations de preuve en vertu des articles 1353 et 9 du Code de procédure civile ?

L’article 1353 du Code civil dispose que « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. »

De plus, l’article 9 du Code de procédure civile précise que « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »

Dans le litige en question, les consorts [J] doivent prouver que les pathologies de M. [J] ne sont pas des pathologies à manifestation répétitive, afin de contester la limitation d’indemnisation.

Cependant, ils se contentent d’affirmer qu’il n’existe pas de lien entre les pathologies, sans fournir de preuves médicales ou juridiques suffisantes pour étayer leur position.

En conséquence, la charge de la preuve incombe aux consorts [J], qui doivent démontrer que les conditions contractuelles ne s’appliquent pas à leur situation.

Comment se justifie la limitation de durée d’indemnisation selon les dispositions contractuelles ?

Les conditions générales des contrats d’assurance stipulent que le versement des indemnités journalières est limité à 365 jours maximum pour les pathologies à manifestation répétitive.

Ces pathologies incluent les pathologies ostéo-articulaires, qui sont clairement définies dans les contrats.

Il est précisé que lorsque la durée cumulée maximale d’indemnisation a été atteinte, le droit à indemnisation cesse définitivement pour l’ensemble des pathologies citées.

Dans le cas présent, M. [J] a déjà été indemnisé pour une pathologie de la hanche pendant 316 jours et pour une pathologie de l’épaule pendant 48 jours, atteignant ainsi la limite de 365 jours.

Les consorts [J] ne démontrent pas que les pathologies ne relèvent pas de cette catégorie, ce qui justifie la limitation d’indemnisation.

Quelles sont les implications de l’exonération des cotisations selon le contrat ?

L’exonération des cotisations est prévue dans le contrat Acti-Relais, qui stipule qu’elle s’applique à compter du 61ème jour d’arrêt de travail.

Cette exonération est calculée à hauteur de 1/365ème de la cotisation annuelle par jour.

Il est établi que M. [J] a bénéficié de cette exonération en même temps que la garantie d’indemnités journalières.

Cependant, cette exonération n’a pas d’impact financier sur les périodes d’indemnisation, car la limite contractuelle de 365 jours a été atteinte.

Ainsi, bien que M. [J] ait eu droit à l’exonération, cela ne modifie pas le fait qu’il a épuisé son droit à indemnisation pour les pathologies à manifestation répétitive.

Comment se justifie la décision d’exécution provisoire selon l’article 514 du Code de procédure civile ?

L’article 514 du Code de procédure civile dispose que « les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. »

Dans le cas présent, la décision du tribunal est exécutoire de droit à titre provisoire, ce qui signifie qu’elle peut être mise en œuvre immédiatement, même si elle est susceptible d’appel.

Cette exécution provisoire est justifiée par la nature et l’ancienneté du litige, ainsi que par la nécessité de garantir les droits des consorts [J] à recevoir les indemnités dues.

Ainsi, le tribunal a décidé de ne pas écarter l’exécution provisoire, permettant aux consorts [J] de bénéficier rapidement des sommes qui leur sont dues.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION B

JUGEMENT N°

Enrôlement : N° RG 21/01695 – N° Portalis DBW3-W-B7F-YOK4

AFFAIRE :

M. [U] [J] (Me Frédérique GAMBINI)
Madame [F] [T] veuve [J] (Me Frédérique GAMBINI)
Madame [P] [J] épouse [N] (Me Frédérique GAMBINI)
Monsieur [Y] [J] (Me Frédérique GAMBINI)

C/
S.A. ALLIANZ VIE (Me Catherine CHAMAGNE)

Rapport oral préalablement fait

DÉBATS : A l’audience Publique du 26 Septembre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Mme Anna SPONTI,

Greffier : Madame Olivia ROUX, lors des débats

A l’issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 21 Novembre 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 21 Novembre 2024

PRONONCE en audience publique par mise à disposition au greffe le 21 Novembre 2024

Par Mme Anna SPONTI,

Assistée de Madame Olivia ROUX,

NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEURS

Madame [P] [J] épouse [N]
née le [Date naissance 7] 1987 à [Localité 10] (HAUTS-DE-SEINE)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 9]

représentée par Me Frédérique GAMBINI, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [Y] [J]
né le [Date naissance 4] 1990 à [Localité 12]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 8]

représenté par Me Frédérique GAMBINI, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [U] [J]
né le [Date naissance 5] 1960 à [Localité 13] (ITALIE)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Frédérique GAMBINI, avocat au barreau de MARSEILLE

Intervenant volontaire
Madame [F] [T] veuve [J]
née le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 11] (BOUCHES-DU-RHONE)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 8]

représentée par Me Frédérique GAMBINI, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDERESSE

S.A. ALLIANZ VIE
immatriculé au RCS Nanterre 340 234 962
pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Catherine CHAMAGNE, avocat au barreau de MARSEILLE

EXPOSE DU LITIGE :

La SARL APPIA, dont M. [U] [J] est le gérant, a contracté au profit de ce dernier, auprès des ASSURANCES GENERALES DE FRANCE, aux droits desquelles vient désormais ALLIANZ VIE (ci-après ALLIANZ), deux polices d’assurance prévoyance :

▪ une police « Tonus », référencée 8994052270, souscrite à effet du 16 septembre 2003, qui comporte notamment une garantie « Indemnités Journalières » prévoyant le versement, en cas d’accident ou de maladie, d’une somme journalière de 106,93 € sur une durée de 1 095 jours.

▪ une police « Acti-Relais », référencée 8994027440, souscrite à effet du 18 septembre 2007, qui comporte notamment une garantie « Indemnités Journalières » prévoyant le versement, en cas d’accident ou de maladie, d’une somme journalière de 140,60 € sur une durée de 365 jours pour chaque période d’incapacité temporaire de travail ;

Ces deux contrats, en cas de «maladies» ou de «pathologies» dites à « manifestation répétitive» prévoient une durée cumulée maximale d’indemnisation de 365 jours.

Le 12 janvier 2015, Monsieur [J] a interrompu son activité professionnelle en raison d’une pathologie de la hanche gauche, pour lequel il a été indemnisé par ALLIANZ au titre des indemnités journalières, des deux polices d’assurance souscrites pour une durée respective, de 316 et 279 jours.

Le 8 juin 2020, Monsieur [J] a interrompu son activité professionnelle, en raison d’une rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite et s’est alors rapproché de la compagnie afin de solliciter la prise en charge de l’assureur au titre de la garantie « Indemnités Journalières » de ses deux contrats d’assurance.

Par courrier daté du 22 juillet 2020, la compagnie a indiqué à Monsieur [J] qu’elle acceptait de prendre en charge son arrêt de travail au titre de la garantie « Indemnités Journalières » du contrat d’assurance « TONUS » pour la période du 8 juin 2020 au 25 juillet 2020, et a procédé au règlement des indemnités journalières dues pour un montant total de 5.776,80 euros. ALLIANZ a par ailleurs informé l’assuré que son arrêt de travail était motivé par une “pathologie à manifestation répétitive” ce qui conduisait à limiter la durée maximale d’indemnisation à 365 jours cumulés sur toute la durée de vie du contrat, laquelle était atteinte le 25 juillet 2020 en raison de l’indemnisation antérieure pour sa pathologie de la hanche.

Par ailleurs, ALLIANZ à indemnisé Monsieur [J] au titre de la garantie « Indemnités Journalières » du contrat d’assurance « ACTI RELAIS » pour la période du 8 juin 2020 au 1er septembre 2020, et a procédé au règlement des indemnités journalières dues pour un montant total de 13.088,34 euros et l’a de nouveau informé que la durée maximale d’indemnisation de 365 jours était atteinte le 1er septembre 2020 compte tenu de la nature répétitive de la pathologie et son indemnisation antérieure.

Par courrier en date du 23 octobre 2020, Monsieur [J] a contesté la limitation de durée retenue par la compagnie au motif qu’il n’existe pas de lien entre les deux pathologies, en vain.

Par acte d’huissier en date du 5 février 2021, Monsieur [U] [J] a assigné ALLIANZ VIE devant le Tribunal judiciaire de Marseille, aux fins notamment d’obtenir le paiement d’une somme de 63 655,83 euros correspondant au paiement de ses indemnités journalières depuis le 8 juin 2020.

Monsieur [U] [J] étant décédé le [Date décès 6] 2021, ses ayant-droit, [F] [T] veuve [J], [P] [J] épouse [N] et [Y] [J], (ci-après « les consorts [J] ») sont intervenus volontairement à l’instance par conclusions du 22 octobre 2021.

Aux termes de leurs conclusions communiquées par le réseau privé virtuel des avocats le 3 avril 2024, au visa des articles 1231-1 du Code civil, 328 et suivants du Code de procédure civile, les consorts [J] sollicitent de voir le tribunal :
In limine litis recevoir leur intervention volontaireCondamner la société ALLIANZ à leur payer ses sommes de : 78 159,69 euros au titre des indemnités journalières dues à [U] [J] assorti du taux légal à compter de la demande en justice, capitalisées par année entière en application des dispositions de l’article 1343-2 du Code civil
3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la société ALLIANZ aux entiers dépens, distraits au profit de Maitre GAMBINIOrdonner l’exécution provisoire
Au soutien de leurs prétentions, les consorts [J] affirment que les deux pathologies dont était atteint [U] [J], sont dépourvues de tout rapport, tant juridique que médical, de telle sorte qu’elles ne peuvent être considérées comme une «pathologie répétitive» et que l’indemnisation de la première pathologie par la compagnie ALLIANZ, est sans effet sur l’indemnisation de la seconde et ne peut donc fonder une limitation dans le temps. De plus, il est relevé que les dispositions contractuelles sur ce point, manquent de clarté et doivent être interprétées en faveur de l’assuré. Les consorts [J] soulèvent également que la pathologie cardiaque du défunt diagnostiquée en 2021 doit également être comprise dans l’assiette d’indemnisation. Enfin ces derniers soutiennent que le fait d’avoir commencé à régler l’indemnité contractuellement prévue (concernant la seconde pathologie), équivaut à une renonciation à se prévaloir des exceptions et lui interdit dès lors de limiter dans le temps l’indemnisation de Monsieur [J]. En outre, contrairement à ce qu’affirme la société ALLIANZ, il ressort tant des dispositions contractuelles, que des courriers émis par la société ALLIANZ elle-même, que l’assuré était bien couvert pas la garantie « exonération des cotisations ».

Aux termes de ses conclusions communiquées par le réseau privé virtuel des avocats le 9 avril 2024, au visa des articles 1103 du Code civil et 514-1 du Code de procédure civile, la société ALLIANZ sollicite de voir le tribunal :
Débouter les consorts [J] de leurs demandesLes condamner au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépensEcarter l’exécution provisoire
Au soutien de ses prétentions, la société ALLIANZ fait valoir que Monsieur [J] ne pouvait plus bénéficier des indemnités journalières prévues en cas d’incapacité temporaire de travail dès lors que la durée contractuelle maximale d’indemnisation au titre des pathologies à manifestation répétitive était atteinte, ce dernier étant atteint de pathologies ostéo-articulaire entrant dans la famille des pathologies répétitives. Par ailleurs, le montant sollicité par les consorts [J] est erroné en ce qu’il ne tient pas compte de la prise en charge déjà intervenue au titre des deux contrats d’assurance pour un montant de 5776,80 euros et 13088,34, et inclut l’exonération des cotisations alors même que ce dernier n’était pas couvert au titre de la garantie « Exonération des cotisations ». En outre, ALLIANZ accepte de prendre en charge le sinistre en date du 15 janvier 2021 lequel n’entre pas dans la définition des maladies à manifestation répétitives

Au-delà de ce qui a été repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l’espèce des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le Tribunal entend se référer pour l’exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessus.

Après clôture de l’instruction ordonnée le 11 avril 2024, l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 26 septembre 2024. Les débats publics clos, la décision a été mise en délibéré au 21 novembre 2024 pour être rendue par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur l’intervention volontaire :

Il y’a lieu de recevoir l’intervention volontaire des consorts [J], ayants-droits de feu [U] [J].

Sur la demande de paiement :

Aux termes de l’article 1103 du code civil, “les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.”

L’article 1353 nouveau du code civil dispose que “celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver”.

Selon l’article 9 du code de procédure civile, “il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.”

En l’espèce, il ressort des annexes aux dispositions générales des deux contrats d’assurances que le versement des indemnités journalières est limité à 365 jours maximum pour les pathologies à manifestation répétitive : notamment les pathologie vertébrales, paravertébrales, disco vertébrales, ostéo-articulaire, péri-articulaires (musculaires ou tendineuses) quelle qu’en soit l’origine (dégénérative, inflammatoire, métabolique et post-traumatiques) Il est précisé que lorsque la durée cumulée maximale d’indemnisation a été atteinte, au cours d’une ou plusieurs périodes d’incapacité temporaire totale ou partielle de travail, le droit à indemnisation cesse définitivement pour l’ensemble des pathologies citées. 

Force est de constater que les conditions générales prévoient une limitation de durée d’indemnisation, pour l’ensemble des “pathologies à manifestation répétitive”, sans aucune mention d’un critère de chronicité. Dès lors, cela n’implique pas nécessairement que les pathologies présentent un lien entre elle, ni qu’elles constituent une pathologie unique, sous réserve que chacune entre dans la catégorie des “pathologies à manifestation répétitive”, lesquelles sont clairement énoncées.

Les consorts [J] se contentent d’affirmer que les deux pathologies n’ont pas de lien entre elles et ne doivent pas être considérées comme des pathologies à manifestation répétitive, mais ne démontrent pas que celles-ci ne sont pas des pathologies « ostéo-articulaire » au sens des dispositions contractuelles. En conséquence, s’agissant de deux pathologies touchant les articulations (épaule, hanche), il y a lieu de considérer que la limitation de durée d’indemnisation de 365 jours contractuellement prévue a été atteinte du fait de l’indemnisation d’[U] [J] pour une pathologie de la hanche du 8 avril 2015 au 18 février 2016 (317 jours), puis pour une pathologie de l’épaule du 8 juin 2020 au 25 juillet 2020 (48 jours) au titre du contrat prévoyance n° 8994052270 et du 8 avril 2015 au 11 janvier 2016 (279 jours) et du 8 juin 2020 au 1 septembre 2020 au titre du contrat prévoyance n°8994027440.

S’agissant de la garantie « exonération de cotisations », il ressort de l’annexe aux dispositions générales du contrat Acti relais (pièce en défense n°5) que le contrat prévoit une exonération des cotisations à compter du 61ème jour d’arrêt à hauteur de 1/365ème de la cotisation annuelle par jour, ce qui ressort également du courrier ALLIANZ en date du 9 septembre 2020 et de l’expertise amiable.

Dès lors, Monsieur [J] était bien garanti au titre de l’exonération des cotisations. Toutefois, l’existence de cette garantie n’emporte aucune conséquence financière sur les périodes temporelles précitées, puisque les consorts [J] admettent qu’[U] [J] a bénéficié de cette exonération en même temps que la garantie indemnités journalières et que la limite contractuelle précitée de 365 jours a été atteinte.

S’agissant de l’indemnisation pour la pathologie cardiaque, la société ALLIANZ accepte d’indemniser les consorts [J] à ce titre pour la période du 15 février 2021 au [Date décès 6] 2021 compte tenu de la franchise de 30 jours en cas de maladie:
Contrat AGF TONUS : 4834,44 eurosContrat ACTI-RELAIS : 6053,97 euros
Toutefois, il convient de retirer la franchise de 30 jours, dans la mesure où [U] [J] était déjà en arrêt de travail depuis plusieurs mois au moment de la survenance de sa pathologie cardiaque et n’avait à aucun moment repris son activité professionnelle, or il ressort des dispositions contractuelles que « en cas de rechute, le versement des indemnités journalières reprend sans qu’un nouveau délai de franchise soit appliqué » et d’ajouter les sommes dues au titre de l’exonération des cotisations portant ainsi la somme globale due par la société ALLIANZ aux consorts [J] à :
Contrat ACTI-RELAIS : garantie indemnités journalières 140,60 euros/jour + garantie exonération de cotisation : 14,94 euros/jour x 68 jours = 10.576,72 eurosContrat TONUS : garantie indemnités journalières 106,93 euros/jour + garantie exonération de cotisation : 6,12 euros/jour x 68 jours = 7687,40 euros
En conséquence la société ALLIANZ sera condamnée à payer aux consorts [J] la somme de 18.264,12 euros.

Sur la capitalisation des intérêts

En vertu de l’article 1343-2 du code civil, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l’a prévu ou si une décision de justice le précise.

En l’espèce il convient d’ordonner la capitalisation des intérêts sollicitée par les consorts [J]

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Il y a lieu de condamner la société ALLIANZ, qui succombe, aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître GAMBINI.

Il y a lieu de condamner la société ALLIANZ à verser aux consorts [J] la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Sur l’exécution provisoire :

L’article 514 du code de procédure civile dispose que « les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. »

La présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire et il n’y a pas lieu de l’écarter, au regard de la nature et de l’ancienneté du litige.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant publiquement par mise à disposition de la décision au greffe après débats en audience publique, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort :

RECOIT l’intervention volontaire de [F] [T] veuve [J], [P] [J] épouse [N] et [Y] [J]

CONDAMNE la société ALLIANZ VIE à verser à [F] [T] veuve [J], [P] [J] épouse [N] et [Y] [J] la somme de 18.264,12 euros ;

DIT que cette somme portera intérêt au taux légal à compter de l’assignation soit le 5 février 2021 ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;

CONDAMNE la société ALLIANZ VIE aux entiers dépens

DIT que la condamnation aux dépens sera assortie du droit pour Maître GAMBINI, avocat de [F] [T] veuve [J], [P] [J] épouse [N] et [Y] [J] de recouvrer directement contre ALLIANZ VIE ceux des dépens dont il a fait l’avance sans avoir reçu provision ;

CONDAMNE ALLIANCE VIE à verser à [F] [T] veuve [J], [P] [J] épouse [N] et [Y] [J] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente décision est exécutoire à titre provisoire ;

REJETTE les prétentions pour le surplus ;

Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an susdits.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


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