Licenciement sans cause réelle et sérieuseLe licenciement d’un salarié doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, conformément à l’article L.1232-1 du Code du travail. En l’absence de preuve d’une faute grave ou d’une cause justifiant le licenciement, celui-ci est considéré comme abusif. La charge de la preuve incombe à l’employeur, qui doit démontrer que les faits reprochés au salarié sont établis et suffisamment graves pour justifier la rupture du contrat de travail. Nullité du licenciement pour discriminationSelon l’article L.1132-1 du Code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié en raison de son état de santé ou de son handicap. En cas de litige, il appartient à l’employeur de prouver que la décision de licenciement est fondée sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Si le salarié présente des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination, l’employeur doit apporter la preuve du caractère non discriminatoire de sa décision. Mise à pied conservatoireLa mise à pied conservatoire est une mesure disciplinaire qui doit être justifiée par des faits graves. Selon l’article L.1332-4 du Code du travail, l’employeur doit respecter un délai de deux mois pour engager une procédure disciplinaire à compter de la connaissance des faits. Si la mise à pied est prononcée sans respect de cette procédure, elle peut être considérée comme injustifiée. Indemnités de licenciementEn cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié a droit à des indemnités, conformément à l’article L.1235-1 du Code du travail. Le montant de ces indemnités est déterminé en fonction de l’ancienneté du salarié et ne peut être inférieur à un certain seuil, qui est fixé à trois mois de salaire pour les entreprises de moins de 11 salariés, sauf preuve du contraire par l’employeur. Rappel de salaire et primesLes primes et les rappels de salaire doivent être versés conformément aux dispositions contractuelles et aux conventions collectives applicables. L’article 14.7 de la convention collective applicable stipule que le treizième mois doit être calculé sur la totalité de la rémunération fixe et variable, ce qui implique que toute rémunération variable doit être prise en compte dans le calcul du treizième mois. Retenue sur salaireLa retenue sur salaire est régie par l’article L.1331-2 du Code du travail, qui interdit toute déduction non justifiée. En cas de litige sur une retenue, il appartient à l’employeur de prouver la légitimité de cette déduction, notamment en démontrant qu’elle est conforme aux dispositions légales et contractuelles. Frais professionnelsLes frais professionnels engagés par le salarié dans le cadre de son activité doivent être remboursés par l’employeur, conformément aux dispositions du Code du travail. L’absence de justificatifs ne peut pas justifier le refus de remboursement, sauf si l’employeur prouve que les frais ne sont pas liés à l’activité professionnelle du salarié. |
L’Essentiel : Le licenciement d’un salarié doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. En l’absence de preuve d’une faute grave, il est considéré comme abusif. La charge de la preuve incombe à l’employeur, qui doit démontrer que les faits reprochés sont établis et suffisamment graves. De plus, aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé ou de son handicap, et l’employeur doit prouver l’absence de discrimination en cas de litige.
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Résumé de l’affaire : Un employeur, la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser, a embauché un salarié en qualité de négociateur immobilier par un contrat de travail à durée indéterminée en avril 2017. En décembre 2017, un avenant a été signé concernant le 13ème mois. Le salarié a été en arrêt maladie à deux reprises en 2021. En octobre 2021, l’employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable au licenciement, suivi d’une mise à pied conservatoire et d’un licenciement pour faute grave.
Le salarié a contesté son licenciement, demandant la nullité de celui-ci et des indemnités. En mars 2024, le conseil de prud’hommes a rejeté sa demande de nullité et a confirmé la légitimité de son licenciement, tout en condamnant l’employeur à verser certaines indemnités, notamment pour préavis et licenciement. Le salarié a ensuite interjeté appel, demandant la confirmation de certaines décisions et l’infirmation d’autres, notamment concernant la nullité de son licenciement et des dommages-intérêts. Dans ses écritures, le salarié a soutenu que son licenciement était discriminatoire en raison de son état de santé. L’employeur a répliqué en affirmant que les griefs reprochés au salarié étaient fondés et que le licenciement était justifié. La cour a examiné les éléments de preuve, notamment les griefs liés à des publications sans mandats de vente, et a conclu que l’employeur n’avait pas établi la faute grave. Finalement, la cour a infirmé le jugement initial sur plusieurs points, déclarant le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamnant l’employeur à verser des indemnités supplémentaires au salarié, tout en rejetant certaines demandes du salarié et de l’employeur. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la nullité du licenciement ?La nullité du licenciement peut être fondée sur l’article L.1132-1 du code du travail, qui stipule qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire en raison de son état de santé ou de son handicap. Il est également pertinent de se référer à l’article L.1134-1 du même code, qui impose à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Dans le cas présent, le salarié a soutenu que son licenciement était discriminatoire en raison de son état de santé, mais il n’a pas réussi à établir des éléments probants à cet égard. Quel est le critère de la cause réelle et sérieuse du licenciement ?La cause réelle et sérieuse du licenciement est définie par l’article L.1232-1 du code du travail, qui exige que le licenciement repose sur un motif objectif et vérifiable, en lien avec la conduite du salarié ou les nécessités de l’entreprise. Dans cette affaire, le conseil de prud’hommes a jugé que les griefs reprochés au salarié constituaient une cause réelle et sérieuse de licenciement, ce qui a été confirmé par la cour d’appel. Quel est le régime des indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ?L’article L.1235-1 du code du travail prévoit que, lorsque le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, le salarié a droit à des dommages-intérêts. Ces dommages-intérêts doivent être calculés en fonction de l’ancienneté du salarié et de la situation de l’entreprise, avec un minimum de trois mois de salaire, sauf preuve du contraire par l’employeur. Dans le cas présent, le salarié a été condamné à recevoir une somme de 21826,72 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Quel est le cadre légal concernant la mise à pied conservatoire ?La mise à pied conservatoire est régie par l’article L.1332-4 du code du travail, qui stipule qu’elle doit être notifiée au salarié et ne peut excéder la durée nécessaire à l’instruction de la procédure disciplinaire. Dans cette affaire, la mise à pied a été jugée injustifiée, car le licenciement a été déclaré sans cause réelle et sérieuse, entraînant le droit au rappel de salaire pour la période de mise à pied. Quel est le traitement des demandes de dommages-intérêts pour préjudice moral ?Les dommages-intérêts pour préjudice moral ne peuvent être accordés que si le salarié établit un lien direct entre le comportement de l’employeur et le préjudice subi, conformément à la jurisprudence. Dans cette affaire, le salarié a été débouté de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral, n’ayant pas prouvé que ses arrêts de travail étaient liés à la conduite de son employeur. Quel est le cadre légal pour la remise des documents de fin de contrat ?L’article L.1234-19 du code du travail impose à l’employeur de remettre au salarié les documents de fin de contrat, tels que le certificat de travail et l’attestation Pôle emploi, dans un délai raisonnable. Dans cette affaire, la cour a ordonné à l’employeur de remettre ces documents sous astreinte, confirmant ainsi l’obligation légale de l’employeur à cet égard. |
du 2/04/2025
N° RG 24/00622
MLB/FJ
Formule exécutoire le :
à :
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE SOCIALE
Arrêt du 2 avril 2025
APPELANT :
d’un jugement rendu le 25 mars 2024 par le Conseil de Prud’hommes de REIMS, section Activités Diverses (n° F 22/00388)
Monsieur [M] [F]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par la SELARL G.R.M.A., avocats au barreau de REIMS
INTIMÉE :
SCP PATRICE PROUVEUR, ANNE-CLAIRE ANCELIN, MAXIME SCHLESSER
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par la SCP SAMMUT-CROON-JOURNE-LEAU, avocats au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE et par la SELARL CHRISTIAN BENOIT, avocats au barreau de la HAUTE-MARNE
DÉBATS :
En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 février 2025, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, et Madame Isabelle FALEUR, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 2 avril 2025.
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Monsieur François MÉLIN, président
Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller
Madame Isabelle FALEUR, conseiller
GREFFIER lors des débats :
Monsieur Francis JOLLY, greffier
ARRÊT :
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 3 avril 2017, la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser a embauché Monsieur [M] [F] en qualité de négociateur immobilier.
Un avenant à son contrat de travail intitulé ‘CONVENTION 13e MOIS dérogation article 14.7 de la convention collective’ a été signé le 28 décembre 2017.
Monsieur [M] [F] a été en arrêt-maladie du 29 mars au 23 avril 2021, puis du 13 septembre au 10 octobre 2021.
Le 6 octobre 2021, la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser l’a convoqué à un entretien préalable à licenciement.
Le 18 octobre 2021, elle lui a signifié sa mise à pied conservatoire.
Le 21 octobre 2021, elle lui a notifié son licenciement pour faute grave.
Le 22 octobre 2021, Monsieur [M] [F] a demandé à la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser des précisions sur les motifs de son licenciement et celle-ci lui a répondu le 27 octobre 2021 que le courrier de licenciement comportait toutes les explications et confirmait la violation manifeste de ses obligations contractuelles.
Contestant notamment le bien-fondé de son licenciement, Monsieur [M] [F] a saisi le 4 octobre 2022 le conseil de prud’hommes de Reims d’une demande tendant à voir prononcer à titre principal la nullité de son licenciement et à titre subsidiaire son absence de cause réelle et sérieuse, et de demandes en paiement à caractère indemnitaire et salarial.
Par jugement en date du 25 mars 2024, le conseil de prud’hommes a :
– rejeté la demande de nullité du licenciement de Monsieur [M] [F] ainsi que la demande afférente de dommages-intérêts pour la somme de 43653,43 euros,
– rejeté la demande de Monsieur [M] [F] de considérer le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ainsi que la demande afférente de dommages-intérêts pour la somme de 32740,08 euros,
– dit que les griefs reprochés à Monsieur [M] [F] constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement,
– dit que la mise à pied est fondée,
en conséquence,
– condamné la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à verser à Monsieur [M] [F] les sommes suivantes :
indemnité compensatrice de préavis : 16370,04 euros + congés payés 1637 euros,
indemnité de licenciement pour ancienneté de 4 ans et 9 mois : 6479,81 euros,
rappel de salaire sur mise à pied conservatoire : 555,57 euros + congés payés afférents 55,55 euros,
– débouté Monsieur [M] [F] des demandes suivantes :
la somme de 4000 euros nets de toute charge à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
la somme de 2278,34 euros nets de toute charge à titre de dommages-intérêts pour défaut de signalement de licenciement à la commission nationale paritaire de l’emploi du notariat,
la somme de 14737,50 euros à titre de rappel de commissions pour l’année 2021 sur les honoraires encaissés par l’étude dont Monsieur [M] [F] est à l’origine outre les congés afférents : 1473,75 euros,
la somme de 9687,11 euros à titre de rappel de 13e mois de décembre 2018 à octobre 2021 inclus, outre la somme de 968,71 euros de congés payés afférents,
la somme de 5000 euros pour attitude abusive et préjudice financier,
la somme de 334,90 au titre de la déduction opérée de manière illicite en février 2020 outre les congés payés : 33,49 euros,
la somme de 1452,31 euros au titre du remboursement des frais kilométriques exposés par Monsieur [M] [F] du 3 juillet au 18 octobre 2021,
– ordonné la remise des bulletins de salaire conformes, de l’attestation pôle emploi ainsi que du certificat de travail conformes sous astreinte de 10 euros par jour de retard pour l’ensemble des documents dans un délai de trois semaines suivant la notification du jugement, le conseil se réservant le droit de liquider l’astreinte,
– condamné la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à payer à Monsieur [M] [F] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser aux entiers dépens,
– rejeté la demande de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser au titre de l’article 1240 du code civil ainsi que les dommages intérêts afférents de 2000 euros,
– rejeté la demande de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser au titre de l’article 700 et des dépens,
– rejeté le surplus des demandes formées par les deux parties.
Monsieur [M] [F] a formé une déclaration d’appel le 17 avril 2024.
Dans ses écritures en date du 10 décembre 2024, Monsieur [M] [F] demande à la cour :
* de confirmer le jugement en ce qu’il a :
– condamné la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui verser les sommes suivantes :
indemnité compensatrice de préavis : 16370,04 euros + congés payés 1637 euros,
indemnité de licenciement pour ancienneté de 4 ans et 9 mois : 6479,81 euros,
rappel de salaire sur mise à pied conservatoire : 555,57 euros + congés payés afférents 55,55 euros,
– ordonné la remise des bulletins de salaire conformes, de l’attestation pôle emploi ainsi que du certificat de travail conformes sous astreinte de 10 euros par jour de retard pour l’ensemble des documents dans un délai de trois semaines suivant la notification du jugement, le conseil se réservant le droit de liquider l’astreinte,
– condamné la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser aux entiers dépens,
– rejeté la demande de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser au titre de l’article 1240 du code civil ainsi que les dommages intérêts-afférents de 2000 euros,
– rejeté la demande de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser au titre de l’article 700 et des dépens,
* d’infirmer le jugement en ce qu’il :
– a rejeté sa demande de nullité du licenciement ainsi que sa demande afférente de dommages-intérêts pour la somme de 43653,43 euros,
– a rejeté sa demande de considérer le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ainsi que sa demande afférente de dommages-intérêts pour la somme de 32740,08 euros,
– a dit que les griefs qui lui sont reprochés constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement,
– a dit que la mise à pied est fondée,
– l’a débouté des demandes suivantes :
la somme de 4000 euros nets de toute charge à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
la somme de 14737,50 euros à titre de rappel de commissions pour l’année 2021 sur les honoraires encaissés par l’étude dont il est à l’origine outre les congés afférents : 1473,75 euros,
la somme de 9687,11 euros à titre de rappel de 13e mois de décembre 2018 à octobre 2021 inclus, outre la somme de 968,71 euros de congés payés afférents,
la somme de 5000 euros pour attitude abusive et préjudice financier,
la somme de 334,90 au titre de la déduction opérée de manière illicite en février 2020 outre les congés payés : 33,49 euros,
la somme de 1452,31 euros au titre du remboursement des frais kilométriques qu’il a exposés du 3 juillet au 18 octobre 2021,
– a rejeté le surplus des demandes des parties,
en conséquence, statuant à nouveau y ajoutant :
* à titre principal,
– juger que son licenciement est nul,
en conséquence,
– condamner la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 43653,43 euros (8 mois de salaire) nette de toute charge, à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,
* à titre subsidiaire,
– juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
en conséquence,
– condamner la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 32740,08 euros (6 mois de salaires conventionnellement prévus) nette de toute charge, à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
en tout état de cause,
– condamner la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer les sommes de :
. 4000 euros nette de toute charge, à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
. 14737,50 euros à titre de rappel de commissions pour l’année 2021 sur les honoraires encaissés par l’étude dont il est à l’origine, outre congés payés y afférents à hauteur de 1473,75 euros,
. 9687,11 euros à titre de rappel de 13e mois, de décembre 2018 à octobre 2021 inclus, outre la somme de 968,71 euros congés payés y afférents,
. 5000 euros à titre de dommages-intérêts pour attitude abusive et préjudice financier,
. 334,90 euros au titre de la déduction opérée de manière illicite en février 2020, outre congés payés à hauteur de 33,49 euros,
. 1578,84 euros au titre du remboursement des frais kilométriques exposés du 3 juillet au 18 octobre 2021,
– ordonner la régularisation de sa situation sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par organisme social à compter de la décision à intervenir, la cour se réservant la faculté de liquider l’astreinte,
– condamner la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel,
– condamner la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 1 euro à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
– condamner la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser aux entiers dépens de première instance et d’appel,
– débouter la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser de son appel incident,
– débouter la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser de l’intégralité de ses demandes.
Dans ses écritures en date du 13 septembre 2024, la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a :
– rejeté la demande de nullité du licenciement de Monsieur [M] [F] ainsi que la demande afférente de dommages-intérêts pour la somme de 43653,43 euros,
– rejeté la demande de Monsieur [M] [F] de considérer le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ainsi que la demande afférente de dommages-intérêts pour la somme de 32740,08 euros,
– dit que les griefs reprochés à Monsieur [M] [F] constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement,
– dit que la mise à pied est fondée,
– débouté Monsieur [M] [F] des demandes suivantes :
la somme de 4000 euros nets de toute charge à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
la somme de 2278,34 euros nets de toute charge à titre de dommages-intérêts pour défaut de signalement de licenciement à la commission nationale paritaire de l’emploi du notariat,
la somme de 14737,50 euros à titre de rappel de commissions pour l’année 2021 sur les honoraires encaissés par l’étude dont Monsieur [M] [F] est à l’origine outre les congés afférents : 1473,75 euros,
la somme de 9687,11 euros à titre de rappel de 13e mois de décembre 2018 à octobre 2021 inclus, outre la somme de 968,71 euros de congés payés afférents,
la somme de 5000 euros pour attitude abusive et préjudice financier,
la somme de 334,90 au titre de la déduction opérée de manière illicite en février 2020 outre les congés payés : 33,49 euros,
la somme de 1452,31 euros au titre du remboursement des frais kilométriques exposés par Monsieur [M] [F] du 3 juillet au 18 octobre 2021,
et de l’infirmer en ce qu’il :
– l’a condamnée à verser à Monsieur [M] [F] les sommes suivantes :
indemnité compensatrice de préavis : 16370,04 euros + congés payés 1637 euros,
indemnité de licenciement pour ancienneté de 4 ans et 9 mois : 6479,81 euros,
rappel de salaire sur mise à pied conservatoire : 555,57 euros + congés payés afférents 55,55 euros,
– a ordonné la remise des bulletins de salaire conformes, de l’attestation pôle emploi ainsi que du certificat de travail conformes sous astreinte de 10 euros par jour de retard pour l’ensemble des documents dans un délai de trois semaines suivant la notification du jugement, le conseil se réservant le droit de liquider l’astreinte,
– l’a condamnée à payer à Monsieur [M] [F] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– l’a condamnée aux entiers dépens,
– a rejeté sa demande au titre de l’article 1240 du code civil ainsi que les dommages-intérêts afférents de 2000 euros,
– a rejeté sa demande au titre de l’article 700 et des dépens,
– a rejeté le surplus des demandes formées par les deux parties,
y faisant droit, statuant à nouveau y ajoutant,
à titre préliminaire,
– juger que Monsieur [M] [F] est défaillant à démontrer la réalité du harcèlement qu’il lui impute,
– rejeter la demande de nullité du licenciement,
– rejeter la demande indemnitaire formulée au titre d’un licenciement nul, préavis, congés payés et indemnité de licenciement,
à titre principal,
– dire et juger que la mise à pied conservatoire à l’encontre de Monsieur [M] [F] est parfaitement fondée,
– constater que Monsieur [M] [F] a commis plusieurs fautes dans l’exécution de sa prestation,
– déclarer le licenciement de Monsieur [M] [F] fondé en son principe sur une faute grave,
– débouter Monsieur [M] [F] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– dire n’y avoir lieu à verser au salarié aucune indemnité au titre d’un licenciement abusif, préavis et indemnité de licenciement,
subsidiairement,
– dire que le licenciement de Monsieur [M] [F] est fondé a minima sur une cause réelle et sérieuse,
à titre infiniment subsidiaire,
– réduire le quantum des demandes à de justes proportions,
en tout état de cause,
– débouter Monsieur [M] [F] de l’intégralité de ses demandes,
– condamner Monsieur [M] [F] au paiement de 2000 euros de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 1240 du Code civil,
– condamner Monsieur [M] [F] à lui payer la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
– condamner Monsieur [M] [F] aux entiers dépens dont recouvrement direct au profit de la Selarl Christian Benoit ainsi qu’aux frais d’exécution qui pourraient en découler.
– Sur le rappel de commissions :
Monsieur [M] [F] demande à la cour d’infirmer le jugement du chef du rejet de sa demande en paiement d’un montant de 14737,50 euros, outre les congés payés y afférents au titre d’un rappel de commissions pour l’année 2021, soutenant que sa demande est fondée en application de l’avenant à son contrat de travail et au regard des pièces qu’il produit.
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser s’y oppose, motifs pris tant des dispositions contractuelles que de l’absence de preuve de Monsieur [M] [F] au titre des prétendues ventes qu’il revendique.
L’article 9 du contrat de travail de Monsieur [M] [F] intitulé ‘prime exceptionnelle liée à la fonction de négociateur’ est ainsi rédigé :
‘Outre la rémunération mensuelle ci-dessus mentionnée sous 4°), Monsieur [F], compte tenu de sa qualité d’employé au service ‘gérance-négociation’ et des obligations de déplacement inhérentes à cette fonction, aura une prime exceptionnelle mensuelle et proportionnelle de treize pour cent (13%) brut sur les honoraires de négociation hors taxes encaissés par l’Office au cours de chaque mois civil’.
Le pourcentage a été porté à 15 au terme de l’avenant au contrat de travail en date du 28 décembre 2017.
Monsieur [M] [F] produit une liste de 10 biens, pour lesquels il prétend être à l’origine de la vente et applique un pourcentage de 15 % sur le montant des honoraires qu’il détaille.
Or, les pièces qu’il produit par ailleurs permettent de retenir qu’il n’a été à l’origine que des 3 ventes suivantes :
– vente [N] à [Localité 7] avec des honoraires de négociation de 5000 euros.
– vente du bâtiment Argo France avec des honoraires de négociation de 40000 euros.
– vente [G] avec des honoraires de négociation de 9450 euros.
Pour le reste, soit les pièces ne sont pas suffisamment précises (pièce n°50 : l’honoraire de négociation n’est pas précisé), soit elles ne permettent pas de retenir que Monsieur [M] [F] est à l’origine de la vente (pièce n°52), soit elles sont inexistantes pour les 5 autres ventes qu’il prétend avoir réalisées.
Dans ces conditions, sur la base d’honoraires de négociation d’un montant de 54450 euros, la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser doit être condamnée à payer à Monsieur [M] [F] la somme de 8167,50 euros, outre les congés payés y afférents.
En effet, c’est à tort que la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser s’oppose au paiement d’une telle somme au motif que Monsieur [M] [F] n’aurait plus été présent au sein de l’étude lors de l’encaissement des honoraires, alors que le versement de la prime n’est pas subordonné à la présence de Monsieur [M] [F] au moment dudit encaissement.
Le jugement doit donc être infirmé en ce sens.
– Sur le rappel au titre du 13ème mois :
Monsieur [M] [F] demande la condamnation de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 9687,11 euros correspondant à un rappel de 13ème mois sur la partie variable de sa rémunération en application de l’article 14.7 de la convention collective, de 2018 à 2021, dès lors que la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser lui a versé un 13ème mois calculé sur la seule partie fixe de sa rémunération.
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser s’y oppose au motif que les parties sont convenues de disposition plus favorable au salarié.
Or, si elle prétend que Monsieur [M] [F] ne percevait pas de 13ème mois sur la partie variable de sa rémunération parce qu’il bénéficiait par ailleurs de dispositions largement plus favorables économiquement, elle ne le démontre pas.
Dès lors, l’article 14.7 de la convention collective applicable, qui prévoit que ‘lorsque le salaire habituel comprend une partie variable en plus de la rémunération fixe convenue, le treizième mois est égal au douzième de la totalité de la rémunération fixe et variable annuelle’, doit recevoir application.
Ainsi au vu des bulletins de produits, Monsieur [M] [F] a perçu les commissions suivantes :
– 2400 euros en décembre 2018,
– 27200 euros au titre de l’année 2019,
– 21921,30 euros au titre de l’année 2020,
– 17812,25 euros de janvier à octobre 2021, outre la somme de 8167,50 euros ci-dessus retenue, soit la somme totale de 25979,75 euros.
Le montant de la rémunération variable, calculé de 2018 à 2021 -et au prorata au titre de cette dernière année-, s’élève donc à la somme de 6097,57 euros, que la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser doit être condamnée à payer à Monsieur [M] [F], outre les congés payés y afférents.
Le jugement doit être infirmé en ce sens.
– Sur le remboursement des sommes de 334,90 euros et de 33,49 euros :
Monsieur [M] [F] demande la condamnation de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 334,90 euros, outre les congés payés afférents, au motif que celle-ci lui a indûment retenu sur son salaire au mois de février 2020 ce montant correspondant au coût de location d’un véhicule en remplacement du véhicule mis à sa disposition, accidenté, et ce en violation de l’article L.1331-2 du code du travail.
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser s’y oppose au motif que la demande serait prescrite en application de l’article L.1471-1 du code du travail, qu’en toute hypothèse cette déduction n’est que la conséquence d’un accident de circulation dont Monsieur [M] [F] était responsable et qu’il ne l’a pas contestée dans le délai de 6 mois du solde de tout compte.
Monsieur [M] [F] réplique à raison à la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser que sa demande n’est pas prescrite en ce que l’article L.3245-1 du code du travail est applicable, s’agissant d’une demande de rappel de salaire, et que dès lors qu’il a saisi le conseil de prud’hommes le 4 octobre 2022 et que la déduction est intervenue au mois de février 2020, il a agi dans le délai légal de 3 ans.
Il importe peu par ailleurs que Monsieur [M] [F] n’ait pas contesté son reçu pour solde de tout compte dans le délai de 6 mois, lequel n’avait pas d’effet libératoire au titre des salaires, puisqu’aucune mention ne figure à ce titre dans ledit solde.
Dans ces conditions, c’est à tort que la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser a procédé à une retenue sur salaire d’un montant de 334,90 euros sur le salaire de février 2020 de Monsieur [M] [F], et même si celui-ci était responsable de l’accident du véhicule, et ce en application de l’article L.1331-2 du code du travail.
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser doit donc être condamnée à payer à Monsieur [M] [F] la somme de 334,90 euros, outre les congés payés y afférents.
Le jugement doit être infirmé en ce sens.
– Sur le remboursement des frais de déplacement :
Monsieur [M] [F] demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande en paiement de la somme de 1452,31 euros au titre du remboursement des frais kilométriques qu’il a exposés du 3 juillet au 18 octobre 2021, portée à celle de 1578,84 euros à hauteur d’appel.
Si la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser lui oppose à tort que de tels frais lui ont été réglés, via le versement de la prime exceptionnelle de 13, puis 15 % sur les honoraires de négociation qui ne pouvaient tenir lieu de remboursement des frais, Monsieur [M] [F] doit toutefois être débouté de sa demande, dès lors qu’il procède tout au plus à une estimation forfaitaire du coût de ses déplacements et qu’il ne produit aucun justificatif à ce titre.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [M] [F] de sa demande à ce titre.
– Sur les dommages-intérêts pour attitude abusive et préjudice financier :
Monsieur [M] [F] demande à la cour de condamner la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 5000 euros à titre de dommages-intérêts pour attitude abusive et préjudice financier et la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser s’y oppose, en faisant valoir que Monsieur [M] [F] réclame à plusieurs reprises l’indemnisation du même préjudice, alors qu’il n’est pas établi.
Monsieur [M] [F] n’établit pas que la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser ne lui transmettait plus de dossier, ne procédant sur ce point que par voie d’allégations, ni que le comportement de son employeur aurait été à l’origine d’un préjudice financier, en l’absence de toute pièce à ce titre.
En conséquence, le jugement doit être confirmé du chef du rejet de la demande de dommages-intérêts.
– Sur la nullité du licenciement :
Monsieur [M] [F] demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement, qu’il prétend être discriminatoire, en raison de son état de santé.
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser réplique que Monsieur [M] [F] tente de convaincre les juges que son licenciement n’est que l’aboutissement de faits de harcèlement moral alors qu’au regard des faits qu’il invoque, il ne satisfait pas à la preuve qui lui incombe.
Il convient en premier lieu de relever que Monsieur [M] [F] ne soutient pas avoir subi un harcèlement moral mais une discrimination en lien avec son état de santé.
Il résulte de l’article L.1132-1 du code du travail qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison de son état de santé ou de son handicap.
Aux termes de l’article L.1134-1 du code du travail ‘Lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles’.
Il convient d’examiner les éléments invoqués par Monsieur [M] [F] au soutien de la discrimination qu’il prétend avoir subie à raison de son état de santé.
Il invoque en premier lieu une intensification de la dégradation de ses relations de travail suite à son 1er arrêt de travail, laquelle n’est pas établie, puisqu’il n’est pas justifié d’une dégradation de ses relations de travail avant celui-ci.
Monsieur [M] [F] fait ensuite exactement valoir que la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser cite le second arrêt-maladie dans la lettre de licenciement, et qu’elle l’a convoqué par courrier du 6 octobre 2021 à un entretien préalable à son licenciement pendant son arrêt-maladie.
Monsieur [M] [F] invoque aussi au soutien de la discrimination que les griefs ne seraient pas fondés.
Or, et même si les griefs reprochés à Monsieur [M] [F] ne s’avèrent pas fondés -comme il sera retenu ci-après-, de tels éléments pris dans leur ensemble ne laissent pas supposer une discrimination à raison de l’état de santé, dès lors que :
– la référence à l’arrêt-maladie dans la lettre de licenciement constitue tout au plus un repère temporel utilisé par l’employeur : ‘Si dans un premier temps, la relation contractuelle s’est bien passée, malheureusement, elle s’est dégradée à compter de deux mois précédent votre dernier arrêt de maladie’.
– la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser établit au moyen de l’attestation de l’autre négociateur de l’étude, que c’est pendant l’arrêt-maladie de Monsieur [M] [F] qu’elle a appris les griefs les plus récents qu’elle impute à Monsieur [M] [F], en dehors de celui en date de l’entretien préalable ou postérieur à celui-ci, ce qui l’a conduite à déclencher la procédure de licenciement, ce qui explique la convocation pendant l’arrêt-maladie.
Dans ces conditions, le jugement doit être confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [M] [F] de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du licenciement et de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement nul.
– Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement :
Monsieur [M] [F] soutient en premier lieu que son licenciement serait sans cause réelle et sérieuse, dès lors que la mise à pied conservatoire du 18 octobre 2021, constituerait une mise à pied disciplinaire et que dès lors la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser avait épuisé son pouvoir disciplinaire en le licenciant le 21 octobre 2021, ce que conteste à raison la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser au regard des termes du courrier qu’elle lui a adressés.
Le courrier est ainsi rédigé :
‘Vous êtes l’auteur du fait de mettre en publicité des biens immobiliers sans mandats de vente, en notre Etude et sur sites internet, faute professionnelle que nous avons découvert pendant votre dernière absence.
Pour cette raison, vous avez été convoqué le vendredi 15 octobre 2021 pour un entretien préalable pouvant mener au licenciement.
Dans l’attente du résultat de cet entretien préalable, où vous n’avez apporté aucunes explications face à la gravité des faits, nous avons le regret de vous signifier votre mise à pied conservatoire. Elle prend effet dès remise de ce courrier, vous serez rapidement informé de la suite de la procédure’.
Dès lors que cette mise à pied, prise à l’issue de l’entretien préalable, a été notifiée en faisant référence à la procédure de licenciement disciplinaire en cours, elle présentait un caractère conservatoire.
Dans ces conditions, l’employeur n’a pas épuisé son pouvoir disciplinaire.
Monsieur [M] [F] soutient que son licenciement serait dénué de cause réelle et sérieuse au motif que la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser ne rapporte pas la preuve de la faute grave qu’elle lui reproche, ce que conteste la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser qui soutient établir que les 3 griefs qu’elle lui reproche sont établis et constitutifs d’une faute grave, contrairement à ce que les premiers juges ont retenu.
Il appartient à la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser de rapporter la preuve d’une telle faute qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.
Il est en premier lieu reproché à Monsieur [M] [F] ‘Le 23/07/2021 d’avoir publié sur le site internet l’annonce N°52046-922591 une maison à [Localité 8] des consorts [O] moyennant le prix de 40.000 euros, le 20/07/2021 l’annonce N°52046-922125 un appartement des consorts [V] moyennant le prix de 105.000 euros, le 01/03/2019 l’annonce N°52046-359156 un terrain à [Localité 5] de Monsieur [H] dont le mandat est expiré et sans avoir signé préalablement avec les clients de mandats de vente, et sur les panneaux d’affichage de l’étude, l’annonce n°52046-918803 portant sur la vente d’un bien immobilier d’une maison sise à [Localité 6] appartenant à Monsieur et Madame [X], l’annonce N°52046-922811 d’un immeuble de stockage sis à [Localité 6] appartenant à Monsieur [E] sans avoir signé préalablement avec les clients de mandats de vente’.
Or, les pièces produites par la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser permettent de retenir que seuls les biens relatifs aux immeubles des consorts [V] et de Monsieur [E] n’avaient pas fait l’objet de mandats de vente. En effet, seuls ces deux noms sont cités de façon précise par Monsieur [W] [U], salarié de l’étude, dans son attestation. S’il indique qu’il y avait aussi d’autres dossiers dont il n’a plus les noms en tête et qu’il avait transmis une liste à Maître Prouveur, ladite liste n’est pas produite.
Les pièces produites ne permettent pas par ailleurs de retenir que le bien des consorts [V] aurait été publié sur le site internet, alors qu’une liste de biens prétendument éditée le 7 octobre 2021, et par Monsieur [M] [F], à une date où il était en arrêt-maladie est produite et ne comprend pas la référence du bien en cause. Elles ne permettent pas davantage de retenir que le bien de Monsieur [E] se serait retrouvé sur le panneau d’affichage de l’étude, alors qu’à ce titre est produite une photographie sur laquelle il apparaît que différentes annonces de vente de bien-dont celui de Monsieur [E]- sont punaisées, qu’aucun élément toutefois ne permet de dater.
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser est donc défaillante à établir que Monsieur [M] [F] a fait des publications de vente de ces deux biens sans signature d’un mandat de vente.
Monsieur [U] explique par ailleurs dans son attestation s’être souvenu être présent dans le bureau de son collègue (courant août 2021 de mémoire) lorsque Maître Prouveur lui a rappelé une fois de plus cette obligation -de publier l’annonce d’un bien en disposant du mandat de vente-qu’il n’avait pas respectée dans un dossier [A].
Or, Monsieur [M] [F] oppose à la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser la prescription des griefs.
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser réplique qu’elle n’a eu connaissance des manquements de Monsieur [M] [F] au titre de la publication de mandats que pendant l’arrêt-maladie de Monsieur [M] [F], soit en septembre-octobre 2021, ce qui est inexact au regard de ce qu’indique Monsieur [U] au titre du dossier [A].
Dans ces conditions, dès lors que la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser n’établit pas précisément à quelle date au mois d’août 2021, elle a eu connaissance d’un tel grief, il y a lieu de retenir qu’il est prescrit, alors qu’il lui appartenait d’établir qu’elle en aurait eu connaissance au plus tôt le 6 août 2021, dès lors qu’elle a convoqué Monsieur [M] [F] à un entretien préalable à licenciement le 6 octobre 2021, et ce en application de l’article L.1332-4 du code du travail.
Un tel grief n’aurait pu par ailleurs, même prescrit, être pris en considération que s’il s’était répété dans le délai de deux mois précédant l’engagement des poursuites, ce qui n’est pas le cas au vu de ce qui vient d’être précédemment retenu.
Les deux griefs suivants ne sont pas prescrits en ce qu’ils sont datés du 15 octobre 2021.
Il est reproché à Monsieur [M] [F] ‘lors de l’entretien préalable organisé le 15 octobre 2021 à 15 heures, d’avoir cru devoir procéder à un enregistrement sonore clandestin (appareil dissimulé dans l’une de vos chaussettes)’. La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser écrit ensuite qu’elle rappelle à Monsieur [M] [F] à toutes fins utiles qu’un tel stratagème est prohibé et constitue un moyen de preuve illicite et qu’il s’agit d’un comportement susceptible d’être qualifié pénalement.
Or, la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser n’établit pas que Monsieur [M] [F] a procédé à un enregistrement sonore clandestin. En effet, tout au plus Maître Prouveur écrit-il dans la lettre de licenciement que Monsieur [M] [F] avait dissimulé un appareil dans l’une de ses chaussettes, ce que ce dernier conteste en répliquant que l’appareil était posé sur sa jambe. Il n’y a aucun témoin de ladite scène, de sorte que les faits ne sont pas établis.
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser reproche enfin à Monsieur [M] [F] d’avoir par ses actes fait obstacle purement et strictement à la consultation par l’employeur des dossiers et données professionnels, alors qu’il ‘ a été constaté par procès-verbal d’huissier établi le vendredi 15 octobre 2021, que l’ordinateur mis à votre disposition exclusive par l’entreprise a été complètement et volontairement vidé de toutes ses données (dont les mails, les diagnostics et les fichiers clients vendeurs et acquéreurs) et que vous avez supprimé le logiciel negoweb et le logiciel de rédaction des actes authentiques de FICHORGA’.
Or, il n’est pas établi que Monsieur [M] [F] serait à l’origine de tels faits, alors qu’il ressort du constat d’huissier de justice produit que celui-ci a pu faire ses constatations, dès lors que Maître Prouveur a allumé l’ordinateur et que le mot de passe a été entré puisqu’il était indiqué sur la tour de l’ordinateur. L’ordinateur n’était pas protégé et était donc accessible à d’autres personnes que le salarié.
Dans ces conditions, aucune faute n’est établie à l’encontre de Monsieur [M] [F], de sorte que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le jugement doit être infirmé en ce sens.
– Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Le jugement doit être confirmé des chefs de l’indemnité de préavis et des congés payés y afférents, ainsi que de l’indemnité légale, dont les quantum ne sont pas contestés.
S’agissant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, Monsieur [M] [F] réclame 6 mois de salaire tandis que la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser entend les voir limités à 3 mois de salaire.
A la date de son licenciement, Monsieur [M] [F] avait une ancienneté en années complètes de 4 ans, de sorte qu’il peut prétendre à une indemnité comprise entre 3 mois -l’employeur n’établit pas qu’il emploie habituellement moins de 11 salariés- et 5 mois de salaire.
Monsieur [M] [F] était âgé de 59 ans lors de son licenciement. Il a créé la SAS Transac le 3 février 2022 dont l’activité est la transaction sur immeubles et fonds de commerce, qui a enregistré une perte de l’ordre de 10500 euros à l’issue du premier exercice. Il établit qu’il s’est inscrit à Pôle Emploi, et ce à compter du mois de janvier 2023 et il justifie avoir perçu l’ARE de février 2023 à juin 2024.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser sera condamnée à payer à Monsieur [M] [F] la somme de 21826,72 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement doit être infirmé en ce sens.
– Sur la mise à pied conservatoire :
Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, Monsieur [M] [F] est bien-fondé en sa demande au titre de la condamnation de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer un rappel de salaire de 555,57 euros au titre de la mise à pied conservatoire injustifiée, outre les congés payés y afférents.
Le jugement doit être confirmé de ce chef.
– Sur les dommages-intérêts pour préjudice moral :
Monsieur [M] [F] demande la condamnation de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 4000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral. Il doit être débouté d’une telle demande, alors qu’il n’établit pas que ses arrêts de travail seraient en lien avec le comportement de son employeur et alors qu’il ne justifie pas d’un préjudice moral distinct de celui déjà réparé par l’octroi de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [M] [F] de sa demande à ce titre.
– Sur la remise des bulletins de salaires et des documents de fin de contrat sous astreinte :
Il y a lieu d’enjoindre à la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser de remettre à Monsieur [M] [F] les bulletins de salaire et les documents de fin de contrat conformes à la présente décision, sans qu’il y ait lieu au prononcé d’une astreinte.
Le jugement doit être infirmé en ce sens.
– Sur la demande au titre de la régularisation de la situation de Monsieur [M] [F] auprès des organismes sociaux sous astreinte :
Monsieur [M] [F] doit être débouté de sa demande tendant à voir régulariser sa situation auprès d’organismes sociaux qu’il ne désigne pas.
– Sur les dommages-intérêts pour résistance abusive présentée par Monsieur [M] [F] :
A hauteur d’appel, Monsieur [M] [F] demande la condamnation de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à lui payer la somme de 1 euro à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, dont il doit être débouté à défaut de la caractériser dans ses écritures.
– Sur les dommages-intérêts pour procédure abusive présentée par la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser :
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser demande la condamnation de Monsieur [M] [F] à lui payer la somme de 2000 euros à titre de dommages-intérêts, motif pris d’une procédure abusive.
Le jugement doit être confirmé du chef du rejet de sa demande à ce titre, alors que Monsieur [M] [F] lui oppose à raison que sa procédure ne peut être qualifiée d’abusive, alors qu’il voit une partie de ses prétentions satisfaites.
– Sur l’article L.1235-4 du code du travail :
Les conditions d’application de l’article L.1235-4 du code du travail sont réunies, puisque l’employeur n’établit pas employer habituellement moins de 11 salariés.
– Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile :
La SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser doit être condamnée aux dépens de première instance et d’appel, déboutée de sa demande d’indemnité de procédure au titre des deux instances et condamnée en équité à payer à Monsieur [M] [F] la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel, en sus de l’indemnité de procédure allouée en première instance.
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a :
– rejeté la demande de nullité du licenciement de Monsieur [M] [F] ainsi que la demande afférente de dommages-intérêts pour la somme de 43653,43 euros ;
– condamné la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à verser à Monsieur [M] [F] les sommes suivantes :
indemnité compensatrice de préavis : 16370,04 euros + congés payés 1637 euros ;
indemnité de licenciement pour ancienneté de 4 ans et 9 mois : 6479,81 euros ;
rappel de salaire sur mise à pied conservatoire : 555,57 euros + congés payés afférents 55,55 euros ;
– débouté Monsieur [M] [F] des demandes suivantes :
la somme de 4000 euros nets de toute charge à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
la somme de 5000 euros à titre de dommages-intérêts pour attitude abusive et préjudice financier ;
la somme de 1452,31 euros au titre du remboursement des frais kilométriques exposés par Monsieur [M] [F] du 3 juillet au 18 octobre 2021, portée à celle de 1578,84 euros à hauteur d’appel ;
– condamné la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à payer à Monsieur [M] [F] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser aux entiers dépens ;
– rejeté la demande de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser au titre de l’article 1240 du code civil ainsi que les dommages intérêts-afférents de 2000 euros ;
– rejeté la demande de la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
L’infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau :
Condamne la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à payer à Monsieur [M] [F] les sommes de :
– 8167,50 euros à titre de rappel de commissions au titre de l’année 2021 et 816,75 euros au titre des congés payés y afférents ;
– 6097,57 euros à titre de rappel de 13ème mois de décembre 2018 à octobre 2021 et 609,75 euros au titre des congés payés y afférents ;
– 334,90 euros au titre de la déduction opérée de manière illicite sur le salaire au mois de février 2020 et 33,49 euros au titre des congés payés y afférents ;
Dit que le licenciement de Monsieur [M] [F] est dénué de cause réelle et sérieuse ;
Condamne la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à payer à Monsieur [M] [F] la somme de 21826,72 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Déboute Monsieur [M] [F] de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
Enjoint à la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser de remettre à Monsieur [M] [F] ses bulletins de paie et ses documents de fin de contrat conformes à la présente décision ;
Déboute Monsieur [M] [F] de sa demande d’astreinte ;
Déboute Monsieur [M] [F] de sa demande de régularisation de sa situation auprès des organismes sociaux ;
Condamne la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à rembourser à l’organisme intéressé, dans la limite de six mois, les indemnités chômage versées au salarié, du jour de son licenciement à celui de la présente décision ;
Condamne la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser à payer à Monsieur [M] [F] la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;
Déboute la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser de sa demande d’indemnité de procédure ;
Dit que les condamnations sont prononcées sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables ;
Condamne la SCP Prouveur-Ancelin-Schlesser aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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