L’Essentiel : Madame [Y] [N] a saisi le tribunal judiciaire de Lille le 2 octobre 2023, demandant des indemnités à Air Algérie pour un retard de vol de plus de 5 heures le 19 juillet 2023. Elle réclame 400 euros pour ce retard, ainsi que 150 euros pour résistance abusive et 500 euros pour frais de justice. La société n’était pas présente lors de l’audience du 24 septembre 2024, rendant le jugement contradictoire. Le tribunal a reconnu le droit à l’indemnisation, ordonnant à Air Algérie de couvrir les dépens et les frais de justice, avec une exécution provisoire de la décision.
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Contexte de la DemandePar une requête enregistrée le 2 octobre 2023, Madame [Y] [N] a saisi le tribunal judiciaire de Lille pour demander des indemnités à la société Air Algérie, en vertu du règlement CE n° 261/2004. Elle réclame 400 euros pour un retard de vol, 150 euros pour résistance abusive, 500 euros pour frais de justice, ainsi que la prise en charge des dépens et l’exécution provisoire du jugement. Retard du VolMadame [Y] [N] a réservé un vol AH 1079 le 19 juillet 2023, reliant [Localité 5] à [Localité 7], qui a subi un retard de plus de 5 heures. Elle affirme que ce retard lui donne droit à une indemnisation forfaitaire de 400 euros, conformément à l’article 7 du règlement CE n° 261/2004. Malgré ses demandes d’indemnisation, la société Air Algérie n’a pas répondu. Absence de la DéfenseLa société Air Algérie n’était pas représentée lors de l’audience du 24 septembre 2024, bien que la convocation ait été reçue. En vertu de l’article 473 alinéa 2 du code de procédure civile, le jugement est réputé contradictoire, même en l’absence du défendeur. Analyse JuridiqueLe tribunal a examiné la demande principale en se basant sur les articles du règlement CE n° 261/2004, qui stipulent que les passagers ont droit à une indemnisation en cas de retard significatif. La requérante a fourni des preuves de sa réservation et du retard du vol, sans que la société Air Algérie ne justifie de circonstances extraordinaires. Résistance AbusiveConcernant la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive, le tribunal a noté qu’il n’y avait pas de preuve d’un abus de droit de la part de la société Air Algérie. Le simple fait de ne pas verser l’indemnité ne constitue pas une résistance abusive, et la requérante n’a pas démontré de préjudice. Dépens et FraisLe tribunal a décidé que les dépens de l’instance seraient à la charge de la société Air Algérie, considérée comme partie perdante. De plus, la société devra verser 500 euros à Madame [Y] [N] pour couvrir ses frais de justice, conformément à l’article 700 du code de procédure civile. Exécution ProvisoireEnfin, le tribunal a statué que la décision serait exécutoire à titre provisoire, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner une exécution supplémentaire. Le jugement a été prononcé le 19 novembre 2024. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article 7 du Règlement CE n° 261/2004 concernant l’indemnisation des passagers ?L’article 7 du Règlement (CE) n° 261/2004 stipule que : « 1. Lorsqu’il est fait référence au présent article, les passagers reçoivent une indemnisation dont le montant est fixé à : b) 400 euros pour tous les vols intracommunautaires de plus de 1 500 kilomètres et pour tous les autres vols de 1 500 à 3 500 kilomètres… » Cet article établit clairement le droit à une indemnisation forfaitaire pour les passagers en cas de retard de vol, sous certaines conditions. En l’espèce, la requérante a démontré qu’elle avait une réservation confirmée pour le vol AH 1079, qui a subi un retard de 5 heures et 52 minutes, dépassant ainsi le seuil de trois heures requis pour bénéficier de cette indemnisation. La société Air Algérie n’ayant pas fourni de justification valable pour ce retard, le tribunal a jugé que la requérante avait droit à l’indemnisation de 400 euros prévue par cet article. Quelles sont les implications de l’article 32-1 du code de procédure civile sur la résistance abusive ?L’article 32-1 du code de procédure civile énonce que : « Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés. » Cet article vise à sanctionner les comportements abusifs dans le cadre d’une procédure judiciaire. Cependant, pour qu’une résistance soit qualifiée d’abusive, il faut prouver que l’une des parties a agi avec malice ou mauvaise foi, ce qui n’a pas été établi dans le cas présent. La requérante a demandé des dommages-intérêts en raison de la résistance d’Air Algérie, mais le tribunal a conclu qu’il n’y avait pas de preuve d’un abus de droit. Ainsi, la demande de dommages-intérêts a été rejetée, car le simple fait de ne pas verser l’indemnité ne constitue pas une résistance abusive. Comment l’article 700 du code de procédure civile s’applique-t-il dans ce litige ?L’article 700 du code de procédure civile dispose que : « Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer : 1° A l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens… » Dans cette affaire, la société Air Algérie, en tant que partie perdante, a été condamnée à verser à Madame [Y] [N] la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles. Cette disposition permet de compenser les frais engagés par la partie gagnante qui ne sont pas couverts par les dépens. Le tribunal a donc appliqué cet article pour garantir que la requérante soit indemnisée pour les frais qu’elle a dû supporter dans le cadre de la procédure judiciaire. Quelles sont les conséquences de l’article 514 du code de procédure civile sur l’exécution des décisions judiciaires ?L’article 514 du code de procédure civile prévoit que : « Les décisions de première instance sont, de droit, exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. » Cet article établit le principe selon lequel les décisions rendues en première instance sont exécutoires immédiatement, sauf indication contraire. Dans le cas présent, le tribunal a jugé que la décision était déjà assortie de l’exécution provisoire, ce qui signifie qu’il n’était pas nécessaire d’ordonner une exécution supplémentaire. Cela permet à la partie gagnante de bénéficier rapidement de l’indemnisation qui lui est due, sans attendre l’issue d’éventuels recours. |
de LILLE
[Localité 5]
☎ :[XXXXXXXX01]
N° RG 23/09177 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XTJ4
N° de Minute : 24/00316
JUGEMENT
DU : 19 Novembre 2024
[Y] [N]
C/
Société AIR ALGERIE
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUGEMENT DU 19 Novembre 2024
DANS LE LITIGE ENTRE :
DEMANDEUR
Madame [Y] [N] demeurant [Adresse 3]
représentée par Maître Elodie RIFFAUT, avocat au barreau de PARIS, substituée par Maître Emilie GUILLEMANT, avocat au barreau de LILLE
ET :
DÉFENDEUR
Société AIR ALGERIE, dont le siège social est sis [Adresse 2] – ALGERIE et dont l’Etablissement principal est situé [Adresse 4]
non comparante
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L’AUDIENCE PUBLIQUE DU 24 Septembre 2024
Julie THOREZ, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ
Par mise à disposition au Greffe le 19 Novembre 2024, date indiquée à l’issue des débats par Julie THOREZ, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier
RG n°9177/23 – Page KB
Par requête enregistrée le 2 octobre 2023 au greffe de la 10ème chambre du tribunal judiciaire de Lille, Madame [Y] [N] demande, aux visas des dispositions du règlement CE n° 261/2004 du 11 février 2004, des articles 32-1 et 700 du code de procédure civile et 1240 du code civil, de :
condamner la société Air Algérie à lui verser la somme de 400 euros sur le fondement de l’article 7 du Règlement n°261/2004 du 11 février 2004,condamner la société Air Algérie à lui verser la somme de 150 euros à titre de dommages et intérêts du fait de sa résistance abusive en application des articles 32-1 du code de procédure civile et 1240 du code civil,condamner la société Air Algérie à lui verser la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,condamner la société Air Algérie aux entiers dépens,ordonner l’exécution provisoire du jugement.
Lors de l’audience du 24 septembre 2024, la requérante, représentée par son conseil a demandé de faire droit aux prétentions contenues dans la requête.
Elle fait valoir que le vol AH 1079 du 19 juillet 2023 reliant [Localité 5] à [Localité 7] soit 1687 kilomètres, pour lequel elle bénéficiait d’une réservation confirmée, a subi un retard de plus de 3 heures relevant de l’indemnisation forfaitaire à hauteur de 400 euros.
Elle expose que la société Air Alégrie a volontairement manqué à son obligation d’indemnisation et ce malgré les demandes préalables à l’introduction de l’instance.
La société Air Algérie, à qui la lettre recommandée du greffe la convoquant à l’audience a été distribuée, n’était pas représentée à l’audience, de sorte que le jugement, qui est rendu en dernier ressort, sera réputé contradictoire en application de l’article 473 alinéa 2 du code de procédure civile.
L’affaire a été mise en délibéré au 19 novembre 2024.
Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque « le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée. »
Sur la demande principale
L’article 3 du règlement (CE) n° 261/2004 prévoit que :
« 1. Le présent règlement s’applique:
aux passagers au départ d’un aéroport situé sur le territoire d’un État membre soumis aux dispositions du traité;
aux passagers au départ d’un aéroport situé dans un pays tiers et à destination d’un aéroport situé sur le territoire d’un État membre soumis aux dispositions du traité, à moins que ces passagers ne bénéficient de prestations ou d’une indemnisation et d’une assistance dans ce pays tiers, si le transporteur aérien effectif qui réalise le vol est un transporteur communautaire.
2. Le paragraphe 1 s’applique à condition que les passagers :
a) disposent d’une réservation confirmée pour le vol concerné et se présentent, sauf en cas d’annulation visée à l’article 5, à l’enregistrement :
— comme spécifié et à l’heure indiquée à l’avance et par écrit (y compris par voie électronique) par le transporteur aérien, l’organisateur de voyages ou un agent de voyages autorisé, ou, en l’absence d’indication d’heure,
— au plus tard quarante-cinq minutes avant l’heure de départ publiée, ou
b) aient été transférés par le transporteur aérien ou l’organisateur de voyages, du vol pour lequel ils possédaient une réservation vers un autre vol, quelle qu’en soit la raison. »
L’article 6 du règlement (CE) n° 261/2004 prévoit encore que :
« 1. Lorsqu’un transporteur aérien effectif prévoit raisonnablement qu’un vol sera retardé par rapport à l’heure de départ prévue..
b) de trois heures ou plus pour tous les vols intracommunautaires de plus de 1 500 km et pour tous les autres vols de 1 500 à 3 500 km … »
L’article 7 du règlement (CE) n° 261/2004 prévoit enfin que :
« 1. Lorsqu’il est fait référence au présent article, les passagers reçoivent une indemnisation dont le montant est fixé à:
b) 400 euros pour tous les vols intracommunautaires de plus de 1 500 kilomètres et pour tous les autres vols de 1 500 à 3 500 kilomètres… »
En l’espèce, la requérante verse aux débats :
la réservation pour le vol AH 1079 de [Localité 5] à destination d'[Localité 7] pour un départ prévu le 19 juillet 2023 à 19h30 et une arrivée à 21h10,la carte d’embarquement de Madame [Y] [N] pour le vol AH 1079 du 19 juillet à 19H30,la copie du passeport de Madame [Y] [N],l’état du vol AH 1079 opéré par Air Algérie parti de [Localité 6] le 20 juillet 2023 à 1 h44 et arrivé à [Localité 7] le 20 juillet 2023 à 3h02,la mise en demeure adressée à la société Air Algérie le 29 juillet 2023.
Il ressort des pièces versées aux débats que Madame [Y] [N] disposait d’une réservation confirmée pour le vol AH 1079 du 19 juillet 2023 réalisant le trajet [Localité 5] [Localité 7] soit 1687 kilomètres a subi un retard de 5h52.
La société Air Algérie ne fait état d’aucune circonstance extraordinaire justifiant le retard.
La requérante indique ne pas avoir été indemnisée par suite du retard subi.
Dès lors, la requérante établit le bien-fondé de sa demande.
Il y a donc lieu de condamner la société Air Algérie à payer à Madame [Y] [N] la somme de 400 euros au titre de l’indemnisation forfaitaire due en raison du retard du vol.
Sur la résistance abusive
Aux termes de l’article 9 du code de procédure civile « il incombe à chacune des parties de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »
L’article 32-1 du code de procédure code de procédure civile énonce que « Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés”
La requérante sollicite la condamnation de la société Air Algérie à lui payer une indemnité en raison du caractère abusif de la procédure.
Toutefois, l’exercice d’un droit tel que celui d’agir en justice ne dégénère en abus que si son titulaire en fait, à dessein de nuire, par malice ou mauvaise foi, un usage préjudiciable à autrui.
En l’espèce, la preuve d’un abus de droit n’étant pas rapportée, la requérante sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts sur ce fondement.
L’article 1240 du code civil énonce que “Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.”
De plus, le simple fait de ne pas verser l’indemnité sollicitée ne peut être considéré comme une résistance abusive, d’autant que la requérante ne justifie d’aucun préjudice.
Elle sera déboutée de sa demande à ce titre.
Sur les dépens
En application de l’article 696 du code de procédure civile, il convient de mettre les dépens de l’instance à la charge de la société Air Algérie, partie perdante.
Sur les frais irrépétibles
En application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, « le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer : 1° A l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens… »
En l’espèce, la société Air Algérie, tenue aux dépens, sera condamnée à payer à Madame [Y] [N] une somme de 500 euros sur ce fondement.
Sur l’exécution provisoire
L’article 514 du code de procédure civile prévoit que « Les décisions de première instance sont, de droit, exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. »
La décision étant assortie de droit de l’exécution provisoire, il n’y a pas lieu de l’ordonner.
Le tribunal, statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par jugement réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,
Condamne la société Air Algérie à payer à Madame [Y] [N] la somme de 400 euros en application de l’article 7 du Règlement CE 261/2004,
Déboute Madame [Y] [N] de sa demande de dommages et intérêts,
Condamne la société Air Algérie au paiement des dépens,
Condamne la société Air Algérie à payer à Madame [Y] [N] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire.
Ainsi jugé et prononcé le 19 novembre 2024.
Le greffier La présidente
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