Hospitalisation psychiatrique : enjeux de consentement et de soins nécessaires

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Hospitalisation psychiatrique : enjeux de consentement et de soins nécessaires

L’Essentiel : Monsieur [C] [T] [W], né le 14 avril 1998, est hospitalisé à l’EPS de [Localité 5] depuis le 13 novembre 2024, suite à une demande de sa sœur, Madame [J] [W]. Son admission a été jugée urgente en raison de troubles du comportement, notamment une agression. Lors de l’audience du 21 novembre, son avocat a contesté la régularité de la procédure, mais le juge a confirmé la validité des certificats médicaux. Malgré son désaccord sur son hospitalisation, les éléments médicaux indiquent qu’il nécessite des soins en raison de troubles mentaux, justifiant une surveillance médicale constante.

Présentation de la personne en soins psychiatriques

Monsieur [C] [T] [W], né le 14 avril 1998, est hospitalisé à l’EPS de [Localité 5] depuis le 13 novembre 2024. Il est représenté par Me Kenza LARBI, avocat commis d’office. La demande d’hospitalisation a été initiée par sa sœur, Madame [J] [W], qui a constaté une dégradation de son état mental.

Décision d’admission et hospitalisation

Le 14 novembre 2024, la directrice de l’établissement a décidé de l’admission de Monsieur [C] [T] [W] en soins psychiatriques, en raison de troubles du comportement, notamment une agression envers sa sœur. Cette hospitalisation a été qualifiée d’urgence, et le juge des libertés et de la détention a été saisi le 18 novembre 2024 pour statuer sur la poursuite de cette mesure.

Observations et contestations

Lors de l’audience du 21 novembre 2024, l’avocat de Monsieur [C] [T] [W] a soulevé des questions sur la régularité de la procédure, notamment concernant la motivation des certificats médicaux et leur notification. Cependant, le juge a constaté que les certificats contenaient des informations précises sur l’état du patient et que la procédure était régulière.

État de santé et besoin de soins

Les éléments médicaux indiquent que Monsieur [C] [T] [W] présente des troubles mentaux qui rendent impossible son consentement aux soins. Il a exprimé son désaccord avec son hospitalisation, affirmant ne pas être malade et contestant les accusations de violence. Sa sœur a témoigné de son comportement sociable antérieur et de sa dégradation progressive, soulignant la nécessité de soins pour son rétablissement.

Décision du juge des libertés et de la détention

Le juge a rejeté les moyens de nullité soulevés par la défense et a ordonné la poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur [C] [T] [W], considérant que son état mental justifie une surveillance médicale constante. Cette décision est susceptible d’appel et a été notifiée au parquet.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la régularité de la procédure

La défense de Monsieur [C] [T] [W] soutient que la procédure d’hospitalisation est irrégulière, notamment en raison de la motivation insuffisante des certificats médicaux et de la notification de ceux-ci à l’intéressé.

Il est essentiel de se référer à l’article L. 3212-1 du Code de la santé publique, qui stipule que :

« Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l’article L. 3211-2-1. »

Dans le cas présent, les certificats médicaux fournis comportent des indications précises sur l’état de Monsieur [C] [T] [W] et son évolution. Le juge des libertés et de la détention n’a pas à remettre en cause le contenu de ces certificats, car il n’est pas compétent pour apprécier la pathologie du patient.

Concernant la notification des certificats médicaux, bien que ceux-ci ne portent pas le nom du patient, les mentions présentes permettent de vérifier leur rédaction. Le médecin ayant signé ces documents a constaté l’impossibilité pour le patient d’en prendre connaissance en raison de son état.

Ainsi, la procédure est jugée régulière et le moyen soulevé par la défense est rejeté.

Sur la poursuite de la mesure de soins psychiatriques

L’article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique précise que :

« L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure, avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée. »

Dans cette affaire, Monsieur [C] [T] [W] a été hospitalisé sans son consentement, suite à une demande de sa sœur, en raison de troubles du comportement. Les éléments médicaux indiquent qu’il présente des délires de persécution, une anosognosie et un risque de récidive de passage à l’acte hétéro-agressif.

L’avis médical du 18 novembre 2024 souligne que le patient conteste son hospitalisation et son traitement, affirmant ne pas avoir besoin de soins. Cependant, les témoignages de sa sœur et les constatations médicales montrent une dégradation de son état mental, rendant impossible son consentement.

Il est donc établi que les conditions de l’article L. 3212-1 sont remplies, justifiant la poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur [C] [T] [W].

En conséquence, le juge des libertés et de la détention ordonne la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète, considérant que l’état de santé du patient nécessite une surveillance médicale constante.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BOBIGNY
ORDONNANCE STATUANT SUR LA POURSUITE D’UNE MESURE D’HOSPITALISATION COMPLÈTE

DÉLAI DE 12 JOURS

ADMISSION A LA DEMANDE D’UN TIERS OU EN CAS DE PÉRIL IMMINENT

N° RG 24/09567 – N° Portalis DB3S-W-B7I-2GYC
MINUTE: 24/2298

Nous, Hélène ASTOLFI, juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de BOBIGNY, assistée de Annette REAL, greffier, avons rendu la décision suivante concernant:

LA PERSONNE EN SOINS PSYCHIATRIQUES :

Monsieur [C] [T] [W]
né le 14 Avril 1998 à [Localité 4]
[Adresse 2]
[Localité 3]

Etablissement d’hospitalisation : L’EPS DE [Localité 5],

Présent assisté de Me Kenza LARBI, avocat commis d’office

PERSONNE A L’ORIGINE DE LA SAISINE
Madame la directrice de L’EPS DE [Localité 5]
Absente

TIERS A L’ORIGINE DE L’HOSPITALISATION
Madame [J] [W]
Présente

MINISTÈRE PUBLIC
Absent
A fait parvenir ses observations par écrit le 20 novembre 2024.

Le 14 novembre 2024, la directrice de L’EPS DE [Localité 5] a prononcé la décision d’admission en soins psychiatriques de Monsieur [C] [T] [W] avec prise d’effets au 13 novembre 2024.

Depuis cette date, Monsieur [C] [T] [W] fait l’objet d’une hospitalisation complète au sein de L’EPS DE [Localité 5].

Le 18 novembre 2024, la directrice de l’établissement a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur [C] [T] [W].

Le ministère public a fait connaître son avis par conclusions écrites du 20 novembre 2024.

A l’audience du 21 novembre 2024, Me Kenza LARBI, conseil de Monsieur [C] [T] [W], a été entendu en ses observations.

L’affaire a été mise en délibéré à ce jour.

MOTIFS

Sur la régularité de la procédure

Le conseil de Monsieur [C] [T] [W] soutient que la procédure est irrégulière en ce que les certificats médicaux figurant en procédure ne seraient pas suffisamment motivés et que la notification qui en a été faite à l’intéressé serait irrégulière.

En l’espèce, il convient de constater que les différents certificats médicaux figurant en procédure comportent des indications précises et détaillées concernant l’état de l’intéressé et son évolution depuis le début de la mesure. Le contenu de ces certificats ne saurait être remis en cause par le juge des libertés et de la détention qui n’a aucune appréciation à porter sur la pathologie du patient, ni les soins qui lui sont prodigués.

S’agissant des notifications des certificats médicaux des 24h et 72h, s’il est exact que ces derniers ne comportent pas le nom du patient, les conditions dans lesquelles ils ont été rédigés peuvent être vérifiées grâce à leurs mentions. Il est constant que le médecin ayant signé chacune de ces notifications et constaté l’impossibilité pour le patient d’en prendre connaissance en raison de son état est toujours le médecin ayant procédé à l’examen et que les dates de rédactions concordent.

Dès lors, la procédure est parfaitement régulière. Le moyen sera rejeté.

Sur la poursuite de la mesure de soins psychiatriques

Aux termes de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l’article L. 3211-2-1.

L’article L. 3211-12-1 du même code dispose que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure, avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ou à compter de la décision par laquelle le directeur de l’établissement a modifié la forme de la prise en charge du patient en procédant à son hospitalisation complète.

Il résulte des pièces du dossier que Monsieur [C] [T] [W] a été hospitalisé sans son consentement sur demande d’un tiers (soeur) et dans le cas d’urgence, suivant décision de la directrice d’établissement en date du 14 novembre 2024 avec prise d’effets au 13 novembre 2024, à la suite de troubles du comportement à domicile (agression de sa soeur). A l’examen initial, il était constaté un contact méfiant, des délires de persécution et de filiation, une anosognosie et un risque de récidive de passage à l’acte hétéro agressif.

L’avis motivé en date du 18 novembre 2024 mentionne que le patient juge son hospitalisation non bénéfique et revendique sa sortie sans cesse. Il reconnait avoir donné un coup de poing sans raison devant les soignants, mais conteste devant sa famille. Il conteste son traitement médicamenteux tous les jours et dissimule ses médicaments dès que possible. Une surveillance quotidienne est nécessaire car il ne comprend pas la nécessité des soins.

A l’audience Monsieur [C] [T] [W] déclare qu’il n’a pas compris les raisons pour lesquelles il a été hospitalisé. Il s’agit de sa seconde hospitalisation. Il indique que personne ne lui a jamais dit qu’il était malade et conteste que ce soit le cas. Il affirme être dans un état normal et ne pas avoir besoin de soins. Il conteste consommer des stupéfiants. Il réfute également avoir commis des violences sur sa soeur. Il affirme que cette dernière ment. Il insiste sur sa volonté de quitter l’hôpital et sur le fait qu’il n’a nullement besoin de soins.

Madame [J] [W] indique que son frère était quelqu’un de très sociable, qui a fait des études et travaillait. Elle explique que depuis 3 ans il s’est renfermé, qu’il a arrêté de travailler et s’est éloigné de ses amis. Elle indique que sa famille n’a pas tout de suite perçu qu’il allait mal. Elle explique qu’ils se sont rendus compte qu’il consommait des stupéfiants et qu’ils ont constaté que son retrait du monde s’aggravait. Elle indique qu’il a également eu des hallucinations visuelles et auditives et qu’il a commencé à être violent envers les membres de sa famille. Elle explique avoir demandé son hospitalisation pour la première fois à l’été 2024 en raison de la dégradation de son état. Elle précise qu’il a été très difficile pour sa famille d’accepter sa maladie. Elle confirme que son frère pense ne pas être malade. Elle explique qu’il a fugué de sa première hospitalisation et que sa famille a décidé de le faire sortir contre avis médical parce qu’il avait promis de se faire soigner. Elle indique qu’il n’a pas respecté son suivi et qu’il est de nouveau devenu violent. Elle confirme avoir été frappée sans raison par ce dernier avant sa dernière hospitalisation. Elle explique que sa famille est désormais consciente qu’il a besoin de soins pour pouvoir reprendre sa vie.

Il résulte des éléments médicaux ci dessus rappelés, lesquels ne peuvent être remis en cause par le juge des libertés et de la détention, que Monsieur [C] [T] [W] présente des troubles médicalement attestés qui rendent impossible son consentement et que son état mental impose des soins assortis d’une surveillance médicale constante justifiant le maintien d’une hospitalisation complète.

En conséquence, il convient d’ordonner la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète de Monsieur [C] [T] [W].

PAR CES MOTIFS

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bobigny, après débats tenus en audience publique dans la salle d’audience aménagée à l’établissement public de santé de [Localité 5], [Adresse 1], statuant au tribunal par décision susceptible d’appel,

Rejette les moyens de nullité soulevés,

Ordonne la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète de Monsieur [C] [T] [W],

Laisse les dépens à la charge de l’Etat,

Dit que cette ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.

Fait et jugé à Bobigny, le 21 Novembre 2024

Le Greffier

Annette REAL

La vice-présidente
Juge des libertés et de la détention

Hélène ASTOLFI

Ordonnance notifiée au parquet le à
le greffier

Vu et ne s’oppose :

Déclare faire appel :


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