Honoraires d’Avocat : Validité et Modalités de Rémunération en Cas de Dessaisissement

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Honoraires d’Avocat : Validité et Modalités de Rémunération en Cas de Dessaisissement

Convention d’honoraires et obligation de l’avocat

La loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, modifiée par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, impose à l’avocat de conclure une convention d’honoraires par écrit avec son client, sauf en cas d’urgence, de force majeure ou dans le cadre de l’aide juridictionnelle totale. Cette obligation vise à garantir la transparence et la prévisibilité des coûts pour le client, tout en encadrant la relation contractuelle entre l’avocat et son client.

Caducité des clauses d’honoraires en cas de dessaisissement

En cas de dessaisissement de l’avocat, les clauses relatives aux honoraires de base et complémentaires deviennent caduques, conformément à l’article III de la convention d’honoraires. Seule demeure applicable la clause qui organise les modalités de paiement de l’honoraire de diligence, fixant un taux horaire usuel, en l’occurrence 180 € HT. Cette disposition permet de réguler la rémunération des diligences déjà effectuées avant le changement d’avocat.

Évaluation des diligences effectuées par l’avocat

L’évaluation des diligences effectuées par l’avocat doit se faire sur la base de preuves tangibles et documentées. L’article 455 du code de procédure civile impose que les décisions judiciaires soient motivées, ce qui inclut l’examen des éléments de preuve fournis par les parties. Dans le cas présent, les allégations de Mme [E] concernant le manque de diligence de Me [L] n’ont pas été corroborées par des éléments probants, tandis que Me [L] a produit des justificatifs attestant de ses interventions.

Limites de la contestation des honoraires

Les griefs formulés par un client à l’encontre de son avocat concernant la qualité du travail ou le manque d’implication ne peuvent pas être examinés dans le cadre d’une procédure de contestation des honoraires. Le juge des honoraires n’a pas compétence pour statuer sur d’éventuelles fautes professionnelles de l’avocat, conformément aux principes déontologiques régissant la profession. Cette règle vise à protéger l’intégrité de la profession d’avocat et à éviter que des litiges sur la qualité des services ne viennent perturber les procédures de taxation des honoraires.

Recevabilité du recours

La recevabilité du recours formé par Mme [E] est régie par l’article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, qui précise les délais et modalités de contestation des décisions du bâtonnier. En l’espèce, le recours a été formé dans les délais impartis, ce qui en assure la recevabilité.

Indemnisation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

L’article 700 du code de procédure civile permet au juge d’allouer une somme à la partie qui a gagné le procès pour couvrir les frais non compris dans les dépens. Cette disposition vise à garantir l’accès à la justice et à compenser les frais engagés par la partie qui a dû défendre ses droits. Dans le cas présent, Me [L] a été indemnisée pour ses frais, ce qui est conforme à la pratique judiciaire.

L’Essentiel : La loi n° 71-1130 impose à l’avocat de conclure une convention d’honoraires par écrit avec son client, sauf en cas d’urgence ou d’aide juridictionnelle totale. En cas de dessaisissement, les clauses d’honoraires deviennent caduques, sauf celle relative au paiement de l’honoraire de diligence. L’évaluation des diligences doit se baser sur des preuves documentées. Les griefs concernant la qualité du travail de l’avocat ne peuvent pas être examinés dans une procédure de contestation des honoraires.
Résumé de l’affaire : En début d’année 2022, une cliente a sollicité un avocat pour la défense de ses intérêts dans le cadre d’une procédure de divorce. Une convention d’honoraires a été signée le 4 mars 2022, stipulant un montant de 1.800 € TTC pour les services juridiques. Cependant, le 4 juillet 2023, la cliente a contesté ces honoraires auprès du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon. Le bâtonnier a rendu une décision le 4 mars 2024, confirmant le montant des honoraires et rejetant la demande de remboursement de la cliente, considérée comme injustifiée.

Suite à cette décision, la cliente a formé un recours le 18 mars 2024, demandant l’annulation de l’ordonnance de taxation et le remboursement des honoraires. Elle a soutenu que l’avocat n’avait pas consacré le temps qu’elle prétendait sur son dossier et a évoqué un manque de conseils et d’accompagnement, ce qui lui aurait causé un préjudice. La cliente a reconnu avoir eu seulement trois rendez-vous avec son avocat, ainsi que quelques échanges restés sans effet.

De son côté, l’avocat a contesté les allégations de la cliente, affirmant avoir effectué plusieurs diligences documentées, y compris des consultations et des échanges avec l’avocat de l’époux. Elle a également produit des preuves de ses communications et des travaux réalisés, justifiant ainsi le montant des honoraires.

Lors de l’audience du 12 novembre 2024, les parties ont soutenu leurs positions par écrit. Le délégué de la première présidente a finalement rejeté le recours de la cliente, considérant que les griefs formulés à l’encontre de l’avocat ne pouvaient pas justifier une réduction des honoraires. La cliente a été condamnée à payer les dépens et à verser une somme à l’avocat au titre des frais de justice.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le cadre juridique de la convention d’honoraires entre l’avocat et le client ?

La convention d’honoraires entre l’avocat et le client est régie par l’article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015. Cet article stipule que, sauf urgence ou force majeure, l’avocat doit conclure par écrit une convention d’honoraires avec son client.

Cette convention doit préciser les modalités de rémunération de l’avocat, notamment les honoraires de base et les honoraires de résultat. Dans le cas présent, la convention signée le 4 mars 2022 entre la cliente et l’avocat prévoyait des honoraires de base de 1.800 € TTC, incluant les fournitures du cabinet et les étapes procédurales liées à la procédure de divorce.

Il est également important de noter que l’article III de cette convention stipule que, en cas de dessaisissement de l’avocat, les diligences déjà effectuées seront rémunérées selon un taux horaire usuel, soit 180 € HT.

Quel est le principe de la recevabilité du recours formé par la cliente ?

La recevabilité du recours formé par la cliente est régie par l’article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991. Cet article précise que le recours doit être formé dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision contestée.

Dans cette affaire, la décision du bâtonnier a été notifiée à la cliente le 11 mars 2024, et le recours a été formé le 18 mars 2024. Ainsi, la recevabilité du recours n’est ni contestée ni contestable, conformément aux dispositions de l’article précité.

Quel est le rôle du bâtonnier dans la fixation des honoraires d’un avocat ?

Le rôle du bâtonnier dans la fixation des honoraires d’un avocat est de statuer sur les contestations relatives aux honoraires, conformément aux règles déontologiques et aux dispositions légales en vigueur. Le bâtonnier doit s’assurer que les honoraires sont justifiés et proportionnés aux diligences effectuées par l’avocat.

Dans le cas présent, le bâtonnier a fixé le montant des honoraires à 1.800 € TTC, considérant que la somme en principal avait été réglée par la cliente. Il a également rejeté la demande de remboursement de la cliente, la jugeant injustifiée en droit et en fait.

Quels sont les éléments à prendre en compte pour évaluer les diligences effectuées par l’avocat ?

L’évaluation des diligences effectuées par l’avocat doit prendre en compte plusieurs éléments, notamment la durée des rendez-vous, les échanges téléphoniques, les courriers échangés, ainsi que les travaux de rédaction et d’étude des pièces.

Dans cette affaire, l’avocat a produit des justificatifs démontrant qu’elle avait consacré un temps significatif à la préparation du dossier, y compris des rendez-vous et des échanges avec l’avocat de l’époux. La cliente, quant à elle, n’a pas fourni d’éléments circonstanciés pour contester ces diligences, se limitant à des allégations sans fondement.

Quel est le cadre juridique concernant les griefs formulés par la cliente à l’encontre de l’avocat ?

Les griefs formulés par la cliente à l’encontre de l’avocat, tels que la qualité du travail, le manque de soutien et d’implication, ne peuvent pas être examinés dans le cadre de la présente procédure. En effet, le juge des honoraires n’a pas le pouvoir de statuer sur les fautes professionnelles ou les manquements déontologiques de l’avocat.

Cette limitation est essentielle pour garantir que les contestations relatives aux honoraires ne se transforment pas en un examen des compétences professionnelles de l’avocat. Ainsi, les griefs de la cliente ne peuvent pas servir de fondement à une éventuelle réduction des honoraires dus à l’avocat.

Quel est le montant des dépens et des frais alloués à l’avocat en vertu de l’article 700 du code de procédure civile ?

Conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, le juge peut allouer une somme à la partie qui a gagné le procès pour couvrir ses frais non compris dans les dépens. Dans cette affaire, l’avocat a été condamné à recevoir une somme de 500 € en application de cet article.

Cette somme est destinée à compenser les frais engagés par l’avocat dans le cadre de la procédure, et elle est allouée en tenant compte de l’équité et des circonstances de l’affaire. La cliente, ayant succombé dans son recours, doit également supporter les dépens inhérents à ce recours.

N° R.G. Cour : N° RG 24/02487 – N° Portalis DBVX-V-B7I-PRYZ

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DU 11 Mars 2025

contestations

d’honoraires

DEMANDERESSE :

Mme [V] [E]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Muriel BELASSIAN, avocat au barreau de LYON (toque 2032)

DEFENDEUR :

Me [B] [L]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Benoît COURTIN, avocat au barreau de LYON (toque 2216)

Audience de plaidoiries du 12 Novembre 2024

DEBATS : audience publique du 12 Novembre 2024 tenue par Marianne LA MESTA, Conseillère à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 septembre 2024, assistée de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée le 11 Mars 2025 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;

signée par Marianne LA MESTA, Conseillère et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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EXPOSE DU LITIGE

En début d’année 2022, Mme [V] [E] a pris attache avec Me [B] [L] en vue de lui confier la défense de ses intérêts dans le cadre d’une procédure de divorce.

Une convention d’honoraires a été régularisée entre Mme [E] et Me [L] le 4 mars 2022.

Le 4 juillet 2023, Mme [E] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon d’une contestation des honoraires de Me [L].

Celui-ci, par décision du 4 mars 2024, a :

– fixé à la somme de 1.800 € TTC le montant des honoraires de Me [L],

– constaté que la somme en principal a été réglée par Mme [E],

– rejeté en conséquence la demande de remboursement de Mme [E] injustifiée en droit et en fait.

Suivant lettre recommandée du 18 mars 2024, reçue au greffe le 20 mars 2024, Mme [E] a formé un recours contre cette décision qui lui avait été notifiée par courrier recommandé dont l’avis de réception a été signé le 11 mars 2024.

A l’audience du 12 novembre 2024, devant le délégué de la première présidente, les parties s’en sont remises à leurs écritures, qu’elles ont soutenues oralement.

Dans son courrier de recours, complété par des conclusions transmises le 27 septembre 2024, Mme [E] demande au délégué de la première présidente d’annuler l’ordonnance de taxation rendue par M. Le Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Barreau de Lyon, de dire qu’elle n’est pas redevable de la somme de 1.800 € TTC, d’ordonner que Me [L] lui rembourse cette somme et de condamner cette dernière aux entiers dépens.

Si Mme [E] ne conteste pas la convention d’honoraires et la clause de dessaisissement prévue à ce contrat, elle estime en revanche que Me [L] n’a certainement pas passé 14 heures 30 sur son dossier comme elle le soutient, ni même les 11 heures retenues par le bâtonnier, faisant valoir tout à la fois que certaines diligences évoquées par l’avocate ne sont pas corroborées par des pièces justificatives et qu’elle a perçu chez cette dernière une insuffisance de travail ainsi qu’un manque de conseil et d’accompagnement qui a été source d’anxiété et lui a donc causé un préjudice.

Mme [E] reconnaît ainsi uniquement trois rendez-vous avec son conseil, outre des échanges restés sans effet.

Elle entend à cet égard observer :

– que Me [L] l’a sommée très vite de lui annoncer le montant de la prestation compensatoire, sans plus de conseil,

– que seuls deux brefs échanges téléphoniques sont intervenus pour fixer des rendez-vous et autant de mails sans grand contenu,

– qu’elle est restée sans nouvelles de Me [L] entre février 2022 et mai 2023,

– qu’elle n’a jamais bénéficié d’une consultation fiscale de sa part,

– que la consoeur adverse, Me [Z] n’a pas pu s’entretenir avec Me [L],

– que cette dernière a d’ailleurs été l’unique rédactrice de la convention de divorce,

– que Me [L] a refusé une proposition de rendez-vous à quatre (époux et leurs avocats), cet élément, qui est venu s’ajouter au défaut de réactivité et de travail de Me [L], ayant d’ailleurs été à l’origine de sa décision de changer d’avocat.

Dans son mémoire remis au greffe le 7 novembre 2024, Me [L] sollicite le rejet de l’ensemble des demandes présentées par Mme [E], ainsi que sa condamnation aux entiers dépens et au versement d’une somme de 780 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Me [L] expose que ses diligences, qui sont justifiées par les pièces versées aux débats, ont été les suivantes :

– elle a reçu Mme [E] pendant 1 heure 30 le 10 février 2022,

– elle a ensuite écrit à M. [I] et reçu la constitution de Me [Z] avec laquelle les discussions ont pu débuter, comme en témoignent les mails échangés entre elles,

– elle a étudié durant 2 heures les pièces transmises par sa cliente, dont en particulier le projet notarié de liquidation griffonné au crayon à papier,

– après avoir mis en oeuvre les différentes méthodes de calcul de la prestation compensatoire, ce qui a nécessité une heure de travail, elle a attiré l’attention de Mme [E] sur le fait que la proposition de prestation compensatoire de M. [I] était bien en deçà de ce à quoi elle pouvait prétendre,

– elle en a fait de même pour le montant de la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants mineurs, dont l’un en situation de handicap, proposé par son futur ex-époux, lui-aussi en deçà de ce à quoi Mme [E] pouvait prétendre,

– elle a ensuite discuté ces différents points avec Mme [E] dans le cadre de 3 entretiens téléphoniques les 3 mars, 15 mars et 18 mars 2022, outre 20 échanges de mails, ce qui représente 1 heure 30 de travail,

– Mme [E] lui ayant demandé conseil sur une question fiscale précise, elle a consulté un confrère spécialisé en ce domaine auquel elle fait régulièrement appel afin de pouvoir répondre à sa cliente et évoquer le sujet avec Me [Z], l’attestation établie par ce confrère venant confirmer le travail effectué à ce titre durant 1 heure,

– elle a régulièrement communiqué avec Me [Z] dans ce dossier, étant précisé que celle-ci utilise peu l’outil électronique et privilégie les échanges téléphoniques,

– les discussions qui ont eu lieu avec cette dernière ont d’ailleurs abouti à un accord entier et global,

– elle a ainsi rédigé un premier projet de convention de divorce au printemps 2022 qui a été réactualisé en 2023 avec les nouvelles règles relatives à l’IFPA, soit 4 heures de travail, ce projet ayant été mis en suspens dans l’attente d’être complété avec l’acte liquidatif finalisé, puisque la vente de l’appartement commun a pris plus de temps que prévu,

– une fois la vente en bonne voie, elle a reçu Mme [E] à sa demande le 22 mai 2023, celle-ci ayant souhaité obtenir des éclaircissements, notamment quant aux aides de la CAF dont elle était susceptible de bénéficier.

Dans le souci d’éviter une facturation supplémentaire pour un acte inutile, elle a en revanche indiqué à Mme [E] qu’elle n’estimait pas opportun de prévoir un rendez-vous à 4, dès lors qu’en l’état, aucune des parties ne remettait en cause l’accord trouvé et rédigé.

Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux mémoires et courriers régulièrement déposés ci-dessus visés.

MOTIFS

Compte tenu de la date de notification de la décision du bâtonnier (11 mars 2024) et de celle à laquelle le recours a été formé par Mme [E] (18 mars 2024), la recevabilité de ce dernier n’est ni contestée ni contestable au regard des dispositions de l’article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.

Conformément à l’article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, sauf urgence ou force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat doit conclure par écrit avec son client une convention d’honoraires.

En l’occurrence, Mme [E] et Me [L] ont régularisé une convention d’honoraires le 4 mars 2022 (pièce n°1 de l’avocate) prévoyant :

– d’une part (article I), des honoraires de base d’un montant de 1.800 € TTC qui comprennent les fournitures du cabinet (photocopies notamment) et couvrent les étapes procédurales détaillées ci-après dans le cadre d’une procédure de divorce par acte sous seing privé contresigné par avocats et déposé au rang des minutes d’un notaire, à savoir consultation, échanges téléphoniques et électroniques préalables à la présente, trois rendez-vous en vue de la préparation de la convention de divorce, étude de pièces, rédaction avec le conseil de la partie adverse de la convention de divorce (hors liquidation du régime matrimonial), rendez-vous en vue de la relecture et de la signature de la convention de divorce, frais postaux, transcription,

– d’autre part (article II), des honoraires de résultat fixés à 5 % des sommes allouées à la cliente au titre de la prestation compensatoire et réglés à l’avocat lors de la perception effective des sommes mises à la charge de la partie adverse.

L’article III de cette convention stipule par ailleurs que dans l’hypothèse où Mme [E] souhaiterait dessaisir Me [B] [L] et confierait sa défense à un autre conseil, les diligences déjà effectuées seront rémunérées par référence au taux horaire usuel de l’avocat, soit 180 € HT et non sur la base des honoraires de base et complémentaires.

Dans la présente espèce, les deux parties d’accordent sur le fait que leurs relations contractuelles ont pris fin avant l’achèvement de la mission de Me [L], Mme [E] relatant dans ses écritures avoir fait le choix d’un autre conseil courant 2023 en raison de la passivité de Me [L] et de ses réponses lacunaires voire inexistantes, ce qui est confirmé par Me [L], laquelle indique de son côté que le cabinet de Me [M] lui a adressé un courriel le 6 juin 2023 pour l’aviser qu’il lui succédait dans le dossier, alors que le projet de convention de divorce restait à compléter avec l’acte liquidatif notarié devant être établi après la vente de l’appartement commun.

Ce dessaisissement de Me [L] a provoqué la caducité des clauses relatives aux honoraires de base et complémentaires, seul l’article III de la convention demeurant applicable, en ce qu’il vise précisément à organiser les modalités de paiement de l’honoraire de diligence dans l’hypothèse d’un dessaisissement.

Mme [E] reconnaît d’ailleurs elle-même que cette clause a vocation à être mise en oeuvre et ne discute pas non plus le taux horaire de 180 € HT auquel elle se réfère, le bâtonnier ayant à cet égard considéré de manière pertinente que ledit taux est en adéquation avec la difficulté de l’affaire et la notoriété de l’avocat.

Pour ce qui est des diligences effectuées par Me [L] avant son dessaisissement, il est d’abord à noter que Mme [E] ne conteste pas l’existence des deux rendez-vous qu’elle a eus avec cette dernière à son cabinet les 10 février 2022 et 22 mai 2023, pas plus qu’elle ne critique la durée de ces entretiens telle qu’évaluée par l’avocate, à savoir 1 heure 30 pour le premier et 1 heure pour le second. Elle concède également avoir eu deux échanges téléphoniques avec Me [L] qu’elle qualifie de brefs, sans cependant donner une quelconque évaluation horaire.

S’agissant des autres prestations et tâches évoquées par Me [L] et qui sont remises en cause dans leur principe par Mme [E], il y a lieu de relever que cette dernière se borne à procéder par simples allégations, sans fournir un quelconque élément circonstancié de nature à étayer ses dires, en particulier quant au fait que le conseil de son époux n’aurait pas été en mesure de communiquer avec Me [L] et avait seul la charge de la rédaction de la convention de divorce, alors que Me [L] produit de son côté des justificatifs permettant d’établir la réalité de la quasi-totalité des diligences dont elle excipe dans ses conclusions.

Les pièces qu’elle verse aux débats, et en particulier les messages électroniques échangés tant avec Mme [E] qu’avec Me [Z], conseil de son époux, mettent ainsi en évidence :

– qu’à la suite du premier rendez-vous du 10 février 2022, Me [L] a demandé à Mme [E] de lui communiquer les pièces d’état-civil et les documents financiers nécessaires à l’étude de son dossier (pièces n° 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 9),

– qu’avant même la signature de la convention d’honoraires, Me [L] a adressé un courrier à l’époux de Mme [E], M. [I], pour lui faire part de son souhait de divorcer et lui demander sa position sur cette éventualité (pièces n°8 et 14),

– que Me [G] [Z] a ensuite rapidement pris attache avec elle pour lui signaler qu’elle intervenait dans les intérêts de M. [I] (courriel de Me [L] du 18 mars 2022, pièce n°14),

– qu’après s’être entretenue téléphoniquement avec Mme [E] le 21 mars 2022, Me [L] a engagé les négociations avec Me [Z] sur le contenu de la future convention de divorce dès le 22 mars 2022 (pièce n°14),

– que dans un message du 29 mars 2022, Me [L] a proposé à Me [Z] de rédiger le projet de convention, ce à quoi cette dernière a répondu qu’il convenait d’attendre qu’elles puissent se contacter par téléphone pour évoquer un aménagement sur la garde (pièce n°14),

– que Me [L] a par ailleurs examiné les quelques éléments manuscrits fournis par le notaire sur la future liquidation du régime matrimonial (pièce n°10),

– que les discussions entre les deux conseils ayant permis l’émergence d’un accord sur les mesures entre époux et à l’égard des enfants, Me [L] a établi le projet de convention d’une longueur de 26 pages, prévoyant notamment le versement d’une prestation compensatoire de 20.000 € à Mme [E] (pièce n°12),

– que par mail du 2 juin 2022, Me [Z] a fait savoir à Me [L] que les parties préfèrent attendre d’avoir vendu leur bien immobilier avant de peaufiner leurs accords et qu’elle reviendra donc vers elle dès signature de la vente lorsque les futurs ex-époux auront un acquéreur,

– que dans ce même courriel, Me [Z] rappelle également à Me [L] qu’elle a souhaité aborder oralement avec elle la question de la défiscalisation de la pension alimentaire de son client,

– que compte tenu de la résidence alternée par ailleurs envisagée par les parties, Me [L] s’est tournée vers Me [Y] [P], confrère spécialisé en la matière, qu’elle a consulté par téléphone en 2023 pour avoir sa position à ce sujet (attestation de Me [P] en date du 20 septembre 2024, pièce n°15),

– que le 4 mai 2023, Mme [E] a repris attache avec Me [L] pour l’informer qu’elle-même et son époux viennent de trouver un acquéreur pour leur appartement et qu’elle aimerait refaire le point avec elle pour envisager la suite de la procédure (pièce n°14),

– que par courriel en réponse du 5 mai 2023, Me [L] lui a proposé de la recevoir le 22 mai 2023, rendez-vous que Mme [E] souhaitera maintenir malgré la rétractation des acquéreurs car elle dit avoir besoin d’éclaircissements (pièce n°14),

– que quelques jours après cet entretien, le 25 mai 2023 Mme [E] a de nouveau contacté Me [L] pour lui demander qu’une réunion soit organisée avec son mari et son avocate, sollicitation à laquelle Me [L] répondra par la négative en raison de l’accord trouvé, tout en lui précisant que cette possibilité pourra être envisagée s’il devait y avoir le moindre changement (pièce n°14).

In fine, la seule tâche mentionnée par Me [L] dans ses écritures, dont l’existence n’est pas corroborée par les éléments produits, est celle relative au calcul du montant de la prestation compensatoire selon les différentes méthodes possibles en vue de pouvoir ensuite conseiller Mme [E] sur ce point. S’il est en effet indéniable que l’avocate a évoqué la question de la prestation compensatoire avec Mme [E] lors de l’entretien du 10 février 2022, puis à l’occasion de l’appel téléphonique du 21 mars 2022, comme le révèle notamment le courriel qu’elle a adressé à sa cliente le 22 mars 2022 à 11 heures 18 (pièce n°14), il n’en reste pas moins qu’elle ne démontre pas avoir consacré une heure de travail à la détermination des montants auxquels pouvait prétendre sa cliente, puisque le message précité indique uniquement qu’il conviendra de compléter avec les ‘chiffres retenus’. Me [L] ne fournit en revanche aucun autre document de nature à établir que la discussion avec Mme [E] sur le montant de la prestation compensatoire s’est opérée sur la base de calculs approfondis préalablement effectués par ses soins.

Il doit à ce stade être observé que Me [L] n’a pas formé d’appel incident à l’encontre de la décision du bâtonnier qui a arbitré ses honoraires à la somme de 1.800 € TTC, soit celle réglée par Mme [E] au titre des honoraires de base, étant relevé qu’en première instance, l’avocate n’avait d’ores et déjà pas sollicité de somme complémentaire pour la rémunération de ses diligences.

En faisant application du taux horaire de 180 € HT ou 216 € TTC stipulé par la clause de dessaisissement, ce montant de 1.800 € TTC correspond à un temps de travail de 8 heures 20 minutes.

Après déduction des 2 heures 30 consacrées aux deux rendez-vous en présentiel avec Mme [E], il subsiste un reliquat de 5 heures 50 minutes pour couvrir l’ensemble des autres prestations réalisées par Me [L], telles que rappelées ci-dessus.

Or, au vu de la teneur et de la somme de ces diligences, il est manifeste que l’avocate y a consacré un temps supérieur à ces 5 heures 50 minutes, étant notamment souligné qu’à l’évidence, l’élaboration du projet de convention de divorce a nécessité à elle-seule une durée minimale de 2 heures et qu’il en est de même pour les échanges avec l’avocat de l’époux de Mme [E], ainsi que l’avait d’ailleurs pertinemment apprécié le bâtonnier.

Il sera enfin rappelé que les griefs formulés par Mme [E] à l’encontre de Me [L] concernant la qualité de son travail, un soutien insuffisant de sa part et un défaut d’implication dans la gestion de son dossier ne peuvent être examinés dans le cadre de la présente procédure et servir de fondement à une éventuelle réduction des honoraires lui étant dus, dans la mesure où le juge de l’honoraire n’a pas le pouvoir de statuer, même à titre incident, sur les fautes professionnelles susceptibles d’avoir été commises par l’avocat dans l’exécution de son mandat ou les éventuels manquements à ses obligations déontologiques.

Il résulte dès lors de l’ensemble des développements qui précèdent que le recours formé par Mme [E] à l’encontre de la décision du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon en date du 4 mars 2024 doit être rejeté.

Mme [E], qui succombe devra supporter les dépens inhérents à ce recours, comme ceux éventuels touchant à une exécution forcée.

Enfin, l’équité commande d’allouer une somme de 500 € à Me [L] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le délégué de la première présidente, statuant publiquement et par ordonnance contradictoire,

Rejette le recours formé par Mme [V] [E],

Condamne Mme [V] [E] aux dépens inhérents à ce recours et aux éventuels frais de recouvrement forcé,

Condamne Mme [V] [E] à verser une somme de 500 € à Me [B] [L] en application de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


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