Honoraires d’avocat : conditions de taxation et effets d’un dessaisissement tardif

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Honoraires d’avocat : conditions de taxation et effets d’un dessaisissement tardif

Recevabilité du recours

Les articles 175 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 stipulent qu’en cas de non-statut du bâtonnier sur une demande de taxation d’honoraires dans un délai de quatre mois, prorogeable une fois, l’une des parties peut saisir le premier président dans le mois suivant l’échéance, sous peine d’irrecevabilité.

En l’espèce, la demande de taxation d’honoraires a été introduite par Maître [P] dans le respect des délais légaux, rendant ainsi la demande recevable.

Honoraires de résultat

La convention d’honoraires signée entre Maître [P] et [Z] [L] [X] prévoit que, en cas de dessaisissement de l’avocat à proximité de l’issue de la procédure, la clause relative aux honoraires de résultat demeure applicable. Cette stipulation est conforme aux principes de la liberté contractuelle, tels que consacrés par l’article 1102 du Code civil, qui permet aux parties de déterminer librement le contenu de leur contrat.

Dans cette affaire, le dessaisissement de l’avocat est survenu moins d’un mois avant l’issue de la procédure, ce qui justifie l’application de la clause d’honoraires de résultat, permettant à Maître [P] de réclamer 12 % du montant obtenu dans le partage de la communauté.

Conditions de validité du consentement

Le consentement des parties à la convention d’honoraires doit être exempt de vices, conformément aux articles 1130 et suivants du Code civil. En l’espèce, [Z] [L] [X] n’a pas démontré l’existence d’un vice du consentement lors de la signature de la convention, ce qui valide la demande de Maître [P] pour le paiement des honoraires.

Frais irrépétibles et indemnisation

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. Toutefois, Maître [P] n’ayant pas justifié d’un préjudice lié à la mauvaise foi ou à la résistance abusive de [Z] [L] [X], sa demande d’indemnisation à ce titre a été rejetée.

De plus, la demande de paiement d’intérêts sur les honoraires impayés n’a pas été retenue, car Maître [P] n’a pas prouvé que [Z] [L] [X] avait accepté cette condition dans la convention d’honoraires.

Conclusion sur les honoraires

Les honoraires de Maître [P] ont été taxés à 22 860 € TTC, correspondant à 12 % du montant perçu par [Z] [L] [X] dans le cadre du partage de la communauté, conformément à la convention d’honoraires. Les autres demandes de Maître [P] ont été déboutées, et les dépens ont été mis à la charge de [Z] [L] [X].

L’Essentiel : Les articles 175 et suivants du décret n° 91-1197 stipulent qu’en cas de non-statut du bâtonnier sur une demande de taxation d’honoraires dans un délai de quatre mois, l’une des parties peut saisir le premier président dans le mois suivant l’échéance. La demande de taxation d’honoraires a été introduite par Maître [P] dans le respect des délais légaux, rendant ainsi la demande recevable. La convention d’honoraires prévoit que, en cas de dessaisissement, la clause relative aux honoraires de résultat demeure applicable.
Résumé de l’affaire : Dans cette affaire, un avocat a introduit une demande de taxation de ses honoraires à l’encontre d’une cliente, suite à la représentation de celle-ci dans une procédure de liquidation de communauté. La cliente, ayant perçu une somme de 158 755,18 € dans le cadre de ce partage, conteste le montant des honoraires réclamés, qui s’élèvent à 22 860,67 €, correspondant à 12 % du montant perçu, conformément à la convention d’honoraires signée entre les parties.

L’avocat soutient que ses prestations ont été déterminantes pour l’obtention du résultat et demande également des sommes supplémentaires pour mauvaise foi et résistance abusive de la part de la cliente. En revanche, la cliente affirme avoir révoqué le mandat de l’avocat avant la conclusion de l’acte de partage, arguant que l’avocat n’a pas effectué de diligences suffisantes dans la vente de l’immeuble indivis.

Le tribunal examine la recevabilité de la demande de l’avocat, notant que la procédure a été correctement engagée dans les délais impartis. Sur le fond, il est établi que la convention d’honoraires stipule que, même en cas de dessaisissement proche de l’issue de la procédure, les honoraires de résultat demeurent applicables. Étant donné que la révocation du mandat a eu lieu moins d’un mois avant la conclusion de la procédure, le tribunal conclut que l’avocat a droit à ses honoraires.

Finalement, le tribunal taxe les honoraires à 22 860 € et rejette les autres demandes de l’avocat, notamment celles relatives à la mauvaise foi et aux intérêts. La cliente est condamnée à payer cette somme, ainsi qu’aux dépens de la procédure.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la recevabilité de la demande de taxation d’honoraires ?

La recevabilité de la demande de taxation d’honoraires est fondée sur les articles 175 et suivants du décret numéro 91-1197 du 27 novembre 1991.

Ces articles stipulent qu’à défaut pour le bâtonnier saisi d’une demande de taxation d’honoraires d’avoir statué dans le délai de quatre mois, éventuellement prorogé d’un nouveau délai de durée identique, une des deux parties au litige peut saisir le premier président à cette fin, dans le mois de l’échéance dudit délai, à peine d’irrecevabilité.

En l’espèce, il a été constaté que le bâtonnier du barreau de Dax a été saisi par la défenderesse d’une demande de taxation d’honoraires le 29 février 2024.

Ainsi, l’avocat ayant introduit la présente instance devant cette juridiction par acte émis le 25 juillet 2024, sa demande a été déclarée recevable.

Quel est le cadre juridique des honoraires d’avocat dans le cadre d’une procédure de liquidation de communauté ?

Le cadre juridique des honoraires d’avocat dans le cadre d’une procédure de liquidation de communauté est régi par la convention d’honoraires signée entre les parties.

Il est précisé que l’honoraire de résultat est fixé à 12 % hors-taxes du montant des sommes obtenues suite au partage.

En l’espèce, l’avocat a émis une facture d’un montant de 22 860,67 €, correspondant à 12 % de la somme de 158 755,18 € attribuée à la défenderesse dans le cadre du partage de la communauté.

Il est également important de noter que, selon la convention d’honoraires, « dans l’hypothèse où le dessaisissement interviendrait à une date proche de l’issue de la procédure, et alors que le travail accompli aura permis l’obtention du résultat recherché, la clause relative aux honoraires de résultat demeurera applicable ».

Ainsi, même en cas de révocation du mandat, si celle-ci intervient peu avant l’issue de la procédure, l’avocat peut toujours prétendre à ses honoraires de résultat.

Quel impact a la révocation du mandat sur le droit à l’honoraire de résultat ?

La révocation du mandat a un impact significatif sur le droit à l’honoraire de résultat, mais cela dépend des circonstances entourant cette révocation.

Dans le cas présent, la défenderesse a révoqué le mandat par mail le 24 octobre 2023, en précisant qu’elle n’avait plus besoin des services de l’avocat.

Cependant, la convention d’honoraires stipule que si le dessaisissement intervient à une date proche de l’issue de la procédure, l’honoraire de résultat demeure applicable.

Étant donné que le dessaisissement a eu lieu moins d’un mois avant l’issue de la procédure, la juridiction a jugé que la clause relative aux honoraires de résultat devait s’appliquer.

Les diligences effectuées par l’avocat ont contribué à l’obtention du résultat, ce qui justifie le maintien de son droit à l’honoraire de résultat.

Quel est le rôle des frais irrépétibles dans cette affaire ?

Les frais irrépétibles, mentionnés dans l’article 700 du code de procédure civile, sont des frais que la partie perdante peut être condamnée à payer à la partie gagnante, en plus des dépens.

Dans cette affaire, l’avocat n’a pas justifié d’un préjudice pour sa demande de paiement de 1500 € pour mauvaise foi et résistance abusive, ce qui a conduit à son rejet.

De plus, l’avocat n’a pas prouvé que la défenderesse avait accepté que les honoraires impayés soient générateurs d’intérêts, ce qui a également conduit à la non-acceptation de sa demande de 500 € à ce titre.

Ainsi, l’équité a conduit la juridiction à laisser à la charge de l’avocat les frais irrépétibles exposés à l’occasion de la présente instance, sans que la défenderesse ne soit condamnée à les payer.

N°25/00796

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Cour d’Appel

de Pau

ORDONNANCE

CHAMBRE SPÉCIALE

Contestation Honoraires Avocat du

13 mars 2025

Dossier N°

N° RG 24/02217 – N° Portalis DBVV-V-B7I-I5PF

Affaire :

[I] [P]

C/

[Z] [L] [X]

Nous, Rémi LE HORS, Premier Président de la cour d’appel de Pau,

Après débats en audience publique le 23 janvier 2025,

Avons prononcé la décision suivante à l’audience du 13 mars 2025 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Avec l’assistance de Madame GABAIX-HIALE, Greffier

ENTRE :

Maître [I] [P]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Demandeur à la contestation

comparante en personne

Assistée de Me François PIAULT, avocat au barreau de PAU, avocat postulant et de Me Katy MIRA de la SELARL MIRA, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN, avocat plaidant

ET :

Madame [Z] [L] [X]

Chez Mme [G]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Défenderesse à la contestation

comparante en personne

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par acte enregistré au greffe de cette juridiction le 29 juillet 2024, Maître [P] demande au premier président de ce siège de taxer à la somme de 22 860,67 € ses honoraires à la charge de [Z] [L] [X] qui lui a confié la défense de ses intérêts pour initier une procédure d’ouverture des opérations de liquidation et de partage de la communauté existante entre elle et [N] [D] alors que le bâtonnier de Dax que la cliente avait saisi à cet effet a constaté son dessaisissement par ordonnance en date du 12 septembre 2024 pour ne pas avoir statué dans le délai de quatre mois.

Elle explique que la somme réclamée correspond à 12 % hors-taxes du montant que [Z] [L] [X] a perçu dans le partage de la communauté s’élevant à 158 755,18 € et ce, conformément à la convention d’honoraires liant les parties.

Dans des écritures développées à l’audience du 23 janvier 2025, Maître [P] réitère ses prétentions antérieures et sollicite en outre la taxation de ses honoraires à une somme complémentaire de 3124,30 € TTC dont la défenderesse s’est déjà acquittée et la condamnation de celle-ci à lui payer une somme de 1500 € au titre de sa mauvaise foi caractérisée et sa résistance abusive, celle de 500 € au regard du règlement de sa facture, outre celle de 1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle relève que les prestations qu’elle a réalisées ont contribué au résultat obtenu alors d’une part que le courrier qu’elle lui a adressé le 24 octobre 2023 ne saurait constituer une révocation de son mandat et d’autre part qu’il est intervenu quelque jours avant la régularisation de l’acte de partage.

[Z] [L] [X] conclut au rejet des prétentions de Maître [P] et précise qu’elle a dessaisi cette dernière le 24 octobre 2024 alors qu’elle n’a exécuté aucune diligence dans la vente de l’immeuble indivis, lui ayant conseillé exclusivement l’identité d’un géomètre et transmis en décembre 2024 un catalogue avec plusieurs maisons.

SUR QUOI

1) Sur la recevabilité du recours

Il ressort des dispositions des articles 175 et suivants du décret numéro 91-1197 du 27 novembre 1991 qu’à défaut pour le bâtonnier saisi d’une demande de taxation d’honoraires, d’avoir statué dans le délai de quatre mois éventuellement prorogé d’un nouveau délai de durée identique, une des deux parties au litige peut saisir le premier président à cette fin, dans le mois de l’échéance dudit délai à peine d’irrecevabilité.

Or, en la cause, il sera relevé que le bâtonnier du barreau de Dax a été saisi par [Z] [L] [X] d’une demande de taxation d’honoraires de Maître [P] le 29 février 2024.

Dès lors, Maître [P] ayant introduit la présente instance devant cette juridiction par acte émis le 25 juillet 2024, sa demande sera déclarée recevable.

2) Sur le fond

Il ressort d’un acte sous-seing privé en date du 8 juillet 2022 que [Z] [L] [X] a confié à Maître [P] la défense de ses intérêts pour assurer sa représentation dans une procédure de liquidation de la communauté issue de son union avec [N] [D], moyennant un honoraire de base, un honoraire complémentaire et un honoraire de résultat fixé à 12 % hors-taxes du montant des sommes obtenues suite à ce partage, Maître [P] ayant émis le 15 décembre 2023 une facture numéro 2023 -1132 d’un montant de 22 860,67 € soit 12 % de la somme de 158 755, 18 €, outre la TVA.

Il est tout aussi constant que par acte en date du 23 novembre 2023, diligenté Maître [C] notaire à [Localité 5], il a été procédé au partage de la communauté susvisée, une somme de 158 755,18 € ayant été attribuée à la défenderesse qui se reconnaît réglée de ses droits.

S’il est exact que par mail adressé à Maître [P] le 24 octobre 2023 [Z] [L] [X] a révoqué le mandat qu’elle lui avait confié précisant «…depuis votre dernière intervention au sujet de mon affaire, je n’ai plus eu besoin ni ai besoin de vos services », terme exempt d’ambiguïté, il sera rappelé que, selon la convention d’honoraires liant les parties. « dans l’hypothèse où le dessaisissement interviendrait à une date proche de l’issue de la procédure, et alors que le travail accompli aura permis l’obtention du résultat recherché, la clause relative aux honoraires de résultat demeurera applicable…».

Or, en la cause, il sera relevé que le dessaisissement de l’avocat est intervenu dans un délai inférieur à un mois de l’issue de la procédure, alors que le mandat date du 8 juillet 2022.

Dès lors, une stricte application de la volonté des parties conduira cette juridiction à faire application de la clause précitée alors que les divers diligences exécutées par l’avocat, à savoir les divers échanges intervenus entre celle-ci et le notaire, avec l’agence immobilière et la cliente, l’analyse de la procédure, ont contribué à l’allocation au bénéfice de la défenderesse de la somme de 158 755,18 €.

Par suite [Z] [L] [X] ne justifiant pas d’un vice qui aurait entaché son consentement lors de la signature de la convention liant les parties, alors que les honoraires de résultat ont pour assiette non le prix de vente de l’immeuble indivis mais la part revenant à la défenderesse dans le partage de la communauté, ceux-ci seront taxés à 22 860 € sans que cette juridiction retienne la demande de taxations d’honoraires à hauteur de 3124 € pour ne pas avoir été présentée en première instance.

Maître [P] ne justifiant pas d’un préjudice au soutien de sa demande en paiement de la somme de 1500 € au regard de la mauvaise foi et de la résistance abusive alléguées, elle sera rejetée.

L’avocat ne justifiant pas non plus que [Z] [L] [X] ait accepté que les honoraires impayés soient générateurs d’intérêts, tel que mentionnés sur la facture émise postérieurement à la convention liant les parties, point qui par ailleurs n’est pas précisé dans cet acte, sa demande en paiement de la somme de 500 € à ce titre ne saurait prospérer.

L’équité commande de laisser à la charge de Maître [P] des frais irrépétibles exposés à l’occasion de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

Nous, Premier président statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort.

Taxons les honoraires de Maître [P] à la charge de [Z] [L] [X] à la somme de 22 860 € TTC (vingt deux mille huit cent soixante euros toutes taxes comprises),

Condamnons [Z] [L] [X] à payer à Maître [P], la somme de 22 860 € TTC (vingt deux mille huit cent soixante euros),

Déboutons Maître [P] de toutes ses autres demandes,

Condamnons [Z] [L] [X] aux entiers dépens.

Le Greffier, Le Premier Président,

Sandrine GABAIX-HIALE Rémi LE HORS


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