Homologation d’un protocole transactionnelL’article 1565 du Code de procédure civile stipule que l’accord auquel sont parvenues les parties à une médiation, une conciliation ou une procédure participative peut être soumis à l’homologation du juge compétent pour rendre cet accord exécutoire. Le juge ne peut modifier les termes de l’accord soumis à son homologation. Application à la transactionL’article 1567 du même code précise que cette disposition est également applicable à la transaction conclue sans recourir à une médiation, une conciliation ou une procédure participative. Le juge est saisi par la partie la plus diligente ou par l’ensemble des parties à la transaction. Conditions de validité de la transactionLa transaction doit avoir pour objet un litige civil et non pénal, et son objet doit être licite. Elle doit également contenir des concessions réciproques entre les parties, ce qui est le cas lorsque les parties conviennent de mettre un terme à un litige en échange de concessions mutuelles. Force exécutoire de l’accordL’homologation d’un protocole transactionnel permet de lui conférer force exécutoire, ce qui signifie que l’accord peut être exécuté de manière forcée en cas de non-respect par l’une des parties. Dans le cas présent, le protocole d’accord signé par Mme [W] et M. [D] a été jugé conforme aux exigences légales, permettant ainsi son homologation par la cour. Conséquences de l’homologationL’homologation entraîne que les dépens de première instance et d’appel restent à la charge de la partie qui a demandé l’homologation, en l’occurrence Mme [W]. Cette règle est conforme aux dispositions générales du Code de procédure civile concernant la répartition des dépens. |
L’Essentiel : L’article 1565 du Code de procédure civile stipule que l’accord des parties à une médiation peut être soumis à l’homologation du juge pour le rendre exécutoire. Le juge ne peut modifier les termes de l’accord. L’article 1567 précise que cette disposition s’applique également à la transaction sans médiation. La transaction doit concerner un litige civil, être licite et contenir des concessions réciproques. L’homologation confère force exécutoire à l’accord, permettant son exécution forcée en cas de non-respect.
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Résumé de l’affaire : Le 16 septembre 2024, une requête a été déposée par une victime auprès du président du tribunal judiciaire de Toulon, visant à obtenir l’homologation d’une transaction conclue avec un ex-compagnon. Dans cette requête, la victime a exposé que l’ex-compagnon avait falsifié et utilisé des chèques tirés sur son compte bancaire entre 2017 et 2021, pour un montant total de 30 000 euros. Un accord avait été établi, reconnaissant que l’ex-compagnon devait à la victime la somme de 30 832,30 euros, remboursable par versements mensuels. Cependant, il avait cessé tout paiement depuis juin 2023, incitant la victime à demander l’homologation du protocole d’accord.
Le 27 septembre 2024, le président du tribunal a rejeté la demande, arguant que l’accord était contraire à l’ordre public. En réponse, la victime a interjeté appel le 8 octobre 2024. L’affaire a été entendue le 28 janvier 2025, où la victime, représentée par son avocat, a demandé à la cour d’infirmer l’ordonnance et d’homologuer le protocole d’accord. Elle a souligné que, étant le père de leur fille commune, elle ne souhaitait pas porter plainte, mais désirait être indemnisée sans nuire à ses obligations parentales. Le Ministère public, partie jointe, a soutenu l’infirmation de l’ordonnance, affirmant que le protocole était licite et que la victime avait droit à son homologation. La cour, statuant en matière gracieuse, a finalement infirmé l’ordonnance du 27 septembre 2024, homologuant le protocole transactionnel signé le 4 avril 2022, et a laissé les dépens à la charge de la victime. Cette décision a été motivée par la nature civile de la transaction, qui ne contrevenait pas à l’ordre public. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de l’homologation d’un protocole transactionnel ?L’homologation d’un protocole transactionnel repose sur l’article 1565 du code de procédure civile, qui stipule que « l’accord auquel sont parvenues les parties à une médiation, une conciliation ou une procédure participative peut être soumis, aux fins de le rendre exécutoire, à l’homologation du juge compétent pour connaître du contentieux dans la matière considérée. » Ce même article précise que « le juge à qui est soumis l’accord ne peut en modifier les termes. » En outre, l’article 1567 du même code élargit cette possibilité d’homologation à la transaction conclue sans médiation, conciliation ou procédure participative, permettant ainsi à la partie la plus diligente ou à l’ensemble des parties de saisir le juge. Ainsi, dans le cas présent, la demande d’homologation formulée par la partie lésée est fondée sur ces dispositions légales, permettant de donner force exécutoire à l’accord conclu. Quel est l’objet de la transaction entre les parties ?L’objet de la transaction entre la victime et le débiteur est clairement défini dans le protocole signé le 4 avril 2022. Ce dernier stipule que le débiteur a falsifié des chèques appartenant à la victime pour un montant total de 30 832,30 euros entre 2017 et 2021. La victime, en acceptant de recevoir en compensation le remboursement des sommes subtilisées, renonce à poursuivre une plainte pénale contre le débiteur, à condition que celui-ci s’engage à lui rembourser la somme totale due. Il est important de noter que cette transaction porte sur une action civile et non pénale, ce qui en fait un objet licite. De plus, la transaction contient des concessions réciproques, ce qui est un élément essentiel pour sa validité. Quel est le rôle du juge dans l’homologation d’une transaction ?Le rôle du juge dans l’homologation d’une transaction est strictement encadré par la loi. Selon l’article 1565 du code de procédure civile, le juge compétent ne peut pas modifier les termes de l’accord soumis à son homologation. Cela signifie que le juge doit se prononcer sur la conformité de l’accord avec l’ordre public et les bonnes mœurs, mais il ne peut pas intervenir dans le contenu même de la transaction. Dans le cas présent, la cour a statué sur la demande d’homologation de la victime, en vérifiant que l’accord ne contrevient pas à l’ordre public, ce qui a conduit à l’infirmation de l’ordonnance précédente qui avait rejeté la demande. Quel est l’impact de l’homologation sur les dépens ?L’impact de l’homologation sur les dépens est précisé dans la décision rendue par la cour. En effet, il est stipulé que « l’arrêt étant rendu à la demande de la victime, celle-ci conservera la charge des dépens. » Cela signifie que, même si la cour a homologué la transaction, la partie qui a initié la procédure d’homologation est responsable des frais de justice engagés. Cette règle est conforme aux dispositions générales sur les dépens, qui prévoient que la partie qui succombe dans ses prétentions est généralement condamnée aux dépens, sauf disposition contraire. Dans ce cas, la cour a décidé de laisser les dépens à la charge de la victime, ce qui est une pratique courante dans les affaires où la demande d’homologation est acceptée. |
Chambre 1-1
ARRÊT EN MATIÈRE GRACIEUSE
DU 25 MARS 2025
N° 2025/145
Rôle N° RG 24/12189 – N° Portalis DBVB-V-B7I-BNZG7
[O], [Z], [I] [W]
C/
LE PROCUREUR GÉNÉRAL
Notification par LRAR le :
à :
Madame [O] [W]
Notification par LS le :
à :
Me Nathalie COMTET
Notification par mail au Ministère Public
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Nathalie COMTET
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance sur requête du Président du TJ de TOULON en date du 27 Septembre 2024.
APPELANTS
Madame [O], [Z], [I] [W]
Née le 30 Janvier 1974 à [Localité 2] (83)
Demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Nathalie COMTET, avocat au barreau de TOULON
Partie jointe
MINISTERE PUBLIC
Près la cour d’Appel d’Aix-en-Provence, Palais Monclar, Rue Peyresc – 13100 AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
L’affaire a été débattue le 28 Janvier 2025 en audience en chambre du conseil devant la Cour composée de :
Madame Elisabeth TOULOUSE, Présidente de chambre
Madame Catherine OUVREL, Conseillère
Madame Fabienne ALLARD, Conseillère, rapporteur
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Anastasia LAPIERRE.
PRONONCE
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Mars 2025,
Signé par Madame Elisabeth TOULOUSE, Présidente de chambre et Mme Anastasia LAPIERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
Exposé des faits et de la procédure
Le 16 septembre 2024, Mme [O] [W] a déposé une requête auprès du président du tribunal judiciaire de Toulon afin d’obtenir l’homologation d’une transaction conclue avec M. [N] [D], son ex-compagnon.
Dans cette requête, elle expose que ce dernier a falsifié et fait usage de chèques tirés sur son compte bancaire entre 2017 et 2021 pour une somme totale de 30 000 euros, qu’ils ont conclu un accord aux termes duquel il se reconnaît débiteur à son égard de la somme de 30 832,30 euros et s’engage à la lui rembourser par des versements mensuels de 100 euros jusqu’à ce que leur fille commune puisse subvenir à ses besoins, puis par mensualités de 300 euros, mais qu’il a cessé tout versement depuis juin 2023, de sorte qu’elle souhaite que protocole d’accord soit homologué et revêtu de la force exécutoire.
Par ordonnance du 27 septembre 2024, la présidente du tribunal judiciaire de Toulon a rejeté sa demande au motif que l’accord des parties est contraire à l’ordre public.
Par acte reçu au greffe de la cour le 8 octobre 2024, Mme [W] a relevé appel à l’encontre de cette ordonnance.
La procédure a été régulièrement communiquée au Ministère public.
L’appelante a été entendue à l’audience du 28 janvier 2025 où elle était représentée par son avocat.
Dans son acte d’appel, dont elle a repris les termes lors de l’audience, Mme [W] demande à la cour d’infirmer l’ordonnance et, statuant à nouveau, de faire droit à sa requête en apposant la formule exécutoire sur le protocole d’accord conclu entre elle et M. [D] le 4 avril 2022.
Elle fait valoir que M. [D] étant le père de sa fille, elle n’a pas souhaité déposer plainte et que si elle souhaite être indemnisée de son préjudice, elle n’entend pas l’accabler dès lors qu’il doit également contribuer à l’entretien de leur enfant commun. Selon elle, le protocole ne contrevient pas à l’ordre public dès lorsqu’il n’avait pas pour objectif de couvrir une infraction pénale mais de régler les conséquences dommageables des fautes commises par son ex-compagnon à son préjudice. Elle s’estime dès lors fondée, en application des articles 1565 et suivants du code de procédure civile à en obtenir l’homologation.
Le Ministère public, partie jointe, conclut à l’infirmation de l’ordonnance et à l’homologation de la transaction conclue par Mme [W] et M. [D] afin de mettre un terme au litige qui les oppose. Il fait valoir que ce protocole est licite et que M. [D] ayant cessé de l’exécuter, Mme [W] est fondée à en obtenir l’homologation.
En application de l’article 1565 du code de procédure civile, l’accord auquel sont parvenues les parties à une médiation, une conciliation ou une procédure participative peut être soumis, aux fins de le rendre exécutoire, à l’homologation du juge compétent pour connaître du contentieux dans la matière considérée.
Le juge à qui est soumis l’accord ne peut en modifier les termes.
Selon l’article 1567 du même code, cette disposition est applicable à la transaction conclue sans qu’il ait été recouru à une médiation, une conciliation ou une procédure participative. Le juge est alors saisi par la partie la plus diligente ou l’ensemble des parties à la transaction.
En l’espèce, Mme [W] soumet à l’homologation de la cour un protocole d’accord conclu le 4 avril 2022 avec M. [N] [D].
Ce protocole, qui supporte en dernière page les signatures de Mme [W] et M. [D] expose que :
– M. [D] a falsifié des chèques appartenant à Mme [W] pour un montant de 30 832,30 euros entre 2017 et 2021 ;
– Mme [W] accepte de recevoir en compensation le remboursement des sommes subtilisées, n’ayant aucun intérêt à la poursuite d’une plainte au pénal contre le père de sa fille si celui-ci s’engage à lui rembourser la somme totale qu’il lui doit, soit 30 832,30 euros.
Suivent les modalités de règlement de la dette.
Il en résulte que M. [D] et Mme [W] ont convenu de mettre un terme au litige qui les oppose quant aux conséquences dommageables des actes de falsification et usage de chèques falsifiés commis par M. [D] au préjudice de Mme [W].
S’agissant d’une transaction portant sur une action civile et non pénale, son objet est licite.
Elle contient des concessions réciproques.
En conséquence, Mme [W] est fondée à en obtenir l’homologation.
L’arrêt étant rendu à la demande de Mme [W], celle-ci conservera la charge des dépens.
La cour, statuant en matière gracieuse et en dernier ressort,
Infirme en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 27 septembre 2024 par le président du tribunal judiciaire de Toulon ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Homologue le protocole transactionnel signé par les parties le 4 avril 2022, dont copie demeurera annexé au présent arrêt et lui donne force exécutoire ;
Laisse les dépens de première instance et d’appel à la charge de Mme [O] [W].
Le greffier Le président
Chambre 1-1
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