Statut d’associé et gestion des biens communsLe statut d’associé dans une société est déterminé par les dispositions des articles 1832 et suivants du Code civil, qui régissent la société et les droits des associés. En l’espèce, il est établi que Madame [N] n’a pas le statut d’associée de la société [4], ce qui limite ses droits en matière de gestion et d’administration des biens communs. Gestion des biens indivisL’article 815-6 du Code civil stipule que chaque indivisaire peut demander la désignation d’un mandataire ad hoc pour gérer les biens indivis lorsque la gestion est mise en péril. Toutefois, la demande de Madame [N] pour la désignation d’un mandataire ad hoc a été rejetée, car il n’a pas été prouvé que la gestion par Monsieur [J] était contraire à l’intérêt des deux époux. Dividendes et droits de propriétéLes dividendes perçus par Monsieur [J] et les enfants ne constituent pas une atteinte à la bonne gestion du patrimoine commun, mais relèvent de l’exercice des droits de propriété de chacun, conformément aux principes énoncés dans l’article 544 du Code civil, qui définit la propriété comme le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue. Contrôle et surveillance des opérationsLa gestion des sociétés et des biens communs est soumise à des règles de contrôle, notamment par le biais d’un commissaire aux comptes, comme le prévoit l’article L. 823-1 du Code de commerce. Le rapport du commissaire aux comptes certifiant la régularité des comptes annuels de la société [4] renforce la légitimité de la gestion actuelle. Frais irrépétibles et dépensL’article 696 du Code de procédure civile prévoit que chaque partie supporte ses propres dépens, sauf disposition contraire. Dans cette affaire, il a été jugé équitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés, conformément à la nature de l’affaire et à l’absence de preuve d’une mauvaise gestion. |
L’Essentiel : Le statut d’associé dans une société est régi par les articles 1832 et suivants du Code civil. Madame [N] n’a pas le statut d’associée de la société [4], limitant ses droits en matière de gestion des biens communs. La demande de désignation d’un mandataire ad hoc a été rejetée, car la gestion par Monsieur [J] n’était pas contraire à l’intérêt des époux. Les dividendes perçus ne portent pas atteinte à la gestion du patrimoine commun, mais relèvent des droits de propriété de chacun.
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Résumé de l’affaire : Le président du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a rendu un jugement le 14 novembre 2023, rejetant l’exception d’incompétence et déboutant l’épouse de l’ensemble de ses demandes. Cette dernière a interjeté appel le 23 novembre 2023, soutenant que son mariage avec son époux avait été célébré le 14 avril 1969 et qu’elle avait engagé une procédure de divorce le 18 juin 2021. Une ordonnance sur mesures provisoires a été rendue le 20 septembre 2021, et un arrêt du 5 avril 2022 a attribué à l’épouse la jouissance de l’usufruit du domicile conjugal à titre onéreux.
L’épouse a demandé la désignation d’un administrateur pour gérer les sociétés de la communauté et a sollicité une provision sur sa part des fruits civils de l’indivision post-communautaire. Elle a accusé son époux d’abuser de la gestion des biens indivis, notamment en conservant les dividendes de la société concernée, et a signalé un risque de dilapidation des avoirs communs. Elle a également demandé la désignation d’un mandataire ad hoc pour gérer les parts sociales et obtenir des documents relatifs aux dividendes. En réponse, l’époux a contesté les demandes de son épouse, arguant qu’elle n’avait pas participé à la création du centre commercial et qu’aucune carence dans la gestion des affaires du couple n’était démontrée. Il a également fait valoir que la cession des actifs immobiliers rendait la demande de mandataire ad hoc sans objet. Le tribunal a constaté que l’épouse n’avait pas le statut d’associée de la société et qu’elle avait consenti à ce que son époux gère les sociétés. Les documents présentés ont montré que l’époux avait pris en compte les revendications de son épouse. Le rapport du commissaire aux comptes a confirmé la régularité des comptes de la société. En conséquence, le tribunal a confirmé le jugement initial, déboutant les parties de leurs demandes et condamnant chacune à supporter ses propres dépens. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la demande de désignation d’un mandataire ad hoc par l’épouse ?La demande de désignation d’un mandataire ad hoc par l’épouse repose sur l’article 815-6 du Code civil, qui stipule que « tout indivisaire peut demander la désignation d’un mandataire ad hoc pour gérer les biens indivis lorsque l’indivision est susceptible de causer un préjudice à l’un des indivisaires ». Dans cette affaire, l’épouse soutient qu’il existe un risque de dilapidation du patrimoine commun, ce qui pourrait justifier la désignation d’un mandataire ad hoc. Cependant, le tribunal a constaté que l’épouse avait donné son accord pour que son époux gère les sociétés de la communauté, ce qui affaiblit son argumentation. De plus, le tribunal a relevé que des organes de surveillance étaient en place et que des expertises comptables étaient en cours, ce qui indique que la gestion du patrimoine commun était surveillée et conforme à l’intérêt des deux époux. Quel est l’impact de l’absence de statut d’associée sur les droits de l’épouse concernant la société ?L’absence de statut d’associée de l’épouse dans la société [4] a des conséquences significatives sur ses droits. En effet, selon l’article 1832 du Code civil, « la société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent de mettre en commun des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter ». Étant donné qu’elle n’est pas associée, l’épouse ne peut pas revendiquer des droits sur les dividendes ou sur la gestion de la société. Le tribunal a noté que le fait que son époux et leurs enfants perçoivent des dividendes ne constitue pas une atteinte à la bonne gestion du patrimoine communautaire, mais plutôt l’exercice des droits de propriété de chacun. Ainsi, l’absence de statut d’associée limite considérablement les recours de l’épouse pour contester la gestion des biens de la société. Quel est le rôle des expertises comptables dans la décision du tribunal ?Les expertises comptables jouent un rôle crucial dans la décision du tribunal, car elles permettent d’évaluer la régularité et la sincérité des comptes des sociétés. Selon l’article 223-1 du Code de commerce, « les comptes annuels doivent donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise ». Dans cette affaire, le rapport du commissaire aux comptes de la société [4] a certifié que les comptes annuels étaient conformes aux règles comptables françaises. Cela a contribué à rassurer le tribunal sur la gestion des biens communs et a justifié le rejet des demandes de l’épouse. Le tribunal a également souligné que des expertises étaient en cours, ce qui signifie que la situation financière des sociétés était en train d’être examinée de manière approfondie, rendant ainsi inopérantes les demandes de provision et de désignation d’un mandataire ad hoc. Quel est le principe de la répartition des frais irrépétibles selon l’article 700 du CPC ?L’article 700 du Code de procédure civile (CPC) prévoit que « le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles exposés par elle ». Dans cette affaire, le tribunal a décidé que chacune des parties supporterait ses propres frais, considérant qu’il n’était pas inéquitable de laisser à la charge de chacune la somme exposée au titre des frais irrépétibles. Cela signifie que, malgré les demandes de l’épouse, le tribunal a jugé que les circonstances de l’affaire ne justifiaient pas une condamnation de l’époux à payer les frais de l’épouse. Cette décision reflète le principe selon lequel les frais irrépétibles ne sont pas systématiquement attribués à la partie gagnante, mais dépendent des circonstances de chaque affaire. |
DE RIOM
Deuxième Chambre Civile
ARRET N° 89
DU : 18 mars 2025
AFFAIRE N° : N° RG 23/01778 – N° Portalis DBVU-V-B7H-GC3X
AG/RG/VP
ARRÊT RENDU LE DIX HUIT MARS DEUX MILLE VINGT CINQ
ENTRE :
Madame [L] [N] épouse [J]
née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 6]
demeurant [Adresse 5]
[Adresse 5]
Représentée par Me François xavier DOS SANTOS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANTE
ET :
Monsieur [P], [D], [F] [J]
né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 7]
demeurant [Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Alexandra PETIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Représenté par Me François MAINETTI, avocat au barreau de PARIS
INTIME
Décision déférée à la Cour :
jugement au fond, origine président du tj de CLERMONT ferrand, décision attaquée en date du 14 novembre 2023, enregistrée sous le n° 23/00700
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Monsieur Alexandre GROZINGER, Président
Madame Florence BREYSSE, Conseiller
Madame Aurélie GAYTON, Conseiller
GREFFIER :
Madame Rémédios GLUCK, Greffier lors de l’appel de la cause et du prononcé
DÉBATS : A l’audience publique du 04 février 2025
Sur le rapport de Alexandre GROZINGER conformément à l’article 804 du code de procédure civile
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 18 mars 2025, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Monsieur GROZINGER, président, et par Madame GLUCK, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par un jugement en date du 14 novembre 2023 le président du tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND a :
Rejeté l’exception d’incompétence,
Débouté Madame [N] de l’ensemble de ses demandes,
Cette dernière a interjeté appel le 23 novembre 2023.
Elle expose, suivant des conclusions en date du 7 janvier 2025, que son mariage avec Monsieur [J] est en date du 14 avril 1969.
Elle indique avoir assigné celui-ci en divorce le 18 juin 2021.
Une ordonnance sur mesures provisoires a été rendue le 20 septembre 2021 et un arrêt en date du 5 avril 2022 a attribué à l’épouse la jouissance de l’usufruit du domicile conjugal à titre onéreux.
Madame [N] sollicite la désignation d’un administrateur afin de gérer les sociétés de la communauté et demande une provision à valoir sur sa part de fruits civils au titre de l’indivision post communautaire.
Elle soutient que son époux abuse de la gestion des biens indivis et de l’administration des sociétés du couple afin de conserver à son profit les distributions de dividendes et principalement ceux de la société [4].
Il aurait au surplus mis en vente les actifs immobiliers pour en retirer 35 000 000 d’euros.
Madame [N] soutient que les dividendes de la SAS [4] constituent des actifs de l’indivision post communautaire et ainsi des fruits civils qui auraient du être partagés par moitié tous les ans.
Elle indique qu’il existerait un risque majeur de dilapidation des avoirs de communauté et des fruits civils des biens constitués par les époux ensemble durant cinquante ans.
Madame [N] sollicite sur le fondement de l’article 815-6 du code civil la désignation d’un mandataire ad hoc à la gestion de l’ensemble des parts sociales détenues par la communauté.
Elle demande, par ailleurs, la désignation d’un mandataire ad hoc afin d’obtenir un certain nombre de documents et de déterminer le montant des dividendes attachés aux parts sociales de toutes les sociétés détenues par la communauté.
Elle réclame une somme de 800 000 euros à titre de répartition provisionnelle des bénéfices indivis ainsi que la publication de l’arrêt à intervenir au registre du commerce et des sociétés dans un journal d’annonces légales outre une somme de 12 000 euros par application de l’article 700 du CPC.
Monsieur [J] fait valoir en réponse, suivant des conclusions en date du 20 janvier 2025, que Madame [N] n’a pas participé à la création et au développement du centre commercial et a interrompu toute activité professionnelle en 2004.
Aucune carence dans la gestion des affaires du couple ne serait démontrée.
La demande de désignation d’un mandataire ad hoc serait devenue sans objet du fait de la cession des actifs immobiliers de la société [4].
Les opérations d’expertise seraient en cours et aucune demande de répartition provisionnelle des bénéfices ne pourrait prospérer.
Monsieur [J] conclut au rejet des demandes de Madame [N] et à la confirmation du jugement entrepris.
Il sollicite un montant de 12 000 euros par application de l’article 700 du CPC.
La procédure a été clôturée le 29 janvier 2025 et l’arrêt a été mis en délibéré au 18 mars 2025.
Attendu qu’il est constant que Madame [N] n’a pas le statut d’associée de la société [4] et a cessé son activité professionnelle depuis 2004 ;
Attendu, par ailleurs, qu’elle ne conteste pas avoir donné son accord à ce que son époux assume la gestion et l’administration des sociétés dépendant de la communauté dans le cadre des mesures provisoires ;
Attendu qu’elle soutient qu’il existe un risque important de dilapidation du patrimoine commun à son détriment en raison des man’uvres réalisées par son époux ;
Attendu qu’il ressort des documents produits aux débats, et notamment d’un courrier de Me [H] en date du 22 septembre 2023, que Monsieur [J] a tenu compte des revendications de son épouse et qu’il avait été mandaté afin de convoquer les assemblées générales des différentes sociétés dépendant de la communauté des époux afin qu’il soit statué sur les comptes ainsi que sur les répartitions de capital nécessaires au regard des modifications des statuts dues aux revendications respectives des époux quant à la qualité d’associé ;
Attendu que le fait que Monsieur [J] et les enfants du couple perçoivent des dividendes liés à l’activité de la société [4] ne constitue pas une atteinte à la bonne gestion du patrimoine communautaire ; qu’il s’agit d’une mise en pratique des droits de propriété de chacun ;
Attendu que le rapport du commissaire aux comptes de la société [4] concernant l’exercice clos le 31 décembre 2022 certifie que les comptes annuels sont au regard des règles et principes comptables français réguliers et sincères ;
Attendu que Madame [N] n’établit pas en quoi la gestion et l’administration du patrimoine commun ne seraient pas conformes à l’intérêt des deux époux ; que des organes de surveillance existent et remplissent leur rôle, à défaut de preuve contraire, et qu’un notaire a été désigné afin d’effectuer l’inventaire du patrimoine ; qu’il n’est pas contesté que des expertises comptables et foncières sont en cours ; que Madame [N] est informée des opérations réalisées par son époux ainsi que des sommes perçues par ce dernier; qu’il en sera tenu compte lors des opérations liquidatives et notamment au titre du partage à venir et de la détermination des parts de chacun outre la fixation d’une éventuelle prestation compensatoire;
Attendu qu’il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de désignation d’un mandataire ad hoc au regard des désignations déjà effectuées dans le présent dossier et de l’état d’information des parties ; que de la même façon il ne sera pas fait droit à la demande de versement d’une provision en raison des opérations d’expertise étant toujours en cours concernant les résultats comptables des sociétés ;
Attendu que le jugement déféré sera confirmé quant au rejet des prétentions de Madame [N] ;
Attendu qu’il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties la somme exposée au titre des frais irrépétibles ;
Attendu qu’eu égard à la nature de l’affaire, chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens ;
Statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare l’appel recevable en la forme,
Au fond,
Confirme le jugement de la présidente du tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND en date du 14 novembre 2023,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne chacune des parties à payer ses propres dépens.
Le greffier Le Président
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