L’Essentiel : Le 22 octobre 2020, Mme [B] [I], auxiliaire de vie, a déclaré une maladie professionnelle liée à une tendinopathie des deux épaules. La CPAM a reconnu ces pathologies, attribuant un taux d’incapacité permanente partielle de 3 % pour l’épaule gauche. Contestant cette décision, Mme [I] a vu son taux porté à 4 % par le tribunal judiciaire de Lille, qui a maintenu le taux d’incidence professionnelle à 3 %. En appel, la CPAM a contesté cette majoration, et lors de l’audience du 14 novembre 2024, l’absence de Mme [I] a été notée, entraînant le rejet de sa demande d’indemnisation.
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Contexte de la maladie professionnelleLe 22 octobre 2020, Mme [B] [I], auxiliaire de vie, a déclaré une maladie professionnelle suite à un certificat médical du 14 octobre 2020, mentionnant une « tendinopathie des deux épaules ». Les pathologies des épaules ont été reconnues par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) après une instruction distincte, avec des décisions prises le 18 février 2021. Évaluation de l’incapacité permanenteConcernant l’épaule gauche, l’état de santé de Mme [B] [I] a été déclaré consolidé le 4 avril 2022. La CPAM a alors attribué un taux d’incapacité permanente partielle de 3 % pour des séquelles douloureuses. Mme [I] a contesté cette décision, qui a été rejetée par la commission médicale de recours amiable de la CPAM le 25 octobre 2022, entraînant un recours devant le tribunal. Décision du tribunal judiciaireLe 9 mars 2023, le tribunal judiciaire de Lille a jugé que la demande de Mme [B] [I] était recevable et a fixé son taux d’incapacité permanente à 4 % pour la tendinopathie de l’épaule gauche, tout en maintenant un taux d’incidence professionnelle de 3 %. La CPAM a été condamnée aux dépens. Appel de la CPAMLe 7 avril 2023, la CPAM a fait appel de la décision, contestée uniquement sur le taux d’incidence professionnelle. Elle a soutenu que la majoration du taux était disproportionnée par rapport aux séquelles médicales et a demandé à la cour de rejeter les demandes de Mme [I]. Audience et absence de Mme [I]Lors de l’audience du 14 novembre 2024, Mme [B] [I] ne s’est pas présentée, bien qu’elle ait été régulièrement convoquée. Son conseil a déposé un dossier en cours de délibéré, mais cela a été jugé irrecevable. Analyse de l’incidence professionnelleLe tribunal a examiné les critères de l’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, qui stipule que le taux d’incapacité peut être majoré en cas de préjudice professionnel. Bien que Mme [I] ait été déclarée inapte à son poste, le médecin a recommandé un reclassement dans un emploi administratif. Le rapport médical a suggéré un taux socioprofessionnel de 3 % pour l’une des tendinopathies. Conclusion du jugementLa cour a infirmé le jugement du tribunal de Lille concernant le taux d’incidence professionnelle, considérant que la majoration n’était pas justifiée pour l’épaule gauche. Mme [B] [I] a été déboutée de sa demande d’indemnisation et condamnée aux dépens d’appel. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la définition de l’incapacité permanente partielle selon le Code de la sécurité sociale ?L’incapacité permanente partielle (IPP) est définie par l’article L. 434-2 du Code de la sécurité sociale. Cet article stipule que : « Le taux d’incapacité permanente partielle est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité. » Il en résulte que le taux médical peut être majoré lorsque les séquelles d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail entraînent une modification préjudiciable de la situation professionnelle de la victime, notamment en ce qui concerne ses aptitudes et sa qualification professionnelle. Ainsi, la notion d’incapacité permanente partielle ne se limite pas à une simple évaluation médicale, mais prend également en compte l’impact sur la capacité de la victime à exercer son métier ou à se reclasser professionnellement. Quelles sont les conditions pour majorer le taux d’incapacité permanente partielle ?Pour qu’une majoration du taux d’incapacité permanente partielle soit justifiée, il faut que les séquelles de la maladie professionnelle ou de l’accident du travail entraînent une modification préjudiciable de la situation professionnelle de la victime. L’article L. 434-2 du Code de la sécurité sociale précise que : « Les notions de qualification professionnelle et d’aptitude se rapportent aux possibilités d’exercice d’une profession déterminée et aux facultés que peut avoir une victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé. » Il est important de noter que cette majoration ne vise pas à compenser la perte de salaire, mais à reconnaître l’impact des séquelles sur la capacité de la victime à travailler dans son domaine de compétence. Dans le cas de Mme [B] [I], la cour a considéré que, bien que l’incapacité permanente partielle ait été établie, l’incidence professionnelle n’était pas suffisamment justifiée pour justifier une majoration du taux d’incapacité pour l’épaule gauche. Quels sont les critères pris en compte pour évaluer l’incidence professionnelle ?L’évaluation de l’incidence professionnelle repose sur plusieurs critères, notamment l’âge de la victime, son état de santé général, ses aptitudes physiques et mentales, ainsi que sa qualification professionnelle. L’article L. 434-2 du Code de la sécurité sociale indique que : « Le taux d’incapacité permanente partielle est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle. » Dans le cas de Mme [B] [I], plusieurs éléments ont été pris en compte : – Son âge (55 ans au moment de la consolidation), Ces éléments ont conduit la cour à conclure que l’incidence professionnelle était établie, mais qu’elle était suffisamment indemnisée par le taux de 3 % attribué pour l’épaule dominante. Quelles sont les conséquences de l’absence de la partie à l’audience ?L’absence de la partie à l’audience a des conséquences sur la recevabilité de ses demandes et sur le déroulement de la procédure. Selon l’article 696 du Code de procédure civile : « La partie qui succombe sera condamnée aux dépens. » Dans le cas présent, Mme [B] [I] n’a pas comparu à l’audience, ce qui a conduit la cour à considérer que son absence était irrecevable. Bien que son conseil ait déposé un dossier en cours de délibéré, cela n’a pas pu pallier son absence, car la procédure était orale. Par conséquent, la cour a statué sur la base des éléments présentés par la CPAM et a débouté Mme [B] [I] de sa demande d’indemnisation de l’incidence professionnelle. |
N°
CPAM DE [Localité 3] [Localité 5]
C/
[I]
CCC adressées à :
-CPAM de [Localité 3]-[Localité 5]
-Mme [I]
-Me LECOMPTE
Copies exécutoires adressées à :
-CPAM de [Localité 3]-[Localité 5]
-Me LECOMPTE
Le 13 janvier 2025
COUR D’APPEL D’AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 13 JANVIER 2025
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N° rg 23/01935 – n° portalis dbv4-v-b7h-ix6g – n° registre 1ère instance : 22/2024
Jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille en date du 09 mars 2023
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
CPAM DE [Localité 3] [Localité 5], agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée et plaidant par Mme [M] [O], dûment mandatée
ET :
INTIMEE
Madame [B] [I]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Non comparante
Représentée par Me Olivier LECOMPTE de la SCP LECOMPTE LEDIEU, avocat au barreau de CAMBRAI
DEBATS :
A l’audience publique du 14 Novembre 2024 devant Mme Véronique CORNILLE, président, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l’article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 13 Janvier 2025.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Nathalie LÉPEINGLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la cour composée en outre de:
Mme Jocelyne RUBANTEL, président de chambre,
M. Pascal HAMON, président,
et Mme Véronique CORNILLE, conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 13 Janvier 2025, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, président a signé la minute avec Charlotte RODRIGUES, Greffier.
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DECISION
Le 22 octobre 2020, Mme [B] [I], exerçant la profession d’auxiliaire de vie, a établi une déclaration de maladie professionnelle sur la base d’un certificat médical initial du 14 octobre 2020 constatant une «’tendinopathie des deux épaules’».
Les pathologies affectant l’épaule droite et l’épaule gauche, après une instruction distincte, ont été prises en charge au titre de la législation sur les risques professionnels par deux décisions du 18 février 2021 de la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 3]-[Localité 5] (ci-après la CPAM).
S’agissant de l’épaule gauche, objet du présent litige, l’état de santé de Mme [B] [I] a été déclaré consolidé le 4 avril 2022 et par décision du 5 mai 2022, la CPAM a attribué à Mme [I] un taux d’incapacité permanente partielle de 3 % pour des «’séquelles à type de gêne fonctionnelle douloureuse de l’épaule gauche chez une droitière’».
Mme [I] a contesté cette décision devant la commission médicale de recours amiable de la CPAM, qui a rejeté sa demande lors de sa séance du 25 octobre 2022, puis elle a saisi le tribunal d’un recours contre la décision de rejet de la commission.
Par jugement du 9 mars 2023, le pôle social du tribunal judiciaire de Lille a’:
– déclaré recevable la demande de Mme [B] [I],
– fixé le taux d’incapacité permanente de Mme [B] [I] à 4 % à compter du 4 avril 2022 pour «’tendinopathie de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche’»,
– fixé le taux d’incidence professionnelle de Mme [B] [I] à 3 % pour l’épaule gauche à compter du 4 avril 2022,
– précisé que les frais de consultation sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie,
– condamné la CPAM de [Localité 3]-[Localité 5] aux dépens.
Par courrier recommandé’expédié le 7 avril 2023, la CPAM de [Localité 3]-[Localité 5] a fait appel de la décision qui lui avait été notifiée le 3 avril 2023 uniquement en ce qu’elle a fixé le taux d’incidence professionnelle de Mme [B] [I] à 3 %.
Par ordonnance du 12 juin 2023, le magistrat chargé de l’instruction de l’affaire a ordonné une mesure de consultation sur pièces et a commis à cet effet le docteur [L].
Ce dernier a déposé son rapport, daté du 7 septembre 2023, le 29 février 2024.
Les parties ont été convoquées à l’audience du 14 novembre 2024.
Par conclusions visées par le greffe le 14 novembre 2024 et soutenues oralement à l’audience, la CPAM de [Localité 3]-[Localité 5] demande à la cour de’:
– infirmer la décision déférée en ce qu’il a fixé le taux d’incidence professionnelle à 3% pour l’épaule gauche,
– juger qu’il n’y a pas lieu de majorer le taux d’IPP indemnisant les séquelles de la maladie professionnelle de Mme [B] [I] concernant l’épaule gauche au titre d’une incidence professionnelle,
– débouter Mme [I] de l’ensemble de ses demandes,
– condamner Mme [I] aux dépens.
Elle fait valoir que la majoration du taux socioprofessionnel par le tribunal, à hauteur de 3 % pour chaque épaule, apparaît disproportionnée au regard des critères prévus à l’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale et des séquelles médicales de Mme [I], à savoir une tendinopathie dite douloureuse sans gêne fonctionnelle à droite comme à gauche traitée uniquement par des séances de rééducation sans thérapeutique médicamenteuse’; que le médecin conseil de la caisse a en effet observé à droite comme à gauche des amplitudes des épaules complètes et symétriques sur les 6 axes prévus au barème (en actif comme en passif), la persistance d’une douleur à l’antépulsion et l’abduction à partir de 120°, la réalisation possible des mouvements complexes’; que le médecin du travail a déclaré Mme [I] inapte au poste d’assistante de vie tout en précisant qu’elle pouvait effectuer un travail de type administratif ou bénéficier d’une formation la préparant à un poste adapté’; que son avis ne permet pas de rattacher l’inaptitude professionnelle à la tendinopathie de l’épaule gauche et a fortiori aux tendinopathies bilatérales’; que Mme [I] ne rapporte pas la preuve d’un préjudice économique en lien avec la tendinopathie de l’épaule gauche à la date de consolidation du 4 avril 2022′; que l’ajout d’un taux de 3% pour chacune des épaules est surévalué’; qu’il n’y a pas lieu de majorer le taux pour l’épaule non dominante.
À l’audience du 14 novembre 2024, Mme [B] [I], bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec avis de réception retourné signé, n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter.
En cours de délibéré, le lendemain de l’audience, le conseil de Mme [B] [I] a fait déposer son dossier au greffe. Toutefois, ce dépôt en cours de délibéré est irrecevable et ne saurait pallier l’absence de l’intimée à l’audience, la procédure étant orale.
MOTIFS
Le taux d’incapacité permanente partielle de 4% sur le plan médical n’est pas contesté.
Sur l’incidence professionnelle
Aux termes de l’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, le taux d’incapacité permanente partielle est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.
Il en résulte que le taux médical peut être majoré lorsque les séquelles d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail entraînent une modification préjudiciable de la situation professionnelle de la victime au regard notamment de ses aptitudes et de sa qualification professionnelle.
Les notions de qualification professionnelle et d’aptitude mentionnées à l’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale se rapportent aux possibilités d’exercice d’une profession déterminée et aux facultés que peut avoir une victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.
Il ne s’agit pas de compenser la perte de salaire liée aux séquelles.
En l’espèce, Mme [I], âgée de 55 ans au moment de la consolidation de la maladie (4 avril 2022), a fait l’objet d’un avis d’inaptitude au poste d’assistante de vie établi par le médecin du travail le 3 février 2022 à l’issue de la visite médicale de reprise, lequel préconise l’exercice d’un emploi de type administratif (ou du télétravail) ou le bénéfice d’une formation la préparant à occuper un poste adapté. Puis elle a été licenciée pour inaptitude avec impossibilité de reclassement par courrier recommandé du 3 mars 2022.
Il ressort du jugement que Mme [I] a précisé qu’elle essayait de retrouver un emploi comme aide administrative mais en vain compte tenu de son âge à quelques années de la retraite.
Aux termes de son rapport, le docteur [L], médecin commis par la cour, préconise l’attribution d’un taux socioprofessionnel de 3 % à au moins l’une des deux tendinopathies, la logique voulant qu’il le soit plutôt au membre dominant, en ce que la tendinopathie bilatérale et la gêne algique subséquente ont nécessairement entraîné un retentissement sur l’activité professionnelle de l’assurée.
Eu égard à l’ensemble de ces éléments, l’incidence professionnelle est établie compte tenu de la difficulté de se reclasser pour une personne âgée de 55 ans exerçant un métier physique atteinte d’une pathologie des deux épaules ayant généré un taux de 5% sur le plan médical pour une gêne fonctionnelle douloureuse pour l’épaule droite et un taux de 4% pour l’épaule gauche. Toutefois, cette incidence professionnelle liée à la tendinopathie bilatérale est suffisamment indemnisée par l’attribution d’un taux de 3% pour l’épaule dominante de sorte qu’il n’y a pas lieu de majorer le taux d’incapacité s’agissant de l’épaule gauche.
Le jugement sera donc infirmé.
Sur les dépens
L’appel ne vise que la disposition du jugement relative à l’incidence professionnelle.
En application de l’article 696 du code de procédure civile, Mme [B] [I] qui succombe, sera condamnée aux dépens d’appel.
La cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire rendu en dernier ressort par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 9 mars 2023 en ce qu’il a attribué à Mme [B] [I] un taux d’incidence professionnelle, les autres dispositions n’étant contestées,
Statuant à nouveau,
Déboute Mme [B] [I] de sa demande d’indemnisation de l’incidence professionnelle des séquelles de la tendinopathie de l’épaule gauche, maladie professionnelle du 22 octobre 2020,
Condamne Mme [B] [I] aux dépens d’appel.
Le greffier, Le président,
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