Discrimination syndicaleLa discrimination syndicale est prohibée par l’article L. 1132-1 du Code du travail, qui stipule qu’aucun salarié ne peut être écarté d’un processus de recrutement, de formation ou de promotion en raison de ses activités syndicales. L’article L. 1132-4 précise que toute mesure discriminatoire à l’égard d’un salarié en raison de son engagement syndical est nulle et de nul effet. Pour établir une discrimination, le salarié doit prouver des faits laissant supposer qu’il a été traité moins favorablement en raison de son activité syndicale, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation. Prise d’acte de ruptureLa prise d’acte de rupture du contrat de travail, selon l’article L. 1231-1 du Code du travail, peut produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si elle est justifiée par des manquements de l’employeur. L’article L. 1235-3-1 précise que le salarié peut demander une indemnité en cas de prise d’acte de rupture, si celle-ci est fondée sur des faits constitutifs de harcèlement ou de discrimination. Obligation de l’employeurL’employeur a une obligation de sécurité et de prévention des risques psychosociaux, inscrite dans l’article L. 4121-1 du Code du travail, qui impose de protéger la santé mentale et physique des salariés. L’absence d’entretien professionnel, comme stipulé par l’article L. 6315-1, peut constituer un manquement à cette obligation, mais ne suffit pas à établir une discrimination sans éléments probants de traitement inégal. Évaluation des preuvesLa charge de la preuve incombe au salarié qui doit démontrer l’existence de faits constitutifs de discrimination, conformément à l’article 1353 du Code civil, qui stipule que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit prouver les faits qui lui donnent droit à cette exécution. La jurisprudence exige que les éléments présentés soient suffisamment probants pour établir un lien direct entre les faits reprochés et l’activité syndicale du salarié. |
L’Essentiel : La discrimination syndicale est prohibée par l’article L. 1132-1 du Code du travail, interdisant d’écarter un salarié en raison de ses activités syndicales. L’article L. 1132-4 déclare nulle toute mesure discriminatoire liée à l’engagement syndical. Pour prouver une discrimination, le salarié doit démontrer qu’il a été traité moins favorablement en raison de son activité syndicale, selon la jurisprudence de la Cour de cassation.
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Résumé de l’affaire : Le 4 juin 2013, la société Soprema a recruté un gestionnaire comptable et administratif, qui a démissionné le 20 juillet 2020. Le 19 février 2021, ce dernier a saisi le conseil de prud’hommes, alléguant une discrimination syndicale et demandant que sa démission soit considérée comme un licenciement nul. Le 19 octobre 2022, le conseil de prud’hommes de Strasbourg a rejeté ses demandes, tout en déboutant la société Soprema de sa demande reconventionnelle pour procédure abusive.
Le conseil a noté que, bien que Soprema n’ait pas organisé d’entretien professionnel en 2018, cela n’était pas lié à l’élection du salarié comme représentant du personnel en 2019. De plus, le salarié n’avait pas été exclu d’un processus de recrutement pour un poste de responsable trésorerie, ayant choisi de ne pas postuler en raison d’un manque de compétences. Les demandes d’élargissement de ses tâches avaient été prises en compte, et les remarques sur la distribution de masques n’indiquaient pas de discrimination. Le départ de plusieurs membres de la direction financière n’était pas non plus un signe de discrimination syndicale. Le 14 novembre 2022, le salarié a interjeté appel. Dans ses conclusions du 9 février 2023, il a réitéré ses accusations de discrimination syndicale et a demandé des indemnités pour préjudice. Il a évoqué l’absence d’évolution de carrière, son exclusion d’un processus de recrutement, et des conditions de travail dégradées. En réponse, la société Soprema a contesté ces allégations, affirmant qu’aucune discrimination n’avait eu lieu et que le salarié n’avait pas prouvé son préjudice. Le jugement a confirmé que la démission du salarié, sur fond de conflit préexistant, devait être analysée comme une prise d’acte de rupture. Les éléments présentés n’ont pas permis de prouver une discrimination syndicale, et le jugement a été confirmé, condamnant le salarié aux dépens. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le fondement juridique de la demande de M. [Y] [U] concernant la discrimination syndicale ?M. [Y] [U] invoque la discrimination syndicale en se basant sur l’article L. 1132-1 du Code du travail, qui stipule que « nul ne peut être écarté d’un recrutement, d’une formation, d’une promotion ou d’une sanction en raison de ses opinions politiques, de ses croyances, de son appartenance ou de son non-appartenance à un syndicat ». Il soutient que son élection en tant que représentant du personnel a entraîné des conséquences négatives sur sa carrière, notamment l’absence d’évolution professionnelle et des tâches subalternes. Cependant, le conseil de prud’hommes a jugé que les éléments présentés par M. [Y] [U] ne démontraient pas de lien direct entre ses activités syndicales et les décisions de l’employeur. Quel est l’impact de la démission de M. [Y] [U] sur la qualification de la rupture de son contrat de travail ?La démission de M. [Y] [U] est analysée comme une prise d’acte de rupture, conformément à l’article L. 1231-1 du Code du travail, qui précise que « le contrat de travail peut être rompu à tout moment par l’une ou l’autre des parties ». M. [Y] [U] soutient que sa démission est motivée par des reproches de l’employeur et des conditions de travail dégradées, ce qui pourrait justifier une requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse selon l’article L. 1235-1 du même code. Cependant, le tribunal a conclu que les faits reprochés ne justifiaient pas une telle requalification, car ils ne démontraient pas une discrimination syndicale ou un comportement fautif de l’employeur. Quel est le rôle des entretiens professionnels dans la situation de M. [Y] [U] ?L’article L. 6315-1 du Code du travail impose à l’employeur d’organiser des entretiens professionnels tous les deux ans. M. [Y] [U] fait valoir qu’aucun entretien n’a été organisé depuis 2016, ce qui aurait pu affecter son évolution professionnelle. Cependant, le conseil de prud’hommes a noté que M. [Y] [U] n’a pas démontré que cette absence d’entretien avait eu un impact direct sur sa carrière ou qu’elle était liée à ses activités syndicales. Ainsi, bien que l’employeur ait manqué à son obligation, cela ne suffit pas à établir une discrimination. Quel est le lien entre les reproches formulés par l’employeur et la légitimité des actions de M. [Y] [U] en tant que représentant du personnel ?L’article L. 2141-1 du Code du travail protège les représentants du personnel contre les mesures discriminatoires liées à l’exercice de leur mandat. M. [Y] [U] affirme avoir été critiqué pour avoir signalé des problèmes d’approvisionnement en masques, ce qui pourrait constituer une entrave à son mandat. Cependant, le tribunal a constaté que les reproches formulés par l’employeur ne remettaient pas en cause la légitimité de ses actions, mais étaient plutôt liés à une mauvaise communication interne. Ainsi, aucune discrimination n’a été établie sur ce point. Quel est le fondement des demandes d’indemnisation de M. [Y] [U] ?M. [Y] [U] sollicite des indemnités basées sur l’article L. 1235-3-1 du Code du travail, qui prévoit une indemnité en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il demande également des indemnités pour préjudice moral et pour l’absence d’entretien professionnel. Cependant, le tribunal a jugé que les demandes d’indemnisation étaient infondées, car M. [Y] [U] n’a pas prouvé l’existence d’une discrimination ou d’un licenciement abusif. Les demandes ont donc été rejetées, confirmant le jugement de première instance. |
Copie exécutoire
aux avocats
Copie à Pôle emploi
Grand Est
le
Le greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE – SECTION A
ARRET DU 01 AVRIL 2025
Numéro d’inscription au répertoire général : 4 A N° RG 22/04150 – N° Portalis DBVW-V-B7G-H6P4
Décision déférée à la Cour : 19 Octobre 2022 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG
APPELANT :
Monsieur [Y] [U]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Amandine MICHAUD, avocat au barreau de STRASBOURG,
INTIMEE :
S.A.S. SOPREMA, prise en la personne de son représentant légal,
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Florence DREVET-WOLFF de la SELAS VALORIS AVOCATS, avocat au barreau de STRASBOURG,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 Février 2025, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. ROBIN, Président de chambre, chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. ROBIN, Président de chambre (chargé du rapport)
M. PALLIERES, Conseiller
M. LE QUINQUIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme WOLFF
ARRET :
– contradictoire
– prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été avisées,
– signé par M. ROBIN, Président de chambre, et Mme WOLFF, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le 4 juin 2013, la société Soprema a embauché M. [Y] [U] en qualité de gestionnaire comptable et administratif. Celui-ci a démissionné de ses fonctions le 20 juillet 2020.
Le 19 février 2021, M. [Y] [U] a saisi le conseil de prud’hommes en soutenant avoir été victime d’une discrimination syndicale et en demandant que sa démission produise les effets d’un licenciement nul.
Par jugement du 19 octobre 2022, le conseil de prud’hommes de Strasbourg a débouté M. [Y] [U] de ses demandes et la société Soprema de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Pour l’essentiel, le conseil de prud’hommes a considéré que, si la société Soprema avait manqué à son obligation d’organiser un entretien professionnel au cours de l’année 2018, ce fait était sans lien avec l’élection du salarié en qualité de représentant du personnel en 2019, que M. [Y] [U] n’avait pas été exclu d’un processus de recrutement au poste de responsable trésorerie et financements mais qu’il avait choisi de ne pas postuler après avoir constaté qu’il n’avait pas les compétences requises, que la hiérarchie avait pris en compte ses demandes d’élargissement de ses tâches et de modification de celles qu’il considérait comme rébarbatives, qu’il n’était pas contraint de prendre ses heures de délégation durant les heures de pause et que la réponse qui lui avait été faite concernant la distribution de masques au début de l’été 2020 était maladroite mais ne laissait pas supposer l’existence d’une discrimination, et, enfin, que le départ de quatre personnes de la direction financière sur deux ans ne montrait pas l’existence d’une discrimination syndicale.
Le 14 novembre 2022, M. [Y] [U] a interjeté appel de ce jugement.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 4 octobre 2023, et l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 7 février 2025, à l’issue de laquelle elle a été mise en délibéré jusqu’à ce jour.
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Par conclusions déposées le 9 février 2023, M. [Y] [U] demande à la cour de dire qu’il a été victime de discrimination syndicale et que sa démission produit les effets d’un licenciement nul ou, subsidiairement, d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse en ce qu’elle est consécutive aux agissements fautifs de l’employeur ; il sollicite la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice causé par la discrimination syndicale et une indemnité de 36 607,92 euros par application de l’article L. 1235-3-1 du code du travail ou, subsidiairement, de 24 405,28 euros par application de l’article L. 1235-3 de ce code ; il sollicite également la somme de 5 338,65 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement, celles de 5 374,97 euros et de 537,50 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et une indemnité de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour caractériser la discrimination dont il a été victime, M. [Y] [U] invoque l’absence d’évolution de carrière, de formation et d’entretien de progression, malgré le souhait exprimé lors d’un entretien professionnel du 8 février 2016, l’exclusion du processus de recrutement au poste de trésorier du groupe exprimée par un courriel de novembre 2019, l’affectation à des tâches subalternes, des reproches injustifiés en lien avec ses fonctions de représentant du personnel, une dégradation de ses conditions de travail depuis la fin de l’année 2019 et une dégradation corrélative de son état de santé.
En ce qui concerne la rupture du contrat de travail, M. [Y] [U] fait valoir que la démission motivée par des reproches du salarié à son employeur s’analyse en une prise d’acte de rupture, laquelle produit les effets d’un licenciement nul ou d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse suivant la nature de ces reproches ; en l’espèce, il justifierait d’un différend antérieur à la démission et à l’origine de celle-ci, provoqué par les faits dont il était victime. Ces faits caractériseraient une discrimination prohibée ou, à tout le moins, un comportement fautif de l’employeur.
Par conclusions déposées le 15 mai 2023, la société Soprema demande à la cour de débouter M. [Y] [U] de ses demandes, ou le cas échéant de réduire le montant des indemnités consécutives au licenciement, et de le condamner au paiement de la somme d’un euro à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre une indemnité de 3 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Soprema conteste toute discrimination syndicale en affirmant que les faits invoqués par M. [Y] [U] sont présentés de manière erronée et qu’ils sont sans lien avec son mandat de représentation ou une appartenance syndicale ; notamment, aucune entrave à l’exercice de ses fonctions ne serait caractérisée. M. [Y] [U] ne rapporterait pas la preuve du préjudice qu’il prétend avoir subi, alors que l’employeur aurait, au contraire, manifesté de l’empathie.
Sur la rupture du contrat de travail
Par lettre du 20 juillet 2020, M. [Y] [U] a déclaré démissionner du poste de trésorier adjoint qu’il occupait auprès de la société Soprema depuis juillet 2013, en demandant à ne pas effectuer son préavis dans les locaux de l’employeur.
Si la lettre de démission n’expose pas les motifs de celle-ci, la décision du salarié est intervenue dans un contexte conflictuel préexistant, lié, d’une part, à la décision de l’employeur de ne pas le nommer au poste de trésorier du groupe à la fin de l’année 2019, et, d’autre part, à un reproche fait par son supérieur hiérarchique, par courriel du 1er juillet 2020, à la suite d’une réunion du comité social et économique du 30 juin 2020 lors de laquelle M. [Y] [U] avait indiqué que des masques n’avaient pas été distribués dans son service.
Dès lors, cette démission est équivoque et s’analyse en une prise d’acte de rupture du contrat de travail en raison des faits reprochés par M. [Y] [U] à la société Soprema.
Pour justifier cette prise d’acte de rupture, M. [Y] [U] soutient avoir été victime d’une discrimination à compter de son élection, le 13 mai 2019, en qualité de membre du comité social et économique sur une liste établie par le syndicat Force ouvrière.
Pour caractériser cette discrimination syndicale, M. [Y] [U] affirme :
qu’il a été freiné dans ses missions et dans son épanouissement professionnel en raison de tâches rébarbatives dues à une mauvaise organisation et que l’employeur, informé de cette situation, n’a rien entrepris pour y remédier,
que ses souhaits d’évolution professionnelle n’ont pas été pris en compte et qu’il a été écarté du processus de recrutement au poste de trésorier du groupe,
qu’il a été mis à l’écart à la suite de l’arrivée du nouveau trésorier,
qu’en juin 2020 il lui a été reproché d’avoir « fait remonter les difficultés de certains salariés quant à l’approvisionnement en masques sanitaires », alors qu’il agissait dans l’exercice de ses missions de représentant du personnel.
M. [Y] [U] démontre s’être plaint de « tâches rébarbatives qui n’ont aucune valeur ajoutée » mais ne produit aucun élément laissant supposer qu’il aurait été affecté à des tâches étrangères à ses fonctions de trésorier adjoint ou avoir subi des conséquences anormales d’une mauvaise organisation du travail. Il ne démontre pas que ses missions n’auraient pas été en adéquation avec son diplôme et ses compétences.
En revanche, M. [Y] [U] soutient à juste titre qu’aucun entretien professionnel et de carrière n’a été formellement organisé au cours de l’année ayant suivi son élection en qualité de membre du conseil social et économique, et qu’aucun entretien de ce type n’avait eu lieu depuis 2016.
M. [Y] [U] démontre également qu’en novembre 2019 il a demandé de reprendre les fonctions de trésorier du groupe suite à la démission de la collègue qui occupait ce poste, et que M. [T] [G], directeur financier, lui a alors exposé le contenu du poste et le profil recherché avant de l’inviter à contacter le cabinet chargé du recrutement du nouveau trésorier du groupe. M. [Y] [U] a alors renoncé à présenter sa candidature en indiquant qu’il ne disposait pas des compétences recherchées, en déplorant de n’avoir pas été mis en situation de les acquérir, en se plaignant d’être considéré uniquement comme un simple exécutant et en annonçant qu’il agira désormais en tant que tel, tout en mentionnant le mal être qu’il ressentait à venir travailler. Le directeur financier lui a alors fixé un nouveau rendez-vous, en présence du directeur des ressources humaines, en déclarant découvrir ce mal-être, puis, à l’issue de ce rendez-vous, lui a indiqué par courriel qu’il entendait prendre en compte dès que possible son souhait d’évolution professionnelle.
Si M. [Y] [U] n’a pas obtenu le poste qu’il convoitait, il soutient en revanche faussement qu’il aurait été écarté du processus de recrutement et il résulte de ses propres déclarations qu’il ne disposait pas, à l’époque, des compétences requises pour occuper le poste de trésorier du groupe. Il ne justifie d’aucune demande de formation ou d’évolution professionnelle faite depuis le mois de mai 2019 et ne produit aucun élément démontrant que l’intention déclarée du directeur financier de prendre en compte ses désirs était destinée à rester sans suite. Au contraire, la société Soprema fait valoir à juste titre que le directeur financier a pris en compte les doléances de M. [Y] [U] en demandant au service de comptabilité de lui confier des tâches comptables dès le mois de janvier 2020 et en lui demandant des propositions concrètes afin de le libérer des tâches considérées comme rébarbatives.
Il ne peut donc être reproché à la société Soprema de ne pas avoir pris en compte les souhaits d’évolution professionnelle et le mal-être manifestés par M. [Y] [U] à la fin de l’année 2019.
Aucun élément de fait ne permet de caractériser une quelconque mise à l’écart de M. [Y] [U] à compter de l’arrivée du nouveau trésorier du groupe.
En ce qui concerne l’exercice par M. [Y] [U] de ses fonctions représentatives, aucun élément ne démontre qu’il aurait rencontré quelque difficulté que ce soit pour exercer ses heures de délégation durant son temps de travail ; l’attestation de Mme [F] [V], qu’il produit en pièce n°15, ne relate aucun fait précis et circonstancié le concernant que ce témoin aurait personnellement constaté.
M. [Y] [U] affirme que le directeur financier lui aurait reproché d’avoir signalé lors d’une réunion du comité social et économique des difficultés d’approvisionnement en masques sanitaires. Il résulte cependant expressément du courriel du directeur financier que celui-ci reprochait à son subordonné de ne pas l’avoir informé de la difficulté évoquée devant le conseil social et économique et de ne pas s’être renseigné au préalable sur les circonstances de la distribution, en lui demandant pour l’avenir de « privilégier le dialogue à l’intérieur de notre équipe ». Ce courriel manifeste ainsi le dépit du supérieur hiérarchique de n’avoir pas été informé d’une éventuelle difficulté dans l’organisation et le fonctionnement interne du service avant qu’il en soit fait état en-dehors de celui-ci, mais ne critique en rien l’engagement syndical de M. [Y] [U], ni la légitimité de sa participation aux instances représentatives du personnel.
Par ailleurs, M. [Y] [U] n’établit aucun lien entre la démission de quatre salariés, qu’il impute à des « conditions de travail dégradées au sein de la société Soprema » et une discrimination syndicale à son égard.
Si M. [Y] [U] invoque une dégradation de son humeur au travail, constatée par certains collègues et décrite à une psychologue, aucun élément objectif ne permet de relier cette situation de mal-être à un comportement fautif de l’employeur ou à des mesures consécutives à son élection en qualité de membre du comité social et économique. Au contraire, l’attestation de la psychologue démontre que celle-ci a été consultée d’octobre 2019 à janvier 2020, que le salarié se plaignait à l’origine d’un manque de travail puis que M.[Y] [U] avait été agacé et démotivé en raison d’un refus opposé à sa demande de promotion au poste de trésorier du groupe ; cette dégradation de l’humeur apparaît ainsi imputable à la déception de ne pas être promu au poste de trésorier du groupe, sans que le choix de l’employeur soit lié à l’activité syndicale de M. [Y] [U], puisque, ainsi qu’il l’a lui-même reconnu, il ne disposait pas des compétences requises.
Dès lors, les différents faits invoqués par M. [Y] [U], pris dans leur ensemble, ne laissent pas supposer qu’en raison de ses activités syndicales ou de son mandat de représentation du personnel, il a été traité moins favorablement qu’un autre salarié ne l’aurait été dans une situation comparable.
En conséquence, les faits réels reprochés par M. [Y] [U] à la société Soprema, à savoir l’absence de promotion au poste de trésorier du groupe et la remarque de son supérieur hiérarchique à la suite d’une intervention devant le comité social et économique, n’étaient pas de nature à justifier une prise d’acte de rupture du contrat de travail.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a débouté M. [Y] [U] de ses demandes.
Sur l’abus de procédure
Les faits de l’espèce ne permettent pas de caractériser un abus dans l’exercice par M. [Y] [U] de son droit de faire valoir sa cause en justice.
En outre, la société Soprema ne rapporte aucune preuve d’une atteinte à sa réputation.
La société Soprema a donc été déboutée à juste titre de sa demande reconventionnelle.
Sur les dépens et les autres frais de procédure
M. [Y] [U], qui succombe, a été à juste titre condamné aux dépens de première instance. Il sera également condamné aux dépens d’appel, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.
Selon l’article 700 1° de ce code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
Le premier juge a fait une application équitable de ces dispositions ; les circonstances de l’espèce justifient de condamner M. [Y] [U] à payer à la société Soprema une indemnité de 1 000 euros au titre des frais exclus des dépens exposés en cause d’appel ; il sera lui-même débouté de sa demande à ce titre.
La cour, statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement déféré en ses dispositions frappées d’appel ;
CONDAMNE M. [Y] [U] aux dépens d’appel ainsi qu’à payer à la société Soprema une indemnité de 1 000 euros, par application de l’article 700 du code de procédure civile, et le déboute de sa demande à ce titre.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 1er avril 2025, signé par Monsieur Emmanuel ROBIN, Président de chambre, et Madame Lucille WOLFF, Greffier.
Le Greffier, Le Président,
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