Type de juridiction : Cour de cassation
Juridiction : Cour de cassation
Thématique : Saisie de biens immobiliers : accès aux pièces de la procédure contesté.
→ RésuméUne information a été ouverte contre une personne non dénommée pour des faits pénaux. Le juge d’instruction a ordonné, par une ordonnance du 25 mars 2022, la saisie de biens immobiliers situés au Royaume-Uni appartenant à un propriétaire et à une société luxembourgeoise, dont le père du propriétaire est le bénéficiaire économique. Le propriétaire et la société ont interjeté appel de cette ordonnance.
L’examen des moyens de recours a révélé que les griefs soulevés par le propriétaire et la société n’étaient pas suffisants pour permettre l’admission du pourvoi selon l’article 567-1-1 du code de procédure pénale. En ce qui concerne le troisième moyen proposé par le propriétaire, celui-ci critiquait l’arrêt attaqué pour avoir ordonné la saisie pénale du bien immobilier sans respecter certaines exigences procédurales. Le moyen soutenait que, lors de la décision sur le recours du tiers appelant concernant la saisie d’un immeuble, l’arrêt devait indiquer que le tiers avait eu accès aux pièces de la procédure relatives à la saisie contestée. Il devait également identifier les pièces sur lesquelles la chambre de l’instruction s’était fondée pour justifier la mesure. Or, l’arrêt se contentait de mentionner que certaines réquisitions avaient été versées au dossier et que le dossier avait été mis à disposition des avocats des parties, sans préciser que le propriétaire avait eu accès aux pièces pertinentes. Ainsi, l’arrêt ne respectait pas les exigences des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et 706-150 du code de procédure pénale, ce qui a conduit à une méconnaissance des droits de la défense. |
Cour de cassation, 2 avril 2025, N° Pourvoi 23-85.087
N° M 23-85.087 F-D
N° 00366
GM
2 AVRIL 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 2 AVRIL 2025
M. [T] [Y] et la société [5] ont formé des pourvois contre l’arrêt n° 8 de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris,
2e section, en date du 4 juillet 2023, qui, dans l’information suivie contre personne non dénommée des chefs, notamment, de blanchiment aggravé et association de malfaiteurs en vue, a confirmé l’ordonnance de saisie pénale rendue par le juge d’instruction.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Clément, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [T] [Y], de la société [5], les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de l’Etat du Liban et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 12 février 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Clément, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Une information contre personne non dénommée a été ouverte des chefs susvisés.
3. Par ordonnance du 25 mars 2022, le juge d’instruction a ordonné la saisie de biens immobiliers situés au Royaume-Uni appartenant à M. [T] [Y] et à la société luxembourgeoise [5], dont son père, M. [V] [Y], est le bénéficiaire économique.
4. M. [T] [Y] et la société [5] ont interjeté appel de cette ordonnance.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième, quatrième et cinquième moyens proposés pour M. [T] [Y], les deuxième, troisième, pris en sa deuxième branche, et quatrième moyens proposés pour la société [5],
5. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le troisième moyen, proposé pour M. [T] [Y]
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a ordonné la saisie pénale du bien immobilier situé au Royaume-Uni dont M. [T] [Y] est propriétaire, alors « que lorsque la chambre de l’instruction statue sur le recours du tiers appelant sur la saisie d’un immeuble, les mentions de l’arrêt doivent énoncer que le tiers appelant a eu accès aux pièces de la procédure se rapportant à la saisie qu’il conteste et, le cas échéant, aux pièces précisément identifiées sur lesquelles la chambre de l’instruction se fonde pour justifier la mesure dans ses motifs décisoires, ainsi qu’identifier, directement ou par renvoi à un inventaire éventuellement dressé par le procureur général, chacune des pièces mises à disposition de l’avocat du tiers appelant ; qu’en l’espèce, l’arrêt se borne à mentionner que « les réquisitions du procureur de la République financier du 22 mars 2022 ont été versées au dossier de la chambre de l’instruction », que « le dossier comprenant le réquisitoire écrit de M. le procureur général en date du 25 octobre 2022, a été déposé au greffe de la chambre de l’instruction et tenu à la disposition des avocats des parties » et que « les conseils de la société [5] ont obtenu, en suite d’une erreur du greffe de la chambre de l’instruction, la copie de la procédure d’instruction » ; que les mentions de l’arrêt n’énoncent pas que l’exposant – qui était assisté par un autre conseil que ceux de la société [5] – a eu accès aux pièces de la procédure se rapportant à la saisie qu’il contestait et aux pièces précisément identifiées – notamment les résolutions du Comité central de la Banque du Liban, le détail des comptes de la société [4] et les ordres de virement (swift) – sur lesquelles la chambre de l’instruction s’est fondée pour justifier la mesure dans ses motifs décisoires et n’identifient pas, directement ou par renvoi à un inventaire, chacune des pièces mises à disposition de l’avocat de l’exposant ; que, partant, la chambre de l’instruction a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et 706-150 du code de procédure pénale ainsi que les principes précités. »
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