Type de juridiction : Cour de cassation
Juridiction : Cour de cassation
Thématique : Responsabilité en matière de procédure abusive : conditions et limites.
→ RésuméDans cette affaire, un litige oppose plusieurs héritiers d’une personne décédée à des cessionnaires d’actions de sociétés. En janvier 2004, un acte sous seing privé a été signé, par lequel des cessionnaires ont transféré l’intégralité des actions de deux sociétés, Jumstech et PVC Fence Dépôt Inc, à une héritière et à son époux, ainsi qu’à une autre héritière. Le prix de cette cession a été partiellement réglé par la dation en paiement de parts détenues dans une société civile immobilière (SCI) nommée Odilette.
Peu après, un acte de cession de parts sociales de la SCI Odilette a été signé entre les héritiers et les cessionnaires, puis réitéré par acte authentique en juin 2004. Cependant, des contestations ont émergé, conduisant les héritiers à assigner les cessionnaires en nullité ou résolution de l’acte de cession des parts sociales. Suite au décès de l’une des héritières, ses héritiers ont poursuivi la procédure. Un liquidateur judiciaire, agissant pour le compte de la société décédée, a également été impliqué dans le litige. Les héritiers ont formé un pourvoi contre un arrêt de la cour d’appel de Chambéry, qui avait condamné les héritiers à verser des dommages-intérêts pour procédure abusive à l’un des cessionnaires. Les héritiers ont contesté cette décision, arguant que l’exercice de leur droit d’appel ne pouvait être qualifié d’abus de droit sans circonstances particulières justifiant une telle qualification. La Cour de cassation a examiné les moyens de cassation soulevés par les héritiers, mais a jugé que les arguments présentés ne justifiaient pas une cassation de la décision de la cour d’appel. Ainsi, la décision de condamner les héritiers à des dommages-intérêts pour procédure abusive a été maintenue. |
Cour de cassation, 2 avril 2025, N° Pourvoi 23-22.109
Première chambre civile
–
Formation restreinte hors RNSM/NA
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 2 avril 2025
Cassation partielle sans renvoi
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 221 F-D
Pourvoi n° H 23-22.109
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 AVRIL 2025
1°/ Mme [T] [OS], épouse [CW], domiciliée [Adresse 3] [Localité 22] (Canada), agissant tant en son nom personnel qu’en qualité d’héritière de [H] [P], veuve [OS],
2°/ la société Ouizille – [E], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 9], [Localité 15], venant aux droits de [B] [OS],
3°/ Mme [O] [OS], épouse [Y], domiciliée [Adresse 8], [Localité 18],
4°/ M. [S] [OS], domicilié [Adresse 20], [Localité 7],
5°/ Mme [D] [OS], épouse [I], domiciliée [Adresse 14], [Localité 4],
6°/ M. [X] [OS], domicilié [Adresse 21], [Localité 7],
7°/ Mme [R] [OS], épouse [F], domiciliée [Adresse 23], [Localité 5],
8°/ Mme [U] [OS], épouse [C], domiciliée [Adresse 24], [Localité 12],
9°/ Mme [V] [OS], épouse [L], domiciliée [Adresse 1], [Localité 11],
10°/ Mme [OL] [OS], épouse [A], domiciliée [Adresse 6], [Localité 17],
11°/ Mme [G] [OS], épouse [ZW], domiciliée [Adresse 2], [Localité 16],
agissant tous neuf en qualité d’héritiers de [H] [P], veuve [OS],
ont formé le pourvoi n° H 23-22.109 contre l’arrêt rendu le 1er août 2023 par la cour d’appel de Chambéry (chambre civile, 1re section), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [IK] [K],
2°/ à Mme [Z] [W], épouse [K],
3°/ à M. [N] [K],
tous trois domiciliés [Adresse 10], [Localité 13],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Tréard, conseiller, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de Mmes [T], [O], [D], [R], [U], [V], [OL] et [G] [OS], de MM. [S] et [X] [OS] et de la société Ouizille – [E], de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de MM. [IK] et [N] [K] et de Mme [W], épouse [K], après débats en l’audience publique du 11 février 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Tréard, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Chambéry, 1er août 2023), par acte sous seing privé du 7 janvier 2004, M. [IK] [K], Mme [K] et M. [N] [K] ont cédé à [B] [OS], [H] [P] veuve [OS] et Mme [T] [OS] épouse [CW] I’intégralité des actions des sociétés Jumstech et PVC Fence Dépôt Inc, domiciliées en Floride, dont le prix a, pour partie, été acquitté par dation en paiement des parts détenues par M. et Mmes [OS] dans la SCI Odilette.
2. Par acte sous seing du 30 janvier 2004, signé entre M. et Mmes [OS], d’une part, Mme [K] et M. [N] [K] représentés par M. [IK] [K] d’autre part, les premiers ont cédé aux seconds leurs parts dans la SCI Odilette.
3. Le 18 juin 2004, cette cession de parts sociales a été réitérée par acte authentique dressé par un notaire établi à [Localité 19].
4. [H] [OS] et Mme [T] [OS] ont assigné Mme [K], MM. [N] et [IK] [K], notamment, en nullité ou résolution de l’acte de cession des parts sociales de la SCI Odilette du 18 juin 2004.
5. [H] [OS] étant décédée en cours d’instance, ses héritiers ont repris la procédure, en qualité d’intervenants forcés (avec Mme [T] [OS], ensemble « les consorts [OS] »).
6. [B] [OS], décédé le 26 novembre 2010, ayant fait l’objet d’une procédure collective toujours pendante, M. [M] [E], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de [B] [OS] est intervenu volontairement à l’instance.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, le deuxième moyen et le troisième moyen, pris en sa première branche
7. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
8. Les consorts [OS] et M. [M] [E], ès qualités, font grief à l’arrêt, ajoutant au jugement, de les condamner in solidum à payer à M. [IK] [K] la somme de 1 000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive, alors :
« 2°/ qu’en tout état de cause, l’exercice d’une voie de recours ne peut constituer un abus de droit que dans des circonstances particulières le rendant fautif ; qu’en retenant, pour condamner les consorts [OS] à payer à M. [IK] [K] des dommages-intérêts pour procédure abusive en cause d’appel, qu’ils n’ignoraient pas que ce dernier agissait en qualité de représentant des cessionnaires dans le cadre des actes litigieux dont ils sollicitent l’annulation ou la résolution, la cour d’appel, qui a ainsi statué par des motifs impropres à caractériser une faute ayant fait dégénérer en abus le droit des requérants de relever appel de la décision de première instance, a violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil ;
3°/ que l’exercice abusif du droit d’agir en justice suppose la démonstration d’une faute ; qu’en condamnant également Me [M] [E] à indemniser M. [IK] [K] pour procédure abusive en cause d’appel, sans caractériser à son encontre une faute ayant fait dégénérer en abus le droit d’agir en justice, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382, devenu 1240, du code civil. »
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