Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Versailles
Thématique : Conformité des mises en demeure et modalités de calcul des cotisations sociales
→ RésuméContexte du litigeA la suite d’un contrôle de l’application des législations de sécurité sociale, l’URSSAF a notifié à une société de services à la personne un projet de redressement d’un montant de 30 996 euros, portant sur plusieurs chefs de redressement, le 9 septembre 2019. La société a contesté un des chefs de redressement, mais l’URSSAF a maintenu le montant du redressement par courrier du 25 novembre 2019. Mises en demeure et contestationsL’URSSAF a ensuite notifié une mise en demeure pour le paiement d’une somme totale de 35 395 euros, suivie d’une seconde mise en demeure le 16 juillet 2020, qui a annulé la première. La société a saisi la commission de recours amiable, qui a rejeté son recours. Par la suite, la société a porté l’affaire devant le tribunal judiciaire de Chartres. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré la société recevable dans son action, mais a débouté ses demandes d’annulation des mises en demeure et de condamnation de l’URSSAF. La société a été condamnée à payer 35 392 euros à l’URSSAF et aux dépens. Elle a interjeté appel le 15 décembre 2023. Arguments de la sociétéLa société a soutenu qu’elle avait commis une erreur de paramétrage dans ses bases de données, entraînant un trop-perçu. Elle a contesté le calcul des cotisations et des majorations de retard, affirmant que la mise en demeure ne lui permettait pas de connaître l’étendue exacte de son obligation. Elle a demandé l’annulation des mises en demeure et la restitution des sommes. Arguments de l’URSSAFL’URSSAF a défendu la régularité de la seconde mise en demeure, affirmant que la société n’avait pas produit les justificatifs nécessaires pour effectuer les proratisations. Elle a également soutenu que la société avait omis de calculer correctement les majorations de retard. Exonérations et calcul des cotisationsLe tribunal a examiné les exonérations applicables aux aides à domicile et a constaté que la société n’avait pas correctement distingué les prestations effectuées auprès d’un public fragile. L’URSSAF a justifié son calcul des cotisations en se basant sur les documents fournis par la société, qui n’a pas produit les bordereaux mensuels nécessaires pour une proratisation correcte. Confirmation du jugementLa cour a confirmé le jugement du tribunal de Chartres, rejetant les arguments de la société concernant les mises en demeure et les calculs des cotisations. Elle a également condamné la société aux dépens d’appel et a débouté sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. |
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 88B
Ch.protection sociale 4-7
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 21 NOVEMBRE 2024
N° RG 23/03574 – N° Portalis DBV3-V-B7H-WIBV
AFFAIRE :
S.A.R.L. [4]
C/
URSSAF CENTRE-VAL DE LOIRE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Novembre 2023 par le pôle social du tribunal judiciaire de CHARTRES
N° RG : 22/00219
Copies exécutoires délivrées à :
Me François SOUCHON
URSSAF CENTRE-VAL-DE-LOIRE
Copies certifiées conformes délivrées à :
S.A.R.L. [4]
URSSAF CENTRE-VAL DE LOIRE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.R.L. [4]
[Adresse 1]
[Localité 2] (FRANCE)
représentée par Me François SOUCHON de la SCP SCP SOUCHON – CATTE – LOUIS – PLAINGUET, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000061 – N° du dossier 2210152
APPELANTE
****************
URSSAF CENTRE-VAL DE LOIRE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par M. [Z] [W], en vertu d’un pouvoir spécial
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Septembre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente, chargée d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente
Madame Aurélie PRACHE, présidente de chambre,
Madame Charlotte MASQUART, conseillère,
Greffière, lors des débats et du prononcé : Madame Juliette DUPONT,
EXPOSÉ DU LITIGE
A la suite d’un contrôle de l’application des législations de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires portant sur la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018, l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales du Centre-Val-de-Loire (l’URSSAF) a notifié à la société [4] (la société), entreprise de services à la personne, une lettre d’observations, le 9 septembre 2019, aux termes de laquelle il était envisagé un redressement d’un montant de 30 996 euros portant sur sept chefs de redressement.
Le 5 novembre 2019, la société a fait part de ses observations contestant le chef de redressement n° 2 (erreur matérielle de report ou de totalisation).
Par courrier du 25 novembre 2019, l’URSSAF a maintenu le montant du redressement.
L’URSSAF a notifié à la société une mise en demeure datée du 16 décembre 2019 pour le paiement de la somme totale du 35 395 euros, dont 30 999 euros de cotisations et 4 396 euros de majorations de retard.
Le 16 juillet 2020, l’URSSAF a notifié à la société une seconde mise en demeure annulant et remplaçant la précédente, pour le paiement de la somme totale de 35 392 euros, dont 30 996 euros de cotisations et 4 396 euros de majorations de retard.
La société a contesté la première mise en demeure en saisissant la commission de recours amiable de l’URSSAF. Dans sa séance du 30 septembre 2020, la commission de recours amiable, qui a intégré la délivrance d’une seconde mise en demeure du 16 juillet 2020, a rejeté le recours de la société.
Le 15 avril 2020, la société a ensuite saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres qui, par jugement contradictoire en date du 24 novembre 2023, a :
– déclaré la société recevable en son action ;
– débouté la société de sa demande en annulation des mises en demeure ;
– débouté la société de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de sa demande au titre de l’article 696 du même code ;
– condamné reconventionnellement la société à payer à l’URSSAF la somme de 35 392 euros ;
– condamné la société aux entiers dépens ;
– dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 15 décembre 2023, la société a interjeté appel et les parties ont été convoquées à l’audience du 24 septembre 2024.
Par conclusions écrites, déposées et soutenues à l’audience, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société demande à la Cour :
– de la juger recevable et bien fondée en son appel ;
– de juger que la mise en demeure est erronée dans son montant, de sorte qu’elle ne lui permet pas de connaître l’étendue exacte et réelle de son obligation ;
en conséquence,
– d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres le 24 novembre 2023 ;
et, statuant de nouveau,
– de juger que les mises en demeure en date des 16 décembre 2019 et 16 juillet 2020 sont annulées ;
– de débouter l’URSSAF de l’ensemble de ses demandes, prétentions, moyens, fins et conclusions ;
– de condamner l’URSSAF à lui payer la somme de 40 703 euros en restitution des causes du jugement de première instance, et des nouveaux intérêts prélevés depuis ;
– de condamner l’URSSAF à lui payer la somme de 3 600 euros à titre d’indemnité relative aux frais irrépétibles de première instance ;
– de condamner l’URSSAF aux entiers dépens de première instance ;
y ajoutant,
– de condamner l’URSSAF à lui payer la somme de 3 600 euros à titre d’indemnité relative aux frais irrépétibles d’appel ;
– de condamner l’URSSAF aux entiers dépens de l’appel.
La société expose qu’elle est une société d’aide à la personne et qu’elle bénéficie d’exonérations pour certaines prestations au profit de personnes dépendantes, public fragile ; qu’elle a réalisé un paramétrage erroné dans ses bases de données et qu’elle a payé plus que prévu ; que le contrôle a décelé cette erreur mais que l’URSSAF n’a pas appliqué la méthode légale mais une méthode qui n’existe pas, sans proratisation, entraînant une restitution moindre, en ne prenant pas en compte l’ensemble des rémunérations.
Elle affirme avoir bien produit tous les documents nécessaires pour permettre un calcul conforme, que l’URSSAF n’a jamais demandé la production des bordereaux mensuels et que ce moyen n’apparaît pas dans la lettre d’observations ou durant la phase contradictoire.
Elle demande donc la nullité de la mise en demeure, le redressement étant atteint dans sa totalité.
Elle affirme également que le calcul de la majoration est erroné et n’aurait dû aboutir qu’à une somme de 1 550 euros ; qu’il en résulte que la mise en demeure doit être annulée en ce qu’elle ne permet pas de connaître l’étendue de son obligation.
Elle précise que l’erreur de calcul dans le trop perçu fausse le montant final du rappel et par conséquent des majorations y afférent ; que la mise en demeure du 16 juillet 2020 ne lui permet pas de connaître l’étendue exacte et réelle de son obligation et que les mises en demeure doivent être annulées en totalité.
Par conclusions écrites, déposées et soutenues à l’audience, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, l’URSSAF demande à la Cour :
– de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Chartres le 24 novembre 2023 ;
et y ajoutant,
– de débouter la société de sa demande de condamnation au titre d’une indemnité relative aux frais irrépétibles d’appel ;
– de condamner la société aux entiers dépens exposés en appel.
L’URSSAF soutient que la seconde mise en demeure du 16 juillet 2020 a été prise devant l’incompréhension de la société quant aux montants mentionnés dans la première mise en demeure et qu’elle est régulière.
Elle ajoute que le contrôle a révélé une répartition erronée des ‘heures fragiles’ et ‘non fragiles’ et une erreur de paramétrage ; que les différences constatées entre les montants mentionnés sur les documents comptables et sociaux et les montants déclarés ont été réintégrés dans l’assiette des cotisations et contributions sociales ; que l’URSSAF n’a pas pu effectuer les proratisations invoquées par la société en l’absence de justificatifs produits et notamment les bordereaux mensuels ; que la régularisation n’est pas une improvisation et l’absence de proratisation ne rend pas le calcul non conforme ; que la société avait la possibilité de produire ses bordereaux et qu’elle ne l’a pas fait.
Sur les majorations de retard, la société omet de calculer les majorations de retard complémentaires de 0,2 % aux majorations de retard initiales de 5 %.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne la société [4] aux dépens d’appel ;
Déboute la société [4] de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente, et par Madame Juliette DUPONT, greffière, à laquelle la magistrate signataire a rendu la minute.
La greffière La conseillère
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