Cour d’appel de Toulouse, 5 février 2025, RG n° 23/00784
Cour d’appel de Toulouse, 5 février 2025, RG n° 23/00784

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Toulouse

Thématique : Qualité de professionnel : le pouvoir de requalification du juge

Résumé

Contexte de l’Affaire

Le 29 mai 2018, une professionnelle de la santé, exerçant en tant qu’auto-entrepreneur, a conclu un contrat avec une société par actions simplifiée (SAS) pour la mise en place d’une solution internet. Ce contrat prévoyait le paiement de 48 mensualités de 290 euros hors taxes, ainsi qu’un forfait de mise en ligne. Le même jour, elle a également signé un contrat de location de site web avec une autre SAS pour financer cette opération.

Exercice du Droit de Rétractation

Le lendemain de la signature, la professionnelle a exercé son droit de rétractation par lettre recommandée, souhaitant annuler le contrat. Cependant, le 12 juin 2018, elle a de nouveau signé un contrat avec la première SAS pour un site internet, à des conditions modifiées, ainsi qu’un nouveau contrat de location avec la seconde SAS.

Problèmes de Paiement et Résiliation

Les paiements ont été effectués régulièrement jusqu’en avril 2019, date à laquelle plusieurs échéances sont restées impayées. En conséquence, la société Locam a mis en demeure la professionnelle de régulariser son arriéré, ce qui a conduit à la résiliation du contrat le 22 août 2019.

Procédures Judiciaires

Le 19 novembre 2019, la société Locam a assigné la professionnelle devant le tribunal judiciaire de Toulouse pour obtenir le paiement d’une somme due. En réponse, la professionnelle a également assigné la première SAS, demandant la jonction des procédures.

Jugement du Tribunal

Le 18 novembre 2022, le tribunal a rejeté les demandes de nullité des contrats formulées par la professionnelle, a condamné cette dernière à payer la somme due à la société Locam, et a accordé un délai de paiement. Le tribunal a également condamné la professionnelle à payer des frais aux deux sociétés.

Appel de la Décision

Le 3 mars 2023, la professionnelle a interjeté appel du jugement, contestant la validité des contrats et demandant leur annulation pour dol et manquements aux obligations d’information. Elle a également sollicité des remboursements et des indemnités pour préjudice moral.

Arguments des Parties

La société Locam a contesté les allégations de dol, affirmant que la professionnelle avait signé les contrats et que les paiements avaient été effectués sans contestation. De son côté, la première SAS a soutenu que les contrats étaient valides et que les dispositions du code de la consommation n’étaient pas applicables.

Décision de la Cour

Le 18 novembre 2024, la cour a confirmé le jugement du tribunal de Toulouse, rejetant les demandes de la professionnelle et la condamnant à payer des frais aux deux sociétés. La cour a également statué que les contrats étaient valides et que les dispositions du code de la consommation ne s’appliquaient pas dans ce cas.

05/02/2025

ARRÊT N° 41/25

N° RG 23/00784

N° Portalis DBVI-V-B7H-PJH3

MD – SC

Décision déférée du 18 Novembre 2022

TJ de TOULOUSE – 20/00132

L. DURIN

[P] [C]

C/

S.A.S. LOCAM

S.A.S. AXECIBLES

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le 05/02/2025

à

Me Jacques MONFERRAN

Me Léna BARO

Me BONNAUD-CHABIRAND

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU CINQ FEVRIER DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANTE

Madame [P] [C]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Jacques MONFERRAN de la SCP MONFERRAN – ESPAGNO – SALVADOR, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEES

S.A.S. LOCAM

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Léna BARO, avocat au barreau de TOULOUSE (Postulant)

Représentée par Me Eric BOHBOT, avocat au barreau de PARIS (plaidant)

S.A.S. AXECIBLES

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Julia BONNAUD-CHABIRAND, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant)

Représentée par Me Michel APELBAUM de l’ASSOCIATION APELBAUM et BACHALARD, Avocats associés, avocat au barreau de PARIS (plaidant)

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 novembre 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. DEFIX, Président, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. DEFIX, président

A.M. ROBERT, conseillère

S. LECLERCQ, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière : lors des débats M. POZZOBON

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par M. DEFIX, président et par M. POZZOBON, greffière

EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Le 29 mai 2018, Mme [P] [C], exerçant la profession de diététicienne-nutritionniste sous le statut d’auto-entrepreneur à [Localité 7] (31), a conclu un contrat avec la société par actions simplifiée (Sas) Axecibles portant notamment sur la mise en place d’une ‘solution internet globale’, moyennant le versement de 48 mensualités de 290 euros hors taxes, soit 348 euros toutes taxes comprises, ainsi que le paiement d’un forfait de mise en ligne à hauteur de 442,80 euros toutes taxes comprises.

Le même jour, Mme [P] [C] a conclu avec la Sas Locam un contrat intitulé contrat de location de site web, destiné à financer l’opération conclue avec la Sas Axecibles, moyennant le versement de 48 loyers de 348 euros toutes taxes comprises.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 mai 2018, Mme [P] [C] a exercé son droit de rétractation et a souhaité annuler le contrat.

Le 12 juin 2018, Mme [P] [C] a de nouveau conclu, d’une part, un contrat avec la Sas Axecibles portant sur la mise en place d’un site internet, moyennant désormais 48 mensualités de 250 euros hors taxes soit 300 euros toutes taxes comprises et, d’autre part, un contrat avec la Sas Locam intitulé ‘contrat de location de site web’ en vue du financement du site internet prévoyant le paiement de 48 mensualités de 250 euros hors taxes soit 300 euros toutes taxes comprises.

La Sas Axecible indique qu’un cahier des charges a été réalisé le 14 juin 2018.

Le 10 juillet 2018, Mme [P] [C] a signé par voie électronique un procès-verbal de réception du site internet réalisé par la Sas Axecibles, un procès verbal de livraison et de conformité émis par la Sas Locam et deux mandats de prélèvement à destination des sociétés Locam et Axecibles.

Les remboursements ont été effectués régulièrement à compter du 10 août 2018.

Plusieurs échéances sont demeurées impayées à partir du 10 avril 2019.

Par courrier recommandé du 15 août 2019, la Sas Locam a mis en demeure Mme [P] [C] de régulariser son arriéré ainsi que des indemnités de retard et au titre de la clause pénale sous peine de résiliation du contrat en vertu de la clause contractuelle résolutoire de plein droit pour défaut de paiement des loyers.

Le 22 août 2019, le contrat a été résilié par la Sas Locam en l’absence de paiement par Mme [P] [C].

Par acte d’huissier du 19 novembre 2019, la Sas Locam a fait assigner Mme [P] [C] devant le tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de la voir condamner à lui payer la somme de 12 895,86 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 août 2019.

Par acte d’huissier du 2 octobre 2020, Mme [P] [C] a fait assigner la société Axecible devant cette même juridiction, sollicitant la jonction des procédures, laquelle a été prononcée par ordonnance du 26 octobre 2020.

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Par un jugement du 18 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

– rejeté la demande de Mme [P] [C] de nullité du contrat d’abonnement et de location de solution internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [P] [C] le 12 juin 2018 et celle portant sur la nullité du contrat de location de site web le 12 juin 2018 entre la Sas Locam et Mme [P] [C] sur le fondement du dol,

– rejeté la demande de Mme [P] [C] de nullité du contrat d’abonnement et de location de solution internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [P] [C] le 12 juin 2018 et celle portant sur la nullité du contrat de location de site web le 12 juin 2018 entre la Sas Locam et Mme [P] [C] sur le fondement des dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement,

– rejeté la demande subsidiaire de Mme [P] [C] de nullité de la clause de l’article 1 alinéa 2 du contrat d’abonnement et de location de site internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [P] [C] le 12 juin 2018,

– condamné Mme [P] [C] à payer à la Sas Locam la somme de 12 895,86 euros,

– accordé à Mme [P] [C] un délai de 24 mois pour régler cette somme,

– dit qu’entre le 5 et le 10 de chaque mois à compter du premier mois suivant la signification du présent jugement et au plus tard le 15 de ce mois et de chacun des mois suivants, Mme [P] [C] devra effectuer 24 versements d’un montant de 537,30 euros soldant la dette, jusqu’à complet paiement de la somme restant due,

– dit qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité, le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,

– condamné Mme [P] [C] à payer à la Sas Axecibles la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [P] [C] à payer à la Sas Locam la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [P] [C] aux dépens de l’instance,

– rejeté la demande de Mme [P] [C] d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision,

– rappelé que l’exécution provisoire de la décision est de droit.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que les signatures apposées sur les contrats litigieux étaient bien celles de Mme [P] [C] et que celle-ci n’apportait pas la preuve des éléments constitutifs du dol dont elle se prévalait.

Sur l’applicabilité du droit de la consommation, le premier juge a retenu que les contrats litigieux étaient des contrats hors établissement conclus avec un professionnel remplissant les conditions de l’article L. 221-3 du code de la consommation lui permettant de bénéficier des dispositions protectrices de ce code, à savoir que les contrats n’entraient pas dans le champ d’activité principale de Mme [P] [C] et qu’elle n’employait pas plus de cinq salariés.

Sur l’application du droit de la consommation, il a été retenu que l’exception au droit de rétractation posée par l’article L. 221-28, 13° du code de la consommation avait lieu de s’appliquer en l’espèce, de sorte que Mme [P] [C] ne pouvait se prévaloir de manquements aux obligations d’information des sociétés Locam et Axecibles s’agissant d’un droit de rétractation dont elle ne bénéficiait pas. Par conséquent, la demande de nullité des contrats a été rejetée en l’absence de manquement imputable aux sociétés Locam et Axecibles. Cet absence de manquement aux obligations d’information a également conduit le premier juge à rejeter la demande subsidiaire d’annulation de la clause de renonciation au droit de rétractation, le tribunal ayant en outre relevé que Mme [P] [C] ne pouvait se prévaloir d’une absence d’information quant à son droit de rétractation alors qu’elle avait exercé ce droit antérieurement, à l’égard des contrats conclus le 29 mai 2018.

En l’absence d’élément permettant de remettre en cause la validité des contrats conclus, le premier juge a fait application des stipulations contractuelles pour estimer que le contrat avait été valablement résilié par la société Locam à la suite d’une mise en demeure restée infructueuse pendant huit jours et a condamné Mme [P] [C] à une somme de 12 895,86 euros correspondant aux loyers échus et impayés à la date de la résiliation majorés de 10% en application de la clause pénale insérée à l’acte, aux intérêts de retard, aux loyers à échoir jusqu’à la date à laquelle le contrat aurait dû prendre fin majorés de 10% en application de la la clause pénale insérée à l’acte.

Le tribunal a enfin considéré que l’exécution provisoire était compatible avec la nature de l’affaire, a accordé des délais de paiement à Mme [P] [C] au regard de ses faibles revenus, l’a condamnée aux dépens en tant que partie succombante et, partant, au paiement de certaines sommes en application de l’article 700 du code de procédure civile.

-:-:-:-

Par déclaration du 3 mars 2023, Mme [P] [C] a relevé appel de ce jugement en ce qu’il a :

– rejeté la demande de Mme [P] [C] de nullité du contrat d’abonnement et de location de solution internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [C] le 12 juin 2018 et celle portant sur la nullité du contrat de location de site web le 12 juin 2018 entre la Sas Locam et Mme [P] [C],

– rejeté la demande de Mme [C] de nullité de la clause de l’article 1er alinéa 2 du contrat d’abonnement et de location de site internet conclu netre la Sas Axecibles et Mme [C] le 12 juin 2018,

– condamné Mme [C] à payer à la Sas Locam la somme de 12 895,86 euros, accordé un délai de paiement et dit qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,

– condamné Mme [P] [C] à payer 1 500 euros à la Sas Axecibles et 1 500 euros à la Sas Locam sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [C] aux entiers dépens de l’instance,

– rejeté la demande à Mme [C] d’écarter l’exécution provisoire, et en conséquence en ce que la décision n’a pas fait droit aux demandes de Mme [C] en condamnation solidaire des sociétés Locam et Axecibles à payer les sommes de 2 400 euros en remboursement des échéances versées, 1 500 euros pour résistance abusive et 2 000 euros à titer de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et dépens.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 20 juin 2024, Mme [P] [C], appelante, demande à la cour, au visa des articles L. 221-3, L. 221-5, L. 221-9, L. 221-18 et L. 221-20 du code de la consommation, des articles 1137, 1343-5 et 1130 du code civil et de l’article 514-1 du code de procédure civile, de :

– infirmer et réformer le jugement dont appel du tribunal judiciaire de Toulouse du 18 novembre 2022 en ce qu’il a :

* rejeté la demande de Mme [P] [C] de nullité du contrat d’abonnement et de location de solution internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [C] le 12 juin 2018 et celle portant sur la nullité du contrat de location de site web le 12 juin 2018 entre la Sas Locam et Mme [P] [C],

* rejeté la demande de Mme [C] de nullité et de déclaration du caractère non avenu de la clause de l’article 1er alinéa 2 du contrat d’abonnement et de location de site internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [C] le 12 juin 2018,

* condamné Mme [C] à payer à la Sas Locam la somme de 12 895,86 euros, accordé un délai de paiement et qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,

* condamné Mme [P] [C] aux entiers dépens de l’instance,

* et en conséquence en ce que la décision n’a pas fait droit aux demandes de Mme [C] en condamnation solidaire des sociétés Locam et Axecibles à payer les sommes de 2 400 euros en remboursement des échéances versées, 1 500 euros pour résistance abusive et 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et dépens,

Statuant à nouveau,

– prononcer la nullité du contrat d’abonnement et de location de solution internet conclu entre Axecibles et Mme [P] [C] le 12 juin 2018,

– prononcer la nullité du contrat de location de site web conclu entre la Sas Locam et Mme [P] [C] le 12 juin 2018, et subsidiairement, la caducité de ce contrat,

– déclarer subsidiairement la clause prévue à l’article 1 alinéa 2 du contrat d’abonnement et de location de solution internet signé avec la Sas Axecibles le 14 juin 2018 nulle et réputée non avenue,

En toutes hypothèses,

– débouter la société Locam et la société Axecibles de l’intégralité de leurs demandes,

– condamner in solidum les sociétés Locam et Axecibles à payer à Mme [P] [C] :

* 2 400 euros en remboursement des échéances versées (300 euros toutes taxes comprises août 2018 à mars 2019),

* 1 500 euros pour résistance abusive,

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,

– condamner les sociétés Locam et Axecibles à payer in solidum la somme de 10 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance et d’appel,

À titre subsidiaire dans l’hypothèse où la cour viendrait à entrer en voie de condamnation à l’encontre de Mme [C],

– accorder les plus larges délais de paiement à Mme [C].

L’appelante fait valoir, d’une part, la nullité des contrats conclus avec les sociétés Axecible et Locam sur le fondement du dol, en raison de manoeuvres qui auraient été mises en oeuvre pour surprendre son consentement, invoquant l’existence d’une procédure pénale à l’encontre de la société Locam, à laquelle elle n’est pas partie, pour des faits similaires à ceux qu’elle allègue. Elle avance également que la signature figurant au contrat la liant à la société Locam le 12 juin 2018 n’a pas été apposée par elle.

Elle soutient, d’autre part, la nullité des contrats sur le fondement des dispositions du code de la consommation relatives aux contrats hors établissement.

Elle avance que ces dispositions lui sont applicables en vertu de l’article L. 221-3 du code de la consommation, en tant que professionnel ayant contracté en dehors de son champ d’activité professionnelle principal employant moins de cinq salariés, que le contrat ne correspond à aucune exclusion légale et que l’interdépendance des contrats les soumet tous les deux à la législation consumériste relative aux contrats hors établissement. En application de celle-ci, elle soutient la nullité des contrats au regard des manquements aux articles L. 221-5, 2° et L. 221-9 du code de la consommation.

Elle soutient également l’inapplicabilité des exceptions au droit de rétractation, posées par les dispositions relatives aux contrats hors établissement, en application de l’article L. 221-3 du code de la consommation. Subsidiairement, elle conteste la validité de la clause de renonciation au droit de rétractation stipulée, invoquant un vice de son consentement du fait de l’information inexacte délivrée par la clause.

Finalement, elle se prévaut, à titre subsidiaire, de la caducité du contrat de location conclu avec la société Locam du fait de son interdépendance avec le contrat conclu avec la société Axecible, lequel serait nul du fait de l’irrespect des dispositions des articles L. 221-5, 2° et L. 221-9 du code de la consommation, comme évoqué précédemment.

Par conséquent, elle sollicite la restitution des loyers versés, diverses indemnités et la condamnation des intimées aux dépens et au remboursement des frais irrépétibles.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 29 août 2023, la Sas Locam, intimée et appelante incidente, demande à la cour, au visa des articles 1103, 1104, 1130 et 1137 du code civil, et des articles L. 221-2-4° et L. 221-3 du code de la consommation, de :

– débouter Mme [P] [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 18 novembre 2022, en ce qu’il a :

* rejeté la demande de Mme [P] [C] de nullité du contrat d’abonnement et de location de solutions internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [P] [C] le 12 juin 2018 et celle portant sur la nullité du contrat de location de site web du 12 juin 2018 entre la société Locam et Mme [P] [C] sur le fondement du sol et sur le fondement des dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement,

* rejeté la demande subsidiaire de Mme [P] [C] de nullité de la clause de l’article 1 alinéa 2 du contrat d’abonnement et de location de site internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [P] [C] le 12 juin 2018,

* condamné Mme [P] [C] à payer à la société Locam, la somme de 12 895,86 euros,

* condamné Mme [P] [C] à payer à la société Locam la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné Mme [P] [C] aux dépens de l’instance,

– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse qui a dit que les dispositions du code de la consommation avaient vocation à s’appliquer en l’espèce,

Statuant à nouveau du chef du jugement infirmé,

– ‘dire et juger’ que les dispositions du code de la consommation n’ont pas vocation à s’appliquer en l’espèce,

En conséquence,

– débouter Mme [P] [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– condamner Mme [P] [C] à payer à la société Locam la somme de 12 895,86 euros,

À titre subsidiaire,

– débouter Mme [P] [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 18 novembre 2022 en toutes ses dispositions,

À titre infiniment subsidiaire, pour le cas où la cour réformerait le jugement rendu et retiendrait la caducité du contrat,

– condamner Mme [P] [C] à payer à la société Locam la somme de 10 681,12 euros correspondant à la facture acquittée par la société Locam au bénéfice de la société Axecibles,

En tout état de cause,

– condamner Mme [P] [C] aux entiers dépens,

– condamner Mme [P] [C] à payer à la société Locam la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La Sas Locam fait valoir que l’appelante procède par allégations concernant le dol qui aurait vicié son consentement et n’établit pas la réunion des conditions exigées pour retenir ce vice. Elle avance à cet égard que la signature figurant sur l’acte est bien celle de Mme [P] [C], qu’il est établi que cette dernière avait parfaitement connaissance des mensualités qui avaient été régulièrement prélevées d’août 2018 à avril 2019 et qu’il est indifférent qu’une procédure pénale à l’encontre de la société Locam, ayant au demeurant abouti en première instance à la relaxe des prévenus, soit pendante.

Elle fait valoir que le contrat porte sur ‘des services financiers’ et échapperait donc à aux dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement, en application de l’article L. 221-2, 4° du même code.

Elle avance que Mme [P] [C] ne saurait bénéficier de l’extension au professionnel des dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement, à défaut pour elle de remplir les conditions posées par l’article L. 221-3 du même code. Elle soutient à cet égard que le contrat entre dans le champ de l’activité principale de la professionnelle sollicitée, ce d’autant plus qu’il était expressément stipulé au contrat que celui-ci était en rapport direct avec l’activité professionnelle de Mme [P] [C].

La Sas Locam s’associe à l’argumentation de la Sas Axecibles quant aux dérogations prévues par l’article ‘L. 121-21-8″ du code de la consommation et sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a jugé que les conditions prévues à l’article ‘L. 221-8, 13°’ du même code étaient réunies.

Elle avance que Mme [P] [C] ne pouvait se prévaloir des dispositions du code de la consommation et qu’en outre ce code ne sanctionne pas par la nullité les manquements aux obligations légales d’information mais par la prorogation du délai de rétractation pour une durée de douze mois.

En tout état de cause, si le contrat venait à être annulé, les restitutions qui en découleraient imposeraient à Mme [P] [C] de rembourser à la Sas Locam les sommes que cette dernière a versées à la Sas Axecibles. Elle soutient également, qu’en toute hypothèse, Mme [P] [C] sera condamnée au remboursement de cette somme, dès lors que, en application de l’article 18-4 des conditions générales du contrat, en cas de résiliation du contrat entre le loueur et le fournisseur, la locataire est tenue de verser au loueur une indemnité égale au montant des sommes versées par le loueur au fournisseur.

Elle s’oppose à la demande de restitution des loyers, faisant valoir qu’elle serait dépourvue de fondement juridique et qu’elle a pleinement exécuté ses obligations contractuelles.

Elle s’oppose également aux demandes indemnitaires formulées par Mme [P] [C], arguant de l’absence de preuve des préjudices subis et du respect des obligations contractuelles lui incombant.

Enfin, elle s’oppose à la demande d’octroi de délais de paiement de Mme [P] [C] en l’absence de pièce justificative de sa situation financière. Subsidiairement, elle sollicite que, si des délais étaient accordés, la dette soit divisée en douze mensualités égales et qu’il soit prévu une clause de déchéance du terme indiquant que, en cas de non-paiement d’une seule des échances, la totalité des sommes restant dues redeviendrait immédiatement exigible.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 26 juillet 2023, la Sas Axecibles, intimée, demande à la cour, au visa de l’article 9 du code de procédure civile, de :

– juger la société Axecibles recevable et bien fondée en ses écritures,

Et y faisant droit,

– déclarer Mme [P] [C] irrecevable et mal fondée en ses demandes formées à l’encontre de la société Axecibles et l’en débouter,

En tout état de cause,

– confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse en toutes ses dispositions et notamment en ce qu’il a :

* rejeté la demande de Mme [P] [C] de nullité du contrat d’abonnement et de location de solution internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [P] [C] le 12 juin 2018 et celle portant sur la nullité du contrat de location de site web le 12 juin 2018 entre la Sas Locam et Mme [P] [C] sur le fondement du dol,

* rejeté la demande de Mme [P] [C] de nullité du contrat d’abonnement et de location de solution internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [P] [C] le 12 juin 2018 et celle portant sur la nullité du contrat de location de site web le 12 juin 2018 entre la Sas Locam et Mme [P] [C] sur le fondement des dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement,

* rejeté la demande subsidiaire de Madame [P] [C] de nullité de la clause de l’article 1er alinéa 2 du contrat d’abonnement et de location de site internet conclu entre la Sas Axecibles et Mme [P] [C] le 12 juin 2018,

* condamné Mme [P] [C] à payer à la Sas Locam la somme de 12 895,86 euros,

* condamné Mme [P] [C] à payer à la Sas Axecibles la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné Mme [P] [C] aux dépens de l’instance,

Et y ajoutant,

– condamner Mme [P] [C] à verser à la société Axecibles la somme 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [P] [C] aux entiers dépens.

La Sas Axecibles fait valoir que l’annulation du contrat pour dol suppose que celui-ci soit prouvé par Mme [P] [C], qu’il est inopérant à cet égard qu’une procédure pénale soit pendante à l’encontre de la Sas Axecibles devant une autre juridiction et que Mme [P] [C] ne saurait prétendre ne pas avoir signé les contrats litigieux dès lors qu’elle a signé postérieurement les procès-verbaux de livraison, les mandats de prélèvement, reçu les lettres de la Sas Locam et réglé les premières échéances sans contestation.

Elle fait valoir qu’elle a parfaitement exécuté ses obligations tenant à la création d’un site internet et le référencement, tout en soulignant que Mme [P] [C] ne formule aucune critique sur l’exécution de ces obligations.

Elle fait valoir que le code de la consommation serait inapplicable en l’espèce. Elle soutient, d’une part, que le contrat entrait dans le champ principal d’activité de Mme [P] [C], dès lors qu’il avait un rapport direct avec l’activité de cette dernière, soulignant en outre que Mme [P] [C] ne démontre pas ne pas employer cinq salariés ou moins. Elle avance, d’autre part, que, en tout état de cause, les dérogations au droit de rétractation prévues par l’article ‘L. 121-21-8, 1°, 3° et 13°’, du code de la consommation seraient applicables.

La Sas Axecibles conclut enfin au rejet des demandes indemnitaires formées par Mme [P] [C].

L’ordonnance de clôture est intervenue le 8 octobre 2024. L’affaire a été examinée à l’audience du mardi 18 novembre 2024 à 14h00.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement, publiquement, en dernier ressort et dans la limite de sa saisine :

Confirme le jugement rendu le 18 novembre 2022 par le tribunal judiciaire de Toulouse en ses dispositions soumises à la cour.

Y ajoutant,

Rejette la demande de Mme [P] [C] de voir condamner in solidum la Sas Locam et la Sas Axecible à lui payer des sommes en remboursement des échéances versées, pour résistance abusive et à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral.

Condamne Mme [P] [C] aux dépens d’appel.

Condamne Mme [P] [C] au paiement de la somme de 3 000 euros à la Sas Locam sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne Mme [P] [C] au paiement de la somme de 3 000 euros à la Sas Axecibles sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La greffière Le président

M. POZZOBON M. DEFIX

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