Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion
Thématique : Hypothèques et créances : clarifications sur la mainlevée et l’exécution des obligations contractuelles.
→ RésuméUn acheteur a assigné une société de construction devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis pour obtenir la mainlevée d’hypothèques sur son immeuble et demander des dommages-intérêts pour préjudice moral et trouble de jouissance. Par jugement du 23 novembre 2021, le tribunal a déclaré la dette de l’acheteur envers la société éteinte, ordonné la mainlevée des hypothèques, mais a débouté l’acheteur de ses demandes de dommages-intérêts. La société a interjeté appel de cette décision.
La cour a ensuite ordonné des éclaircissements sur la compétence du tribunal et la nature des hypothèques. Dans ses conclusions, la société a demandé l’annulation du jugement, arguant que la demande de mainlevée était irrecevable et que sa créance n’était pas éteinte. L’acheteur, de son côté, a demandé la confirmation du jugement initial, tout en sollicitant des dommages-intérêts. La cour a examiné la validité des hypothèques, notant que l’hypothèque conventionnelle était périmée et que l’hypothèque judiciaire était fondée sur un jugement antérieur. Elle a conclu que la société ne pouvait pas revendiquer la créance, car l’acheteur avait réglé la somme due selon un protocole d’accord. La cour a confirmé le jugement du tribunal de première instance, ordonnant la mainlevée de l’hypothèque judiciaire et rejetant les demandes de la société. Concernant les demandes indemnitaires de l’acheteur, la cour a estimé que la société n’avait pas agi de manière fautive en maintenant les hypothèques, et que l’acheteur n’avait pas prouvé un trouble de jouissance. En conséquence, la cour a confirmé le jugement initial, rejeté les demandes de frais irrépétibles et condamné la société aux dépens. |
Arrêt N°2025/110
PF
N° RG 22/00022 – N° Portalis DBWB-V-B7G-FUZE
S.A.R.L. DLC CONSTRUCTION
C/
[I]
RG 1ERE INSTANCE : 20/02470
COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS
ARRÊT DU 04 AVRIL 2025
Chambre civile TGI
Appel d’une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS en date du 23 NOVEMBRE 2021 RG n° 20/02470 suivant déclaration d’appel en date du 11 JANVIER 2022
APPELANTE :
S.A.R.L. DLC CONSTRUCTION
[Adresse 6]
[Localité 9]
Représentant : Me Olivier NICOLAS de la SELARL DUCASSE NICOLAS SICET, Plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX – Représentant : Me Henri BOITARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIME :
Monsieur [S] [D] [I]
[Adresse 7]
[Localité 8]
Représentant : Me Guillaume jean hyppo DE GERY de la SELARL GERY-SCHAEPMAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION – Représentant : Me Thomas MUNHOZ, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
CLOTURE LE : 27 juin 2024
DÉBATS : En application des dispositions de l’article 785 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 13 Décembre 2024 devant la cour composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, conseillère
Conseiller : Madame Sophie PIEDAGNEL, conseillère
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l’issue des débats, le président a indiqué que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 04 Avril 2025.
Greffier lors des débats : Sarah HAFEJEE
ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 04 Avril 2025.
* * *
LA COUR
Suivant acte d’huissier du 7 octobre 2020, M. [I] a assigné la SARL DLC Construction devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis aux fins de mainlevée des hypothèques judiciaires et conventionnelles prises par celle-ci sur son immeuble sis à Sainte Suzanne, cadastré AB [Cadastre 4] (anciennement AB [Cadastre 4]) et condamnation de la défenderesse à l’indemniser de son préjudice moral et préjudice né d’un trouble de jouissance, outre frais irrépetibles et dépens.
Par jugement en date du 23 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Denis a statué comme suit:
– Juge que la dette M. [I] [S] [D] envers la SARL DLC issue du jugement du 25 septembre 2012 (RG 11/01671) du tribunal de grande instance de Saint-Denis est éteinte,
– Ordonne la mainlevée des hypothèques judiciaires et conventionnelles détenues par la société DLC en vertu de ce jugement et de l’acte notarié du 9 avril 2015 sur les biens de M. [I] [S] [D] et en particulier sur la parcelle sise à [Localité 11] cadastrée AB [Cadastre 4],
– Déboute M. [I] [S] [D] de ses demandes de dommages et intérêts,
– Déboute la SARL DLC de sa demande reconventionnelle en paiement sous astreinte,
– Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision,
– Condamne la SARL DLC à payer à M. [I] [S] [D] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamne la SARL DLC aux entiers dépens de l’instance qui comprendront également les frais de main levée d’hypothèques.
Par déclaration au greffe de la cour du 11 janvier 2022, la SARL DLC Construction a formé appel du jugement.
Par arrêt avant dire droit du 15 février 2024, la cour a ordonné la révocation de l’ordonnance de clôture et interrogé les parties :
. Sur le pouvoir du tribunal judiciaire pour connaitre de la demande en radiation de l’hypothèque judiciaire et sur la possibilité pour la cour de statuer ou non sur la demande;
. Sur la portée de la demande de radiation de l’hypothèque conventionnelle eu égard à la date d’expiration de l’inscription;
. Sur les causes de l’hypothèque conventionnelle et son lien avec l’exécution du jugement du 25 septembre 2012;
. Sur l’interprétation à donner à l’usage du conditionnel dans la clause de l’avenant au protocole du 9 avril 2015 stipulant « A défaut d’exécution de l’intégralité du présent avenant au 31 décembre 2015, la SARL DLC CONSTRUCTION retrouverait sa liberté d’agir en exécution forcée des décisions précitées pour le solde de sa créance à l’égard de Messieurs [D] [I] et [Y] [I] » ;
Aux termes de ses dernières conclusions d’appelante déposées le 10 avril 2024, la SARL DLC Construction demande à la cour de :
– Annuler le jugement entrepris en ce que le Tribunal judiciaire de Saint-Denis s’est déclaré compétent pour statuer sur les demandes de mainlevée des hypothèques,
– Constater l’irrecevabilité des demandes de mainlevée des hypothèques en ce qu’elles sont portées devant une juridiction matériellement incompétente,
En conséquence,
– Rejeter les demandes de mainlevées d’hypothèque et renvoyer M. [S] [D] [I] à mieux se pourvoir,
– Infirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Saint-Denis du 23 novembre 2021 en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
– Juger que sa créance à l’égard de M. [S] [D] [I] n’est pas éteinte ;
– Juger qu’elle est fondée à maintenir les hypothèques judiciaire et conventionnelle inscrites sur la parcelle de terrain appartenant à M. [D] [I] cadastrée AB n° [Cadastre 4] ;
– Débouter M. [S] [D] [I] de l’intégralité de ses demandes ;
– Condamner M. [S] [D] [I] au paiement de la somme de 252.019, 17 ‘ arrêté au 25 janvier 2018 outre intérêts, sous astreinte de 1.000 ‘ par jour de retard à compter du trentième jour suivant la signification de la décision à intervenir ;
– Se réserver la liquidation de l’astreinte ;
– Condamner M. [S] [D] [I] à lui verser la somme de 10.000 ‘ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile;
– Condamner M. [S] [D] [I] aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions d’intimé et d’appelant à titre incident déposées le 10 février 2023, M. [S] [D] [I] demande à la cour de :
– Débouter la SARL DLC Construction de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;
Sur la dette et sur la mainlevée des hypothèques :
A titre principal,
– Confirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Saint-Denis le 23 novembre 2021 (RG 20/02470) sauf en ce qu’il a rejeté sa demande indemnitaire;
A titre subsidiaire,
– Déclarer que la SARL DLC Construction a reçu et encaissé toutes les sommes qu’il a versées et que ce n’est que bien après qu’elle s’est manifestée pour solliciter le recouvrement intégral de sa créance,
– Déclarer que la SARL DLC Construction invoque abusivement la clause de l’avenant au protocole d’accord du 9 avril 2015 lui permettant de retrouver sa liberté d’agir en exécution forcée des décisions des 1er décembre 2011 et 25 septembre 2012,
– Écarter en conséquence les dispositions de la clause de l’avenant au protocole transactionnel du 9 avril 2015 permettant à la SARL DLC Construction de retrouver sa liberté d’agir en exécution forcée des décisions des 1er décembre 2011 et 25 septembre 2012,
– Déclarer que l’affectation hypothécaire sur la parcelle AB [Cadastre 1] située sur la Commune de [Localité 11] (devenue AB [Cadastre 4]) est désormais dénuée de cause,
– Déclarer sans cause et de nul effet, les hypothèques judiciaires et conventionnelles détenues par la SARL DLC sur ses biens,
– Ordonner la mainlevée immédiate des hypothèques judiciaires et conventionnelles sur le bien suivant : les droits sur un immeuble sis à [Localité 11] (nue-propriété) cadastré AB [Cadastre 1] (désormais AB [Cadastre 4]) ayant pour origine de propriété un acte de donation du 04 octobre 1998 de Me [F] publié le 30 novembre 1998,
Sur les demandes dommages et intérêts :
– Infirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Saint-Denis le 23 novembre 2021 (RG 20/02470) en ce qu’il l’a débouté de ses demandes de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau,
– Condamner la SARL DLC Construction au paiement de la somme 10.000,00 euros au titre de son préjudice moral;
– Condamner la SARL DLC Construction au paiement de la somme 10.000,00 euros au titre de son trouble de jouissance,
– Condamner la SARL DLC Construction à lui payer la somme de 5.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, ainsi que du coût de la déclaration de mainlevée à intervenir.
M. [S] [D] [I] a en outre déposé, le 10 avril 2024, des observations suite à l’arrêt avant-dire droit tendant à :
– dire que la cour ne peut soulever d’office l’absence de compétence du tribunal, au regard de l’application du second alinéa de l’article 76 du code de procédure civile;
– soutenir que si l’hypothèque conventionnelle en cause a cessé de produire ses effets au 31 décembre 2021, la demande de radiation garde son sens dès lors que la péremption de l’inscription n’inscrit pas l’hypothèque mais lui fait perdre son rang;
– exposer que l’usage du conditionnel dans la clause du protocole du 9 avril 2015 invoquée par l’appelante implique que le recouvrement de la créance n’était qu’une éventualité.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées, figurant au dossier de la procédure, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile.
La clôture a été prononcée par ordonnance du 27 juin 2024.
Une note en délibéré a été autorisée à l’audience du 13 décembre 2024 sur les hypothèques concernées par les demandes de mainlevée.
Par observations en cours de délibéré du 13 janvier 2025, la SARL DLC Construction a exposé que hormis l’hypothèque judiciaire susvisée, les autres hypothèques qu’elle a pu inscrire n’intéressent pas le débat puisque consistant en des hypothèques provisoires périmées ou d’une hypothèque conventionnelle reçue par notaire dans le cadre de la garantie du protocole litigieux. Elle indique reprendre l’exécution du jugement du 25 septembre 2012 à raison de la non-exécution du protocole de règlement et de l’avenant conclu avec M. [S] [D] [I].
Par message RPVA du 12 février 2025, la cour a sollicité les observations des parties, en cours de délibéré et sous quinzaine, sur la lecture des dispositions de l’article 2440 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, par l’arrêt Civ2, 19 octobre 2002, n° 98-22328 et ses incidences sur le premier point soulevé par la cour dans son arrêt avant dire droit.
Par message RPVA du 26 février 2025, M. [S] [D] [I] a fait observer que si le juge de l’exécution n’est pas compétent pour ordonner la mainlevée de l’Hypothèque, cette compétence relève du tribunal.
La SARL DLC n’a pas formé d’observations en réponse.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par décision contradictoire, en matière civile et en dernier ressort, mis à disposition au greffe, conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
– Confirme le jugement entrepris;
Y ajoutant,
– Dit n’y avoir lieu à frais irrépétibles;
– Condamne la SARL DLC Construction aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par monsieur Patrick CHEVRIER, président de chambre, et par madame Sarah HAFEJEE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
Signé
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