Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Riom
Thématique : Renvoi et dessaisissement suite à une requalification contractuelle
→ RésuméL’affaire concerne un litige entre un preneur et une bailleur relatif à une convention pluriannuelle d’exploitation de surfaces agricoles. Par acte d’huissier de justice en date du 28 juin 2018, la bailleur a délivré un congé au preneur, mettant fin à la convention à compter du 1er janvier 2020, conformément aux termes du contrat signé en janvier 2012. Le preneur a contesté ce congé devant le tribunal paritaire des baux ruraux d’Aurillac, demandant la requalification de la convention en bail rural.
Le tribunal, par jugement du 18 mars 2021, a déclaré irrecevable la demande de requalification et a ordonné au preneur de libérer les parcelles concernées sous astreinte. Il a également condamné le preneur à verser une indemnité d’occupation à la bailleur et a débouté sa demande de dommages-intérêts. Ce jugement a été partiellement confirmé par la cour d’appel de Riom le 24 mai 2022, qui a cependant requalifié la convention en bail rural et annulé le congé. Suite à un pourvoi formé par la bailleur, la Cour de cassation a rendu un arrêt le 28 mars 2024, cassant l’arrêt de la cour d’appel sauf en ce qui concerne le rejet de la demande de dommages-intérêts. L’affaire a été renvoyée devant la cour d’appel de Limoges pour un nouvel examen. En attendant, l’expert judiciaire désigné a déposé son rapport en octobre 2023, et des décisions concernant la rémunération de l’expert ont été prises en novembre 2023. La cour d’appel de Riom a été informée qu’elle était dessaisie de l’affaire suite à l’arrêt de la Cour de cassation, confirmant ainsi le renvoi de l’affaire à la cour d’appel de Limoges pour une nouvelle audience. |
COUR D’APPEL
DE [Localité 14]
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 25 mars 2025
N° RG 21/00806 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FSMT
-LB- Arrêt n°
[S] [U] / [W] [Y]
Jugement au fond, origine Tribunal paritaire des baux ruraux d’AURILLAC, décision attaquée en date du 18 Mars 2021, enregistrée sous le n° 51-19-000013
Arrêt rendu le MARDI VINGT CINQ MARS DEUX MILLE VINGT CINQ
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
En présence de :
Mme Céline DHOME, greffier lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
M. [S] [U]
[Adresse 8]
[Localité 3]
Assisté de Maître Jean antoine MOINS de la SCP MOINS, avocat au barreau D’AURILLAC
APPELANT
ET :
Mme [W] [Y]
[Adresse 12]
[Localité 4]
Assistée de Maître Frédéric DELAHAYE, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND
INTIMEE
DÉBATS : A l’audience publique du 20 janvier 2025
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 25 mars 2025, après prorogé du délibéré initiallement prévu le 18 mars 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme DHOME, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par acte d’huissier de justice signifié le 28 juin 2018, Mme [W] [Y] a fait délivrer à M. [S] [U] un congé concernant une convention pluriannuelle d’exploitation relative à un ensemble de surfaces agricoles, situé au lieu-dit [Localité 9], sur le territoire de la commune de [Localité 15] (Cantal), ce à effet au 1er janvier 2020, date correspondant au terme de huit années prévu au contrat signé le 13 janvier 2012 entre M. [S] [U] et les auteurs de Mme [W] [Y].
Par jugement rendu le 18 mars 2021, le tribunal paritaire des baux ruraux d’Aurillac, saisi par M. [S] [U] d’une contestation de ce congé et d’une demande de requalification de la convention pluriannuelle d’exploitation en bail rural, a :
– déclaré irrecevable la demande formée par M. [U] aux fins de requalification de cette convention pluriannuelle d’exploitation en bail rural ;
– condamné M. [S] [U] et tous occupants de son chef à libérer les parcelles ZI-27, ZK-11 et [Cadastre 17] dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision et sous astreinte de 100 € par jour de retard à l’expiration de ce délai, l’astreinte ne pouvant courir que pendant un délai de trois mois ;
– condamné M. [U] à payer à Mme [Y] une indemnité d’occupation équivalente à celle du loyer convenu entre les parties pour la période du 1er janvier 2020 à la date de libération effective des lieux et au prorata de la durée d’occupation ;
– débouté M. [U] de sa demande de dommages-intérêts ;
– condamné M. [U] à payer à Mme [Y] une indemnité de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté M. [U] de sa demande formée au titre des frais irrépétibles ;
– rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire ;
– condamné M. [U] aux entiers dépens de l’instance.
Par arrêt rendu le 24 mai 2022, la cour d’appel de Riom a statué en ces termes :
« CONFIRME le jugement n° RG/51-19-000013 rendu le 18 mars 2021 par le tribunal paritaire des baux ruraux d’Aurillac dans l’instance opposant M. [S] [U] à Mme [W] [Y] en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts formée par M.[S] [U] à l’encontre de Mme [W] [Y].
INFIRME ce même jugement en toutes ses autres dispositions.
Statuant à nouveau,
DÉCLARE RECEVABLE la demande formée par M. [S] [U] à l’encontre de Mme [W] [Y] aux fins de requalification en bail rural de la convention pluriannuelle d’exploitation ci-après mentionnée.
REQUALIFIE en bail rural la convention pluriannuelle d’exploitation conclue le 13 janvier 2012 à compter du 2 janvier 2012 par M. [E] [J] et Mme [A] [J] en qualité de bailleurs, aux droits desquels se trouve actuellement Mme [W] [Y], et M. [S] [U] en qualité de preneur, sur les parcelles rurales cadastrées section ZI numéro [Cadastre 5] lieu-dit [Localité 10] (à l’exception d’une superficie de 2 hectares prise sur cette parcelle), section ZK numéro [Cadastre 1] lieu-dit [Localité 13] et section [Cadastre 16] numéro [Cadastre 6] lieu-dit [Localité 11], situées sur le territoire de la commune de [Localité 15] (Cantal).
ANNULE le congé délivré par Mme [W] [Y] à l’encontre de M. [S] [U] par acte d’huissier de justice signifié le 28 juin 2018.
CONSTATE que le bail rural ainsi requalifié est renouvelé à compter du 2 janvier 2021.
SURSOIT À STATUER sur le montant du loyer du bail rural ainsi renouvelé à compter du 2 janvier 2021.
FIXE à la somme de 2.608,00 € par an le montant du loyer provisoire afférent au bail rural ainsi renouvelé à compter du 2 janvier 2021.
AVANT DIRE DROIT, ORDONNE une mesure d’expertise judiciaire d’estimation de la valeur locative des trois parcelles de terre susmentionnées ZI-27 (en rappelant que de cette parcelle, 2 hectares sont exclus du bail), ZK-11 et ZO-43 faisant l’objet du bail ainsi renouvelé à compter du 2 janvier 2021, la mission comportant notamment l’obligation de prendre connaissance du dossier de chaque partie, d’effectuer une visite contradictoire des lieux en présence des parties et de leurs conseils juridiques ou techniques ou ceux-ci dûment convoqués et de tenir compte par ailleurs de l’arrêté préfectoral applicable à la date du 2 janvier 2021 en matière de fixation des valeurs locatives des terres agricoles du Cantal.
DÉSIGNE en qualité d’expert judiciaire :
Mme [F] [G]
[Adresse 2]
06.26.63.64.86
[Courriel 7]
DIT que l’expert judiciaire commis devra avoir diffusé un pré-rapport de ses opérations avant le 30 septembre 2022, sur la base duquel les parties ou leurs conseils pourront lui présenter des dires et observations auxquels il devra être répondu de manière motivée, et devra déposer son rapport définitif avant le 31 octobre 2022.
ORDONNE à M. [S] [U] de consigner au service de la régie de la cour d’appel de Riom la somme de 1.500 € avant le 7 juin 2022, à titre de provision à valoir sur la rémunération et le défraiement de l’expert judiciaire commis.
ORDONNE le renvoi de cette affaire à l’audience civile collégiale du 12 décembre 2022 à 14h00.
CONDAMNE Mme [W] [Y] à payer au profit de M. [S] [U] une indemnité de 3.000 € en dédommagement de ses frais irrépétibles prévus à l’article 700 du code de procédure civile.
REJETTE le surplus des demandes des parties.
RÉSERVE les dépens de l’instance. »
Mme [W] [Y] a formé un pourvoi contre l’arrêt rendu le 24 mars 2022 (à une date qui ne ressort pas des pièces communiquées à la cour).
Mme [F] [G], expert désigné par cette décision, a déposé son rapport le 25 octobre 2023.
Par ordonnance du 13 novembre 2023, le magistrat chargé du suivi de la mesure d’expertise a statué en ces termes :
« -Taxons définitivement la rémunération de l’expert à la somme de 1824 (mille huit cent vingt-quatre euros) TVA incluse ;
-Autorisons la régie d’avances et de recettes à régler à l’expert la somme consignée, soit 1500 (mille cinq cents euros) ;
-La consignation initiale étant insuffisante, disons que M. [S] [U] versera directement à Mme [F] [G] la somme complémentaire de 324 € (trois cent vingt-quatre euros) ;
-Disons qu’en cas de non paiement, le présent titre sera exécutoire ».
Par arrêt du 28 mars 2024, la Cour de cassation, sur le pourvoi formé par Mme [Y], a statué en ces termes, au visa de l’article 2224 du code civil, :
« CASSE et ANNULE, sauf en ce qu’il rejette la demande de dommages-intérêts formée par M.[U], l’arrêt rendu le 24 mars 2022 entre les parties, par la cour d’appel de Riom ;
Remet, sauf sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Limoges ;
Condamne M.[U] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M.[U] et le condamne à payer à Mme [Y] la somme de 3000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ; »
Mme [Y] a fait signifier cet arrêt à M.[U] par acte du 14 juin 2024, ouvrant un délai expirant le 15 août 2024 pour la saisine de la cour de renvoi.
Par courriel du 8 octobre 2024, le greffe de la cour d’appel de Limoges a indiqué au conseil de Mme [Y], sur demande de celui-ci, que la cour n’avait fait l’objet d’aucune saisine suite à l’arrêt de la Cour de cassation du 28 mars 2024.
L’affaire pendante devant la cour d’appel de Riom a été fixée à l’audience collégiale du 20 janvier 2025. À cette audience, les parties ont demandé à la cour de constater qu’elle avait été dessaisie du dossier suite à l’arrêt de la Cour de cassation du 28 mars 2024 ayant cassé l’arrêt du 24 mai 2022 et ordonné le renvoi devant la cour d’appel de Limoges.
Sur quoi,
Vu l’article L. 431-4 du code de l’organisation judiciaire et l’article 631 du code de procédure civile :
Il résulte de ces textes que la cassation d’une décision, prononcée avec renvoi, entraîne le dessaisissement de plein droit du juge dont la décision a été cassée et investit exclusivement le juge de renvoi de la connaissance de l’affaire. [Cf. notamment Cass. 2e civ.,16 mai 2024 , pourvoi n° 22-22.543].
Il convient en conséquence de constater que la cour est dessaisie de l’affaire par suite de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 28 mars 2024.
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