Cour d’appel de Rennes, 4 mars 2025, RG n° 24/01083
Cour d’appel de Rennes, 4 mars 2025, RG n° 24/01083

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Rennes

Thématique : Conflit commercial sur des facturations indûment perçues et prescription des demandes.

Résumé

La société spécialisée dans la vente en gros de fleurs et de plantes a souscrit des contrats avec un opérateur de télécommunications en 2013 et 2015. Suite à la fermeture de plusieurs sites, elle a demandé le transfert de certaines lignes vers de nouveaux emplacements. Cependant, l’opérateur a continué à prélever des montants pour des abonnements résiliés. Après plusieurs échanges, l’opérateur a reconnu des dysfonctionnements et a proposé un geste commercial de 16 866,50 euros. La société a alors demandé le paiement de cette somme et la résiliation de lignes supplémentaires.

Face à l’absence de règlement, la société a mis en demeure l’opérateur, puis a émis une facture pour le montant reconnu. Ne parvenant pas à un accord, elle a saisi le tribunal de commerce de Paris pour obtenir le paiement. Le tribunal a ordonné le paiement d’une somme réduite de 6 702,50 euros, tout en déboutant la société de ses autres demandes. L’opérateur a formé opposition, mais le tribunal a confirmé sa décision.

Par la suite, la société a contesté d’autres facturations qu’elle considérait indues, s’élevant à 29 044,80 euros, et a assigné l’opérateur devant le tribunal de commerce de Nantes. Ce dernier a jugé l’action prescrite, déboutant la société de sa demande principale tout en condamnant l’opérateur à verser des dommages et intérêts pour résistance abusive. La société a fait appel, demandant l’infirmation du jugement sur la base de la non-prescription de sa demande.

Le tribunal a confirmé la prescription de la demande de répétition de l’indu, tout en rejetant les autres demandes de la société. La cour a également condamné la société à payer des frais à l’opérateur, tout en rejetant les demandes supplémentaires des deux parties.

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N° 79

N° RG 24/01083 – N° Portalis DBVL-V-B7I-URJJ

(Réf 1ère instance : 2022004141)

S.A.R.L. FLEURAMETZ FRANCE

C/

S.A. ORANGE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me CLUZEAU

Me RANCHERE

Copie délivrée le :

à :

TC Nantes

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 MARS 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Sophie RAMIN, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Julie ROUET, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 Décembre 2024 devant Madame Fabienne CLEMENT, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 04 Mars 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

S.A.R.L. FLEURAMETZ FRANCE inscrite au RCS de Nantes sous le numéro 788 428 068 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Simon CLUZEAU de la SELAS AGN AVOCATS NANTES, Postulant/Plaidant, avocat au barreau de NANTES substitué par Me Jérôme BAZELOT, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE :

S.A. ORANGE inscrite au registre de commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 380 129 866, prise en la personne de ses  représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me François RANCHERE, Postulant, de la SARL BERTHELOT RANCHERE AVOCATS, avocat au barreau de RENNES,

Représentée par Me Marie-Gabrielle BAILLET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

FAITS

La société FLEURAMETZ FRANCE est spécialisée dans la vente en gros de fleurs et de plantes.

Elle a souscrit auprès de la société ORANGE un contrat professionnel en août 2013 et un contrat Business Internet Office BTelu en septembre 2015.

A la suite de la fermeture de plusieurs de ses sites, notamment ceux de [Localité 6] et de [Localité 7] la société FLEURAMETZ a souhaité transférer certaines lignes sur de nouveaux sites.

Malgré le transfert de lignes par la société ORANGE la société FLEURAMETZ FRANCE a reproché à cette dernière de poursuivre des prélèvements relatifs aux abonnements résiliés.

A la suite d’échanges des 6 juin et 5 juillet 2018, la société ORANGE a reconnu des dysfonctionnements et a proposé de faire un geste commercial suite aux résiliations rétroactives pour un montant de 16 866, 50 euros en proposant une nouvelle offre commerciale.

Par courriel du 28 août 2018, la société FLEURAMETZ FRANCE a sollicité le paiement de la somme de 16.866,5 euros ainsi que la résiliation de 39 lignes mobiles supplémentaires.

A défaut de réglement par la société ORANGE, la société FLEURAMETZ FRANCE l’a mise en demeure de régler cette somme par courrier 19 octobre 2018.

Devant l’absence de paiement la société FLEURAMETZ FRANCE a émis une facture pour la somme de 16.866,5 euros le 31 décembre 2018 considérant que la société ORANGE avait reconnu sa dette.

Les parties n’ont pas trouvé d’accord.

La société FLEURAMETZ FRANCE a saisi le président du tribunal de commerce de Paris en injonction de payer le 21 mars 2019 pour obtenir le règlement de la somme de 16.866,5 euros

Par ordonnance du 29 mars 2019 le président du tribunal de commerce de Paris a fait droit à cette demande pour la somme en principal de 16 866, 50 euros.

La société ORANGE a formé opposition par acte du 16 mai 2019.

Par jugement du 2 décembre 2020, le tribunal de commerce de Paris a :

– Dit la SA ORANGE recevable en son opposition mais mal fondée,

-Condamné la SA ORANGE au paiement de la somme de 6.702,50 euros à la SARL FLEURAMETZ FRANCE, avec intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2018, et l’en a débouté pour le surplus,

– Pris acte de la renonciation de la SARL FLEURAMETZ FRANCE à réclamer la somme de 14.280 euros à la SA ORANGE,

– Débouté la SARL FLEURAMETZ FRANCE de sa demande de dommages intérêts à l’encontre de la SA ORANGE,

– Condamné la SA ORANGE à payer à la SARL FLEURAMETZ FRANCE la somme de 1.000 euros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et l’en a débouté pour le surplus,

– Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples et contraires,

– Ordonné l’exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et sans caution,

– Condamné la SA ORANGE aux dépens de la présente instance dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 95,28 euros dont 15,67 euros de TVA.

Dans le même temps la société FLEURAMETZ FRANCE indique avoir également sollicité la résiliation de toutes les lignes (mail du 7 septembre 2018) puis des lignes de l’offre BteLU ( mail du 5 avril 2019).

Elle affirme que la société ORANGE a procédé à la résiliation des lignes, mais a continué à la facturer.

Le 11 janvier 2021 la société ORANGE a émis une facture d’avoir pour un montant de 25 659,54 euros.

La société FLEURAMETZ FRANCE considère que les lignes résiliées à la suite de ses demandes des 7 septembre 2018 et 5 avril 2019, ont été indûment facturées du 7 septembre 2018 au 31 janvier 2019 pour un montant de 29.044,80 euros.

La société FLEURAMETZ FRANCE a fait assigner la société ORANGE devant le tribunal de commerce de Nantes par acte du 14 juin 2022 aux fins d’obtenir à titre principal la somme de 29.044,80 euros au titre de la répétition de l’indu et à titre subsidiaire la même somme à titre de dommages et intérêts pour manquement aux obligations contractuelles de la société ORANGE.

Par jugement du 11 décembre 2023 le tribunal de commerce de Nantes a :

– Jugé 1’action de Fleurametz prescrite,

En conséquence,

– Débouté la société Fleurametz de sa demande de faire condamner la société Orange à lui payer la somme de 29 044,30 euros au titre de la répétition de l’indu,

– Débouté la société Fleurametz de sa demande de faire payer à la société Orange la somme de 29 044,30 euros au titre de la réparation du préjudice subi,

– Condamné la société Orange à payer à la société Fleurametz la somme de 3000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive,

– Jugé qu’il n’y à pas lieu d’appliquer l’artic1e 700 du code de procédure civile,

– Ordonné l’exécution provisoire au titre de l’article 514 du code de procédure civile,

– Condamné la société FLEURAMETZ FRANCE et la société ORANGE en tous les dépens, chacune pour moitié, dont frais de Greffe liquidés 3 69,59 euros toutes taxes comprises.

La société FLEURAMETZ a fait appel du jugement le 22 février 2024.

L’ordonnance de clôture est en date du 5 décembre 2024.

La cour s’est interrogée sur la question de savoir si, du moins pour partie, la demande de paiement formée par la société Fleurametz au titre de la répetition de paiement ne correspond pas à une demande de paiement de cette facture, avec les règles de prescription propres à ce type de demande.

Le 27 janvier 2025, les parties ont été invitées, pour le 7 février 2025 au plus tard, à faire valoir toutes observations sur ce point.

La société Orange a fait valoir ses observations par note du 6 février 2025.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses écritures notifiées le 22 mai 2024 la société FLEURAMETZ FRANCE demande à la cour au visa des articles 1104, 1302, 1302-1, 1240, 2224, 2240, 1217 et 1231 et suivants du code civil, L.34-2 du code des Poste et Communications Électroniques, 699 et 700 du code de procédure civile, de :

– Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :

– Jugé l’action de FLEURAMETZ prescrite ;

En conséquence,

– Débouté la société FLEURAMETZ de sa demande de faire condamner la société ORANGE à lui payer la somme de 29.044,30 euros au titre de la répétition de l’indu ;

– Débouté la société FLEURAMETZ de sa demande de faire payer à la société ORANGE la somme de 29.044,30 euros au titre de la réparation du préjudice subi ;

– Condamné la société ORANGE à payer à la société FLEURAMETZ la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

– Jugé qu’il n’y a pas lieu d’appliquer l’article 700 du Code de procédure civile.

Et statuant à nouveau :

A titre principal :

– Constater que la société ORANGE n’a effectué aucune prestation de communication électroniques sur les lignes dont il a été sollicité la résiliation par la société FLEURAMETZ mais qui ont été maintenues en facturation ;

– Constater que l’action de la société FLEURAMETZ n’est manifestement pas prescrite ;

– Condamner ORANGE à payer à FLEURAMETZ la somme de 29.044,30 euros TTC au titre de la répétition de l’indu ;

A titre subsidiaire :

– Constater que la société ORANGE a manqué à ses obligations contractuelles envers la société FLEURAMETZ ;

En conséquence,

– Condamner ORANGE à payer à FLEURAMETZ la somme de 29.044,30 euros TTC au titre de la réparation du préjudice subi en raison de l’inexécution contractuelle sur le fondement des articles 1217 et 1231 et suivants du code civil ;

En tout état de cause :

– Condamner ORANGE à payer à FLEURAMETZ la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat et résistance abusive ;

– Condamner ORANGE à payer FLEURAMETZ la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la même aux entiers dépens de l’instance.

Dans ses écritures notifiées le 12 juillet 2024 la société ORANGE demande à la cour au visa des articles 1118, 1353 du code civil, 9 du code de procédure civile et 34-2 CPCE et 122 du code de procédure civile de :

– Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nantes rendu le 11 décembre 2023 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a condamné la société ORANGE à payer à la société FLEURAMETZ la somme de 3 000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

– Infirmer le dispositif du jugement en ce qu’il a «condamné la société ORANGE à payer à la société FLEURAMETZ la somme de 3 000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive ».

En conséquence et à nouveau,

A titre principal,

-Juger l’action de la société FLEURAMETZ FRANCE prescrite pour toute demande en restitution du prix, en remboursement ou en indemnisation au titre des prestations facturées avant le 14 juin 2021 ;

– Déclarer irrecevable l’action de la société FLEURAMETZ FRANCE ;

En tant que de besoin et de plus fort,

– Constater la carence probatoire de la société FLEURAMETZ FRANCE ; – Constater que les demandes fins et prétentions de la société FLEURAMETZ FRANCE ne sont ni fondées ni justifiées ;

– Rejeter l’intégralité des demandes, fins et prétentions formées par la société FLEURAMETZ FRANCE ;

– Condamner la société FLEURAMETZ FRANCE à payer à la société ORANGE la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner la société FLEURAMETZ FRANCE aux entiers dépens.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.

PAR CES MOTIFS

La cour

Infirme le jugement en ce qu’il a :

– Débouté la société Fleurametz de sa demande de faire condamner la société Orange à lui payer la somme de 29 044,30 euros au titre de la répétition de l’indu,

– Condamné la société Orange à payer à la société Fleurametz la somme de 3000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive,

– Condamné la société FLEURAMETZ FRANCE et la société ORANGE en tous les dépens, chacune pour moitié, dont frais de Greffe liquidés 3 69,59 euros toutes taxes comprises,

Confirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

– Déclare irrecevable la demande de la société Fleurametz de condamnation de la société Orange à lui payer la somme de 29 044,30 euros au titre de la répétition de l’indu,

– Condamne la société FLEURAMETZ FRANCE à payer à la société ORANGE la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne la société FLEURAMETZ FRANCE aux dépens de première instance et d’appel,

– Rejette les autres demandes des parties.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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