Cour d’appel de Rennes, 26 mars 2025, RG n° 25/00200
Cour d’appel de Rennes, 26 mars 2025, RG n° 25/00200

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Rennes

Thématique : Prolongation de la rétention administrative : conditions et enjeux de l’ordre public.

Résumé

L’affaire concerne un individu de nationalité marocaine, désigné comme un étranger, qui a été placé en rétention administrative par le Préfet d’Ille-et-Vilaine. Ce dernier a notifié une obligation de quitter le territoire français à l’étranger le 1er décembre 2023, suivie d’une décision de placement en rétention le 10 janvier 2025, en raison de l’absence de documents d’identité valides et de liens suffisants en France. L’étranger avait un passé judiciaire chargé, avec plusieurs condamnations pour des faits de vol aggravé, de violence, et de détention de stupéfiants.

Le Préfet a demandé à plusieurs reprises des prolongations de la rétention administrative, qui ont été accordées par le tribunal judiciaire de Rennes à plusieurs reprises, jusqu’à une ordonnance rendue le 25 mars 2025, qui a refusé une nouvelle prolongation. En réponse, le Préfet a formé appel de cette décision, arguant que l’étranger continuait de représenter une menace pour l’ordre public en raison de ses antécédents judiciaires.

Lors de l’audience du 26 mars 2025, le représentant du Préfet a soutenu que les conditions pour une prolongation étaient remplies, citant les récents antécédents criminels de l’étranger. L’avocat de l’étranger a contesté cette demande, affirmant que les critères pour une prolongation exceptionnelle n’étaient pas réunis.

La Cour a finalement jugé que l’appel était recevable et a infirmé l’ordonnance du tribunal de Rennes, ordonnant la prolongation de la rétention administrative de l’étranger pour une période maximale de quinze jours. La décision a été motivée par la nécessité de prévenir une menace pour l’ordre public, compte tenu des récents comportements criminels de l’individu.

COUR D’APPEL DE RENNES

N° 25/125

N° RG 25/00200 – N° Portalis DBVL-V-B7J-VZWP

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Nous, Sébastien PLANTADE, conseiller à la cour d’appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Elodie CLOATRE, greffière,

Statuant sur l’appel formé le 25 Mars 2025 à 16 heures 44 par la PREFECTURE D’ILLE ET VILAINE concernant :

M. [Y] [H]

né le 22 Mai 1996 à [Localité 1] (MAROC)

de nationalité Marocaine

ayant pour avocat Me Omer GONULTAS, avocat au barreau de RENNES

d’une ordonnance rendue le 25 Mars 2025 à 14 heures 54 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a dit n’y avoir lieu à la prolongation de la rétention administrative de [Y] [H] ;

En présence de M. [F] [W] muni d’un pouvoir aux fins de représenter la PREFECTURE D’ILLE ET VILAINE, dûment convoquée,

En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur DELPERIE Yves, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 25 mars 2025 lequel a été mis à disposition des parties.

En l’absence de [Y] [H], représenté par Me Omer GONULTAS, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 26 Mars 2025 à 10 H 00 l’avocat de [Y] [H] et le représentant du préfet en leurs observations,

Avons mis l’affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :

Monsieur [Y] [H] a fait l’objet d’une obligation de quitter sans délai le territoire français, selon arrêté du préfet de l’Eure-et-Loir en date du 01er décembre 2023, notifié le 12 décembre 2023.

Le 10 janvier 2025, Monsieur [Y] [H] s’est vu notifier par le Préfet d’Ille-et-Vilaine une décision de placement en rétention administrative, au centre de rétention administrative (CRA) de [Localité 2] pour une durée de quatre jours. A l’appui de sa décision, le Préfet a considéré que l’intéressé ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque de fuite, en l’absence de document d’identité ou de voyage valide et de justification d’une domiciliation, retenu que l’intéressé déclarait être célibataire et père de deux enfants mineurs non à sa charge, ne démontrait pas avoir noué en France des liens dont l’intensité serait exclusive de tout autre qu’il conserverait encore dans son pays d’origine, ne faisait état d’aucun problème de santé et représentait une menace pour l’ordre public en lien avec trois condamnations prononcées à son encontre le 20 septembre 2021 à une peine de trois ans d’emprisonnement notamment pour des faits de vol aggravé et de violence sur personne dépositaire de l’autorité publique, le 15 avril 2024 à quatre mois d’emprisonnement pour détention non autorisée de stupéfiants et le 25 juin 2024 à six mois d’emprisonnement pour vol par effraction dans un local d’habitation ou un lieu d’entrepôt et tentative de vol par effraction dans un local d’habitation ou un lieu d’entrepôt en récidive.

Par requête motivée en date du 13 janvier 2025, reçue le 13 janvier 2025 à 15 h 14 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 26 jours de la rétention administrative de Monsieur [Y] [H].

Par ordonnance rendue le 14 janvier 2025, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [Y] [H] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 26 jours à compter du 13 janvier 2025. Cette décision a été confirmée par ordonnance de la Cour d’Appel de Rennes le 16 janvier 2025.

Par requête motivée en date du 07 février 2025, reçue le 07 février 2025 à 11h 06 au greffe du tribunal de Rennes, le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le magistrat du tribunal judiciaire de Rennes d’une nouvelle demande de prolongation pour une durée de 30 jours de la rétention administrative de Monsieur [Y] [H].

Par ordonnance rendue le 08 février 2025, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [Y] [H] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 30 jours. Cette décision a été confirmée par ordonnance de la Cour d’Appel de Rennes en date du 11 février 2025.

Par requête motivée en date du 09 mars 2025, reçue le 09 mars 2025 à 15h 57 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du Préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 15 jours de la rétention administrative de Monsieur [Y] [H].

Par ordonnance rendue le 10 mars 2025, le magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [Y] [H] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 15 jours. Cette décision a été confirmée par ordonnance de la Cour d’Appel de Rennes en date du 12 mars 2025.

Par requête motivée en date du 24 mars 2025, reçue le 24 mars 2025 à 10h 12 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 15 jours de la rétention administrative de Monsieur [Y] [H].

Par ordonnance rendue le 25 mars 2025, le magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Rennes n’a pas fait droit à la requête du Préfet et dit n’y avoir lieu à ordonner la prolongation du maintien de Monsieur [Y] [H] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 15 jours supplémentaires.

Cette ordonnance a été notifiée au Procureur de la République de Rennes le 25 mars 2025 à 15h 01.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 25 mars 2025 à 16h 44, le représentant du Préfet d’Ille-et-Vilaine a formé appel de cette ordonnance. L’appelant fait valoir, au soutien de sa demande d’infirmation de la décision entreprise, que les perspectives d’éloignement de l’intéressé existent, avec la réponse attendue des autorités libyennes saisies, et que Monsieur [H] continue de représenter une menace à l’ordre public comme en témoignent tant ses antécédents judiciaires, avec les deux condamnations récentes du 15 avril 2024 et du 25 juin 2024 pour des faits de détention non autorisée de stupéfiants en récidive et vol par effraction dans un local d’habitation ou un lieu d’entrepôt en récidive, avec un nouveau risque de récidive, étant précisé que ce critère a déjà été retenu plusieurs fois précédemment.

Le Procureur Général, suivant avis écrit du 25 mars 2025, sollicite l’infirmation de la décision entreprise, s’associant aux arguments développés par le Préfet dans son mémoire d’appel.

A l’audience, le représentant du Préfet d’Ille-et-Vilaine sollicite l’infirmation de la décision entreprise et demande la prolongation pour 15 jours supplémentaires de la rétention administrative de Monsieur [Y] [H] au motif que les conditions posées par la loi sont remplies dans la mesure où l’intéressé continue de représenter une menace à l’ordre public, citant de la jurisprudence, et s’en rapporte à ses écritures pour le surplus.

Monsieur [H] a refusé de comparaître à l’audience devant la Cour. Demandant la confirmation de la décision entreprise, son conseil estime que les conditions pour obtenir une quatrième prolongation de la rétention administrative ne sont pas remplies, le critère de la menace à l’ordre public ne pouvant être retenu en l’espèce à ce stade de la procédure, d’autant plus que cette prolongation de la rétention doit rester exceptionnelle.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Déclarons l’appel recevable,

Infirmons l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes en date du 25 mars 2025,

Statuant à nouveau,

Faisons droit à la requête du Préfet d’Ille-et-Vilaine et ordonnons la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [Y] [H] à compter du 25 mars 2025, pour une période d’un délai maximum de quinze jours dans des locaux non pénitentiaires.

Laissons les dépens à la charge du trésor public,

Fait à Rennes, le 26 Mars 2025 à 14 heures 00

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [Y] [H], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier

 


Votre avis sur ce point juridique ? Une actualité ? Une recommandation ?

Merci pour votre retour ! Partagez votre point de vue, une info ou une ressource utile.

Chat Icon