Cour d’appel de Paris, 22 novembre 2017
Cour d’appel de Paris, 22 novembre 2017

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Affaire du Musée Zadkine

Résumé

L’affaire du Musée Zadkine soulève des questions complexes sur le droit moral de l’artiste. L’héritier d’Ossip Zadkine, reconnu judiciairement, a intenté une action contre la Mairie de Paris, légataire universelle, pour atteinte à la mémoire de son père. Cependant, ses demandes ont été jugées irrecevables, car le droit moral, selon l’article L 121-1 du code de la propriété intellectuelle, ne se transmet pas aux descendants après le décès de l’artiste. De plus, les actions de l’héritier ont été déclarées prescrites, car il avait dépassé le délai de 30 ans pour revendiquer ses droits dans la succession.

Atteinte au droit moral de l’artiste

Au cours de son mariage avec Valentine Prax, le sculpteur d’origine russe Ossip Zadkine avait eu une liaison dont est né un héritier, lequel a vu sa filiation paternelle judiciairement reconnue. Non satisfait de retrouver au Musée Zadkine de nombreuses œuvres d’autres artistes, cet héritier a poursuivi la Mairie de Paris pour violation du droit moral de son père (Valentine Prax ayant institué la ville de Paris comme légataire universelle).

Transmission du droit moral

La première action de l’héritier avait été jugée irrecevable : le légataire universel (la Mairie de Paris) avait vocation à recevoir l’universalité héréditaire, et en particulier, à devenir titulaire, même en présence d’héritiers réservataires, du droit moral de l’artiste tel que prévu par l’article L 121-1 du code de la propriété intellectuelle.

L’héritier avait également fait valoir, sans succès, que la Mairie de Paris, en sa qualité de légataire universelle, avait l’obligation de promouvoir la mémoire et le nom d’Ossip Zadkine et qu’elle y avait porté atteinte en consacrant le musée portant son nom à l’oeuvre de tiers. L’héritier avait agi sur le fondement de l’article 9 du code civil, or, le droit à agir pour le respect des droits de la personnalité s’éteint au décès de la personne concernée (non transmissible aux descendants). Ne se prévalant à l’époque que de la seule qualité de descendant (à l’exclusion de celle d’héritier du sculpteur), l’héritier a de nouveau assigné la ville de Paris. Cette deuxième action a aussi été jugée prescrite.

Action prescrite

A nouvelle action, nouvelle irrecevabilité mais cette fois sur le volet de la prescription. Selon l’article 2262 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008, disposait que toutes les actions, tant réelles que personnelles se prescrivaient par 30 ans. Le fait générateur de l’action en reconnaissance d’une vocation successorale est le décès du de cujus, dont la date constitue le point de départ de la prescription. La prescription ne court toutefois pas à l’encontre des mineurs, si bien qu’à leur égard, le point de départ de la prescription est reporté au jour de leur majorité.

En l’occurrence, l’héritier a revendiqué pour la première fois la reconnaissance de ses droits patrimoniaux dans la succession d’Ossip Zadkine en 2010, or à cette date, il était majeur depuis plus de 30 ans. L’effet déclaratif du jugement consacrant sa filiation paternelle n’a pas eu d’incidence sur la prescription, l’héritier disposant du même délai de 30 ans à compter de sa majorité pour faire reconnaître sa paternité et revendiquer des droits dans la succession. En conséquences, toutes les demandes formées par l’héritier tendant à voir reconnaître sa qualité et qu’il était titulaire de l’ensemble des biens meubles et immeubles que lui confère sa qualité ont été jugées irrecevables comme étant prescrites.

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