Cour d’appel de Paris, 11 avril 2025, RG n° 19/06493
Cour d’appel de Paris, 11 avril 2025, RG n° 19/06493

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Reconnaissance d’un accident du travail et ses implications.

Résumé

L’affaire concerne un salarié, conducteur de tramway, qui a déclaré avoir subi un accident de travail le 6 septembre 2016, se plaignant de maux de ventre et de tête. Après avoir été transporté à l’hôpital, un certificat médical a été établi, indiquant un malaise sur le lieu de travail. L’employeur, une société de transport, a émis des réserves sur le caractère professionnel de l’accident, et la caisse de sécurité sociale a refusé de le prendre en charge, décision confirmée par la commission de recours amiable en mai 2018.

Le salarié a contesté cette décision devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, qui a jugé que le recours était recevable mais a confirmé le refus de prise en charge, déboutant le salarié de sa demande. Ce dernier a interjeté appel, et l’affaire a été plaidée devant la cour d’appel en septembre 2023. La cour a ordonné la réouverture des débats pour examiner la recevabilité de nouvelles demandes, notamment concernant une tentative de suicide survenue le 17 novembre 2016, que le salarié souhaitait relier à l’accident du 6 septembre.

Lors de l’audience de février 2025, le salarié a soutenu que la tentative de suicide était une conséquence directe de l’accident initial, tandis que la caisse a argué que cette demande était nouvelle et irrecevable. La cour a statué que la tentative de suicide ne pouvait être considérée comme un prolongement de la demande initiale, la rendant irrecevable. En revanche, la cour a reconnu que l’accident du 6 septembre 2016 devait être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels, infirmant ainsi le jugement précédent. Les demandes de condamnation à l’encontre de l’employeur ont été déclarées irrecevables, et la caisse a été condamnée aux dépens.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 13

ARRÊT DU 11 Avril 2025

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 19/06493 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAB3F

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Mars 2019 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 18/00369

APPELANT

Monsieur [C] [I]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Houcine BARDI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1674

INTIMEE

E.P.I.C. [9] PRISE EN QUALITE D’ORGANISME SPECIAL DE SECUR ITE SOCIALE DENOMMEE CCAS DE LA [9]

[8] [Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Philippe MARION, avocat au barreau de PARIS, toque : TE2181 substitué par Me Saty Isabelle TOKPA LAGACHE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Février 2025, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Sophie COUPET, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Raoul CARBONARO, président de chambre

M Gilles REVELLES, conseiller

Mme Sophie COUPET, conseillère

Greffier : Madame Agnès IKLOUFI, lors des débats

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Raoul CARBONARO, président de chambre et par Madame Fatma DEVECI, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l’appel interjeté par monsieur [C] [I] (l’assuré) d’un jugement rendu le 14 mars 2019 par le tribunal judiciaire de Bobigny dans un litige l’opposant à la Caisse de coordination aux assurances sociales, organisme social de la [9] (la caisse). Un premier arrêt avant dire droit a été rendu le 22 décembre 2023.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été rapportés dans l’arrêt avant dire droit au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que l’assuré, conducteur de tramway salarié de la [9], a déclaré avoir été victime d’un accident le 06 septembre 2016, la déclaration d’accident du travail établie le même jour indiquant « je me suis senti mal avec maux de ventre/tête. Le REL a fait appel aux pompiers de [Localité 7], emmené à l’hôpital [5] ». Le certificat médical initial établi le 06 septembre 2016 fait état d’un « malaise avec céphalées sur son lieu de travail ce jour » et prescrit un arrêt de travail jusqu’au 13 septembre 2016.

La [9], employeur, a émis des réserves sur le caractère professionnel de l’accident et après instruction du dossier, la caisse a refusé, par décision du 09 novembre 2016, de prendre en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

L’assuré a contesté ce refus de prise en charge devant la commission de recours amiable, qui, par décision du 02 mai 2018, a rejeté le recours.

L’assuré a alors porté sa contestation devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny ; à la suite de la réforme des pôles sociaux, la procédure a été transmis au tribunal de grande instance de Bobigny, qui, par jugement du 14 mars 2019, a :

– Déclaré recevable le recours de l’assuré,

– Dit que la décision de rejet notifiée par la caisse le 02 mai 2018 est bien fondée,

– Débouté l’assuré de sa demande de reconnaissance de l’accident déclaré le 06 septembre 2016 au titre de la législation sur les risques professionnels,

– Débouté la caisse et l’assuré de leur demande formulée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

– Condamné la caisse aux entiers dépens de l’instance exposés à compter du 1er janvier 2019.

Le jugement a été notifié le 29 avril 2019 à l’assuré, qui en a interjeté appel le 24 mai 2019.

L’affaire a été plaidée une première fois devant la cour d’appe, le 11 septembre 2023.

Par arrêt du 22 décembre 2023, la cour a :

– Déclaré l’appel recevable,

Avant dire droit,

– Ordonné la réouverture des débats à l’audience du 1er juillet 2024,

– Enjoint aux parties de s’expliquer sur la recevabilité des demandes relatives à la reconnaissance du caractère professionnel de la tentative de suicide du 17 novembre 2016, à la réparation des conséquences de l’accident du 06 septembre 2016 sur le fondement de l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale et aux condamnations formées à l’encontre de la [9], prise en sa qualité d’employeur, non partie à l’instance,

– Sursis à statuer sur les demandes.

Après plusieurs renvois, l’affaire a été de nouveau évoquée à l’audience du 11 février 2025.

A cette audience, l’assuré, représenté par son conseil, reprend oralement les conclusions visées par le greffe, pour demander à la cour de :

In limine litis sur les irrecevabilités soulevées par la cour :

– Dire que la demande de reconnaissance de la nature professionnelle de la tentative de suicide du 17 novembre 2016 est une demande additionnelle qui se rattache par un lien suffisant à la demande initiale relative au premier accident du 06 septembre 2016, car elle trouve son origine dans le même fait générateur consistant dans l’imminence du licenciement pour faute grave de M. [I],

– Donner acte à M. [I] du fait qu’il abandonne la demande d’indemnisation, formulée sur le fondement de l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale et dirigée contre la [9] prise en sa qualité d’employeur,

Au fond,

– Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bobigny le 14 mars 2019 ;

– Annuler la décision de la commission de recours amiable de la caisse du 02 mai 2018,

– Dire et juger que le malaise (et l’effondrement physique et psychologique) dont il a été victime le 06 septembre 2016 est un accident survenu du fait du travail (imminence du licenciement) au sens de l’article L.411-1 du code de la sécurité sociale,

– Dire et juger que la tentative de suicide du 17 novembre 2016 est un accident survenu par le fait du travail et qu’il trouve son origine dans le même fait générateur que l’accident du 06 septembre 2016 consistant dans l’imminence du licenciement du salarié,

– Condamner la [9] à lui payer la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner la [9] aux entiers dépens.

En défense, la caisse, représentée par son conseil, reprend oralement les conclusions visées par le greffe et demande à la cour de :

– Déclarer irrecevables les demandes suivantes : la reconnaissance du caractère professionnel des faits du 17 novembre 2016 de la tentative de suicide de l’assuré ; la réparation des conséquences de l’accident du 06 septembre 2016 sur le fondement de l’article L.453-2 du code de la sécurité sociale ; les demandes de condamnation formée à l’encontre de la [9], prise en qualité d’employeur, non partie à l’instance,

– Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bobigny le 14 mars 2019,

– Débouter l’assuré de toutes ses demandes, comme étant mal fondées,

– Confirmer la décision du 09 novembre 2016 de la caisse et la décision du 27 avril 2018 du conseil d’administration de la caisse, de refus de prise ne charge à titre professionnel des faits déclarés le 06 septembre 2016,

– Condamner l’assuré à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.

A l’issue de l’audience, les parties ont été informées que la décision serait mise à disposition le 11 avril 2015.

PAR CES MOTIFS :

VU l’arrêt de réouverture des débats rendu le 22 décembre 2023 ;

INFIRME, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 14 mars 2019 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny sous le RG 18/00369 ;

STATUANT À NOUVEAU,

DÉCLARE irrecevable la demande de M. [C] [I] de prise en charge, au titre du risque professionnel, de l’accident du travail survenu le 17 novembre 2016 (tentative de suicide) ;

DÉCLARE irrecevable la demande de M. [C] [I] tendant à obtenir la condamnation de la [9], employeur, aux dépens ;

DÉCLARE irrecevable la demande de M. [C] [I] tendant à obtenir la condamnation de la [9], employeur, à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONSTATE que M. [C] [I] a abandonné sa demande d’indemnisation à hauteur de 120 000 euros sur le fondement de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, après expertise ;

DIT que l’accident du travail survenu le 06 septembre 2016 doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels applicable aux agents de la [9] ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes tendant à obtenir la confirmation ou l’annulation des décisions de la caisse en date du 09 novembre 2016 et de la commission de recours amiable du 02 mai 2018 ;

DÉBOUTE la CCAS de la [9] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la CCAS de la [9] aux dépens de première instance et d’appel.

La greffière Le président

 


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