Type de juridiction : Cour d’appel.
Juridiction : Cour d’appel de Nîmes
Thématique : Requalification de la faute et contestation d’un licenciement : enjeux de la classification et de la loyauté contractuelle.
→ RésuméLa SAS MCGR, spécialisée dans les infrastructures de télécommunication, a embauché un salarié en qualité de chargé d’études en février 2020. En juillet 2020, ce dernier a été promu pilote d’activité. En octobre 2022, la SAS MCGR a été placée en redressement judiciaire, suivi d’une liquidation judiciaire en février 2023. En décembre 2022, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement, qui a été notifié le 16 décembre pour faute grave, l’employeur lui reprochant un abandon de poste.
Le salarié a contesté son licenciement devant le conseil de prud’hommes, demandant des indemnités. Le jugement du 18 juillet 2023 a requalifié la faute grave en cause réelle et sérieuse, condamnant la SAS MCGR à verser diverses sommes au salarié, mais a débouté ce dernier de certaines demandes. Le salarié a interjeté appel de cette décision. Dans ses dernières écritures, le salarié a demandé à la cour d’infirmer partiellement le jugement, notamment concernant la reclassification de son poste et la régularité de la procédure de licenciement. Il a également sollicité des dommages-intérêts pour diverses raisons, y compris un licenciement abusif et une exécution déloyale du contrat. La cour a examiné les éléments de preuve fournis par le salarié, notamment des courriels et attestations, mais a conclu que ceux-ci ne suffisaient pas à établir qu’il remplissait les critères pour une reclassification. Concernant le licenciement, la cour a jugé que la SAS MCGR n’avait pas respecté les délais de notification et que la clause de mobilité avait été détournée, rendant le licenciement sans cause réelle et sérieuse. Finalement, la cour a fixé les créances du salarié, incluant des indemnités de licenciement et des dommages-intérêts pour exécution déloyale, et a ordonné au mandataire liquidateur de remettre les documents de fin de contrat au salarié. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 23/02659 – N° Portalis DBVH-V-B7H-I5IL
EM/EB
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES
18 juillet 2023
RG :23/00104
[E]
C/
Me [S] [T] – Mandataire liquidateur de S.A.S. MCGR
CGEA AGS [Localité 9]
Grosse délivrée le 08 AVRIL 2025 à :
– Me BROS
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 08 AVRIL 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NIMES en date du 18 Juillet 2023, N°23/00104
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Mme Delphine OLLMANN, Greffier, lors des débats et Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 21 Janvier 2025, où l’affaire a été mise en délibéré au 08 Avril 2025.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANT :
Monsieur [J] [E]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Guillaume BROS de la SARL LEGANOVA NIMES, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉES :
Me [T] [S] (SELARL [S] [T]) – Mandataire liquidateur de S.A.S. MCGR
[Adresse 5]
[Localité 9]
CGEA AGS [Localité 9]
[Adresse 1]
[Adresse 6]
[Localité 9]
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 08 Avril 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :
La SAS MCGR qui est spécialisée dans le déploiement de réseaux universels d’infrastructures (télécommunication, mobilité…), a embauché M. [J] [E] à compter du 17 févier 2020 dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, en qualité de chargé d’études au sein de l’établissement de [Localité 7], niveau 1.4.2. coefficient 250, statut ETAM.
Par jugement du tribunal de commerce de Toulouse du 10 octobre 2022, la SAS MCGR a été placée en redressement judiciaire avec une date de cessation des paiements fixée au 15 septembre 2022. Le 06 février 2023, la SAS MCGR a été placée en liquidation judiciaire.
Par avenant du 1er juillet 2020, M. [J] [E] a été promu pilote d’activité au niveau 2.2, coefficient 310, statut ETAM.
M. [J] [E] a été placé en arrêt maladie du 23 septembre au 14 octobre 2022.
Le 02 décembre 2022, M. [J] [E] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 13 décembre 2022.
Le 16 décembre 2022, la SAS MCGR a notifié à M. [J] [E] son licenciement pour faute grave, l’employeur lui reprochant un abandon de poste à compter du 03 novembre 2022.
Par requête du 28 février 2023, M. [J] [E] a saisi le conseil de prud’hommes de Nîmes aux fins de contester la rupture de son contrat de travail et de voir condamner la SAS MCGR au paiement de diverses sommes à caractère indemnitaire et salarial.
Par jugement contradictoire rendu le 18 juillet 2023, le conseil de prud’hommes de Nîmes a :
– requalifié la faute grave en cause réelle et sérieuse,
– fixé la créance et condamné la société MCGR à payer à Mr [J] [E] les sommes suivantes :
– 5 621,10 euros au titre de l’indemnité de préavis,
– 562,11 euros au titre des congés payés sur préavis,
– 2 027,71 euros au titre de l’indenmité légale de licenciement,
– débouté Mr [E] du surplus de ses demandes,
– dit que la moyenne des salaires s’établit à 2 000 euros bruts,
– mis les dépens à la charge du défendeur.
Par acte du 28 juillet 2023, M. [J] [E] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 19 juillet 2023.
Par ordonnance en date du 03 octobre 2024, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 23 décembre 2024. L’affaire a été fixée à l’audience du 21 janvier 2025 à laquelle elle a été retenue.
En l’état de ses dernières écritures en date du 21 septembre 2023 auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l’appui de ses prétentions, M. [J] [E] demande à la cour de :
– INFIRMER partiellement le jugement déféré en ce qu’il a :
– Débouté Monsieur [E] de sa demande de reclassification ;
– Jugé que la procédure de licenciement n’était pas irrégulière ;
– Jugé que la société MCGR n’avait pas exécuté de façon déloyale le contrat ;
– Jugé que licenciement pour faute grave de Monsieur [E] en raison d’un prétendu abandon de poste n’était pas abusif et devait être requalifié en cause réelle et sérieuse ;
– Par conséquent, débouté Monsieur [E] de sa demande de fixation au passif de la société MCGR des créances suivantes :
– 8 600.95 ‘ de rappel de salaire sur classification,
– 860.09 ‘ de congés payés afférents,
– 2 500 ‘ de dommages-intérêts pour exécution déloyale,
– 2 630.55 ‘ de dommages-intérêts pour irrégularité de procédure,
– 10 522.20 ‘ à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
– 4559.62 ‘ de rappel de salaire sur la période d’absence injustifiée infondée,
– 455.96 ‘ de congés payés afférents.
– Débouté Monsieur [E] de sa demande de fixation au passif de la société MCGR la créance de 2520.25 ‘ au titre du solde de tout compte non réglé ;
– Débouté Monsieur [E] de sa demande visant à condamner la société MCGR, ou son mandataire liquidateur, à lui délivrer sous astreinte de 100 ‘ par jour retard à compter de la notification de la décision à intervenir, l’ensemble des documents sociaux, en ce compris des bulletins de paie rectificatifs, afférents notamment aux condamnations ci-dessus ;
– Fixé le salaire moyen de Monsieur [E] à la somme de 2 000 ‘ ;
– Débouté Monsieur [E] de sa demande au titre de l’article 700 du CPC ainsi que de sa demande de condamnation de la société MCGR aux entiers dépens.
– CONFIRMER le jugement déféré pour le surplus,
‘ ET, PAR CONSEQUENT, STATUANT A NOUVEAU SUR LES ELEMENTS INFIRMES :
– FIXER les créances de Monsieur [E] au passif de la société MCGR comme suit :
– 8 600.95 ‘ de rappel de salaire sur classification, outre la somme de 860.09 ‘ de congés payés afférents ;
– 2 500 ‘ à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale ;
– 2 630.55 ‘ soit un mois de salaire au titre de l’irrégularité de la procédure de licenciement ;
– 10 522.20 ‘ à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif.
– 4559.62 ‘ de rappel de salaire sur la période d’absence injustifiée infondée, outre 455.96 ‘ de congés payés afférents ;
En tout état de cause,
– FIXER au passif de la société MCGR la créance de Monsieur [E] d’un montant de 2520.25 ‘ au titre du solde de tout compte non réglé par l’employeur ;
– FIXER le salaire mensuel moyen brut de Monsieur [E] à la somme de 2630.55 ‘ ;
– JUGER que l’ensemble des condamnations ainsi prononcées porteront intérêt légal depuis la date de l’acte introductif d’instance et jusqu’à parfait paiement, outre capitalisation, en application des dispositions de l’article 1154 du Code Civil ;
– CONDAMNER la société MCGR ou son mandataire liquidateur à délivrer à Monsieur [E], sous astreinte de 100 ‘ par jour retard à compter de la notification de la décision à intervenir, l’ensemble des documents sociaux,
en ce compris des bulletins de paie rectificatifs, afférents notamment aux condamnations ci-dessus ;
– FIXER au passif de la société MCGR la créance de Monsieur [E] d’un montant de 2500 ‘ par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l’instance.
La SAS MCGR, la SELARL [S] [T] et les AGS CGEA de [Localité 9] n’ont pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en matière prud’homale et en dernier ressort ;
Infirme le jugement rendu le 18 juillet 2023 par le conseil de prud’hommes de Nîmes, sauf en ce qu’il a mis les dépens à la charge du défendeur,
Statuant sur les dispositions réformées et y ajoutant,
Fixe ainsi que suit la créance de M. [J] [E] :
– 1 008 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement,
– 4 030 euros au titre du préavis outre 403 euros à titre d’indemnité de congés payés y afférente,
– 7 052 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
Dit que ces sommes seront inscrites par le mandataire liquidateur sur l’état des créances de la procédure collective ouverte à l’encontre de la SAS MCGR,
Dit qu’en application des articles L 622-28 et L 641-3 du Code de commerce, le jugement d’ouverture de la procédure collective arrête définitivement à sa date le cours des intérêts au taux légal des créances salariales nées antérieurement,
Ordonne au mandataire liquidateur de la SAS MCGR de remettre à M. [J] [E] les documents de fin de contrat conformes au présent arrêt,
Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
Déclare le présent arrêt commun et opposable à l’AGS CGEA de [Localité 9], et à la SELARL [S] [T] es qualité de mandataire liquidateur de la SAS MCGR,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Dit que les dépens seront considérés comme frais privilégiés dans le cadre de la procédure collective.
Arrêt signé par le président et par la greffière.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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