Type de juridiction : Cour d’appel.
Juridiction : Cour d’appel de Nîmes
Thématique : Obligation de sécurité et inaptitude : enjeux de reclassement et prescription des demandes.
→ RésuméLa SARL Loumax Technology, spécialisée dans les services auxiliaires des transports aériens, a embauché un technicien le 8 octobre 2012. La relation contractuelle a évolué vers un contrat à durée indéterminée le 9 octobre 2013. Le 5 août 2015, le technicien a subi un accident de travail, reconnu par la CPAM, entraînant un arrêt de travail jusqu’au 23 août 2015. Après plusieurs arrêts de travail et visites médicales, il a été déclaré inapte à son poste le 22 août 2016, avec une recommandation pour un reclassement administratif.
La SARL Loumax Technology a informé le technicien qu’aucune solution de reclassement n’était disponible et a convoqué un entretien préalable au licenciement, qui a eu lieu le 19 septembre 2016. Le licenciement pour inaptitude a été notifié le 22 septembre 2016. Le technicien a contesté cette rupture devant le conseil de prud’hommes, demandant des indemnités pour divers manquements de l’employeur. Le jugement du 10 septembre 2019 a débouté le technicien de ses demandes, tout en rejetant la demande reconventionnelle de l’employeur. Le technicien a interjeté appel le 23 septembre 2019. En cours d’instance, la SARL Loumax Technology a soutenu que certaines demandes étaient prescrites, notamment celles liées à un prétendu manquement à l’obligation de sécurité. Le technicien a affirmé que son inaptitude était d’origine professionnelle, mais l’employeur a contesté ce lien, arguant qu’il n’était pas informé de l’origine professionnelle de l’inaptitude au moment du licenciement. La cour a confirmé le jugement de première instance, déclarant irrecevable la demande de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité, tout en condamnant le technicien à payer des frais à l’employeur. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 23/02644 – N° Portalis DBVH-V-B7H-I5G6
EM/EB
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES
10 septembre 2019
RG :17/00294
[N]
C/
[M]
Grosse délivrée le 08 AVRIL 2025 à :
– Me SOULIER
– Me BROS
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 08 AVRIL 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NIMES en date du 10 Septembre 2019, N°17/00294
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Mme Delphine OLLMANN, Greffier, lors des débats et Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 21 Janvier 2025, où l’affaire a été mise en délibéré au 08 Avril 2025.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANT :
Monsieur [G] [N]
né le 03 Septembre 1987 à [Localité 5] (73)
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Eve SOULIER de la SELARL EVE SOULIER – JEROME PRIVAT – THOMAS AUTRIC, avocat au barreau D’AVIGNON
INTIMÉ :
Monsieur [K] [M] Es qualité de ‘mandataire ad’hoc’ de la SARL LOUMAX
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Guillaume BROS de la SARL LEGANOVA NIMES, avocat au barreau de NIMES
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 08 Avril 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
La SARL Loumax Technology qui est spécialisée dans le secteur d’activité des services auxiliaires des transports aériens et relève de la convention collective des bureaux d’études techniques (Syntec), a embauché M. [G] [N] le 08 octobre 2012 suivant contrat de travail à durée déterminée, en qualité de technicien.
Le 09 octobre 2013, la relation contractuelle se poursuit dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée.
Le 05 août 2015, M. [G] [N] a été victime d’un accident de travail reconnu par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Gard suivant décision du 1 août 2015 ; la déclaration d’accident de travail établie par l’employeur le 11 août 2015 mentionnait ‘en déplaçant du mobilier afin de procéder à une intervention sur du matériel en panne, il a ressenti une violente douleur au dos’ ‘dos bloqué, impossibilité de bouger’.
M. [G] [N] a été placé en arrêt de travail consécutivement à l’ accident de travail, du 05 août 2015 au 23 août 2015.
Le docteur [D] a établi un certificat d’arrêt de travail de prolongation le 24 août 2015 qui a prévu une reprise de travail de M. [G] [N] à temps complet à cette date.
Le 14 septembre 2015, M. [G] [N] a de nouveau été placé en arrêt de travail jusqu’au 21 septembre 2015.
Le 13 octobre 2015, à l’issue d’une visite médicale de reprise, le médecin du travail a rendu un avis d’aptitude avec aménagement de poste.
Le 22 octobre 2015, la CPAM du Gard a notifié à la SARL Loumax Technology un refus de prise en charge de la nouvelle lésion déclarée par M. [G] [N] dans le certificat médical du 21 septembre 2015.
Le 30 octobre 2015, l’état de santé de M. [G] [N] a été considéré consolidé sans séquelles indemnisables.
Le 16 décembre 2015, M. [G] [N] a été reconnu travailleur handicapé pour la période du 1er novembre 2015 au 31 octobre 2020.
Suite à une visite du 1er février 2016, le médecin du travail a déclaré M. [G] [N] apte avec restrictions.
Du 22 avril au 09 mai 2016, M. [G] [N] a été placé en arrêt de travail pour maladie ordinaire.
Par décision du 30 mai 2016, l’inspecteur du travail a annulé l’avis médical contesté en déclarant M. [G] [N] inapte à son poste de travail de technicien.
En date du 22 août 2016, le médecin du travail a prononcé une inaptitude dé’nitive au poste de technicien, préconisant un aménagement ou un reclassement sur un poste de type administratif.
Le 06 septembre 2016, la SARL Loumax Technology a notifié à M. [G] [N] un courrier à l’issue duquel elle l’informe qu’elle n’a aucune solution de reclassement à lui proposer.
Le 07 septembre 2016, la SARL Loumax Technology a convoqué M. [G] [N] à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement fixé le 19 septembre 2016.
Le 22 septembre 2016, M. [G] [N] a été licencié pour inaptitude avec impossibilité de reclassement.
Par requête du 28 avril 2017, M. [G] [N] a saisi le conseil de prud’hommes de Nîmes aux fins de contester la rupture de son contrat de travail et de voir condamner la SARL Loumax Technology au paiement de diverses sommes à caractère indemnitaire.
Par jugement contradictoire rendu le 10 septembre 2019, le conseil de prud’hommes de Nîmes a :
– débouté Monsieur [N] [G] de l’ensemble de ses demandes ;
– débouté la SARL Loumax Technology de sa demande reconventionnelle ;
– dit que les dépens seront supportés par le DEMANDEUR.’
M. [G] [N] a régulièrement interjeté appel de cette décision le 23 septembre 2019.
Par ordonnance du 18 novembre 2022, le magistrat de la mise en état a prononcé la radiation de l’affaire N°RG 19/03730. Le 03 août 2023, l’affaire a été réinscrite sous le N°RG 23/02644.
Par ordonnance en date du 03 octobre 2024, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 23 décembre 2024. L’affaire a été fixée à l’audience du 21 janvier 2025 à laquelle elle a été retenue.
En l’état de ses dernières écritures en date du 03 août 2023 auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l’appui de ses prétentions, M. [G] [N] demande à la cour de :
– Recevoir l’appel de Mr [G] [N]
– Le dire bien fondé en la forme et au fond,
En conséquence,
– REFORMER le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de NIMES,
En conséquence,
– JUGER que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité en l’absence de visite médicale d’embauche et périodique alors que le salarié présentait avant son accident du travail un état de santé préoccupant,
– JUGER que les chances de reclassement du salarié ont été impactées par l’absence de suivi médical auquel était tenu l’employeur, cause directe de son inaptitude,
– JUGER que le licenciement de Monsieur [N] est sans cause réelle et sérieuse puisqu’il est la résultante du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat, outre l’absence de recherche loyale et sérieuse de reclassement,
En conséquence,
– CONDAMNER Mr [K] [M] ès qualité de mandataire ad hoc de la SARL LOUMAX TECHNOLOGY à inscrire sur l’état des créances de la SARL LOUMAX TECHNOLOGY, la créance de Mr [G] [N] comme suit :
– 1 500 ‘ de dommages et intérêts en raison du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat en l’absence de visite médicale d’embauche ;
– 5 000 ‘ de dommages et intérêts en raison de la perte de chance du salarié d’être reclassé au vu de l’absence de suivi médical ;
– 3 516,84 ‘ à titre d’indemnité compensatrice de préavis correspondant à trois mois de salaire en raison de l’origine professionnelle de l’inaptitude du salarié et de sa qualité de travailleur handicapé,
– 351,68 ‘ de congés payés y afférents,
– 1 325,03 ‘ à titre de solde de l’indemnité spéciale de licenciement au titre du doublement de l’indemnité légale de licenciement en cas de licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle (L. 1226-14 du Code du travail)
– 20 000 ‘ à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1 500’ au titre de l’article 700 du CPC,
– ORDONNER la délivrance des documents de fin de contrat conformes au jugement à intervenir sous astreinte de 100 ‘ par jour de retard à compter de la notification dudit jugement;
– ORDONNER à l’employeur de communiquer la masse globale des indemnités de congés payés prévus par la convention collective de l’ensemble des salariés pour les années 2013, 2014, 2015 et 2016 dans le but de pouvoir établir un chiffrage précis de la prime de vacances conformément à l’article 31 de la convention collective applicable.
Aux termes de ses dernières conclusions contenant appel incident en date du 17 décembre 2024 auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l’appui de ses prétentions, M. [M], ès qualité de mandataire ad hoc de la SARL Loumax Technology, demande à la cour de :
– Débouter Monsieur [N] de son appel, de ses demandes, fins et conclusions,
– Confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
o Débouté Monsieur [N] de l’intégralité de ses demandes liées à une prétendue origine professionnelle de son inaptitude,
o Débouté Monsieur [N] de l’intégralité de ses demandées liées au caractère prétendument abusif de son licenciement,
o Débouté Monsieur [N] de ses demandes de dommages-intérêts en raison d’un prétendu manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité de résultat ainsi qu’en raison d’une soi-disant perte de chance d’être reclassé au vu de l’absence de suivi médical ;
o Débouté Monsieur [N] de sa demande nouvelle relative au paiement de primes de vacances ;
o Débouté Monsieur [N] de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Accueillir l’appel incident, le juger recevable et bien fondé, et statuant à nouveau :
o Juger irrecevables les demandes introduites en cours d’instance prud’homale par le salarié et liées à un prétendu manquement de l’employeur à son obligation de sécurité ainsi que celles relatives au paiement d’une prime de vacances ;
o Débouter par conséquent Monsieur [N] de ses demandes de dommages-intérêts afférentes à un prétendu manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat;
o Débouter Monsieur [N] de sa demande de communication des états de primes de congés payés ;
o Juger que l’inaptitude de Monsieur [N] n’est pas d’origine professionnelle;
o Débouter par conséquent Monsieur [N] de ses demandes au titre de l’indemnité spéciale de licenciement et l’indemnité compensatrice de préavis;
o Juger que l’employeur a satisfait à son obligation de reclassement et qu’il n’existe aucun lien entre l’inaptitude du salarié et le prétendu défaut de visite médicale d’embauche ;
o Débouter par conséquent Monsieur [N] de ses demandes indemnitaires afférentes au caractère prétendument abusif de son licenciement;
o Débouter Monsieur [N] de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
o Condamner Monsieur [N] à porter et payer à la SARL LOUMAX TECHNOLOGY la somme de 2500 ‘ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
En tout état de cause :
o Condamner Monsieur [N] à porter et payer à la SARL LOUMAX TECHNOLOGY la somme de 2500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
o Condamner Monsieur [N] aux entiers dépens de première instance et d’appel.’
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud’homale et en dernier ressort ;
Confirme le jugement rendu le 10 septembre 2019 par le conseil de prud’hommes de Nîmes sauf en ce qu’il a déclaré recevable demande de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité,
Statuant sur les dispositions réformées et y ajoutant,
Juge irrecevable la demande de dommages et intérêts présentée par M. [G] [N] au titre d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité,
Condamne M. [G] [N] à payer à la SARL Loumax Technology la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne M. [G] [N] aux dépens de la procédure d’appel.
Arrêt signé par le président et par la greffière.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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