Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Nîmes
Thématique : Rémunération des pauses et heures supplémentaires : enjeux de disponibilité et de droits des salariés.
→ RésuméLa SARL Marvin, exploitant une boulangerie-pâtisserie, a engagé une salariée en qualité de préparatrice en septembre 2019, avant de la transférer au poste de vendeuse. En août 2020, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave, suite à des comportements jugés inappropriés, notamment des vols de marchandises. Le licenciement a été notifié par lettre recommandée le 11 septembre 2020, précisant plusieurs incidents de non-règlement de consommations et de mise en cuisson de produits après la fermeture.
Contestant la légitimité de son licenciement, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes, qui a confirmé le licenciement pour faute grave tout en condamnant la SARL Marvin à verser certaines sommes pour heures supplémentaires et congés payés. La salariée a interjeté appel, demandant l’infirmation du jugement et des indemnités supplémentaires, notamment pour travail dissimulé et non-respect des règles de sécurité. Dans ses conclusions, la salariée a mis en avant des manquements de l’employeur concernant les temps de pause, les heures supplémentaires non rémunérées, et l’absence de mise en place des représentants du personnel. L’employeur a répliqué en affirmant que les heures supplémentaires avaient été rémunérées et que les pauses étaient conformes à la législation. La cour a examiné les éléments de preuve fournis par les deux parties. Elle a constaté que la salariée n’avait pas pu vaquer à ses occupations personnelles durant ses pauses, ce qui a conduit à l’infirmation du jugement sur ce point. Concernant les heures supplémentaires, la cour a également retenu que la salariée avait droit à des indemnités pour celles non rémunérées. Finalement, la cour a jugé que le licenciement pour faute grave n’était pas justifié, en raison de l’absence de preuves suffisantes des vols reprochés. Elle a donc accordé des indemnités à la salariée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que pour d’autres préjudices subis. La SARL Marvin a été condamnée aux dépens et aux frais irrépétibles. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 23/01229 – N° Portalis DBVH-V-B7H-IY3C
LR EB
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NÎMES
12 janvier 2023
RG :
[X]
C/
S.A.R.L. MARVIN
Grosse délivrée le 25 MARS 2025 à :
– Me
– Me
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 25 MARS 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NÎMES en date du 12 Janvier 2023, N°
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Leila REMILI, conseillère, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Nathalie ROCCI, Présidente
Mme Leila REMILI, Conseillère
M. Michel SORIANO, Conseiller
GREFFIER :
Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l’audience publique du 19 Décembre 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 25 Mars 2025.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
Madame [L] [X]
née le 03 Février 1996 à [Localité 4]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Serge DESMOTS de la SELEURL SERGE DESMOTS AVOCAT, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
S.A.R.L. MARVIN
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Patrick LANOY de la SELARL CAPSTAN PYTHEAS, avocat au barreau de NIMES
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie ROCCI, Présidente, le 25 Mars 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :
La SARL Marvin exploite en franchise une boulangerie-pâtisserie à l’enseigne ‘[3]’ à [Localité 4].
Le 2 septembre 2019, la SARL Marvin a engagé Mme [L] [X] par contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de préparatrice, coefficient 155.
La convention collective nationale applicable est celle de la boulangerie-pâtisserie (IDCC 843).
Par avenant au contrat de travail du 30 octobre 2019, la salariée a été affectée au poste de vendeuse, coefficient 155.
Par courriers remis en mains propres contre décharges du 29 août 2020, Mme [L] [X] s’est vu notifier une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 7 novembre 2020 et une mise à pied à titre conservatoire.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 septembre 2020, Mme [X] a été licenciée pour faute grave dans les termes suivants :
‘Le lundi 17/08/2020, après la fermeture du magasin et après que la caisse soit fermée, vous mettez en cuisson une pizza prise sur échelle.
Le mardi 18/08/2020, vous ne réglez pas vos consommations prises pendant la pause.
Le mercredi 19/08/2020, vous mettez de la marchandise invendue de côté et que vous reconnaissez d’ailleurs avoir oublié.
Le jeudi 20/08/2020, à nouveau, vous mettez en cuisson une pizza prise sur échelle après la fermeture du magasin et vous ne réglez pas vos consommations prises pendant votre pause.
Le vendredi 21/08/2020, récupération de marchandise et non règlement de votre consommation à la pause.
Le samedi 22/08/2020, récupération de marchandises et non règlement de vos consommations à la pause.
Vous êtes parfaitement informée des procédures à appliquer et qui permettent aux salariés de l’entreprise de régler à la fermeture des caisses leurs achats personnels en bénéficiant :
– d’une réduction de 50% sur les marchandises mises à la vente et invendues à l’heure de la fermeture et ceci avant qu’elles ne soient remises aux organisations caritatives.
– d’une réduction de 20 % sur toute autre marchandise non considérée comme invendue.
Les instructions communiquées par moi même et votre responsable ont toujours été très claires et sans ambiguïté, ce que vous ne pouvez ignorer dans le cadre de votre poste de travail et compte tenu de votre maîtrise du terminal d’encaissement.
Pour rappel, le lundi 17/08/2020 lors de votre pause, vous avez consommé avec un ticket dûment justifié.
Tout en reconnaissant les faits reprochés, la récurrence de ces agissements et les explications que vous nous avez fournies ne laissent aucun doute sur le fait qu’il ne s’agit pas d’oublis de votre part mais d’actes délictueux en pleine connaissance de cause. Nous ne pouvons tolérer de tels agissements qui sont des vols de marchandises, (produits finis et ou matières premières) au sein même de l’entreprise.
Le poste de travail de vendeuse nécessite une confiance entière dans l’intégrité morale de la personne qui l’occupe, force est de constater que nous ne pouvons plus vous l’accorder’.
Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre ainsi que les modalités d’exécution de son contrat de travail, Mme [L] [X] a saisi le conseil de prud’hommes de Nîmes d’une demande d’indemnités de rupture et de diverses sommes lequel, par jugement contradictoire du 12 janvier 2023, a :
– Confirmé le licenciement pour faute grave ,
– Condamné la SARL MARVIN à payer à Mme [X] les sommes suivantes:
– 30.45 euros au titre des paiements des heures supplémentaires d’août 2020.
– 3.04 euros au titre des congés payés,
– 106.57 euros nets au titre des 2 jours de fractionnement,
– 500 euros au titre de l’absence de mise en place des représentants du personnel
– Maintenu l’aide juridictionnelle à hauteur de 960 euros
– Débouté Mme [X] du surplus de ses demandes
– Débouté la SARL MARVIN de sa demande reconventionnelle
– Dit que les dépens seront supportés par la SARL MARVIN .’
Par acte du 11 avril 2023, Mme [L] [X] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières écritures en date du 18 décembre 2023, Mme [L] [X] demande à la cour de :
– INFIRMER le jugement du Conseil de prud’hommes de Nîmes en ce qu’il a :
‘ Confirmé le licenciement pour faute grave
‘ Condamné la SARL MARVIN à payer à Mme [X] les sommes suivantes :
o 30,45 euros au titre des paiements des heures supplémentaires d’août 2020,
o 3,04 euros au titre des congés payés,
o 106,57 euros net au titre des 2 jours de fractionnement,
‘ Maintenu l’aide juridictionnelle à hauteur de 960 euros
‘ Débouté Mme [X] du surplus de ses demandes,
Statuant à nouveau,
– CONDAMNER la SARL MARVIN à payer à Mme [X] la somme de :
‘ 1.616,50 euros bruts au titre des heures supplémentaires de septembre 2019 à
juillet 2020,
‘ 161,65 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés y afférente,
‘ 196,02 euros bruts au titre des heures supplémentaires d’août 2020,
‘ 19,60 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés y afférente,
‘ 10.588,41 euros nets au titre de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
‘ 1.000 euros nets au titre des dommages et intérêts pour non-respect des dispositions sur le fractionnement des congés payés,
‘ 1.000 euros au titre des dommages et intérêts pour non-respect de l’obligation de sécurité,
‘ 1.777,82 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
‘ 177,78 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés y afférente,
‘ 481,49 euros nets au titre de l’indemnité légale de licenciement,
‘ 531,87 euros bruts au titre des rappels de salaire correspondant à la mise à pied conservatoire,
‘ 53,19 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés y afférente,
‘ 7.000 euros nets au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et
sérieuse,
– CONDAMNER la SARL MARVIN aux entiers dépens et à payer à la SELARL SERGE DESMOTS AVOCAT la somme de 3.500 euros au titre des frais irrépétibles.’
En l’état de ses dernières conclusions en date du 15 novembre 2024, l’employeur demande à la cour de :
REFORMER le jugement déféré en ce qu’il a accordé la somme de 500 € à Mme [X]
à titre de dommages-intérêts pour absence de mise en place du CSE,
– CONFIRMER le jugement déféré en ce qu’il a rejeté l’ensemble des autres demandes de Mme [X],
– CONDAMNER Mme [X] au paiement de 2.500 euros en application de l’article 700
du Code de procédure civile,
– CONDAMNER Mme [X] aux entiers dépens.’
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 26 juin 2024, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 19 novembre 2024. L’affaire a été fixée à l’audience du 19 décembre 2024.
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