Cour d’appel de Montpellier, 13 mars 2025, RG n° 23/02749
Cour d’appel de Montpellier, 13 mars 2025, RG n° 23/02749

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Montpellier

Thématique : Nullité d’un contrat de vente pour irrégularités formelles et conséquences sur le crédit associé

Résumé

Dans le cadre d’un démarchage à domicile, un acheteur et son épouse ont conclu un contrat avec une société spécialisée pour l’installation de panneaux photovoltaïques et d’un chauffe-eau thermodynamique, pour un montant de 35 800 euros, le 7 juin 2018. Un crédit affecté à cet achat a été accordé par une autre société financière, pour le même montant, le 25 juin 2018. Les travaux ont été réceptionnés le 26 juillet 2018, avec une attestation de conformité délivrée peu après.

Cependant, le 30 juin 2021, les acheteurs ont assigné la société d’installation et la société financière devant le tribunal judiciaire, demandant la nullité des contrats et la restitution du prix. En mars 2022, la société d’installation a été placée en liquidation judiciaire. En juin 2022, les époux ont demandé la jonction de leurs instances, et en mars 2023, le tribunal a débouté les acheteurs de leurs demandes tout en déboutant également la société financière de ses propres demandes.

Les époux ont interjeté appel de ce jugement en mai 2023, soutenant que le contrat de vente était nul en raison d’irrégularités formelles. Ils ont demandé la nullité du contrat de crédit, la restitution des sommes versées, ainsi que des dommages et intérêts. En réponse, la société financière a demandé la confirmation du jugement initial, arguant que les acheteurs avaient ratifié le contrat en recevant les travaux et en remboursant le prêt.

Le tribunal a finalement infirmé le jugement initial, prononçant la nullité du contrat de vente et du crédit, et a ordonné à la société d’installation de supporter les coûts d’enlèvement de l’installation. La société financière a été condamnée à restituer les sommes versées par les acheteurs, ainsi qu’à payer des dommages et intérêts.

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 13 MARS 2025

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 23/02749 – N° Portalis DBVK-V-B7H-P2X5

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 14 mars 2023

Juge des contentieux de la protection de Montpellier

N° RG 11 21-1293

APPELANTS :

Monsieur [H] [Z]

né le 31 Mai 1960

de nationalité espagnole

[Adresse 5]

Représenté sur l’audience par Me Andréa ASSORIN ALESSI, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame [R] [P] épouse [Z]

née le 19 Mai 1954

de nationalité Française

[Adresse 6]

ReprésentéE sur l’audience par Me Andréa ASSORIN ALESSI, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Maître [G] [X], ès qualité de mandataire liquidateur de la société TECH ENERGIE, société par action simplifiée à associé unique immatriculée au RCS de MONTPELLIER sous le numéro 53916163800033, dont le siège social est [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

assigné par acte remis à domicile le 17 juillet 2023

SA Ca Consumer Finance

Société anonyme au capital de 554 482 422,00 euros immatriculée au RCS de EVRY sous le n° 542.097.522, dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit

siège

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée sur l’audience par Me Jérôme PASCAL de la SARL CAP-LEX, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Jérôme MARFAING-DIDIER, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Janvier 2025,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M.Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

– par défaut ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

1- Dans le cadre d’un démarchage à domicile et selon bon de commande accepté le 7 juin 2018, M. [H] [Z] et son épouse née [R] [P] ont confié à la société TECH ENERGIE la pose et l’installation de panneaux photovoltaïques et d’un chauffe-eau thermodynamique moyennant le prix de 35 800 euros.

2- Selon offre de crédit datée du 25 juin 2018, la SA CA CONSUMER Finance a consenti à M. et Mme [Z] un crédit affecté à l’achat de l’installation, d’un montant de 35 800 euros pour une durée de 125 mois.

3- Un procès-verbal de réception des travaux a été établi le 26 juillet 2018 et une attestation de conformité du CONSUEL a été délivrée le 30 juillet 2018.

4- Par acte d’huissier de justice du 30 juin 2021, M. et Mme [Z] ont fait assigner la SA CA CONSUMER FINANCE et la SASU TECH ENERGIE devant le tribunal judiciaire de Montpellier afin de voir prononcer la nullité du contrat de vente et du contrat de prêt affecté et en tout état de cause, condamner la SASU TECH ENERGIE à leur restituer l’intégralité du prix de vente, outre la condamnation solidaire de la SASU TECH ENERGIE et la SA CA CONSUMER FINANCE à leur verser diverses sommes.

5- Par jugement du 14 mars 2022, la société TECH ENERGIE a été placée en liquidation judiciaire.

6- Le 1er juin 2022, les époux [Z] ont fait assigner en intervention forcée maître [G] [E] afin de voir ordonner la jonction et prononcer les mêmes condamnations.

7- Par jugement du 14 mars 2023, le tribunal judiciaire de Montpellier a :

Ordonné la jonction des instances enrôlées sous les numéros 11.21-1293 et 11 22-1197 qui seront jointes sous le numéro 11.21-1293,

Débouté M. [Z] et Mme [Z] de l’intégralité de leurs demandes ;

‘ Débouté la SA CA CONSUMER FINANCE de ses demandes ;

‘ Laissé à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles ;

‘ Condamné M. [Z] et Mme [Z] aux entiers dépens;

‘ Rappelé que l’exécution provisoire est de droit et Dit n’y avoir lieu de l’écarter.

8- Les époux [Z] ont relevé appel de ce jugement le 25 mai 2023.

PRETENTIONS

9- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 1er octobre 2024, les époux [Z] demandent en substance à la cour, au visa de l’article liminaire du code de la consommation et des articles :

-1130 et 1137 du code civil,

-De l’article 16 de la loi n°2012-354 du 14 mars 2012 de finance rectificative pour 2012,

-De l’article L.121-17 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, désormais codifié à l’article 221-5 du même code,

-Des articles 221-5 et suivants du code de la consommation, de l’article L. 111-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue de la Loi n°2014-344 du 17 mars 2014,

-De l’article R.111-1 du même code, issu du Décret 2014-1061 du 17 septembre 2014,

-De l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016,

-Du décret d’application n° 2016-884 du 29 juin 2016, entrés en vigueur au 1er juillet 2016 ; -De la jurisprudence citée et l’ensemble des pièces visées aux débats, de :

‘ Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– Débouté M. [H] [Z] et Mme [Z] de l’intégralité de leurs demandes ;

– Condamné M. [H] [Z] et Mme [R] [Z] aux entiers dépens ;

– Rappelé que l’exécution provisoire est de droit et DIT n’y avoir lieu à l’écarter ;

‘ Confirmer en revanche le jugement en ce qu’il a :

– Débouté la SA CA CONSUMER FINANCE de ses demandes ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

‘ Déclarer les demandes de M. [H] [Z] et Mme [R] [Z], recevables et bien fondées ;

‘ Prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre M. [H] [Z] et Mme [R] [Z], et la société TECH ENERGIE ;

‘ Mettre à la charge de la liquidation judiciaire de la société TECH ENERGIE l’enlèvement de l’installation litigieuse et la remise en état de l’immeuble à ses frais ; et dire qu’à défaut de reprise dans un délai déterminé, celle-ci demeurera acquise à M. [H] [Z] et Mme [R] [P], épouse [Z], lesquels pourront alors en disposer librement ;

Par conséquent,

‘ Prononcer la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre M.[H] [Z] et Mme [R] [Z], et la société CA CONSUMER FINANCE ;

‘ Condamner la société CA CONSUMER FINANCE à restituer à M. [H] [Z] et Mme [R] [Z], l’intégralité des mensualités du prêt versées par eux entre les mains de la banque

‘ Déclarer que la société CA CONSUMER FINANCE a commis une faute dans le déblocage des fonds au préjudice de M. [H] [Z] et Mme [R] [Z], et doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté

‘ Condamner la société CA CONSUMER FINANCE à verser à M. [H] [Z] et Mme [R] [Z], l’intégralité des sommes suivantes au titre des fautes commises :

– 35 800 € correspondant au montant du capital emprunté, en raison de la privation de sa créance de restitution ;

– 14 536,40 € correspondant au montant des intérêts conventionnels et frais payés par M. [H] [Z] et Mme [R] [Z], à la société CA CONSUMER FINANCE en exécution du prêt souscrit ;

A titre subsidiaire,

‘ Condamner la société CA CONSUMER FINANCE à payer à M. [H] [Z] et Mme [R] [Z], la somme de 50 336,40 € à titre de dommages et intérêts compte tenu de la faute commise par elle,

‘ Prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l’encontre de la société CA CONSUMER FINANCE ;

‘ Condamner la société CA CONSUMER FINANCE à verser à M. [H] [Z] et Mme [R] [Z], l’ensemble des intérêts versés par eux au titre de l’exécution normale du contrat de prêt en conséquence de la déchéance du droit aux intérêts prononcée ; et lui en joindre de produire un nouveau tableau d’amortissement expurgés desdits intérêts ;

En tout état de cause,

‘ Condamner la société CA CONSUMER FINANCE à payer à M. [H] [Z] et Mme [R] [Z], les sommes suivantes :

– 5 000 euros au titre du préjudice moral,

– 6 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

‘ Débouter la société CA CONSUMER FINANCE et la société TECH ENERGIE de l’intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes ;

‘ Condamner la société CA CONSUMER FINANCE à supporter les entiers frais et dépens de l’instance, en ce compris ceux de première instance et d’appel.

10- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 16 décembre 2024, la SAS CA CONSUMER FINANCE demande en substance à la cour, au visa des articles 1103, 1181, 1240 du code civil et des articles L.312-12 et suivants du code de la consommation, de :

‘ Recevoir la société CA CONSUMER FINANCE en ses écritures et la dire bien fondée,

In limine litis,

‘ Juger M. et Mme [D] irrecevables en leurs demandes tendant à voir :

– Condamner la société CA CONSUMER FINANCE à payer à M. et Mme [Z] la somme de 50 336,40 euros à titre de dommage intérêts compte tenu de la faute commise par elle,

– Prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l’encontre de la société CA CONSUMER FINANCE,

– Condamner la société CA CONSUMER FINANCE à verser à M. et Mme [Z] l’ensemble des intérêts versés par eux au titre de l’exécution normale du contrat de prêt en conséquence du droit aux intérêts prononcée ; et lui enjoindre de produire un nouveau tableau d’amortissement expurgés desdits intérêts.

Sur le fond,

A titre principal,

‘ Confirmer le jugement rendu le 14 mars 2023 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Montpellier en ce qu’il a débouté M. et Mme [Z] de l’intégralité de leurs demandes,

A titre subsidiaire,

‘ Infirmer le jugement rendu le 14 mars 2023 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Montpellier en ce qu’il a débouté la société CA CONSUMER FINANCE de l’ensemble de ses demandes,

Statuant de nouveau,

– Si la cour devait prononcer la nullité du contrat de vente et celle, subséquente, du contrat de crédit,

‘ Condamner Monsieur et Madame [Z] à la restitution du capital emprunté déduction faite des mensualités déjà versées,

‘ Admettre la créance de la Société CA CONSUMER FINANCE au passif de la Société TECH ENERGIE correspondant aux intérêts et frais non perçus par sa faute au titre de dommage et intérêts, pour la somme de 10 246,40 euros,

– Si la cour devait prononcer la nullité du contrat de vente et celle, subséquente, du contrat de crédit et priver la concluante de son droit à restitution,

‘ Prononcer l’exonération de responsabilité de la SA CA CONSUMER

FINANCE à 80%

‘ Admettre la créance de la Société CA CONSUMER FINANCE au passif de la Société TECH ENERGIE pour la somme de 36 837,12 euros à titre de dommages et intérêts,

En tout état de cause, et y ajoutant :

‘ Débouter Monsieur et Madame [Z] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

‘ Condamner tout succombant au paiement de la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

‘ Condamner tout succombant au paiement des dépens taxables de l’instance.

11- Vu l’ordonnance de clôture en date du 23 décembre 2024.

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

12- Me [G] [X] n’a pas constitué avocat.

– La déclaration d’appel et les conclusions de M. et Mme [Z] lui ont été signifiées suivant acte délivré le 17 juillet 2023 (remise à domicile).

– Les conclusions de l’intimé SA CA CONSUMER ont été signifiées à Me [G] [X] et à la SAS TECH ENERGIE le 20 septembre 2023 (remise à domicile)

PAR CES MOTIFS

Statuant par défaut

Déclare irrecevables les demandes formées à titre subsidiaire par les époux [Z] dans leurs récapitulatives transmises le 1er octobre 2024.

Confirme le jugement en ce qu’il a débouté les époux [Z] de leur demande en nullité du contrat du 8 juin 2019 pour dol et de leur demande au titre du préjudice moral.

L’infirme pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant

Prononce la nullité du bon de commande du 8 juin 2018 et la nullité subséquente du crédit affecté du 25 juin 2018.

Fixe à la charge de la procédure collective de la SASU Tech Energie la charge du coût d’enlèvement de l’installation et de remise en état de la toiture, sans frais pour les époux [Z].

Prive la SA CA Consumer Finance de sa créance de restitution.

Condamne la SA CA Consumer Finance à payer à M. [H] [Z] et à Mme [R] [Z] la somme de 35800€ au titre du crédit remboursé et celle 14536,40€ à titre de dommages et intérêts.

Fixe au passif de la procédure collective de la SASU Tech Energie la somme de 17900€ et celle de 7268,20€ au titre de la créance de la SA CA Consumer Finance.

Condamne la SA CA Consumer Finance aux dépens de première instance et d’appel.

Condamne la SA CA Consumer Finance à payer à M. [H] [Z] et à Mme [R] [Z] la somme de 3500€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


Votre avis sur ce point juridique ? Une actualité ? Une recommandation ?

Merci pour votre retour ! Partagez votre point de vue, une info ou une ressource utile.

Chat Icon