Type de juridiction : Cour d’Appel
Juridiction : Cour d’Appel de Metz
→ RésuméEn 2000, la commune de [Localité 4] a signé un bail à ferme avec M. [K]. En 2018, M. [K] a demandé à céder ce bail à sa fille, Mme [U] [K], mais la commune a refusé, invoquant des manquements aux obligations contractuelles. Le tribunal paritaire a initialement autorisé la cession en 2019, mais la Cour d’Appel de Metz a infirmé cette décision en 2022, rejetant la demande de cession tout en confirmant le rejet de la résiliation du bail par la commune. La Cour a conclu que Mme [K] ne justifiait pas d’une réelle capacité d’exploitation.
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La commune de [Localité 4] a consenti un bail à ferme à M. [S] [K] en 2000, qui a demandé l’autorisation de céder ce bail à sa fille en 2018. La commune a refusé cette cession, invoquant le non-respect des obligations du bail par M. [K]. Le tribunal a autorisé la cession du bail à la fille de M. [K], mais la commune a interjeté appel. La Cour d’Appel de Metz a infirmé le jugement, déboutant M. [K] de sa demande de cession du bail à sa fille. La Cour a également confirmé le rejet de la demande de résiliation du bail par la commune de [Localité 4]. Les dépens ont été laissés à la charge de chaque partie.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS RG 19/01854 – N° Portalis DBVS-V-B7D-FCO7 Minute n° 22/00282 Société COMMUNE DE [Localité 4] C/ [K] Jugement Au fond, origine Tribunal paritaire des baux ruraux de SAINT – AVOLD, décision attaquée en date du 27 Juin 2019, enregistrée sous le n° 51-18-2 COUR D’APPEL DE METZ 3ème CHAMBRE – Baux Ruraux ARRÊT DU 26 JUILLET 2022 APPELANTE : COMMUNE DE [Localité 4], représentée par son Maire [Adresse 2] [Adresse 2] [Localité 4] Non comparant, Représentée par Me Soline DEHAUDT, avocat au barreau de STRASBOURG INTIMÉ : Monsieur [S] [K] [Adresse 1] [Localité 4] Non comparant, Représenté par Me Jean-charles SEYVE, avocat au barreau de METZ DATE DES DÉBATS : A l’audience publique du 28 Avril 2022 tenue par M. MICHEL, Magistrat Rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré pour l’arrêt être rendu le 23 juin 2022 à cette date le délibéré a été prorogé au 26 Juillet 2022. GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Sophie GUIMARAES COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : PRÉSIDENT : Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre ASSESSEURS : Madame BASTIDE, Conseiller Monsieur MICHEL, Conseiller ARRÊT : Contradictoire Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ; Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme GUIMARAES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. EXPOSÉ DU LITIGE Par acte sous seing privé du 8 décembre 2000, la commune de [Localité 4] a consenti à M.[S] [K] un bail à ferme sur des parcelles situées à [Localité 4] et cadastrées section 7 [Cadastre 7] et section 9 [Cadastre 6] pour une durée de 9 années à compter du 1er novembre 2000. Les parcelles ont été mises à la disposition de la SCEA Morschborn par le locataire qui en a avisé la commune par lettre recommandée datée du 14 mars 2018. Par lettre du 21 août 2018, la commune de [Localité 4] a refusé d’autoriser la cession de ce bail à la fille de M. [K], Mme [U] [K]. Par acte introductif d’instance enregistré au greffe le 16 novembre 2018, M. [K] a fait convoquer la commune de [Localité 4] devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Saint-Avold. Au dernier état de ses prétentions, il a demandé au tribunal de l’autoriser à céder le bail conclu avec la commune de [Localité 4] le 8 décembre 2000 à sa fille Mme [K], de condamner la commune de [Localité 4] à lui payer une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de la débouter de sa demande reconventionnelle. La commune de [Localité 4] a demandé au tribunal de déclarer la demande de cession de bail irrecevable et de la rejeter, reconventionnellement de prononcer la résiliation du bail à ferme du 8 décembre 2000, de condamner M. [K] ainsi que tous occupants de son chef à quitter les parcelles litigieuses, de rejeter ses demandes et le condamner au paiement d’une indemnité en application de l’article 700 du code de procédure civile. Par jugement du 27 juin 2019, le tribunal paritaire des baux ruraux de Saint-Avold a : – autorisé M. [K] à céder le bail conclu avec la commune de [Localité 4] le 8 décembre 2000 et relatif aux parcelles cadastrées ban de [Localité 4] section 7 [Cadastre 7] et section 9 [Cadastre 6], à sa fille majeure Mme [U] [K] – débouté la commune de [Localité 4] de l’ensemble de ses demandes – condamné la commune de [Localité 4] à verser à M. [K] la somme de 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens. Le tribunal a dit que M. [K] est toujours associé de la SCEA Morschborn et que la MSA atteste qu’au 1er mars 2019 il est toujours affilié en tant que membre non salarié agricole à titre principal, que s’il a initié des démarches pour faire valoir ses droits à la retraite il les a interrompues et poursuivi son activité, que la preuve d’une cession effective du bail entre M. [K] et sa fille n’est pas rapportée, que celle-ci n’est pas associée de la SCEA Morschborn, qu’aucune pièce n’atteste qu’elle exploite seule les parcelles et que les statuts de cette société ne mentionnent pas son nom. Il en a déduit que la commune de [Localité 4] ne démontre pas l’existence d’une faute commise par le locataire au titre d’une cession irrégulière de son bail et l’a déboutée de sa demande de résiliation de ce bail. Il a observé que M. [K] justifie par ses pièces de la compétence de sa fille majeure au titre de la reprise du bail, que celle-ci at fait l’acquisition à compter du 23 mai 2019 de plusieurs parcelles de terres à vocation agricole et démontre ainsi sa volonté d’étendre l’exploitation, considérant que ces éléments justifient d’autoriserla cession du bail conclu le 8 décembre 2000 au profit de Mme [K]. Par déclaration déposée au greffe le 17 juillet 2019, la commune de [Localité 4] a interjeté appel du jugement du 27 juin 2019 en ce qu’il a autorisé M. [K] à céder le bail conclu avec elle le 8 décembre 2000 et relatif aux parcelles cadastrées ban de [Localité 4] section 7 [Cadastre 7] et section 9 [Cadastre 6] à sa fille majeure Mme [U] [K], l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée à verser à M. [K] la somme de 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens. Par arrêt avant dire droit du 17 décembre 2020, la cour a ordonné à la Mutualité Sociale Agricole Lorraine de fournir les relevés de situation individuelle de M. [S] [K] (dossier 1 58 05 57 606 067 (N571)) pour l’intégralité des années 2018 et 2019. Lors de l’audience de renvoi, la commune de [Localité 4] demande à la cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et de : – débouter M. [K] de sa demande d’autorisation de cession du bail conclu avec elle – prononcer la résiliation du bail consenti à M. [K] et portant sur les parcelles section 7 [Cadastre 7] et section 9 [Cadastre 6] situées à [Localité 4] – condamner M. [K] ainsi que tous occupants de son chef à quitter les parcelles litigieuses dès le prononcé de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard – le condamner à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens. La commune de [Localité 4] rappelle que l’article L.411-35 du code rural pose comme principe d’ordre public l’incessibilité du bail rural et que la dérogation à ce principe ne peut bénéficier qu’au cédant de bonne foi qui n’a pas commis de manquement aux obligations de son bail. Elle expose que M. [K] lui a indiqué prendre sa retraite au 1er juin 2018, qu’il s’est rétracté en l’informant adhérer à la SCEA Morschborn en mettant à sa disposition l’exploitation des parcelles louées, que sa fille a demandé ensuite la cession du bail à son profit, que l’intimé a cessé au moins temporairement d’exploiter les parcelles qui apparaissaient libres de tout exploitant à la MSA le 5 juillet 2018, qu’il s’est notamment inscrit sur la liste des électeurs de la chambre d’agriculture comme ‘ancien exploitant’et qu’un autre de ses bailleurs atteste que les parcelles louées sont devenues libres à la suite de son départ à la retraite. Elle précise que M. [K] a ainsi contrevenu à l’obligation essentielle d’exploiter de manière continue et permanente attachée au bail et que ce manquement constitutif de mauvaise foi le prive du droit de demander la cession de ce contrat de location au profit d’un descendant. L’appelante ajoute que la MSA a indiqué suite à la demande de la cour, que le versement de la pension vieillesse de M. [K] était suspendu depuis le mois de février 2021 parce qu’elle n’avait constaté ‘aucune formalité de sortie de la SCEA Morschborn matérialisant une cessation d’activité effective’, que ce courrier confirme clairement que l’intimé a demandé la liquidation de sa retraite et que la MSA lui a versé une pension. Elle précise que dans une autre procédure devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Saint-Avold opposant M. [K] à une autre propriétaire pour un litige similaire, la MSA a indiqué que le 3 mars 2021, l’intimé a fait une déclaration sur l’honneur de cessation d’activité au 31 décembre 2020, ce qui selon elle constitue un acte positif clair et non équivoque de M. [K]. Elle ajoute que l’absence de bulletin de mutation qui selon l’intimé est le seul document de nature à établir une cessation d’activité, est indifférente, la parcelle n’étant plus inscrite au nom de M. [K] depuis 2018. Elle fait par ailleurs valoir qu’il n’est prouvé ni que Mme [K] détient le matériel nécessaire, ni qu’elle a les capacités financières d’exploiter, ni qu’elle est en règle avec la législation relative au contrôle des structures agricoles, ni qu’elle est dispensée de l’autorisation d’exploiter, M. [K] ne justifiant pas de la situation professionnelle de sa fille, ni de sa volonté et capacité effective d’exploiter personnellement les parcelles. Elle précise que Mme [K] exerce un emploi salarié dans une société située à plus d’une heure de route des parcelles, que son domicile n’a pas été précisé, qu’il n’est pas justifié de la possibilité de concilier cette activité avec une activité agricole, que Mme [K] n’exploite pas les parcelles objet du litige et n’est toujours pas installée comme exploitante agricole alors même que le jugement déféré est exécutoire par provision. Elle en déduit que tant la situation du cédant que celle du cessionnaire contreviennent aux conditions exigées pour la cession du bail rural. L’appelante soutient enfin que sa demande de résiliation du bail pour cause de cession non autorisée est bien fondée aux motifs que, lorsque M. [K] a cessé d’exploiter temporairement les parcelles, il a nécessairement permis à un tiers, en l’occurrence à la SCEA Morschborn, de les exploiter, que cette société ne pouvait plus régulièrement les exploiter par voie de mise à disposition dès lors que M. [K] ne remplissait plus lui-même les conditions d’exploitation effective et permanente exigées par l’article L.411-37 III du code rural et que l’infraction au contrat est constituée et non régularisable, justifiant le prononcé de la résiliation du bail. M. [K] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, débouter la commune de [Localité 4] de sa demande de résiliation de bail et la condamner à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel ainsi qu’aux dépens. Il expose avoir toujours respecté ses obligations de locataire, conteste qu’une cession de bail au profit de sa fille soit intervenue avant que le tribunal lui donne cette autorisation, admet avoir envisagé de prendre sa retraite mais être revenu sur ses intentions en raison du refus de la commune d’autoriser la cession du bail. Il ajoute que les parcelles ont toujours été exploitées par la SCEA Morschborn et que les parts d’associé dont il est le détenteur n’ont pas été cédées à sa fille comme le soutient l’appelante, le procès-verbal d’assemblée générale de cette société en date du 18 octobre 2018, postérieur au prétendu acte de cession du 29 mars 2018, ne mentionnant que deux associés, lui-même et M. [R] [V]. M. [K] indique que sa fille exploitera les parcelles au sein de la SCEA Morschborn dont il justifie qu’elle dispose de tout le cheptel et le matériel nécessaires, qu’elle est titulaire notamment d’une licence professionnelle en logistique globale et d’un baccalauréat technologique en science et technologie et technologie de l’agronomie et du vivant et qu’en raison de sa capacité professionnelle, elle est dispensée d’autorisation conformément aux dispositions de l’article L.331-2 du code rural. L’intimé ajoute qu’il est normal qu’elle commence sa nouvelle activité lorsque le jugement sera devenu définitif et qu’elle vient d’acquérir 12 hectares sur les communes d'[Localité 3] et [Localité 5], ce qui démontre le sérieux de son projet d’installation. Il fait valoir que selon les documents transmis par la MSA à la suite de l’arrêt avant dire droit, les cotisations ont bien été réglées pour l’année 2018, que pour l’année 2019, les points ne figurent pas sur le relevé parce qu’il présentait un arriéré de cotisation de 1.980,09 euros prélevé depuis sur son compte et qu’il produit les relevés des années 2020 et 2021 en précisant que pour les échéances mensuelles de mars, avril et mai 2020, la MSA n’a procédé à aucun prélèvement compte tenu de la période de Covid. M. [K] fait valoir qu’il résulte également des explications de la MSA qu’il n’a pas fourni les documents justificatifs de sa cessation d’activité malgré les relances qui consistent en un bulletin de mutation des terres au profit du nouvel exploitant de celles-ci, daté et signé à la fois par l’exploitant cédant et par l’exploitant cessionnaire, que l’absence d’établissement de ce document suffit à démontrer qu’il n’a pas cédé son exploitation, qu’il a entamé une procédure de mise en retraite début 2021en pensant que la cession de ses baux ne poserait pas de difficulté et que compte tenu de la résistance de la commune et d’une autre bailleresse il a cessé ses démarches. Il soutient être toujours associé exploitant agricole au sein de la SCEA Morschborn, cotiser à ce titre à la MSA et n’avoir pas procédé à une cession de bail au profit de sa fille, le fait d’avoir perçu pendant deux mois sa pension vieillesse qu’il a remboursée ne pouvant justifier la résiliation du bail. A l’audience du 28 avril 2022, les parties représentées, ont repris oralement leurs conclusions déposées le 26 avril 2022 par la commune de [Localité 4] et le 26 avril 2022 par M. [K]. MOTIFS DE LA DÉCISION Sur l’autorisation de cession de bail L’article L.411-35 du code rural et de la pêche maritime dispose que sous réserve des dispositions particulières aux baux cessibles hors cadre familial et nonobstant les dispositions de l’article 1717 du code civil, toute cession de bail est interdite, sauf si la cession est consentie avec l’agrément du bailleur, au profit du conjoint ou du partenaire d’un pacte civil de solidarité du preneur participant à l’exploitation ou aux descendants du preneur ayant l’âge de la majorité ou ayant été émancipé. A défaut d’agrément du bailleur, la cession peut être autorisée par le tribunal paritaire. La faculté de cession exceptionnelle doit être réservée au preneur de bonne foi qui s’est constamment acquitté de ses obligations. La commune de [Localité 4] s’oppose à la cession à Mme [U] [K] du bail à ferme qu’elle a consenti le 8 décembre 2000 à son père M. [K], au motif notamment que celui-ci a manqué à ses obligations, en particulier qu’il a cessé d’exploiter les parcelles objet de ce contrat en raison de son départ en retraite. Cependant, c’est en vain qu’elle fait valoir que le 3 mars 2021 M. [K] a fait une déclaration sur l’honneur de cessation d’activité à la date du 31 décembre 2020, que la MSA lui a versé une pension de retraite au début de l’année 2021 et que par voie de conséquence il a cessé de procéder à l’exploitation des parcelles, alors que la bonne foi s’apprécie à la date de la demande en justice en autorisation de cession et que M. [K] a initié sa demande d’autorisation de cession devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Saint-Avold le 16 novembre 2018. Il s’ensuit que ces éléments postérieurs à la demande de plus de deux ans ne sont pas de nature à caractériser la mauvaise de foi du preneur. S’agissant de l’exploitation des parcelles par le preneur à la date de la demande en autorisation de cession de bail, les documents de la MSA versés aux débats ne font apparaître aucune déclaration de cessation d’activité et de demande de liquidation des droits à la retraite de M. [K] au cours de l’année 2018 et des exercice antérieurs, le relevé intégral de sa carrière attestant au contraire du versement de tous les trimestres de cotisation de retraite jusqu’à la fin de l’année 2018. Il n’est pas plus établi qu’au cours de cette même année, M. [K] a cédé à sa fille ses parts de la SCEA Morschborn comme le soutient l’appelante. Le document produit à cet effet en copie peu lisible (pièce n° 3), fait uniquement état d’une cession partielle consentie par M. [K] à Mme [K], sans préciser l’objet de ladite cession, ni même mentionner la SCEA Morschborn et le procès-verbal de l’assemblée générale annuelle de cette société en date du 18 octobre 2018 mentionne seulement deux associés, M. [S] [K] et de M. [R] [V] et rien ne permet de considérer qu’au cours des mois précédents une cession serait intervenue au profit de Mme [K] qui aurait ensuite recédé ses parts à son père. L’attestation de Mme [X] (pièce n°11) déclarant qu’à la suite du départ en retraite de M. [K], elle a procédé à la vente des terrains qu’elle lui louait en 2018, n’est pas davantage de nature à établir les allégations de la commune de [Localité 4]. En effet, le fait que M. [K] a cessé l’exploitation d’autres parcelles que celles qui sont l’objet du litige ne permet pas d’en déduire valablement qu’il a mis un terme à la totalité de son activité d’exploitant et ce d’autant moins, que son prétendu départ en retraite à l’époque est démenti par le relevé de son organisme social. Enfin, l’inscription du preneur sur les listes électorales en tant ‘qu’ancien exploitant’ est insuffisamment significative à elle seule, pour établir la fin de l’exploitation par M. [K] des parcelles litigieuses, dès lors que celui-ci admet avoir envisagé à l’époque sa mise en retraite avant de se raviser et que cette inscription intervient sur déclaration de l’intéressé, sans donner lieu à des vérifications. Il s’en déduit que la preuve de la mauvaise foi du preneur à la date de la demande, consistant à ne pas avoir participé de façon effective et permanente à l’exploitation des parcelles que la commune de [Localité 4] lui a donné en location, n’est pas rapportée. Il n’est n’est ni justifié, ni même allégué d’un autre manquement de M. [K] à ses obligations. Toutefois, l’autorisation de céder est également subordonnée à la capacité du cessionnaire de satisfaire aux obligations nées du bail, de sorte que pour ne pas nuire aux intérêts légitimes du bailleur, le candidat cessionnaire doit en particulier remplir les conditions suivantes : – posséder le cheptel et le matériel nécessaires à l’exploitation ou, à défaut les moyens de les acquérir et de financer les investissements nécessaires à l’installation – disposer d’un diplôme, d’un certificat ou d’une expérience professionnelle ou à défaut, d’une autorisation administrative d’exploiter – respecter les dispositions concernant le contrôle des structures, – avoir la volonté réelle d’exploiter compte tenu notamment d’une éventuelle activité professionnelle non agricole exercée en parallèle et du lieu d’habitation s’il est différent du lieu d’exploitation. En l’espèce, il est démontré que Mme [K] est notamment titulaire d’un baccalauréat technologique en sciences et technologie de l’agronomie et du vivant et d’une licence professionnelle en logistique globale et éco-responsabilité. Si M. [K] indique que lorsque l’autorisation de cession sera confirmée, il cédera ses parts de la SCEA Morschborn à sa fille qui exploitera les parcelles au sein de cette société, l’intimé ne justifie pas que la SCEA Morschborn dispose du cheptel et du matériel nécessaires, comme allégué dans ses conclusions. Il est tout au plus établi que cette société dispose de trois tracteurs (pièces n°17, 18 et 19) et d’un bâtiment de 1700 mètres carrés avec une salle de traite (pièce n°14 page 2), pour le reste, il est uniquement produit la copie d’une page extraite d’un ‘compte rendu de visite’ de février 2016, non signé, antérieur de plus d’un an à la constitution de la SCEA Morschborn qui n’est pas citée, mentionnant l’existence d’un cheptel de ’33 vl et la suite’sans autre précision et chiffrant sommairement le matériel à 20.000 euros sans aucun détail. Ce document est dépourvu de valeur probante. Il ressort par ailleurs des pièces versées aux débats par la commune de [Localité 4] que Mme [K] occupe actuellement un emploi au sein de la SAS Norma France située à Briey, commune distante de 90 kilomètres environ des parcelles litigieuses et il n’est fourni aucune explication sur la manière dont Mme [K], candidate cessionnaire dont le domicile n’est pas justifié, entend exploiter personnellement les terres en cause et en particulier sur la manière dont elle conciliera sa profession non agricole avec cette exploitation. Il est relevé enfin que nonobstant l’exécution provisoire dont est assorti le jugement déféré, Mme [K] ne s’est pas consacrée immédiatement à l’exploitation des parcelles litigieuses en participant aux travaux de façon effective et permanente. Même si la décision a été frappée d’appel, l’intimé ne peut valablement soutenir qu’il est normal que sa fille ne débute sa nouvelle activité que lorsque le jugement sera définitif, dès lors que lui- même a parallèlement cessé l’exploitation personnelle au moins pour un temps des parcelles que comporte cette nouvelle activité, tel qu’il l’a déclaré à la MSA le 3 mars 2021 en sollicitant la liquidation de ses droits à la retraite. Il s’ensuit qu’il n’est pas établi que Mme [K], candidate à la cession, a la capacité de satisfaire aux obligations nées du bail, notamment qu’elle a la volonté effective et réelle d’exploiter personnellement les terres en causes. Le jugement est donc infirmé et M. [K] est débouté de sa demande tendant à être autorisé à céder le bail qu’il a conclu avec la commune de [Localité 4] le 8 décembre 2000, à sa fille Mme [K]. Sur la demande de résiliation du bail Selon l’article L.411-31 du rural et de la pêche maritime, le bailleur peut solliciter la résiliation du bail s’il justifie notamment d’une contravention aux dispositions de l’article L.411-35. En l’espèce, c’est à juste titre que le premier juge a débouté la commune de [Localité 4] de sa demande de résiliation du bail à ferme en invoquant une cession de bail au profit de la SCEA Morschborn faute par M. [K] d’exploiter personnellement les parcelles. En effet, les motifs de la résiliation doivent s’apprécier au jour de la demande en justice et la demande de la commune de [Localité 4] a été présentée reconventionnellement devant le premier juge par voie de conclusions du 5 février 2019, reprise oralement à l’audience du 13 juin 2019. Comme il l’a été exposé ci-avant, la déclaration sur l’honneur de cessation d’activité de M. [K] dont se prévaut l’appelante est en date du 3 mars 2021 relative à une cessation d’activité au 31 décembre 2020, est postérieure de plus d’un an à la demande de la commune. Il n’est pas démontré qu’avant cette date, l’intimé n’a plus participé même temporairement, à l’exploitation des parcelles en cause de façon effective et permanente. Le relevé intégral de la carrière de M. [K] établi par la MSA atteste du versement de tous les trimestres de cotisation de retraite jusqu’à la fin de l’année 2018 et si le même document ne mentionne aucun trimestre pour l’année 2019, il précise que c’est parce que l’intéressé n’est pas à jour de cotisation et non qu’il a cessé ses activités. La preuve d’un manquement de M. [K] à ses obligations à la date de la demande en résiliation, en particulier d’une cession prohibée de son bail, n’est donc pas rapportée. Le jugement est confirmé. Sur les frais irrépétibles et les dépens Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont infirmées. Chacune des parties qui succombe en ses prétentions supportera ses propres dépens d’instance et d’appel. M. [K] et la commune de [Localité 4] sont par ailleurs déboutés de leurs demandes respectives sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. PAR CES MOTIFS LA COUR, CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a : – débouté la commune de [Localité 4] de sa demande tendant au prononcé de la résiliation du bail qu’elle a consenti à M. [S] [K] le 8 décembre 2000, portant sur les parcelles section 7 [Cadastre 7] et section 9 [Cadastre 6] situées à [Localité 4] – débouté la commune de [Localité 4] de sa demande tendant à la condamnation de M. [K] ainsi que tous occupants de son chef à quitter les parcelles litigieuses sous peine d’astreinte ; L’INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau, DÉBOUTE M. [S] [K] de sa demande tendant à être autorisé à céder le bail qu’il a conclu avec la commune de [Localité 4] le 8 décembre 2020, à sa fille Mme [U] [K] ; DÉBOUTE M. [S] [K] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile; DÉBOUTE la commune de [Localité 4] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ; DIT que chaque partie supportera ses dépens de première instance et d’appel. LE GREFFIER LE PRESIDENT
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