Cour d’appel de Lyon, 27 janvier 2025, RG n° 24/00137
Cour d’appel de Lyon, 27 janvier 2025, RG n° 24/00137

Type de juridiction : Contrats / CGV

Juridiction : Cour d’appel de Lyon

Thématique : Conflit commercial et obligations contractuelles : enjeux de l’exécution provisoire

Résumé

Contexte de l’affaire

La société importatrice, désignée ici comme l’importateur, a collaboré avec la société d’intérêt collectif agricole, désignée comme le fournisseur, depuis octobre 2014. Le 20 janvier 2024, le fournisseur a mis fin à cette collaboration, invoquant un non-respect des objectifs d’achat convenus.

Procédure en référé

Le 14 mars 2024, l’importateur a saisi le tribunal de commerce en référé pour obtenir la reprise des livraisons. Le 29 mars 2024, le tribunal a ordonné au fournisseur de reprendre les livraisons sous astreinte de 2 000 € par commande non honorée, et a condamné le fournisseur à verser 3 000 € à l’importateur au titre des frais de justice.

Appel du fournisseur

Le 12 avril 2024, le fournisseur a interjeté appel de cette décision, et l’affaire a été fixée pour audience le 1er avril 2025. L’importateur a ensuite demandé la radiation de l’affaire et la condamnation du fournisseur à verser 1 000 € supplémentaires pour frais de justice.

Arguments de l’importateur

Lors de l’audience du 13 janvier 2025, l’importateur a soutenu qu’il ne pouvait plus honorer les commandes de ses autres clients en raison du refus du fournisseur de livrer. Il a contesté les conditions générales de vente du fournisseur, jugées inapplicables.

Arguments du fournisseur

Le fournisseur a demandé le rejet de la demande de radiation et a soulevé des arguments reconventionnels, notamment l’impossibilité d’exécuter la décision du tribunal en raison d’un engagement contractuel avec un autre distributeur. Il a également contesté la validité de l’assignation de l’importateur et a demandé l’arrêt de l’exécution provisoire.

Décision du tribunal

Le tribunal a rejeté la demande de radiation de l’importateur, soulignant qu’il n’avait pas justifié l’exécution de l’ordonnance de référé. De plus, il a estimé que le maintien de l’exécution provisoire ne présentait pas de conséquences manifestement excessives pour le fournisseur.

Résistance abusive

L’importateur a également demandé des dommages-intérêts pour résistance abusive, mais cette demande a été déclarée irrecevable, le tribunal ne pouvant évaluer le caractère abusif sans examiner les chances de succès des demandes initiales.

Dépens et frais

Les deux parties ont été condamnées à supporter leurs propres dépens, et les demandes de frais irrépétibles ont été rejetées. Le fournisseur a également vu sa demande de dépens de première instance et d’appel rejetée.

N° R.G. Cour : N° RG 24/00137 – N° Portalis DBVX-V-B7I-PYJB

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE

DU 27 Janvier 2025

DEMANDERESSE :

Société IMBERT JAPAN CO LTD prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2],

[Adresse 4], JAPON

Représentée par Me Guillaume BAULIEUX substituant Me Emmanuel MOUCHTOURIS de la SELARL SOCIETE D’AVOCATS SAINT CYR AVOCATS, avocat au barreau de LYON (toque 1830)

DEFENDERESSE :

Société SICODIS SICA – Société d’Intérêt Collectif Agricole au capital de 38.112€, immatriculée au RCS de LYON sous le numéro 331 108 431

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Laurent LELIEVRE de la SELARL SAINT-EXUPERY AVOCATS, avocat au barreau de LYON (toque 716)

Audience de plaidoiries du 13 Janvier 2025

DEBATS : audience publique du 13 Janvier 2025 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 31 décembre 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée le 27 Janvier 2025 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

La société Imbert Japan Co Ltd (Imbert) a importé au Japon les produits commercialisés par la société d’intérêt collectif agricole Sicodis depuis octobre 2014. Par un courriel du 20 janvier 2024, la société Sicodis a mis fin à la collaboration au motif du non-respect des objectifs d’achat convenus.

Par assignation en référé du 14 mars 2024, la société Imbert a saisi en référé le président du tribunal de commerce afin d’obtenir la reprise des livraisons par la société Sicodis.

Par ordonnance de référé contradictoire rendue le 29 mars 2024, cette juridiction a :

– ordonné à la société Sicodis la reprise des livraisons des commandes de la société Imbert aux nouvelles conditions acceptées, ce sous astreinte de 2 000 € par commande non honorée,

– ordonné le maintien des conditions précitées jusqu’au 31 [30] septembre 2024,

– condamné la société Sicodis à payer à la société Imbert la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens de l’instance,

Par déclaration du 12 avril 2024, la société Sicodis a relevé appel de cette décision reprenant l’ensemble du dispositif de cette ordonnance. L’affaire a été fixée devant la cour d’appel à l’audience du 1er avril 2025.

Par assignation en référé du 18 juin 2024, la société Imbert demande au premier président de prononcer le retrait de l’affaire du rôle de la cour, la radiation de l’affaire, et la condamnation de la société Sicodis à lui verser la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

A l’audience du 13 janvier 2025 devant le délégué du premier président, les parties, comparantes et régulièrement représentées, s’en sont remises à leurs écritures qu’elles ont soutenues oralement.

Dans son assignation, la société Imbert affirme qu’elle n’est plus en mesure d’honorer les commandes de ses autres clients à la suite du refus de la société Sicodis de la livrer. Elle fait valoir que pour justifier le refus d’honorer les commandes passées, la société Sicodis met en avant ses conditions générales de ventes, dont elle avait pourtant relevé le caractère inapplicable devant le juge des référés du tribunal de commerce.

Dans ses conclusions dites rectificatives déposées au greffe par RPVA le 7 novembre 2024, la société Sicodis demande au délégué du premier président de :

– débouter la société Imbert de sa demande de radiation de la procédure d’appel,

– à titre reconventionnel :

arrêter l’exécution provisoire de l’ordonnance de référé rendue le 29 mars 2024 par le président du tribunal de commerce de Lyon,

condamner la société Imbert à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

La société Sicodis soutient l’impossibilité d’exécuter la décision provisoire contre laquelle elle a aussitôt interjeté appel puisque consécutivement à l’arrêt de sa relation commerciale avec la société Imbert, elle s’est engagée par contrat à la distribution exclusive sur le territoire japonais avec la société Shoei et en conclut une impossibilité de faire droit à la demande de radiation.

A titre reconventionnel, la société Sicodis demande l’arrêt de l’exécution provisoire au motif que le maintien forcé de la relation contractuelle l’empêcherait notamment de poursuivre avec un autre distributeur japonais avec lequel elle a convenance à consentir une exclusivité et caractériserait dès lors une conséquence manifestement excessive.

Elle invoque la nullité de l’assignation en ce que celle-ci est muette sur le fondement juridique invoqué par la société Imbert qui l’autoriserait à exiger de la société Sicodis qu’elle accepte et honore les commandes qui lui sont adressées. Ensuite, elle soulève la nullité de l’ordonnance du 29 mars 2024 pour défaut de motivation puisqu’il n’existe aucun texte légal qui aurait permis au juge des référés d’ordonner le maintien d’un contrat non écrit.

Elle fait également valoir l’application du droit japonais à l’exclusion du droit français. Enfin, elle considère enfin que les demandes présentées par la société Imbert sont mal fondées au motif que cette dernière sollicite l’application d’un contrat non écrit, ne formule aucune demande tirée d’une prétendue brutalité de rupture des relations et demande sa condamnation à accepter des commandes jusqu’à la fin de l’année 2024 sans justifier du moindre texte légal qui l’autoriserait à déroger au principe de liberté contractuelle.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe par RPVA le 8 janvier 2025, la société Imbert maintient les demandes formulées dans ses précédentes conclusions et demande en outre la condamnation de la société Sicodis à lui verser la somme de 5 000 € au titre de sa résistance abusive.

Elle affirme que les conséquences manifestement excessives invoquées par la société Sicodis sont inexistantes et que la compétence du premier président pour examiner les moyens d’infirmation ou d’annulation qu’elle invoque est par définition exclue.

Elle considère qu’aucune nullité de l’assignation devant le juge des référés n’est susceptible d’être retenue en ce que la société Sicodis avait connaissance du fondement juridique de ses demandes basées sur les articles 1103, 1217 à 1231-7 du Code civil et ne justifie pas d’un grief au sens de l’article 114 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir que l’ordonnance dont appel a été motivée et qu’elle l’approuve en ce qu’elle a retenu la compétence du juge des référés du tribunal de commerce de Lyon comme la loi applicable en application du règlement Rome I, comme en ce qu’elle a retenu l’imputabilité comme le motif de la rupture.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe par RPVA le 10 janvier 2025, la société Sicodis maintient les prétentions contenues dans ses précédentes écritures.

Elle argumente de plus fort sur les moyens d’annulation et de réformation qu’elle invoque.

Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l’exposé des moyens à l’énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.

PAR CES MOTIFS

Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,

Vu la déclaration d’appel du 12 avril 2024,

Rejetons les demandes principale de radiation de l’instance d’appel et reconventionnelle d’arrêt de l’exécution provisoire présentées par les parties,

Déclarons irrecevable la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive présentée par la société Imbert Japan Co Ltd,

Disons que chaque partie garde la charge de ses propres dépens inhérents à la présente instance en référé et rejetons les demandes présentées par les parties au titre des frais irrépétibles,

Rejetons la demande présentée par la société d’intérêt collectif agricole Sicodis au titre des dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE

 


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