Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Chambéry
Thématique : Prêt hypothécaire : contestation des conditions et prescription des actions.
→ RésuméPar acte notarié en date du 15 janvier 2009, un emprunteur et une emprunteuse ont contracté un prêt viager hypothécaire auprès d’une banque pour un montant de 218 000 euros à un taux d’intérêt de 8,95 % par an, avec affectation hypothécaire d’un bien immobilier. Ce prêt a été précédé d’une offre préalable en novembre 2008. En août 2022, les emprunteurs ont signé un compromis de vente de leur appartement pour 800 000 euros, suivi d’une réitération de la vente en novembre 2022.
En novembre 2022, la banque a réclamé le paiement d’une somme de 716 051,95 euros en principal et intérêts, ainsi que des intérêts intercalaires. Les emprunteurs ont contesté les conditions du prêt et demandé la restitution des sommes versées, mais la banque a refusé. En janvier 2023, les emprunteurs ont assigné la banque pour obtenir l’annulation du prêt ou, à défaut, une indemnisation pour préjudice, invoquant la responsabilité contractuelle de la banque. Le décès de l’emprunteur a eu lieu en 2023, laissant son épouse et deux héritières dans la procédure. La banque a soulevé l’irrecevabilité de l’action pour cause de prescription, tandis que les demandeurs ont soutenu la recevabilité de leurs demandes. En mars 2024, le tribunal a déclaré recevables les actions en nullité et en responsabilité, condamnant la banque aux dépens et à verser une somme aux héritières. La banque a interjeté appel, demandant la déclaration de prescription de l’action des emprunteurs. En réponse, les héritières ont demandé la confirmation de l’ordonnance initiale. La cour a confirmé l’ordonnance, rejetant les demandes de la banque et condamnant celle-ci à verser des frais aux héritières, tout en déboutant les héritières du surplus de leurs demandes. |
N° Minute : 2C25/143
COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 03 Avril 2025
N° RG 24/00420 – N° Portalis DBVY-V-B7I-HOG4
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge de la mise en état d’ANNECY en date du 15 Mars 2024, RG 23/00267
Appelante
S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE dont le siège social est sis [Adresse 5] prise en la personne de son représentant légal
Représentée par la SCP BREMANT GOJON GLESSINGER SAJOUS, avocat postulant au barreau D’ANNECY et Me Patrick VIDAL DE VERNEIX, avocat plaidant au barreau de PARIS
Intimées
Mme [U] [S] [H] veuve [Y]
née le [Date naissance 3] 1927 à [Localité 13], demeurant [Adresse 11]
Mme [R] [F] [H] épouse [T]
née le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 12], demeurant [Adresse 8]
Mme [I] [J] [G] [H] épouse [E]
née le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 10], demeurant [Adresse 6] – ETATS-UNIS
Représentées par Me Christian FORQUIN, avocat postulant au barreau de CHAMBERYet la SCP LACHAT MOURONVALLE, avocat plaidant au barreau de GRENOBLE
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l’audience publique des débats, tenue le 21 janvier 2025 avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière présente à l’appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré, à laquelle il a été procédé au rapport,
Et lors du délibéré, par :
– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente
– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte notarié en date du 15 janvier 2009, M. [W] [H] et Mme [U] [H] ont souscrit un emprunt auprès du Crédit Foncier de France, sous forme d’un prêt viager hypothécaire pour un montant de 218 000 euros au taux de 8,95% l’an.
Cet emprunt emportait affectation hypothécaire du bien acquis sis [Adresse 7] à [Localité 9].
Ce prêt a été précédé d’une offre préalable en date du 4 novembre 2008.
Courant août 2022, les époux [H] ont signé un compromis de vente de leur appartement pour la somme de 800 000 euros, la vente ayant ultérieurement été réitérée le 25 novembre 2022.
Selon décompte au 2 novembre 2022, le Crédit Foncier de France a sollicité le règlement de la somme de 716 051,95 euros en principal et intérêts. Ultérieurement, la banque a sollicité le règlement des intérêts intercalaires à hauteurs de 1 068,11 euros.
Par courrier du 22 novembre 2022, les époux [H] ont demandé la restitution de l’intégralité des sommes versées en exécution du contrat de prêt hypothécaire, ces derniers contestant les conditions dans lesquelles le crédit leur a été octroyé. Le Crédit Foncier de France a refusé de faire droit à leurs demandes par courrier du 13 décembre 2022.
Aussi, par acte du 27 janvier 2023, les époux [H] ont fait assigner le Crédit Foncier de France aux fins notamment d’obtenir l’annulation du prêt ou, à titre subsidiaire, l’indemnisation de leur préjudice sur le fondement de la responsabilité contractuelle de la banque.
M. [H] est décédé le [Date décès 4] 2023, laissant pour lui succéder son épouse ainsi que Mmes [N] [T] et [I] [E]. Ces dernières sont intervenues volontairement à la procédure.
Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 10 novembre 2023, le Crédit Foncier de France a soulevé l’irrecevabilité de l’action pour cause de prescription.
Les demandeurs ont pour leur part conclu à la recevabilité de leurs demandes.
Par ordonnance contradictoire du 15 mars 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d’Annecy a :
– déclaré recevable l’action en nullité du contrat de prêt pour vice du consentement, pour absence de prescription,
– déclaré recevable l’action aux fins de réputer non-écrite une clause abusive, pour absence de prescription,
– déclaré recevable l’action en responsabilité contractuelle pour manquement de la banque à son devoir d’information, pour absence de prescription,
– condamné le Crédit Foncier de France aux entiers dépens de l’incident,
– condamné le Crédit Foncier de France à payer la somme de 3 500 euros à Mme [H], Mme [T] et Mme [E], prises indivisément, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté le Crédit Foncier de France de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état électronique du 2 mai 2024 pour conclusions du Crédit Foncier de France au fond.
Par acte du 22 mars 2024, le Crédit Foncier de France a interjeté appel de la décision.
Par ordonnance du 10 avril 2024, l’affaire a été fixée à bref délai à l’audience du 21 janvier 2025.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 16 décembre 2024, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, le Crédit Foncier de France demande à la cour de :
– le déclarer recevable et bien fondé en son appel,
En conséquence,
– infirmer en toutes ses dispositions, l’ordonnance déférée,
En conséquence, en application des dispositions des articles 1134 et 2224 du code civil,
– déclarer prescrite l’action engagée le 27 janvier 2023 par les consorts [H] devant le
tribunal judiciaire d’Annecy et la demande tendant à voir prononcer la nullité de l’acte de prêt du 15 janvier 2009 et à se voir octroyer des dommages et intérêts,
– les déclarer irrecevables en leur action,
– condamner les consorts [H] à lui payer une somme de 8 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner les consorts [H] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
En réplique, dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 28 novembre 2024, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, Mmes [H], [T] et [E] demandent communément à la cour de :
– confirmer en tout point l’ordonnance déférée,
– rejeter les demandes de la partie adverse,
En conséquence,
– déclarer recevable l’action engagée par les époux [H] et leurs héritiers fondée d’une part sur le vice du consentement, d’autre part, sur le caractère abusif de la clause et enfin sur la responsabilité liée au défaut de mise en ‘uvre du devoir de mise en garde du banquier,
– les déclarer recevables en leur action,
– condamner le Crédit Foncier de France au paiement d’une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner le Crédit Foncier de France à 8 000 euros de dommage et intérêt au titre du caractère abusif de l’appel,
– condamner le Crédit Foncier de France aux entiers dépens de l’instance.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Confirme l’ordonnance déférée,
Y ajoutant,
Déboute le Crédit Foncier de France de l’ensemble de ses demandes,
Condamne le Crédit Foncier de France aux dépens d’appel,
Condamne le Crédit Foncier de France à payer la somme de 3 000 euros à Mmes [U] [H], [N] [T] et [I] [E], prises indivisément, au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute Mmes [U] [H], [N] [T] et [I] [E] du surplus de leurs demandes.
Ainsi prononcé publiquement le 03 avril 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente
Copies :
03/04/2025
la SCP BREMANT GOJON GLESSINGER SAJOUS
Me Christian FORQUIN
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