Cour d’appel de Bordeaux, 3 avril 2025, RG n° 23/02734
Cour d’appel de Bordeaux, 3 avril 2025, RG n° 23/02734

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Bordeaux

Thématique : Requalification d’une rupture de contrat en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Résumé

Une salariée, engagée en qualité de chauffeur accompagnateur par la société Wetterwald Transport Tourisme, a vu son contrat de travail transféré suite à la perte d’un marché public. Informée par courriel du transfert de son contrat à une autre société, elle a refusé ce transfert. Par la suite, la société Wetterwald a considéré qu’elle avait démissionné et a établi des documents attestant de cette démission. La salariée a contesté ce motif, affirmant n’avoir jamais démissionné et a saisi le conseil de prud’hommes pour requalifier la rupture de son contrat en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le conseil de prud’hommes a jugé que la salariée n’avait pas démissionné et a requalifié la rupture en licenciement, condamnant la société à verser des indemnités. La salariée a ensuite interjeté appel, demandant la réformation du jugement sur certains points, notamment concernant les dommages et intérêts pour licenciement abusif. De son côté, la société Wetterwald a contesté la décision, arguant que la rupture était due à la démission de la salariée.

La cour a confirmé que la rupture du contrat était à l’initiative de l’employeur et a requalifié la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle a condamné la société à verser des indemnités de licenciement et des dommages et intérêts pour la perte d’emploi. La cour a également statué sur les frais de justice, condamnant la société à payer des frais irrépétibles à la salariée. En conclusion, la cour a jugé que la salariée avait droit à une indemnisation adéquate en raison de la rupture injustifiée de son contrat de travail.

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION B

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ARRÊT DU : 3 AVRIL 2025

PRUD’HOMMES

N° RG 23/02734 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NJOK

Madame [U] [M]

c/

S.A.R.L. WETTERWALD TRANSPORT TOURISME

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée aux avocats le :

à :

Me Romain SINATRA, avocat au barreau de LIBOURNE

Me Jean-jacques DAHAN, avocat au barreau de BORDEAUX

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 mai 2023 (R.G. n°2021-786) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d’appel du 08 juin 2023,

APPELANTE :

[U] [M]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Louis GAUDIN substituant Me Romain SINATRA, avocat au barreau de LIBOURNE

INTIMÉE :

S.A.R.L. WETTERWALD TRANSPORT TOURISME prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

Représentée par Me Jean-jacques DAHAN, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

Ll’affaire a été débattue le 06 février 2025 en audience publique, devant Madame Marie-Hélène Diximier, Présidente chargée d’instruire l’affaire, qui a retenu l’affaire

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Paule Menu, présidente,

Madame Marie-Hélène Diximier, présidente

Madame Valérie Collet, conseillère,

greffière lors des débats : Evelyne Gombaud

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Le délibéré a été prorogé en raison de la charge de travail de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

FAITS ET PROCEDURE

1- Madame [U] [M] a été engagée en qualité de chauffeur accompagnateur, statut non-cadre, groupe 7 coefficient 136 V, par la SARL Wetterwald Transport Tourisme (en suivant, la société Wetterwald Transport Tourisme), par contrat de travail à durée déterminée à temps partiel, à compter du 3 septembre 2018. Par un avenant du 1 er décembre 2018, la durée hebdomadaire de travail, de 11 heures initialement, a été portée à 14 heures. La relation de travail entre les parties s’est poursuivie dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à la suite d’un avenant conclu le 1 er juin 2019. Les relations contractuelles étaient soumises aux dispositions de la convention collective nationale des transports routiers du 21 décembre 1950.

2 – Par un courriel du 5 août 2021, la société Wetterwald Transport Tourisme a informé Mme [M] que le marché public des transports des enfants handicapés vers les écoles, collèges et lycée pour le compte du conseil départemental de la Gironde était repris par les sociétés Adanev Mobilités, Microbus, Tepif Lokea et Drive 4 You, qu’elle serait contactée par l’une d’entre elles au cours du mois en cours, que son contrat de travail serait ensuite transféré.

3 – Par un courriel du 13 août 2021, Mme [M] a refusé le transfert de son contrat de travail auprès de la société Tepif Lokea; le 23 septembre 2021, elle a reçu de la société Wetterwald Transport Tourisme une attestation de transfert, un certificat de travail, un solde de tout compte et l’attestation d’employeur destinée à Pôle Emploi mentionnant une démission au titre des motifs de la rupture du contrat de travail; par un courrier du 4 octobre 2021, elle a informé la société Wetterwald Transport Tourisme qu’elle contestait le motif mentionné, n’ayant jamais entendu démissionner et qu’en l’absence d’un accord pour un licenciement pour motif économique ou une rupture conventionnelle, elle saisirait le conseil de prud’hommes de Bordeaux.

4 – Estimant la rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur et dépourvue de cause réelle et sérieuse, Mme [M] a saisi le conseil de prud’hommes de Bordeaux d’une demande de requalification en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’une demande en paiement des indemnités de rupture et d’une demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Par un jugement en date du 26 mai 2023, le conseil de prud’hommes de Bordeaux a jugé que Mme [M] n’a pas démissionné de son poste au sein de la société Wetterwald Transport Tourisme, a requalifié la rupture du contrat de travail en un licenciement pour cause réelle et sérieuse, a condamné la société Wetterwald Transport Tourisme à verser à Mme [M] 473,52 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement, 1 298,80 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 1 000 euros sur fondement de l’article 700 du code de procédure civile, a débouté Mme [M] de ses autres demandes, a débouté la société Wetterwald Transport Tourisme de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile, a ordonné l’exécution provisoire selon l’article 515 du code de procédure civile, a condamné la société Wetterwald Transport Tourisme aux dépens de la procédure.

5 – Mme [M] en a relevé appel par une déclaration du 8 juin 2023, dans ses dispositions qui requalifient la rupture du contrat de travail en un licenciement reposant sur une cause réelle et sérieuse et qui la déboutent de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’ordonnance de clôture est en date du 14 janvier 2025 et l’affaire a été fixée à l’audience du 6 février 2025 pour être plaidée.

PRETENTIONS

6 – Suivant ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 30 juin 2023, Mme [M] demande à la cour de :

– la déclarer bien fondée dans son appel et ses demandes;

– réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Bordeaux en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– juger qu’elle n’a jamais manifesté de volonté de démissionner de son emploi et que la rupture de son contrat de travail doit s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse; en conséquence,

– condamner la société Wetterwald Transport Tourisme à lui payer la somme de 5 200 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi à la suite de la perte de son emploi et la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société Wetterwald Transport Tourisme aux dépens ;

– confirmer les autres dispositions du jugement.

7 – Suivant ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 25 septembre 2023, la société Wetterwald Transport Tourisme demande à la cour de :

– la recevoir en ses conclusions et l’en déclarer bien fondée ;

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il juge que Mme [M] n’a pas démissionné de son poste et en ce qu’il la condamne à paiement ; statuant à nouveau,

– déclarer irrecevables les demandes de Mme [M] en l’absence de mise en cause de la société entrante ;

– la mettre hors de cause ;

– débouter Mme [M] de toutes ses demandes ;

– condamner Mme [M] à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner Mme [M] aux dépens.

8 – Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré dans ses dispositions qui condamnent la société Wetterwald Transport Tourisme à payer à Mme [M] la somme de 1 298,40 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, qui condamnent la société Wetterwald Transport Tourisme aux dépens, qui déboutent la société Wetterwald Transport Tourisme de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

Infirme le jugement déféré pour le surplus de ses dispositions soumises à la cour ;

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Juge que la rupture du contrat de travail est intervenue à l’initiative de l’employeur et qu’elle doit produire les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse;

Condamne la société Wetterwald Transport Tourisme à payer à Mme [M] :

– la somme de 460,10 euros à titre d’indemnité de licenciement

– la somme de 1 948,20 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Wetterwald Transport Tourisme aux dépens d’appel ; en conséquence la déboute de sa demande au titre de ses frais irrépétibles ;

Condamne la société Wetterwald Transport Tourisme à payer à Mme [M] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Signé par Marie-Paule Menu, présidente et par Evelyne Gombaud, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

E. Gombaud MP. Menu

 


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