Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel d’Angers
Thématique : Reprise de travail et contestation médicale : enjeux et conséquences.
→ RésuméExposé du litigeLa société de transport frigorifique a embauché une chauffeuse livreuse par contrat à durée indéterminée. Le 24 novembre 2022, la chauffeuse a été victime d’un accident de travail, entraînant une fracture du pied et un arrêt de travail. Visite médicale et repriseLe 17 mars 2023, un médecin du travail a recommandé un retour à 50% de temps de travail. La chauffeuse a ensuite bénéficié d’une reprise évolutive, d’abord à 50%, puis à 80%. Cependant, elle a été de nouveau placée en arrêt de travail à partir de juillet 2023. Contestation de l’attestation de suiviLe 9 octobre 2023, lors d’une visite médicale de reprise, le médecin a jugé son état compatible avec le travail, tout en proposant des mesures individuelles. La chauffeuse a contesté cette attestation en saisissant le conseil de prud’hommes d’Angers le 24 octobre 2023. Décision du conseil de prud’hommesLe 12 décembre 2023, le conseil a déclaré irrecevables les demandes de la chauffeuse et l’a déboutée de ses demandes, la condamnant aux dépens. Elle a interjeté appel de cette décision le 2 janvier 2024. Appel et nouvelles conclusionsL’affaire a été examinée par la cour d’appel, où la chauffeuse a demandé à être déclarée inapte à son poste. La société de transport a demandé le rejet de ses demandes, arguant que l’appel était devenu sans objet suite à un avis d’inaptitude et un licenciement ultérieur. Arguments des partiesLa chauffeuse a soutenu qu’elle avait le droit de contester l’avis du médecin du travail, tandis que la société de transport a affirmé que la procédure de contestation était réservée à des situations spécifiques. Décision de la cour d’appelLa cour a infirmé l’ordonnance du conseil de prud’hommes, déclarant l’action en contestation recevable et renvoyant les parties à se mieux pourvoir. La société de transport a été condamnée à payer des frais à la chauffeuse et aux dépens de l’instance. |
COUR D’APPEL
d’ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N°
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 24/00002 – N° Portalis DBVP-V-B7I-FIFG.
Ordonnance Référé, origine Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ANGERS, décision attaquée en date du 12 Décembre 2023, enregistrée sous le n° 23/00127
ARRÊT DU 27 Février 2025
APPELANTE :
Madame [S] [P]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Véronique PINEAU de la SELARL ATLANTIQUE AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant au barreau d’ANGERS et par Maître SALQUAIN, avocat plaidant au barreau d’ANGERS
INTIMEE :
E.U.R.L. SARL UNIPERSONNELLE TRANSPORTS BONZO
[Adresse 1]
[Localité 3] / FRANCE
représentée par Me Julie DODIN de la SELARL DODIN AVOCAT, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier E0003WYO
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Janvier 2025 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame PORTMANN, président chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Madame Clarisse PORTMANN
Conseiller : Mme Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS
Conseiller : Madame Rose CHAMBEAUD
Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN
ARRÊT :
prononcé le 27 Février 2025, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Clarisse PORTMANN, président, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
EXPOSE DU LITIGE :
La société Transports Bonzo exerce une activité de transport frigorifique de petits colis.
Madame [P] a été embauchée par la société Transports Bonzo par contrat à durée indéterminée à effet du 14 décembre 2021 en qualité de chauffeuse livreuse.
Le 24 novembre 2022, Madame [P] a été victime d’un accident de travail : elle aurait glissé en descendant de son véhicule et se serait cassé le pied. Elle a été placée en arrêt de travail.
Le 17 mars 2023, dans le cadre d’une visite de pré-reprise, le médecin du travail a préconisé un retour dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique à 50%.
C’est dans ces conditions que Madame [P] a bénéficié d’une reprise en mi-temps
thérapeutique évolutive sur un retour complet :
– Du 14 avril au 30 juin 2023 : reprise à 50%
– Du 1er juillet au 31 août 2023 : reprise à 80%
Madame [P] a de nouveau été placée en arrêt de travail par son médecin traitant :
‘ Arrêt initial du 3 au 8 juillet 2023
‘ Arrêt de prolongation du 3 août au 8 octobre 2023.
Le 9 octobre 2023, Madame [P] s’est présentée à la visite médicale de reprise au terme de laquelle :
– son état de santé a été jugé compatible avec la reprise de son poste de travail par le médecin du travail,
-elle a bénéficié de propositions de mesures individuelles en application de l’article L.4624-3 du code du travail, à savoir privilégier la conduite d’un véhicule en boîte automatique.
Madame [P] est de nouveau en arrêt de travail depuis cette date.
Le 24 octobre 2023, Madame [P] a saisi le conseil de prud’hommes d’Angers selon la procédure accélérée au fond en contestation de l’attestation de suivi rendue par le médecin du travail.
Par ordonnance du 12 décembre 2023, le conseil de prud’hommes a :
-Dit que la demande visant à prononcer l’inaptitude de Mme [P] et la demande subsidiaire de désigner un médecin-inspecteur en vue de son prononcer (é’) sur son aptitude ou son inaptitude, sont irrecevables,
-Débouté Mme [P] de l’intégralité de ses demandes,
-Condamné Mme [P] aux dépens et à payer à son adversaire une somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 2 janvier 2024, Madame [P] a interjeté appel de cette décision.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 juin 2024 et l’affaire a été examinée à l’audience collégiale de la chambre sociale de la cour d’appel d’Angers, puis à l’audience rapporteur en date du 16 janvier 2025 après un renvoi.
Dans ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 23 février 2024, auxquelles il sera référé pour un plus ample exposé du litige, l’appelante demande à la cour de :
-La recevoir en son appel et la déclarer bien fondée,
-Débouter la société Transports Bonzo de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
– Infirmer l’ordonnance rendue le 12 décembre 2023 en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
A titre principal :
-La déclarer inapte en son poste de travail, ainsi qu’en tout poste dans l’entreprise,
A titre subsidiaire :
-Ordonner avant dire droit une mesure d’instruction et nommer le médecin-inspecteur territorialement compétent, ou à défaut en cas de refus ou d’indisponibilité un autre médecin-inspecteur ou à défaut en cas de refus ou d’indisponibilité tel médecin sur la liste des experts de la cour d’appel.
Dans ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique, le 7 janvier 2025, auxquelles il sera référé pour un plus ample exposé du litige, l’intimée demande à la cour de :
-Juger qu’elle recevable et bien fondée en ses demandes ;
-Débouter Madame [P] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
A titre liminaire,
-Constater l’appel interjeté par Mme [P] le 2 janvier 2024 sans objet suite à l’avis d’inaptitude rendu le 1er octobre 2024 et au licenciement afférent notifié le 28 octobre 2024 ;
-En conséquence, constater le dessaisissement de la cour ;
Sur l’appel,
A titre principal,
-Confirmer l’ordonnance du conseil de prud’hommes d’Angers du 12 décembre 2023 en ce qu’elle a :
– Dit que la demande visant à prononcer l’inaptitude de Mme [P] par le conseil de prud’hommes et la demande subsidiaire de désigner un médecin inspecteur en vue de prononcer sur l’aptitude ou l’inaptitude de Mme [P] sont irrecevables ;
– Débouté Mme [P] de ses demandes ;
-Condamné Mme [P] à lui payer la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Mis les dépens à la charge de Mme [P] ;
A titre subsidiaire, sur la demande d’expertise,
-L’autoriser à désigner le médecin de son choix pour qu’il lui soit notifié les éléments médicaux ayant fondé l’avis du médecin du travail conformément aux dispositions de l’article L.4624-7 alinéa II du code du travail ;
-Juger que le montant de la provision à valoir sur la rémunération du médecin-expert sera consignée par Madame [P], demanderesse ;
En tout état de cause,
-Condamner en cause d’appel Madame [P] à lui payer la somme 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure ;
-Condamner Madame [P] aux entiers dépens et les éventuels frais d’exécution.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,
-Rabat l’ordonnance de clôture du 19 juin 2024 et prononce une nouvelle clôture au jour des débats,
-Infirme l’ordonnance du 12 décembre 2023, rendue en la forme de référé par le conseil de Prud’hommes d’Angers,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
-Déclare l’action en contestation de l’avis du médecin du travail du 9 octobre 2023 devant le conseil de prud’hommes statuant en la forme des référés recevable,
-Renvoie les parties à se mieux pourvoir,
-Condamne la société Transports Bonzo à payer à Mme [P] la somme de 1300 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
-Condamne la société Transports Bonzo aux dépens de première instance et d’appel,
-Rejette la demande de la société Transports Bonzo relative aux dépens et à ses frais irrépétibles.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Viviane BODIN Clarisse PORTMANN
Votre avis sur ce point juridique ? Une actualité ? Une recommandation ?