Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel d’Agen
Thématique : Vente d’un véhicule : vices cachés et responsabilité du vendeur professionnel
→ RésuméLe 21 juin 2019, un garagiste a vendu un véhicule d’occasion à un particulier. Ce dernier a ensuite revendu le véhicule à des époux le 26 octobre 2019. Rapidement, les nouveaux propriétaires ont constaté plusieurs défauts sur le véhicule, notamment des problèmes avec le système Bluetooth et le toit ouvrant. Après une expertise, il a été révélé que le kilométrage affiché avait été modifié et que le calculateur moteur avait été reprogrammé, rendant le véhicule non conforme aux normes administratives.
Face à l’absence d’accord amiable avec le vendeur initial, les époux ont assigné ce dernier devant le tribunal judiciaire d’Agen pour obtenir la résiliation de la vente pour vice caché. Le tribunal a ordonné une expertise, mais le garagiste n’a pas assisté à celle-ci. L’expert a confirmé les défauts et a établi que le kilométrage avait été falsifié avant la vente au particulier. En l’absence d’accord, les époux ont poursuivi leur action en justice. Le tribunal a finalement rendu un jugement le 9 avril 2024, ordonnant la résolution de la vente et la restitution du prix de vente au particulier, tout en condamnant ce dernier à rembourser certains frais aux époux. Le tribunal a également rejeté les demandes de garantie du particulier contre le garagiste, considérant qu’il n’était pas prouvé que ce dernier avait connaissance des vices au moment de la vente. Le particulier a interjeté appel, soutenant que les vices existaient lors de son achat et que le garagiste, en tant que professionnel, devait en avoir connaissance. La cour d’appel a confirmé le jugement, mais a également prononcé la résolution de la vente entre le garagiste et le particulier, ordonnant à ce dernier de restituer le prix de vente et certains frais, tout en permettant au garagiste de reprendre le véhicule. |
ARRÊT DU
02 avril 2025
DB/CH
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N° RG 24/00569 –
N° Portalis DBVO-V-B7I-DHLS
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[C] [D]
C/
[A] [B]
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GROSSES le
aux avocats
ARRÊT n° 103-2025
COUR D’APPEL D’AGEN
Chambre Civile
LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1ère chambre dans l’affaire,
ENTRE :
Monsieur [C] [D]
né le 12 juin 1978 à [Localité 5]
de nationalité française, maçon
domicilié : [Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Blaise HANDBURGER, avocat au barreau du GERS
APPELANT d’un jugement du tribunal judiciaire d’Agen en date du 09 Avril 2024, RG 22/00898
D’une part,
ET :
Monsieur [A] [B]
de nationalité française, vendeur automobiles
domicilié : [Adresse 6]
[Adresse 6]
INTIMÉ
N’ayant pas constitué avocat,
D’autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
l’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 10 février 2025 devant la cour composée de :
Président : André BEAUCLAIR, Président de chambre,
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller qui a fait un rapport oral à l’audience
Anne Laure RIGAULT, Conseiller
Greffière : Catherine HUC
ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
‘
‘
FAITS :
Le 21 juin 2019, [A] [B], garagiste à [Localité 2], a vendu à [C] [D], particulier demeurant à [Localité 3], un véhicule d’occasion de marque Volkswagen type Touareg immatriculé [Immatriculation 4] mis en circulation le 14 novembre 2011.
Le 26 octobre 2019, après contrôle technique effectué le 19 juin précédent mentionnant un kilométrage parcouru de 146 298 km, M. [D] a vendu le véhicule à [F] [Z] et [E] [X] son épouse (les époux [Z]) pour un prix de 16 000 Euros.
Les époux [Z] ont rapidement constaté que le véhicule était atteint de multiples défauts portant sur les éléments suivants : bluetooth, rideau du toit ouvrant, palettes de volant, mémorisation du siège conducteur.
Ils ont fait étudier le véhicule par le cabinet Lang qui a confirmé la présence de nombreux défauts et mis en évidence que le véhicule avait subi une modification du kilométrage affiché au compteur avec reprogrammation du calculateur moteur.
A défaut d’accord de M. [D] pour annuler la vente du 26 octobre 2019, les époux [Z] l’ont fait assigner devant le juge des référés du tribunal judiciaire d’Agen qui, par ordonnance du 26 avril 2011, a désigné M. [Y], ensuite remplacé par M. [S], afin d’expertiser le véhicule.
M. [D] a appelé en cause M. [B].
M. [B] ne s’est pas présenté à l’expertise.
M. [S] a établi son rapport le 7 janvier 2022.
Ses conclusions sont les suivantes :
– La plupart des options du véhicule sont obsolètes ou défaillantes.
– Le kilométrage du véhicule a été modifié et présente une sous-estimation de 67 330 km.
– Le calculateur a été reprogrammé afin de modifier les caractéristiques de sa puissance fiscale, de sorte qu’il ne répond plus aux normes administratives et n’est plus autorisé à circuler.
– Il n’a pu obtenir de renseignements du constructeur sur la date de modification du calculateur.
A défaut d’accord amiable, par acte du 27 août 2022, les époux [Z] ont fait assigner M. [D] devant le tribunal judiciaire d’Agen afin de voir ordonner la résiliation de la vente pour vice caché, avec restitution du prix et des frais de la vente, et obtention de dommages et intérêts.
Par acte du 5 octobre 2022, M. [D] a appelé en cause M. [B] afin, dans l’hypothèse où les demandes des époux [Z] seraient admises, de voir également résilier la vente du 21 juin 2019, avec ses conséquences et d’être garanti des sommes qu’il doit verser aux époux [Z].
M. [B] n’a pas comparu.
Par jugement rendu le 9 avril 2024, le tribunal judiciaire d’Agen a :
– ordonné la résolution de la vente du véhicule Volkswagen Touareg immatriculé [Immatriculation 4],
– ordonné à M. [C] [D] la restitution du prix de vente du véhicule à M. [F] [Z] pour un montant de 16 000 Euros, augmenté des intérêts au taux légal à compter du jugement,
– ordonné à M. [F] [Z] de restituer le véhicule Volkswagen Touareg immatriculé [Immatriculation 4] à M. [C] [D],
– condamné M. [C] [D] à payer à M. [F] [Z] les sommes suivantes :
* 766,76 Euros au titre des frais de carte grise,
* 1 256 Euros au titre des frais d’assurance,
– rejeté la demande de condamnation de M. [C] [D] au paiement de la somme de 521,58 Euros au titre des réparations,
– rejeté la demande de condamnation de M. [C] [D] au paiement de la somme de 10 656 Euros au titre du préjudice de jouissance,
– rejeté l’appel en garantie formé par M. [C] [D] contre M. [A] [B],
– condamné M. [C] [D] aux dépens,
– condamné M. [C] [D] à verser à M. [F] [Z] la somme de 2 500 Euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté toutes autres demandes.
Le tribunal a admis l’existence de vices cachés lors de la vente du véhicule aux époux [Z] ; considéré qu’il n’était pas prouvé que M. [D] a eu connaissance des vices ; que faute de détermination de la date exacte d’apparition des vices importants antérieurement à la seconde vente, il n’était pas établi qu’ils étaient présents lors de la vente du véhicule par M. [B] ; que toutefois, M. [D] avait au moins connaissance des vices affectant les options, de sorte que l’action de M. [D] à l’encontre de son vendeur devait être rejetée.
Par acte du 22 mai 2024, [C] [D] a déclaré former appel du jugement en désignant [A] [B] en qualité de partie intimée et en indiquant que l’appel porte sur les dispositions du jugement qui ont :
– rejeté l’appel en garantie formé par M. [C] [D] contre M. [A] [B],
– condamné M. [C] [D] aux dépens,
– rejeté toutes autres demandes.
La clôture a été prononcée le 11 décembre 2024 et l’affaire fixée à l’audience de la Cour du 10 février 2025.
PRÉTENTIONS ET MOYENS :
Par conclusions d’appelant déposées le 21 août 2024, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, [C] [D] présente l’argumentation suivante :
– Les vices existaient lorsqu’il a acheté le véhicule :
* c’est soit M. [B], soit un propriétaire antérieur, qui ont falsifié le compteur.
* M. [B] est un professionnel des véhicules présumé irréfragablement en connaître les vices en application de l’article 1645 du code civil.
* subsidiairement, si la différence de kilométrage n’était pas retenue comme constituant un vice caché, son vendeur aurait manqué à son obligation de délivrance conforme.
* il n’est pas l’auteur de la reprogrammation du calculateur.
* il n’avait pas connaissance de la défaillance des options : il n’utilise ni le bluetooth ni les palettes au volant et ces défauts mineurs ne sont pas ceux qui ont entraîné la résolution de la vente.
– M. [B] est de mauvaise foi : il n’a répondu à aucun courrier ou convocation.
Au terme de ses conclusions, il demande à la Cour de :
– d’infirmer le jugement sur les points de son appel,
– condamner M. [B] à le garantir et relever indemne de toutes les condamnations à paiement prononcées contre lui au profit des époux [Z] [X], à l’exception du prix de vente qu’il leur a remboursé, soit :
* 766,67 Euros en principal au titre des frais de carte grise,
* 1 256 Euros en principal au titre des frais d’assurance,
* 2 500 Euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– prononcer la résolution de la vente [B]/[D] pour vices cachés et, subsidiairement, pour défaut de conformité,
– condamner M. [B] à lui restituer le prix payé, soit 16 000 Euros outre intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2022, date de l’assignation au fond,
– le condamner à reprendre ou faire reprendre le véhicule à ses frais dans le délai d’un mois, et dire qu’à défaut il sera délié de son obligation de restitution à titre de dommages et intérêts,
– le condamner à lui payer la somme de 5 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens.
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[A] [B] n’a pas constitué avocat.
M. [D] lui a fait signifier sa déclaration d’appel par acte du 24 juillet 2024 déposé en l’étude du commissaire de justice après passage à son adresse [Adresse 6].
Il lui a fait signifier ses conclusions par acte du 3 septembre 2024.
PAR CES MOTIFS :
– La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort
– CONFIRME le jugement SAUF en ce qu’il a rejeté l’appel en garantie formé par M. [C] [D] contre M. [A] [B],
– STATUANT A NOUVEAU sur le point infirmé,
– PRONONCE la résolution de la vente entre [A] [B], vendeur, et [C] [D], acquéreur, portant sur le véhicule immatriculé [Immatriculation 4] ;
– CONDAMNE [A] [B] à payer à [C] [D] la somme de 16 000 Euros avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2022 en restitution du prix de vente ;
– DIT que [A] [B] peut reprendre le véhicule, à ses frais, auprès de [C] [D], lequel doit le tenir à sa disposition ;
– CONDAMNE [A] [B] à payer à [C] [D] la somme de 1 256 Euros en garantie des frais d’assurance dus aux époux [Z],
– REJETTE la demande de garantie présentée par [C] [D] au titre des frais irrépétibles et du coût du certificat d’immatriculation dus aux époux [Z] ;
– CONDAMNE [A] [B] à payer à [C] [D] la somme de 2 500 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– CONDAMNE [A] [B] aux dépens de l’appel.
Le présent arrêt a été signé par André BEAUCLAIR, président, et par Catherine HUC, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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