Conflit de copropriété : enjeux de la répartition des charges et de la validité des ventes.

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Conflit de copropriété : enjeux de la répartition des charges et de la validité des ventes.

L’Essentiel : Monsieur [T] [K], copropriétaire, a assigné Monsieur [F] [N], Madame [W] [D] et le syndicat des copropriétaires en 2021 pour obtenir la restitution des parties communes et l’annulation des ventes de 2014. En juin 2023, la cour d’appel a déclaré Monsieur [T] irrecevable dans sa demande de nullité des contrats, tout en reconnaissant la régularité des ventes. Malgré cela, le juge a admis ses demandes de restitution et de destruction des travaux, tout en proposant une médiation pour résoudre le conflit. Les parties doivent se rencontrer pour explorer des solutions amiables avant un nouvel examen de l’affaire.

Contexte de l’affaire

Monsieur [T] [K] est propriétaire de plusieurs lots dans un immeuble en copropriété, tandis que Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] détiennent d’autres lots. En septembre 2014, une assemblée générale des copropriétaires a voté la création et la vente de nouveaux lots, dont les n°84 et 85, à Monsieur [F] [N].

Procédure judiciaire

En juillet 2021, Monsieur [T] [K] a assigné Monsieur [F] [N], Madame [W] [D] et le syndicat des copropriétaires pour obtenir la restitution des parties communes occupées illicitement et la destruction des travaux effectués sur celles-ci. Il a également demandé l’annulation des ventes de 2014. En février 2022, le juge a débouté les défendeurs de leur fin de non-recevoir liée à la prescription.

Décision de la cour d’appel

En juin 2023, la cour d’appel de Paris a infirmé la décision précédente, déclarant Monsieur [T] [K] irrecevable dans sa demande subsidiaire de nullité des contrats de vente, tout en constatant la régularité de ces ventes.

Demandes d’expertise

Monsieur [T] [K] a ensuite demandé une expertise pour clarifier la situation des lots et la répartition des charges. Il a sollicité la désignation d’un géomètre expert pour examiner les lieux et vérifier les documents pertinents.

Réponses des défendeurs

Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] ont contesté la demande d’expertise, arguant qu’elle était irrecevable et inutile, tout en demandant à leur tour des condamnations financières à l’encontre de Monsieur [T] [K].

Position du syndicat des copropriétaires

Le syndicat des copropriétaires a également demandé que Monsieur [T] [K] soit jugé irrecevable dans ses demandes, soutenant que l’assemblée générale de 2014 n’avait pas été contestée dans les délais impartis.

Motifs de la décision

Le juge a déclaré Monsieur [T] [K] recevable dans ses demandes de restitution et de destruction des travaux, mais irrecevable concernant la demande de paiement des charges. Il a également jugé incompétent pour statuer sur certaines demandes financières et a proposé une médiation entre les parties pour tenter de résoudre le conflit.

Conclusion et médiation

Le tribunal a ordonné aux parties de rencontrer un médiateur pour explorer des solutions amiables, tout en fixant une date pour un nouvel examen de l’affaire. Les dépens et autres demandes ont été réservés pour une décision ultérieure.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences de la décision de l’assemblée générale des copropriétaires du 12 septembre 2014 ?

La décision de l’assemblée générale des copropriétaires du 12 septembre 2014 a des conséquences juridiques importantes, notamment en ce qui concerne la validité des ventes des lots n°84 et n°85 à Monsieur [F] [N].

Selon l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent être introduites par les copropriétaires opposants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée.

Cette notification est réalisée par le syndic dans le délai d’un mois suivant la tenue de l’assemblée. En l’absence de contestation dans ce délai, les décisions prises deviennent définitives.

Dans ce cas, Monsieur [T] [K] n’ayant pas contesté la décision dans le délai imparti, la cour d’appel a constaté le caractère parfait de la vente, rendant ainsi irrecevable toute demande de nullité de la vente.

Quelles sont les implications de l’article 12 de la loi du 10 juillet 1965 sur la répartition des charges ?

L’article 12 de la loi du 10 juillet 1965 stipule que chaque propriétaire peut poursuivre en justice la révision de la répartition des charges dans un délai de cinq ans à compter de la publication du règlement de copropriété, si la part correspondant à son lot est supérieure de plus d’un quart à celle qui résulterait d’une répartition conforme aux dispositions de l’article 10.

Cet article permet donc à un copropriétaire de demander une révision de la répartition des charges si celle-ci est jugée inéquitable.

Cependant, dans le cas présent, Monsieur [T] [K] a été jugé irrecevable à former une demande de paiement des charges, car cette demande relève des pouvoirs exclusifs du syndicat des copropriétaires, et non d’un copropriétaire individuel.

Comment la notion d’autorité de la chose jugée s’applique-t-elle dans cette affaire ?

L’article 1355 du code civil précise que l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Cela signifie que pour qu’une décision soit opposable, il faut que la demande soit identique, fondée sur la même cause, et entre les mêmes parties.

Dans cette affaire, la cour d’appel a statué sur le caractère parfait de la vente intervenue au profit de Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D], mais n’a pas examiné l’assiette de la vente.

Ainsi, Monsieur [T] [K] peut toujours contester la nature des parties communes occupées par les défendeurs, car cette question n’a pas été tranchée par la cour d’appel, permettant à Monsieur [T] [K] de poursuivre ses demandes de restitution et de destruction des travaux.

Quelles sont les conditions pour qu’une mesure d’expertise soit ordonnée par le juge ?

L’article 146 du code de procédure civile stipule qu’une mesure d’instruction ne peut être ordonnée que si la partie qui l’allègue ne dispose pas d’éléments suffisants pour le prouver.

En d’autres termes, une expertise ne peut pas être demandée pour suppléer à une carence dans l’administration de la preuve.

Dans cette affaire, le juge a jugé que la demande d’expertise de Monsieur [T] [K] était recevable, car elle visait à déterminer l’assiette de la vente et à vérifier les éventuels empiétements sur les parties communes.

Cependant, le juge a également noté que les parties s’accordaient sur l’exactitude d’un plan, rendant ainsi l’expertise superflue pour certains aspects.

Quelles sont les implications de la médiation dans le cadre de ce litige ?

La médiation est un processus qui permet aux parties de trouver une solution amiable à leur conflit, sans passer par le jugement. Dans cette affaire, le juge a décidé d’ordonner une médiation en raison de la nature conflictuelle des relations entre les parties.

Le juge a désigné un médiateur et a enjoint les parties à se rencontrer pour discuter de la possibilité d’une solution amiable.

Cette démarche est prévue par le code de procédure civile, qui encourage les parties à explorer des solutions alternatives avant de poursuivre des procédures judiciaires.

La médiation peut permettre de réduire les tensions et de trouver un accord satisfaisant pour toutes les parties, évitant ainsi une prolongation des procédures judiciaires.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE BOBIGNY
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
DU 06 JANVIER 2025

Chambre 5/Section 3

Affaire : N° RG 21/06908 – N° Portalis DB3S-W-B7F-VMI4
N° de Minute : 24/01802

DEMANDEUR

Monsieur [T] [K]
[Adresse 2]
[Localité 6] représenté par Me Virginie BOUILLIEZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0607

C/

DEFENDEURS
SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU [Adresse 4] représenté par son syndic ARCHIGESTIM, SARL dont le siège social est situé [Adresse 3], agissant par son gérant domicilié ès-qualité audit siège.
[Adresse 4]
[Localité 6]
représenté par Me Michel BOHBOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0052

Monsieur [F] [N]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représenté par Me Joanna GRAUZAM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1117

Madame [W] [D]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par Me Joanna GRAUZAM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1117

JUGE DE LA MISE EN ETAT
Madame Aliénor CORON, Juge de la mise en état, assistée aux débats de Madame Zahra AIT, greffier.

DÉBATS
Audience publique du 04 Novembre 2024.

ORDONNANCE
Prononcée en audience publique, par ordonnance contradictoire et en premier ressort, par Madame Aliénor CORON, Juge de la mise en état, assistée de Madame Sakina HAFFOU, greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur [T] [K] était propriétaire des lots n°7, 8, 63 et 64 au sein d’un ensemble immobilier situé [Adresse 4] (93), soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis.

Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] sont propriétaires des lots n° 15, 16 et 17 au sein de ce même immeuble.
Le 12 septembre 2014, l’assemblée générale des copropriétaires a voté :
-la création d’un nouveau lot de copropriété destiné à être cédé, portant le n°85
-la vente du lot n°85 à Monsieur [F] [N] pour un prix de 100 euros
-la création d’un nouveau lot de copropriété destiné à être cédé, portant le n°84
-la vente du lot n°84 à Monsieur [F] [N] pour un prix de 5 083 euros
-la création d’un nouveau lot de copropriété portant le n°88, par réunion des lots 15, 16, 17, 84 et 85.

Par acte de commissaire de justice en date du 8 juillet 2021, Monsieur [T] [K] a assigné Monsieur [F] [N], Madame [W] [D] et le syndicat des copropriétaires devant le tribunal judiciaire de Bobigny afin notamment qu’il soit ordonné à ces premiers de restituer au syndicat des copropriétaires les parties communes qu’ils occupaient illicitement, que soit ordonnée la destruction des travaux illicites effectués sur ces parties communes, et subsidiairement que soient annulées les ventes intervenues le 12 septembre 2014.

Par ordonnance du 2 février 2022, le juge de la mise en état a notamment débouté le syndicat des copropriétaires et Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription.

Par arrêt du 28 juin 2023, la cour d’appel de Paris a infirmé cette décision et a déclaré Monsieur [T] [K] irrecevable en sa demande subsidiaire de nullité du contrat de vente et en toutes ses demandes subséquentes. Elle a également constaté le caractère parfait de la vente, l’acte de vente ayant été régularisé le 28 mars 2023.

Monsieur [T] [K] a saisi le juge de la mise en état d’une demande d’expertise.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 octobre 2024, Monsieur [T] [K] sollicite du juge de la mise en état de :
-Le déclarer recevable en ses demandes
-Désigner un géomètre expert avec pour mission de :
– se rendre sur les lieux au deuxième étage du [Adresse 4] après avoir convoqué les parties,
-Se faire communiquer et prendre connaissance de tous documents utiles à l’accomplissement de sa mission, des conventions intervenues entre les parties ;
-Vérifier le cadre administratif, réglementaire et contractuel dans lequel la situation est intervenue ;
-Décrire la situation des lots ;
-Se prononcer sur la délimitation des lots en vérifiant la surface des lots et les éventuels empiètements pouvant exister le cas échéant au regard de l’acquisition effectuée ;
-Mesurer les superficies utilisées par M. [N] et Madame [W] [D] en tenant compte des éventuelles annexions de parties communes, même non autorisées par une assemblée générale ;
-Donner son avis sur ce que pourrait être la ligne séparative des lots en se référant au règlement de copropriété, à l’acte de vente et à l’examen des plans ;
-Déterminer s’il existe à l’intérieur de la propriété de M. [N] et Madame [W] [D] une partie de couloir commun exclusif qui n’a pas été soumis à la vente ;
-Constater les modalités de répartition des charges ;
-Donner un avis sur le critère de répartition des charges et surtout la distorsion de la répartition des charges et le visiter pour chacun des lots ;
-Produire les clés de répartition des charges générales et spéciales en tenant compte de ces données ;
-Donner son avis sur les modifications qu’il faudrait apporter au règlement de copropriété pour que la répartition des charges ou le système de répartition des charges soit conforme aux prescriptions de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 au regard de l’état réel de chacun des lots de copropriétés (parties privatives et parties communes) au regard de l’utilité des charges pour chacun desdits lots
-Condamner le syndicat des copropriétaires, M. [N] et Madame [W] [D] solidairement à prendre en charge le coût de la mesure d’expertise ;
-Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], M. [N] et Madame [W] [D] solidairement à rembourser à M. [K] les frais d’expertise unilatérale qu’il a engagée, soit la somme de 1080 euros TTC
-Condamner le syndicat des copropriétaires, M. [N] et Madame [W] [D] 23 solidairement à une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
-Les condamner aux dépens, dont distraction au profit de Maître Virginie Bouilliez.

Au terme de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 25 octobre 2024, Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] sollicitent du juge de la mise en état de :
-Juger irrecevable la demande d’expertise fondée sur la détermination des charges
-La rejeter
A titre subsidiaire,
-Mettre à la charge de Monsieur [T] [K] la rémunération de l’expert
En tout état de cause,
-Débouter Monsieur [T] [K] de l’ensemble de ses demandes
-Le condamner à leur payer la somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice moral
-Condamner Monsieur [T] [K] au paiement d’une amende civile de 10 000 euros
-Condamner Monsieur [T] [K] à leur payer la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
-Condamner Monsieur [T] [K] aux dépens.

Au terme de ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 30 mars 2024, le syndicat des copropriétaires sollicite du juge de la mise en état de :
-Déclarer Monsieur [T] [K] irrecevable en ses demandes au fond et d’expertise
-L’en débouter
A titre subsidiaire,
-Rejeter la demande d’expertise
En tout état de cause,
-Condamner Monsieur [T] [K] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
-Le condamner aux dépens, dont distraction au bénéfice de Maître Michel BOHBOT.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il sera référé aux conclusions des parties pour un complet exposé des moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il ne sera répondu que dans les présents motifs aux demandes de constat et de « dire et juger » qui ne sont pas des prétentions au sens des articles 4, 5 et 768 du code de procédure civile, mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, qui ne doivent à ce titre pas apparaître au dispositif des conclusions des parties et ont par conséquent été expurgées de l’exposé du litige.

Sur les fins de non-recevoir soulevées par le syndicat des copropriétaires

Le syndicat des copropriétaires sollicite que Monsieur [T] [K] soit jugé irrecevable en ses demandes au fond et en sa demande d’expertise. Se fondant sur l’article 789 du code de procédure civile, il fait valoir que l’assemblée générale des copropriétaires du 12 septembre 2014 n’a fait l’objet d’aucune contestation et que Monsieur [T] [K] est donc irrecevable à contester aujourd’hui la cession, dont la cour d’appel de Paris a constaté le caractère parfait par son arrêt du 28 juin 2023. Selon lui la demande d’expertise est dès lors irrecevable puisqu’elle revient à remettre en cause la répartition des charges générales telle que décidée par la résolution n°17 de l’assemblée générale des copropriétaires ayant adopté un modificatif de l’état descriptif de division, et devenue définitive à défaut de recours dans un délai de deux mois.

S’agissant de la demande de Monsieur [T] [K] visant à voir condamner Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] à régler les charges afférentes aux nouveaux lots au prorata des tantièmes, elle est selon le syndicat des copropriétaires irrecevable pour défaut de qualité à agir, seul le syndicat ayant qualité à agir en paiement des charges communes, et prescrite s’agissant des charges antérieures au 15 juillet 2016.

Monsieur [T] [K] fait valoir qu’il ne sollicite plus la nullité de la vente mais la restitution des parties communes occupées de manière illicite par Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D], dans la mesure où ces parties communes n’étaient selon lui pas concernées par la vente intervenue, l’assiette occupée par les défendeurs étant supérieure à l’assiette objet de la vente. Se fondant sur l’article 12 de la loi du 10 juillet 1965, il fait valoir qu’il est recevable à poursuivre en justice la révision de la répartition des charges.

Selon l’article 789 du code de procédure civile, le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non-recevoir.

En application de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

En application de l’article 1355 du code civil, l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

Il résulte de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 que les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée, sans ses annexes. Cette notification est réalisée par le syndic dans le délai d’un mois à compter de la tenue de l’assemblée générale.

L’article 12 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que dans les cinq ans de la publication du règlement de copropriété au fichier immobilier, chaque propriétaire peut poursuivre en justice la révision de la répartition des charges si la part correspondant à son lot est supérieure de plus d’un quart, ou si la part correspondant à celle d’un autre copropriétaire est inférieure de plus d’un quart, dans l’une ou l’autre des catégories de charges, à celle qui résulterait d’une répartition conforme aux dispositions de l’article 10. Si l’action est reconnue fondée, le tribunal procède à la nouvelle répartition des charges.

Cette action peut également être exercée par le propriétaire d’un lot avant l’expiration d’un délai de deux ans à compter de la première mutation à titre onéreux de ce lot intervenue depuis la publication du règlement de copropriété au fichier immobilier.

En l’espèce, Monsieur [T] [K] sollicite du tribunal, au terme de ses dernières conclusions au fond signifiées le 16 septembre 2024, de :
-ORDONNER à Monsieur [N] et Madame [D] de restituer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] les parties communes occupées de manière illicite faute de vente intervenue ;
-ORDONNER la destruction des travaux illicites effectués par Monsieur [N] et Madame [D] pour clore les parties communes qu’ils occupent ;
-CONDAMNER Monsieur [N] et Madame [D] à régler les charges afférentes aux nouveaux lots, au prorata des tantièmes, calculées depuis le 1er juillet 2013 ainsi que celles afférentes aux parties communes occupées jusqu’à leur restitution, ou en tous les cas pendant les cinq dernières années ayant précédé l’assignation jusqu’au jugement à intervenir ;
-CONDAMNER Monsieur [N] et Madame [D] à verser solidairement à Monsieur [K] la somme de 15 000 euros au titre de la réparation de son préjudice.

Il ressort la lecture de ses conclusions que sa demande de restitution et de destruction repose sur le moyen selon lequel Monsieur [F] [N] aurait fourni des plans erronés au géomètre chargé de dresser un projet modificatif au règlement de copropriété, la société GEOMETRIS, ce qui aurait conduit l’assemblée générale des copropriétaires à prévoir la vente d’une partie seulement des parties communes à Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D], l’autre partie étant en réalité occupée illicitement par ces derniers mais par conséquent non incluse à la vente, l’assemblée générale des copropriétaires ayant cru à tort qu’elle leur était déjà incluse dans leurs lots.

Cette demande ne se heurte donc pas à l’autorité de la chose jugée dans la mesure où la cour d’appel de Paris a seulement statué sur le caractère parfait de la vente intervenue au profit de Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D], mais ne s’est pas prononcée sur l’assiette de celle-ci.

Monsieur [T] [K] est donc recevable en ses demandes de restitution et de destruction des travaux entrepris.

Sa demande d’expertise est également recevable en ce qu’elle a précisément pour objet de déterminer l’assiette concernée par la vente.

S’agissant de la demande relative au paiement des charges, il apparaît que Monsieur [T] [K] soutient au terme de ses demandes au fond que Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] ne se sont jamais acquittés des charges supplémentaires correspondant aux tantièmes objet de la vente. Cette demande constitue donc une demande en paiement de charges et non une demande en révision de la répartition des charges comme le soutient Monsieur [T] [K]. Une telle demande relevant des pouvoirs exclusifs du syndicat des copropriétaires, Monsieur [T] [K] sera jugé irrecevable à la former.

Sur la demande d’expertise

Monsieur [T] [K] sollicite que soit ordonnée une mesure d’expertise aux fins d’une part de voir définir la délimitation des lots et les éventuels empiétements pouvant exister et que soit évaluée l’assiette des lots soumis à la vente et l’existence d’une portion non cédée à Monsieur [J] [N], et d’autre part que soit proposée une nouvelle répartition de charges au regard de l’assiette des lots. Il indique avoir fait diligenter une expertise amiable, n’ayant pu aboutir pleinement du fait qu’une partie de la surface litigieuse était précisément incluse dans le domicile de Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D], dont ces derniers avaient refusé l’accès à l’expert.

Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] s’opposent à cette demande. Ils font valoir qu’ils ont fourni à la société GEOMETRIS les plans originaux de la copropriété, que leur avait transmis Monsieur [T] [K] lui-même en 2013, et que les faux plans dont se prévaut Monsieur [T] [K] ont en réalité été établis par la société GEOMETRIS elle-même. Ils ajoutent que ces plans étaient en tout état de cause annexés à la convocation à l’assemblée générale, et que Monsieur [T] [K] était par conséquent en mesure à cette date de constater une éventuelle incohérence. Ils soutiennent que le cabinet GEOMETRIS s’est déplacé sur les lieux pour procéder au mesurage sur place. Ils font valoir que quand bien même les plans auraient été erronés, le couloir leur a été cédé au prix symbolique de 100 euros, et qu’une éventuelle erreur de métrage serait sans incidence sur la vente. Ils en concluent que la mesure d’expertise est inutile dans la mesure où ils reconnaissent qu’il existe une différence entre l’état actuel des lots et l’état d’origine à l’époque de l’établissement du règlement de copropriété. Ils contestent le métré réalisé par l’expert amiable mandaté par Monsieur [T] [K] de façon non contradictoire.

Le syndicat des copropriétaires fait valoir que l’expertise sollicitée est sans utilité puisqu’elle ne servirait qu’à dire le droit, ce qui revient au tribunal et non à l’expert.

L’article 146 du code de procédure civile prévoit qu’une mesure d’instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l’allègue ne dispose pas d’éléments suffisants pour le prouver.En aucun cas une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve.

Selon l’article 789 du code de procédure civile, le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour ordonner une mesure d’instruction.

En l’espèce, les parties s’accordent sur l’exactitude du plan du 2ème étage annexé au règlement de copropriété de 1980, identique au plan réalisé par la société RIA en décembre 2012. Il n’est pas contesté que ce plan est différent de celui annexé à la convocation à l’assemblée générale des copropriétaires du 12 septembre 2014 ayant conduit à la vente des lots.

La question que devra trancher le tribunal est celle de l’assiette de la vente intervenue, et de savoir si la portion qui était présentée comme déjà privative par le plan annexé était incluse dans la vente, l’assemblée générale des copropriétaires ayant cédé « un couloir au 2ème étage du Bâtiment A desservant les lots 15, 16 et 17 » et d’une superficie au sol « d’environ 2,97 m2 ».

Le tribunal disposant d’une part du métré résultant du plan annexé au règlement de copropriété, et d’autre part du métré fourni par le cabinet GEOMETRIS, il n’est pas utile d’ordonner une expertise aux fins de réaliser un troisième métré.

S’agissant du chef d’expertise lié à la répartition de charges, celle-ci est sans utilité dans la mesure où Monsieur [T] [K] ne sollicite pas au fond la modification de la répartition des charges, demandes pour laquelle il n’a au demeurant pas qualité à agir, n’étant plus copropriétaire.

Sur la médiation

Il ressort des pièces produites par les parties, s’agissant notamment des échanges de courriels, mais également du caractère vindicatif de leurs conclusions, que celles-ci vivent une situation particulièrement conflictuelle, ayant conduit à plusieurs procédures judiciaires.

Il apparaît opportun de leur enjoindre de rencontrer un médiateur, ce afin qu’une solution amiable puisse éventuellement être trouvée, de nature à faire cesser un conflit auquel ne pourra de toute évidence pas mettre fin la présente procédure.

Sur les demandes ne relevant pas du juge de la mise en état

Il y a lieu de se déclarer incompétent pour statuer sur la demande visant à voir condamner le syndicat des copropriétaires, Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] à payer à Monsieur [T] [K] la somme de 1 080 euros au titre de l’expertise amiable qu’il a financée, cette demande ne relevant pas des pouvoirs du juge de la mise en état.

Le juge de la mise en état se déclare de même incompétent pour statuer sur la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D].

Le juge de la mise en état ne se considère pas saisi par la demande d’amende civile, une telle amende ne pouvant être prononcée que d’office.

*

Les dépens et les demandes au titre des frais irrépétibles seront réservées.

PAR CES MOTIFS,

Le juge de la mise en état,

-Déclare Monsieur [T] [K] recevable en sa demande de restitution des parties communes non comprises dans la vente votée par l’assemblée générale des copropriétaires le 12 septembre 2014 au bénéfice de Monsieur [F] [N],

-Déclare Monsieur [T] [K] recevable en sa demande de destruction des travaux entrepris,

-Déclare Monsieur [T] [K] recevable en sa demande d’expertise,

-Déclare Monsieur [T] [K] irrecevable en sa demande de condamnation de Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] au paiement des charges de copropriété,

-Déboute Monsieur [T] [K] de sa demande d’expertise,

-Se déclare incompétent pour statuer sur la demande de Monsieur [T] [K] visant à voir condamner le syndicat des copropriétaires, Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D] à lui payer la somme de 1 080 euros au titre de l’expertise amiable qu’il a financée,

-Se déclare incompétent pour statuer sur la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D],

-Enjoint à Monsieur [T] [K], Monsieur [F] [N], Madame [W] [D] et le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 4] (93), de rencontrer un médiateur judiciaire qui les informera sur l’objet et le déroulement d’une mesure de médiation judiciaire,

-Désigne à cette fin :
Maître DEHGHANI-AZAR Hirbod
[Adresse 1]
[Localité 5]
[Courriel 7]

-Donne mission au médiateur ainsi désigné :
–d’expliquer aux parties le principe, le but et les modalités d’une mesure de médiation ;
– de recueillir leur consentement ou leur refus de cette mesure dans un délai de 3 semaines à compter de la notification de la présente ordonnance ;

-Dit que les parties devront se présenter à ce rendez-vous d’information en personne, accompagnées, le cas échéant de leur conseil ; ce rendez-vous est obligatoire et gratuit, et peut se faire par visio-conférence en cas d’impossibilité d’une rencontre en présentiel ;

-Dit que dans l’hypothèse où, au moins l’une des parties refuserait le principe de la médiation, ou à défaut de réponse de la part d’au moins l’une des parties, le médiateur en informera le tribunal et cessera ses opérations, sans défraiement ;

-Dit que dans l’hypothèse où les parties donneraient leur accord à la médiation, le médiateur pourra commencer immédiatement les opérations de médiation ;

-Fixe à 1 500 € T.T.C. le montant de la provision à valoir sur la rémunération du médiateur qui devra être versée entre les mains du médiateur par tiers par Monsieur [T] [K], Monsieur [F] [N] et Madame [W] [D], et le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 4] (93), et ce, sauf meilleur accord des parties, avant la date fixée pour la première réunion, à peine de caducité de la désignation du médiateur ;

-Dit qu’en cas de refus d’aller en médiation, la provision n’aura pas à être versée ;

-Dit qu’en cas de médiation menée à sa fin si le montant de la provision s’avérait insuffisant, il nous en sera référé ;

-Dit que le médiateur informera le juge de la mise en état de tout incident affectant le bon déroulement de la médiation, dans le respect de la confidentialité de rigueur en la matière ;

-Dit qu’au terme de la médiation, le médiateur informera le juge de la mise en état, soit que les parties sont parvenues à un accord, soit qu’elles n’y sont pas parvenues ;

-Renvoie l’affaire à la mise en état du 12 février 2025 à 10 heures, les parties étant invitées à faire connaître l’issue de cette injonction de médiation, et pour conclusions éventuelles de Monsieur [T] [K] en cas d’échec de celle-ci,

-Réserve les dépens et les autres demandes.

Fait au Palais de Justice, le 06 Janvier 2025

La minute de la présente décision a été signée par Madame CORON, Juge de la mise en état, assistée de Madame Sakina HAFFOU, Greffier présente lors de son prononcé.

LE GREFFIER LE JUGE

Madame HAFFOU Madame CORON


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