Conservation des preuves et contestation des mesures d’instruction.

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Conservation des preuves et contestation des mesures d’instruction.

Intérêt à agir

L’article 31 du code de procédure civile stipule que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention. La cour a jugé que la société Pravda Holding, bien qu’elle ne soit pas directement engagée dans des activités d’architecture d’intérieur, a un intérêt à agir en raison de ses participations dans des sociétés concurrentes, ce qui lui confère un droit d’agir contre la société Friedmann & Versace pour des faits de concurrence déloyale.

Nullité du procès-verbal de signification

L’article 493 du code de procédure civile précise que l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement. La cour a considéré que les moyens soulevés par la société Friedmann & Versace concernant la nullité du procès-verbal de signification ne sont pas pertinents pour apprécier le bien-fondé de l’ordonnance initiale, car le juge de la rétractation n’est pas compétent pour examiner la validité de l’exécution de la mesure ordonnée.

Motif légitime pour la mesure d’instruction

L’article 145 du code de procédure civile exige qu’un motif légitime soit justifié pour ordonner des mesures d’instruction. La cour a retenu que les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect avaient démontré l’existence d’un risque de dépérissement des preuves, justifiant ainsi la dérogation au principe du contradictoire, en raison de la nature des preuves recherchées et des circonstances entourant la concurrence déloyale.

Caractère légalement admissible des mesures

Les mesures d’instruction doivent être circonscrites dans le temps et dans leur objet, conformément à l’article 145 du code de procédure civile. La cour a constaté que l’ordonnance du 25 octobre 2023 était limitée géographiquement et temporellement, et que les recherches étaient spécifiquement définies, respectant ainsi les exigences de proportionnalité et de respect des droits fondamentaux.

Frais et dépens

Selon l’article 696 du code de procédure civile, les dépens d’une mesure d’instruction sollicitée avant tout procès sont à la charge de celui qui les demande. La cour a confirmé que les dépens de l’instance de référé sont à la charge des sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect, en tant que demanderesses à la mesure d’instruction.

L’Essentiel : La société Pravda Holding a un intérêt à agir contre Friedmann & Versace en raison de ses participations dans des sociétés concurrentes. La cour a jugé que les moyens soulevés par Friedmann & Versace concernant la nullité du procès-verbal de signification ne sont pas pertinents. Les sociétés Pravda ont démontré un risque de dépérissement des preuves, justifiant des mesures d’instruction. L’ordonnance du 25 octobre 2023 était limitée dans le temps et l’objet, respectant les exigences de proportionnalité. Les dépens sont à la charge des demanderesses.
Résumé de l’affaire : La société spécialisée en architecture d’intérieur, désignée comme la société A, a été assignée par les sociétés B, C et D, qui détiennent des participations dans des activités similaires, devant le tribunal de commerce de Paris. Ces dernières ont demandé une mesure d’instruction sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, invoquant un risque de dépérissement des preuves en raison d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme. Le tribunal a accédé à cette demande par ordonnance du 25 octobre 2023.

En réponse, la société A a contesté cette ordonnance en assignant les sociétés B, C et D, demandant notamment la nullité du procès-verbal de notification de l’ordonnance et la rétractation de celle-ci. Le juge des référés a, par ordonnance du 24 avril 2024, confirmé la validité de l’ordonnance initiale, déboutant la société A de ses demandes et lui imposant de trier les pièces séquestrées en différentes catégories pour préparer la levée de séquestre.

La société A a interjeté appel de cette décision, soutenant que les mesures d’instruction étaient illégales et que la société B n’avait pas d’intérêt à agir. En revanche, les sociétés B, C et D ont demandé la confirmation de l’ordonnance, arguant que la société A était mal fondée dans ses critiques.

La cour d’appel a jugé que la société B avait un intérêt légitime à agir en raison de ses participations dans des sociétés concurrentes. Elle a également considéré que les mesures d’instruction étaient justifiées par un risque de dépérissement des preuves et que l’ordonnance était conforme aux exigences légales. En conséquence, la cour a confirmé l’ordonnance initiale et a condamné la société A aux dépens, rejetant ses demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la demande de mesure d’instruction formulée par les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect ?

La demande de mesure d’instruction est fondée sur l’article 145 du code de procédure civile, qui stipule :

« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Cet article permet à une partie de solliciter des mesures d’instruction pour préserver des preuves avant un procès, lorsque des motifs légitimes sont établis.

Quel est le statut de l’ordonnance rendue le 25 octobre 2023 selon le juge des référés ?

Le juge des référés a déclaré que l’ordonnance du 25 octobre 2023 est conforme aux dispositions des articles 145 et 493 du code de procédure civile. L’article 493 précise que :

« L’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse. »

Cela signifie que l’ordonnance a été jugée valide et que la procédure non contradictoire était justifiée dans ce contexte.

Quel est le fondement de la contestation de la société Friedmann & Versace concernant la nullité du procès-verbal de signification ?

La société Friedmann & Versace conteste la validité du procès-verbal de signification en raison de l’absence de mentions obligatoires et du fait que certaines parties n’ont pas été mises en mesure de contester l’ordonnance. L’article 495 du code de procédure civile stipule que :

« L’ordonnance sur requête est motivée. Elle est exécutoire au seul vu de la minute. Copie de la requête et de l’ordonnance est laissée à la personne à laquelle elle est opposée. »

La société soutient que ces omissions lui ont causé un préjudice en l’empêchant d’organiser sa défense correctement.

Quel est le principe de l’intérêt à agir selon le code de procédure civile ?

L’article 31 du code de procédure civile énonce que :

« L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé. »

Cela signifie que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action, et la société Pravda Holding a été jugée recevable à agir.

Quel est le rôle du juge dans l’examen des mesures d’instruction ordonnées sur le fondement de l’article 145 ?

Le juge est chargé d’apprécier si les mesures d’instruction demandées sont justifiées par un motif légitime. L’article 145 précise que :

« Les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Le juge doit donc évaluer si les circonstances justifient la dérogation au principe du contradictoire et si les mesures sont proportionnées à l’objectif poursuivi.

Quel est le caractère exécutoire de l’ordonnance selon l’article 514 du code de procédure civile ?

L’article 514 du code de procédure civile stipule que :

« La décision est de plein droit exécutoire. »

Cela signifie que l’ordonnance rendue est immédiatement exécutoire, sans qu’il soit nécessaire d’attendre l’issue d’un éventuel appel, ce qui renforce l’urgence et la nécessité des mesures d’instruction ordonnées.

Quel est le fondement des demandes de la société Friedmann & Versace en matière de dommages et intérêts ?

La société Friedmann & Versace demande des dommages et intérêts en vertu de l’article 700 du code de procédure civile, qui prévoit que :

« Le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés non compris dans les dépens. »

Cette demande est fondée sur l’idée que les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect ont agi de manière abusive en sollicitant des mesures d’instruction qu’elle considère infondées.

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRÊT DU 03 AVRIL 2025

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 24/08894 – N° Portalis 35L7-V-B7I-CJNQC

Décision déférée à la cour : ordonnance du 24 avril 2024 – président du TC de Paris – RG n° 2023073126

APPELANTE

S.A.R.L. FRIEDMANN & VERSACE, RCS de Paris n°848055950, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Ayant pour avocat plaidant Me Jonathan THISSIER LEVY, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES

S.A.S. PRAVDA HOLDING, RCS de Paris n°502966435, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

S.A.S. PRAVDA COLLECTION, RCS de Paris n°833155781, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

S.A.S. PRAVDA ARKITECT, RCS de Paris n°881055818, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentées par Me Delphine MENGEOT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1878

Ayant pour avocat plaidant Me Roland PEREZ de la SELARL GOZLAN PEREZ, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 03 février 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Michel RISPE, président de chambre, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Michel RISPE, président de chambre

Anne-Gaël BLANC, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Michel RISPE, président de chambre et par Jeanne BELCOUR, greffier, présent lors de la mise à disposition.

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La société Friedmann & Versace a pour activités principales l’architecture d’intérieur, le conseil, la conception et l’aménagement de l’espace, la rénovation et la décoration, l’achat et la vente de meubles et d’objets. La société Pravda Holding détient des participations dans les sociétés Pravda Collection et Pravda Arkitect. La société Pravda Arkitect a pour objet la réalisation de projets d’architecture et de décoration intérieure. La société Pravda Collection a pour objet la création et la commercialisation de mobiliers.

Par une requête du 19 octobre 2023, les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect ont sollicité du président du tribunal de commerce de Paris l’organisation d’une mesure d’instruction sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 25 octobre 2023, il a été fait droit à cette demande.

Par acte du 19 décembre 2023, la société Friedmann & Versace a fait assigner les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris notamment aux fins de l’entendre :

juger nul le procès-verbal de notification de l’ordonnance rendue sur requête ;

déclarer irrecevable l’action de la société Pravda Holding ;

rétracter, par conséquent, l’ordonnance sur requête rendue le 25 octobre 2023 à l’encontre de la société Friedmann & Versace ;

déclarer, par conséquent, nulles et non avenues toutes saisies, copies et remise de documents prises sur le fondement de cette ordonnance ;

enjoindre, par conséquent, la SCP [B] [R], commissaire de justice audiencier au tribunal de commerce de Paris, de restituer l’ensemble des documents et copies de documents saisies le 20 novembre 2023 dans les locaux de la société Friedmann & Versace ;

enjoindre, par conséquent, les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect de détruire tout document dont elle aurait pu avoir connaissance du fait d’une communication à elle faite par le commissaire de justice instrumentaire dans le cadre de l’exécution de l’ordonnance du 25 octobre 2023 et ce sous le contrôle dudit commissaire de justice ;

en tout état de cause, condamner in solidum, les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect au versement de la somme de 15.000 euros à la société Friedmann & Versace en application de l’article 700 du code de procédure civile outre aux dépens.

Par ordonnance contradictoire du 24 avril 2024, le dit juge des référés a :

dit que l’ordonnance du 25 octobre 2023 est conforme aux dispositions des articles 145 et 493 du code de procédure civile ;

débouté la société Friedmann & Versace de sa demande de rétractation de ladite ordonnance;

demandé à la société Friedmann & Versace, aux fins de préparer la procédure de la levée de séquestre, de faire un tri des pièces séquestrées en trois catégories :

catégorie A les pièces qui pourront être communiquées sans examen ;

catégorie B les pièces qui sont concernées par le secret des affaires et que les défenderesses refusent de communiquer ;

catégorie C les pièces que les défenderesses refusent de communiquer mais qui ne sont pas concernées par le secret des affaires ;

dit que ce tri sera communiqué à Me [R], pour un contrôle de cohérence avec le fichier initial séquestré ;

dit que pour les pièces concernées par le secret des affaires, la société Friedmann & Versace, conformément aux articles R.153-3 à R.153-8 du code de commerce, communiquera au juge un mémoire précisant, pour chaque pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d’un secret des affaires ;

fixé le calendrier suivant :

communication à Me [R] et au juge, des tris des fichiers demandés avant le 12 juillet 2024,

communication au juge des pièces concernées par le secret des affaires et du mémoire avant le 12 septembre 2024, et qu’à défaut de respecter cette date, l’ensemble des pièces séquestrées seront alors libérées, après expiration des délais de recours,

renvoyé l’affaire en référé cabinet au 27 septembre 2024 à 14h30 pour la levée de séquestre,

dit qu’il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné la société Friedmann & Versace aux dépens de l’instance, qui seront liquidés avec l’ordonnance définitive, de levée de séquestre,

rappelé que la décision est de plein droit exécutoire en application de l’article 514 du code de procédure civile.

Par déclaration du 7 mai 2024, la société Friedmann & Versace a relevé appel de cette décision, en élevant critique contre tous les chefs de son dispositif.

Par ses dernières con clusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 10 juillet 2024, au visa des articles 145, 485, 493 et 496 du code de procédure civile, 9 du code civil et 8 de la convention européenne des droits de l’Homme, la société Friedmann & Versace a demandé à la cour de :

la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

infirmer l’ordonnance entreprise ;

et, statuant à nouveau :

déclarer la société Friedmann & Versace recevable et bien fondée en son assignation ;

juger nul le procès-verbal de notification de l’ordonnance rendue sur requête le 25 octobre 2023;

juger nulles les opérations de saisies pratiquées sur le fondement de l’ordonnance rendue sur requête le 25 octobre 2023 ;

déclarer irrecevable l’action de la société Pravda Holding ;

juger que les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect ne justifient pas d’un motif légitime à faire pratiquer une saisie des pièces de la société Friedmann & Versace ;

rétracter, par conséquent, l’ordonnance sur requête rendue le 25 octobre 2023 à l’encontre de la société Friedmann & Versace ;

déclarer, par conséquent, nulles et non avenues toutes saisies, copies et remise de documents prises sur le fondement de cette ordonnance ;

enjoindre, par conséquent, à la SCP [B] [R], commissaire de justice, de restituer l’ensemble des documents et copies de documents saisis le 20 novembre 2023 dans les locaux de la société Friedmann & Versace ;

enjoindre, par conséquent, les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect de détruire tout document dont elles auraient pu avoir connaissance du fait d’une communication à elles, faite par le commissaire de justice instrumentaire dans le cadre de l’exécution de l’ordonnance du 25 octobre 2023, et ce sous le contrôle dudit commissaire de justice ;

en tout état de cause, condamner in solidum les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect au versement de la somme de 12.000 euros à la société Friedmann & Versace en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 7 août 2024, les sociétés Pravda Holding , Pravda Collection et Pravda Arkitect ont demandé à la cour de:

les déclarer recevables et bien fondées en leurs demandes ;

en conséquence, confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise ;

déclarer la société Friedmann & Versace mal fondée en son appel ;

débouter la société Friedmann & Versace de l’ensemble de ses demandes ;

condamner la société Friedmann & Versace à payer aux sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2025.

Sur ce,

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

En application de l’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

Il sera rappelé que les demandes tendant à voir donner acte, constater, juger ou encore dire et juger, ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4 et 5 du code de procédure civile mais des moyens au soutien de celles-ci en sorte qu’il n’y a pas lieu de statuer de ces chefs.

En outre, selon une jurisprudence constante, les juges ne sont pas tenus de répondre à un simple argument, ni de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ni encore de répondre à une simple allégation dépourvue d’offre de preuve.

Il résulte des articles 497 et 561 du code de procédure civile que la cour d’appel, saisie de l’appel d’une ordonnance de référé statuant sur une demande en rétractation d’une ordonnance sur requête prescrivant des mesures d’instruction destinées à conserver ou à établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, est investie des attributions du juge qui l’a rendue devant lequel le contradictoire est rétabli.

Cette voie de contestation n’est donc que le prolongement de la procédure antérieure.

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir de la société Pravda Holding

La société Friedmann & Versace fait valoir que la société Pravda Holding n’a pas de mission d’architecture d’intérieur ou de commercialisation de meubles, ce dont elle déduit qu’elle ne peut prétendre subir une quelconque concurrence déloyale de sa part. Elle ajoute que le fait qu’elle dispose de participations dans des sociétés qui prétendent subir une telle atteinte ne l’autorise pas davantage à exercer une action à ce titre.

Les intimées font valoir qu’à l’origine Mmes [C] et [H] ont toutes deux été engagées par la société Pravda Holding et qu’elles étaient liées par contrat avec cette société jusqu’en décembre 2019, pour l’exécution de leurs missions qui consistaient notamment à concevoir des projets, dont plusieurs ont été repris par la société Friedmann & Versace.

La cour rappelle que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, celles-ci étant définies à l’article 122 du code de procédure civile comme ‘tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée’.

Il résulte de l’article 30 du même code que ‘L’action est le droit, pour l’auteur d’une prétention, d’être entendu sur le fond de celle ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée. Pour l’adversaire, l’action est le droit de discuter le bien fondé de cette prétention’.

En vertu de l’article 31 dudit code, ‘L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé’.

Il résulte des dispositions précitées que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l’action.

En l’espèce, la société Friedmann & Versace soutient que la société Pravda Holding ne serait pas recevable à agir contre elle, alors que son action serait manifestement vouée à l’échec, dans la mesure où elle n’est pas victime des faits dommageables qu’elle lui impute. Mais, l’existence du préjudice invoqué par la société Pravda Holding dans le cadre de l’action qu’elle est susceptible d’engager contre la société Friedmann & Versace, pour en obtenir réparation, n’est pas une condition de recevabilité de cette action mais de son succès, qui relève d’une appréciation au fond.

Dès lors, la cour déclarera recevable l’action de la société Pravda Holding.

Sur la prétendue nullité du procès-verbal de signification de l’ordonnance du 25 octobre 2023

La société Friedmann & Versace soutient que le procès-verbal de signification de l’ordonnance du 25 octobre 2023 rendue sur requête est entaché de nullité, d’une part, compte tenu de l’absence de mentions obligatoires, d’autre part, faute de signification à des parties qui n’ont pas été mises en mesure de la contester. Elle relève qu’en effet, ce procès-verbal ne précise pas que la société requise doit mandater un avocat pour contester l’ordonnance, ni que le président du tribunal a imparti un délai d’un mois à la société requise pour contester sa décision. Elle explique que ces omissions lui font grief alors qu’elle a dû organiser sa défense dans l’urgence. Elle souligne qu’en outre, M. [T] et Mme [C] n’ont pas été mis en mesure de contester l’ordonnance qui pourtant les concerne alors que leurs ordinateurs ont été saisis et qu’ils sont totalement indépendants de la société Friedmann & Versace.

Les parties intimées contestent les moyens adverses développés à ce titre alors que selon elles le procès-verbal dont s’agit n’est entaché d’aucune nullité. Elles considèrent que la société Friedmann & Versace ne peut prétendre qu’elle n’avait pas connaissance du délai d’un mois qui lui était imparti pour demander la rétractation de l’ordonnance alors que celui-ci est mentionné dans l’ordonnance qui était l’objet de la signification. Elles ajoutent que la société Friedmann & Versace ayant effectué son recours dans le délai imparti, elle ne peut alléguer aucun grief. Elles observent qu’il s’est écoulé plus de trois mois et demi entre la saisine de la juridiction par la société Friedmann & Versace et l’audience de plaidoirie du 3 avril 2024, ce qui correspond à un temps largement suffisant pour préparer sa défense. Elles contestent qu’il aurait été nécessaire de notifier l’ordonnance à M. [T] et Mme [C] alors que le commissaire de justice avait pour mission d’accéder à l’ensemble des serveurs, postes informatiques et comptes de messageries utilisés par la société Friedmann & Versace, outre qu’il n’est fourni aucune preuve quant à la propriété des ordinateurs revendiquée par ceux-ci. Elles relèvent enfin que le premier juge a retenu à juste titre son incompétence pour se prononcer sur la validité’ de l’exécution de la mesure qu’il a ordonnée.

La cour rappelle que l’article 145 du code de procédure civile dispose que ‘S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.’

En outre, l’article 493 du dit code prévoit ‘L’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.’

Selon l’article 495 du même code, ‘L’ordonnance sur requête est motivée.

Elle est exécutoire au seul vu de la minute.

Copie de la requête et de l’ordonnance est laissée à la personne à laquelle elle est opposée.’

Selon l’article 496 du même code, ‘S’il n’est pas fait droit à la requête, appel peut être interjeté à moins que l’ordonnance n’émane du premier président de la cour d’appel. Le délai d’appel est de quinze jours. L’appel est formé, instruit et jugé comme en matière gracieuse.

S’il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l’ordonnance.’

En application des dispositions précitées, d’une part, il est admis que le pouvoir d’assigner aux fins de rétractation n’est enfermé dans aucun délai (cf. Cass., 2ème Civ., 17 février 2011, pourvoi n° 10-16.737). D’autre part, il est acquis que l’instance en rétractation a pour unique objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l’initiative d’une partie en l’absence de son adversaire. Il en découle que la saisine du juge de la rétractation, nécessairement limitée à cet objet, n’est pas possible pour d’autres demandes (cf. Cass., 2ème 23 juin 2016, pourvoi n° 15-20.893). Ainsi, le contentieux de l’exécution de la mesure d’instruction ordonnée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, qui n’affecte pas la décision ayant ordonné cette mesure, ne relève pas des pouvoirs du juge de la rétractation, à qui il appartient de statuer sur les mérites de la requête visant à organiser non contradictoirement cette mesure d’instruction (cf. :Cass., 2ème Civ., 17 mars 2016, pourvoi n° 15-12.456, Bull. 2016, II, n° 79).

En l’espèce, il apparaît que les moyens soulevés par la société Friedmann & Versace, tenant à la prétendue nullité du procès-verbal de signification de l’ordonnance du 25 octobre 2023, sont sans rapport avec l’appréciation du bien fondé de cette décision en considération des mérites de la requête qui a conduit à l’édicter.

Aussi, alors qu’en application des dispositions qui viennent d’être rappelées le juge de la rétractation n’a vocation qu’à apprécier les mesures initialement ordonnées à l’initiative d’une partie en l’absence de son adversaire, sont irrecevables les demandes de la société Friedmann & Versace de juger nul le procès-verbal de notification de l’ordonnance rendue sur requête et nulles les opérations de saisies pratiquées sur le fondement de cette ordonnance.

Sur la violation invoquée des dispositions de l’article 493 du code de procédure civile en l’absence de démonstration dans la requête initiale des circonstances qui justifiaient de déroger au principe du contradictoire

Selon la société Friedmann & Versace, les risques de concertation, de dépérissement des preuves voire d’une distraction de documents lui étant imputables qui étaient invoqués par les requérantes procèdent de simples affirmations, non démontrées, et sont de plus inexactes. Elle ajoute qu’en outre, aucun caractère de surprise n’a été préservé dès lors que le 28 juillet 2023, la dirigeante des sociétés du groupe Pravda a prévenu M. [T] qu’elle ‘attaquerait’ si elle constatait des ressemblances.

Les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect soutiennent que comme la requête au pied de laquelle a été rendue l’ordonnance du 25 octobre 2023 le démontrait, il est avéré que la société Friedmann & Versace a accompli des actes de concurrence déloyale et de parasitisme à leur égard. Elles soulignent qu’au regard de ces agissements, il existait bien un risque de dépérissement des preuves informatiques justifiant de la dérogation au principe du contradictoire. Elles contestent n’avoir ménagé aucun caractère de surprise à leur requête alors que les messages cités par la société Friedmann & Versace ne sont absolument pas précis et restent de l’ordre du conditionnel, sans qu’il puisse être déduit de manière certaine que la procédure serait engagée.

La cour, se référant aux dispositions précitées, rappelle que les circonstances justifiant qu’il soit dérogé au principe de la contradiction doivent être caractérisées dans la requête ou l’ordonnance qui y fait droit. Tel est le cas lorsque le requérant expose dans sa requête qu’il est fondé à ne pas appeler la partie adverse pour éviter des manoeuvres destinées à faire échec à la démonstration des faits de concurrence déloyale ; il justifie en effet que l’effet de surprise est une condition de la réussite de la mesure sollicitée (cf. Cass. 2ème Civ., 30 janvier 2020, pourvoi n° 18-24.855). Tel est encore le cas lorsque la nature des preuves recherchées, constituées en particulier de communications électroniques et de transmission de documents ou fichiers numériques pouvant très facilement être effacées ou déplacées, et le risque de concertation entre les différents protagonistes du dossier, imposent un nécessaire effet de surprise, ce dont il se déduit que le risque de dépérissement des preuves des agissements dénoncés par la société requérante est caractérisé en sorte que la nécessité de ne pas procéder par voie contradictoire pour assurer l’efficacité de la mesure est justifiée (cf. Cass. 2ème Civ. ., 6 mars 2025, pourvoi n° 24-15.890).

Il est encore acquis que la circonstance que des éléments de preuve aient pu être supprimés par la partie adverse avant le dépôt de la requête caractérise un risque de dépérissement des preuves justifiant qu’il soit dérogé au principe de la contradiction en considération de la nature des faits de parasitisme et de concurrence déloyale et de la nature même des données informatiques recherchées, peu important l’absence d’un éventuel effet de surprise (cf. Cass. 2ème Civ., 25 mars 2021, pourvoi n° 19-23.448).

Au cas présent, la cour relève que la requête présentée au président du tribunal de commerce de Paris par les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect précise notamment qu’ ‘Il est essentiel que cette mesure soit prise non contradictoirement en raison de la concertation entre la société Friedmann & Versace et les anciens salariés/collaborateurs des sociétés Pravda. Ainsi, le recours à une telle procédure non contradictoire étant seule susceptible d’assurer, dans ces circonstances, son efficacité afin d’éviter le risque de dépérissement des preuves inhérent à la nature même des données informatiques, numériques ou électroniques par essence furtives et susceptibles d’être aisément détruites ou altérées’.

Le juge délégataire du président du tribunal de commerce a retenu ‘que le requérant est fondé à ne pas appeler les parties visées par la mesure, puisqu’en effet les documents recherchés sont essentiellement des documents numériques qui, par nature, peuvent être aisément dissimulés ou détruits, ce qui justifie en soi une dérogation au principe du contradictoire.

Les circonstances de l’espèce ajoutent à ce risque inhérent un risque spécifique résultant d’une très probable concertation entre la société Friedmann & Versace et les anciens salariés ou collaborateurs des sociétés Pravda, qui laisse augurer une autre dissimulation si les éléments recherchés étaient demandés de façon contradictoire.

Plus généralement, dans le cadre d’actes de concurrence déloyale, l’effet de surprise est essentiel et justifie à lui seul que les mesures d’instruction ne soient pas prises contradictoirement.’

Au vu des circonstances de l’espèce et du risque de dépérissement des preuves ainsi caractérisé, c’est vainement que la société Friedmann & Versace se prévaut d’échanges entre la dirigeante des sociétés du groupe Pravda et leur ancien salarié dont elle déduit à tort que ce faisant les demanderesses à la requête n’auraient pas ménagé l’effet de surprise de la mesure sollicitée, alors que la démonstration des faits de concurrence déloyale et de parasitisme en justifiait l’organisation.

Sur la violation invoquée des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile à raison de l’absence de motif légitime

La société Friedmann & Versace soutient en premier lieu que la mesure d’instruction a été obtenue par les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect du fait de leur mauvaise foi et alors qu’elles ont prétendu à l’existence de débauchages en masse lui étant imputables, ce qu’elle conteste. En second lieu, elle considère que les parties intimées n’ont pas établi l’existence d’un motif légitime fondé sur une possible action en concurrence déloyale et parasitaire. Elle fait valoir que les reproches et faits imputés par les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect, quant à l’existence de fortes ressemblances entre les travaux des deux sociétés, sont dénués de sérieux et de crédibilité.

Les parties intimées rappellent que comme le juge des référés l’a relevé elles ont circonscrit dans leur requête l’objet du futur procès à la concurrence déloyale et parasitaire artistique, sans mentionner le débauchage. Elles ajoutent qu’il est néanmoins établi que la société Friedmann & Versace a choisi de recruter précisément et concomitamment trois de leurs anciens collaborateurs, ce qui est particulièrement étonnant au regard du nombre d’agences d’architecture d’intérieur présentes sur [Localité 3] et des fortes ressemblances entre les travaux des deux sociétés.

La cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 145 précité du code de procédure civile, il entre dans les pouvoirs du juge d’ordonner la production d’éléments de preuve, notamment de pièces, sous réserve pour le demandeur à la mesure de justifier d’un motif légitime, à savoir, l’existence d’un procès potentiel entre les parties, plausible et non manifestement voué à l’échec, dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée. Il est encore rappelé que la décision ordonnant une mesure in futurum n’implique aucun préjugé sur la responsabilité des parties appelées à la procédure ni sur les chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé.

Au cas d’espèce, s’il est constant que les parties s’opposent notamment sur l’antériorité de leurs créations respectives qui font l’objet d’analyses comparatives dans leurs écritures, au vu des pièces produites et comme l’a retenu à juste titre le premier juge, il ne peut en être retenu que ne serait pas possible le procès envisagé par les parties intimées sur le fondement de la concurrence déloyale ou parasitaire ni qu’il serait manifestement voué à l’échec. En outre, il n’est pas sérieusement contestable que la mesure sollicitée était de nature à améliorer la situation probatoire des parties demanderesses.

Sur la violation invoquée des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile quant caractère légalement admissible des mesures

La société Friedmann & Versace soulève l’illicéité de la mesure ordonnée dès lors qu’elle n’est pas limitée dans le temps, ni dans l’espace et que les recherches ne sont pas circonscrites à une recherche par mots-clés. Elle considère qu’il s’agit d’une mesure d’investigation générale qui est de nature à porter atteinte aux droits élémentaires tel que le respect de la vie privé des ses différents collaborateurs ou encore le secret des affaires.

Les sociétés intimées diligentées font observer que les recherches confiées au commissaire de justice désigné étaient bien limitées sans qu’il puisse être déduit le contraire des termes de l’ordonnance. Elles ajoutent que l’exécution de l’ordonnance a été accomplie dans ce sens par le commissaire de justice qui n’a recueilli que les éléments strictement délimités et nécessaires à la manifestation de la vérité.

La cour rappelle qu’en application de l’article 145 précité du code de procédure civile, constituent des mesures légalement admissibles des mesures d’instruction circonscrites dans le temps et dans leur objet et proportionnées à l’objectif poursuivi (cf. Cass. 2ème Civ., 25 mars 2021, pourvoi n° 19-22.965). Il en découle que le commissaire de justice désigné en vue d’assurer la conservation ou l’établissement de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige ne peut se voir confier une mission d’investigation générale qui lui permettrait d’accéder à d’autres documents que ceux qui sont strictement en rapport avec l’opération critiquée.

En outre, il est admis que la mesure sollicitée ne doit pas entraîner une atteinte disproportionnée à une liberté fondamentale. Mais, les libertés fondamentales ne constituent par elles-mêmes un obstacle à la mesure d’instruction, dès lors que l’atteinte reste proportionnée à l’objectif poursuivi (cf. Cass. 2ème Civ., 8 février 2006, n° 05-14.198; 2ème Civ., 10 novembre 2010, n° 09-71.674 ; 2ème Civ., 6 janvier 2011, n° 09-72.841 ; 2ème Civ., 17 mars 2016, n°15-11.412). Il en est ainsi relativement au secret des affaires et au secret professionnel (cf. Cass. Civ. 2ème, 8février 2006, n° 05-14.198, et Civ.1ère, 3 novembre 2016 n°15-20.495). Il en est encore ainsi s’agissant du droit au respect de la vie privée (cf. Cass. Civ. 2ème, 16 mai 2019, n°18-14.368, 18-14.369 ; Civ. 2ème, 14 novembre 2019, n° 18-22.008).

Au cas d’espèce, il convient de relever, en premier lieu, que l’ordonnance du 25 octobre 2023 impartit au commissaire de justice désigné de se rendre dans les locaux de la société Friedmann & Versace à Paris et au besoin dans ses établissements et annexes dans le ressort du tribunal, aux fins d’effectuer les recherches dont il est chargé. Il s’en infère que la mesure est limitée géographiquement, puisqu’elle est circonscrite aux seuls locaux de la société Friedmann & Versace situés à [Localité 3].

En deuxième lieu, s’agissant des pièces à collecter, parmi les dossiers, fichiers, documents, correspondances situés dans lesdits locaux, ses établissements ou annexes, quel qu’en soit le support, informatique ou autre, l’ordonnance en délimite le champ expressément à celles en rapport avec les faits litigieux précédemment exposés.

En troisième lieu, il apparaît que c’est dans cette optique de circonscrire l’exécution de la mesure aux seules pièces utiles à apporter un éclairage quant aux faits que l’ordonnance autorise le commissaire de justice à procéder notamment à une recherche par mots-clés en utilisant ceux qu’elle définit précisément comme suit :

à compter des dates précisées ci-après et dans tous les cas jusqu’au jour de l’exécution de l’ordonnance : depuis le 5 mars 2020 : ‘[Y] [C]’, ‘[C]’, ‘[Y]’, ‘[V] [J]’, ‘LG’, ‘[V]’, ‘Pravda’, ‘Miroir tresse’, ‘Noura’, ‘Signature murale’, ‘Cartier’, ‘Table pierre de lave’, ‘Epione’, ‘La Pérouse’, ‘Bambini’, ‘Mosuke’ ; depuis le 30 avril 2022 : ‘[S] [T]’, ‘[T]’, ‘[S]’ et depuis le 1er avril 2021 : ‘[E] [H]’, ‘[E]’.

En quatrième lieu, il ressort de ce qui précède que la recherche ainsi autorisée par le juge est circonscrite aux périodes de temps qu’il a délimitées.

Enfin, il est prévu le placement des pièces collectées sous séquestre provisoire afin d’assurer le plein respect des droits respectifs des parties.

Il s’ensuit que la société Friedmann & Versace a échoué à démontrer le caractère disproportionné des mesures prescrites, lesquelles apparaissent, au contraire, conformes aux prévisions de l’article 145 du code de procédure civile. Ses demandes seront donc rejetées.

Aussi, la cour confirmera la décision entreprise en toutes ses dispositions critiquées.

Sur les frais et dépens

La partie défenderesse à une mesure ordonnée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ne peut être considérée comme une partie perdante au sens de l’article 696 du code de procédure civile. En effet, les mesures d’instruction sollicitées avant tout procès le sont au seul bénéfice de celui qui les sollicite, en vue d’un éventuel procès au fond, et sont donc, de principe et à ce stade, à la charge de ce dernier.

Les dépens seront donc laissés à la charge des sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect, demanderesses à la demande d’instruction et en faveur desquelles celle-ci a été ordonnée. Il n’y a pas lieu d’allouer d’indemnité au titre des frais exposés dans le cadre de l’instance non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable l’action de la société Pravda Holding ;

Confirme l’ordonnance entreprise dans toutes ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Condamne les sociétés Pravda Holding, Pravda Collection et Pravda Arkitect aux dépens d’appel ;

Rejette les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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