Conditions générales de vente : équilibre et responsabilité contractuelle en question

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Conditions générales de vente : équilibre et responsabilité contractuelle en question

Sur le déséquilibre significatif

L’article L. 442-6 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, stipule que le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé.

La société Menuiserie Tiquet n’a pas prouvé qu’elle avait été soumise à un rapport de force imposé par la société Renoval, ni que le contrat signé était un contrat-type, ce qui aurait pu justifier l’application de cet article.

Sur la responsabilité contractuelle

L’article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

La société Menuiserie Tiquet a soutenu que la société Renoval avait engagé sa responsabilité contractuelle en raison d’un retard dans la livraison des châssis, mais n’a pas démontré le lien de causalité entre ce retard et les préjudices allégués.

Sur les pénalités de retard et la clause pénale

L’article L. 441-10 du code de commerce permet aux conditions générales de vente de prévoir des pénalités de retard ainsi qu’une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement.

La société Renoval a appliqué une clause pénale contractuelle de 20% en cas de défaut de paiement, conformément à l’article 1153 du code civil, qui permet d’indemniser les frais engagés pour le recouvrement de la créance.

Sur l’indemnité forfaitaire de recouvrement

L’article D. 441-5 du code de commerce fixe à 40 euros le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, ce qui a été respecté par la société Renoval en demandant 80 euros pour ses deux factures impayées.

La société Menuiserie Tiquet n’a pas démontré que cette indemnité était manifestement excessive, ce qui justifie son application dans le cadre de la procédure.

Sur les frais et dépens

L’article 700 du code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement de ses frais d’avocat, ce qui a été appliqué en condamnant la société Menuiserie Tiquet à verser une somme à la société Renoval, qui a succombé dans ses demandes.

L’Essentiel : L’article L. 442-6 du code de commerce stipule que soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif engage la responsabilité de son auteur. La société Menuiserie Tiquet n’a pas prouvé qu’elle avait été soumise à un rapport de force imposé par la société Renoval. Concernant la responsabilité contractuelle, Menuiserie Tiquet n’a pas démontré le lien de causalité entre le retard de livraison et les préjudices allégués. La société Renoval a appliqué une clause pénale de 20% pour défaut de paiement.
Résumé de l’affaire : En mars 2017, à la suite de l’attribution d’un marché de travaux publics, un vendeur a contacté une société de menuiserie pour commander des menuiseries dans le cadre d’un chantier. Après plusieurs échanges, un bon de commande a été émis le 18 décembre 2017. Cependant, des retards dans la livraison des châssis ont été constatés, entraînant une mise en demeure par le vendeur le 19 mars 2018, qui a également mentionné des pénalités de retard.

Le 30 mars 2018, un procès-verbal de réception des travaux a été établi, mais des réserves ont été émises concernant les châssis. La livraison des derniers châssis a eu lieu le 11 avril 2018. Par la suite, le vendeur a réclamé le paiement de factures impayées, s’élevant à 20 571,60 euros, mais la société de menuiserie a contesté cette demande.

Le 25 septembre 2020, un tribunal a ordonné à la société de menuiserie de régler cette somme, mais celle-ci a formé opposition. Après plusieurs procédures, le tribunal de commerce de Narbonne a rendu un jugement le 19 décembre 2023, confirmant la créance du vendeur et rejetant les demandes de la société de menuiserie. Ce jugement a été contesté par la société de menuiserie, qui a fait appel, arguant d’un déséquilibre significatif dans les conditions générales de vente du vendeur et d’une responsabilité contractuelle engagée en raison des retards.

Le vendeur a également demandé la confirmation du jugement initial et le paiement de frais supplémentaires. Le tribunal a finalement confirmé le jugement en toutes ses dispositions, condamnant la société de menuiserie à payer les sommes dues, ainsi qu’à supporter les frais de justice. L’affaire a été renvoyée pour examen des moyens des parties, avec une ordonnance de clôture prévue pour décembre 2024.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique du déséquilibre significatif dans les relations commerciales ?

La société Menuiserie Tiquet invoque l’article L.442-1 du code de commerce, qui stipule que les conditions générales de vente ne doivent pas créer un déséquilibre significatif entre les parties.

Cet article précise que « le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé. »

Cependant, la société Menuiserie Tiquet n’a pas prouvé qu’elle avait été soumise à un rapport de force imposé par la société Renoval.

Il n’est pas établi que le contrat signé le 12 mai 2017 soit un contrat-type, ce qui aurait pu limiter la capacité de négociation de la société Menuiserie Tiquet.

Ainsi, faute de preuve de soumission ou de tentative de soumission, le moyen de la société Menuiserie Tiquet est écarté.

Quel est l’impact de la clause relative aux délais de livraison sur l’obligation de délivrance ?

La société Menuiserie Tiquet soutient que la clause des conditions générales de vente, qui ne stipule aucun délai précis, vide l’obligation de délivrance de sa substance.

L’article 1231-1 du code civil précise que « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure. »

La clause relative aux délais stipule que « les délais de livraison indiqués sur l’accusé de réception de commande sont donnés à titre indicatif et peuvent évoluer en cas de force majeure. »

La société Renoval a reconnu une faute concernant une erreur de coloris, ce qui a entraîné un retard dans la livraison.

Cependant, la société Menuiserie Tiquet n’a pas prouvé que ce retard lui a causé un dommage direct, car les pénalités de retard qu’elle a subies ne sont pas directement liées à la faute de la société Renoval.

Quel est le régime des pénalités de retard et des clauses pénales dans le cadre des contrats commerciaux ?

La société Renoval réclame des pénalités de retard et une indemnité au titre de la clause pénale contractuelle, en vertu de l’article 9 des conditions générales de vente.

Cet article stipule que « les pénalités de retard seront calculées au taux « REFI » de la BCE majoré de 10%. »

L’article L. 441-10 du code de commerce permet d’inclure des pénalités de retard dans les conditions générales de vente.

La société Menuiserie Tiquet ne démontre pas que la clause pénale de 20% serait manifestement excessive, étant donné l’ancienneté de la dette et le montant en jeu.

Ainsi, la société Menuiserie Tiquet est condamnée à payer la somme de 4 114,32 euros au titre de cette clause pénale.

Quel est le rôle de l’article 700 du code de procédure civile dans le cadre de cette affaire ?

L’article 700 du code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement de ses frais de justice.

Dans cette affaire, la société Renoval demande à la société Menuiserie Tiquet de lui verser 2 000 euros au titre de cet article.

La cour a jugé que la société Menuiserie Tiquet, en succombant, devait supporter la charge des dépens et ne pouvait pas prétendre à ce remboursement.

Ainsi, la société Menuiserie Tiquet est condamnée à payer cette somme à la société Renoval, en plus des dépens d’appel.

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 11 MARS 2025

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 24/00742 – N° Portalis DBVK-V-B7I-QD7I

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 19 DECEMBRE 2023

TRIBUNAL DE COMMERCE DE NARBONNE

N° RG 2022001146

APPELANTE :

S.A.R.L. MENUISERIE TIQUET représentée par son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

S.A.S. RENOVAL prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Frédéric GUIZARD de la SELARL GDG, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me HEYE

Ordonnance de clôture du 18 décembre 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 janvier 2025,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Fabrice VETU, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre

M. Thibault GRAFFIN, conseiller

M. Fabrice VETU, conseiller

Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO

ARRET :

– contradictoire;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Gaëlle DELAGE, greffière.

FAITS et PROCEDURE

En mars 2017, suite à l’attribution d’un marché de travaux public au CHU de [Localité 5], la SARL Menuiserie Tiquet s’est rapprochée de la SAS Renoval aux fins de lui commander plusieurs menuiseries au titre de la phase 1 du chantier.

Le 28 avril 2017, la société Renoval a envoyé un premier devis à la société Menuiserie Tiquet puis un second le 28 novembre 2017.

Le 18 décembre 2017, la société Renoval a adressé un accusé de réception valant bon de commande.

Le 19 mars 2018, la société Menuiserie Tiquet a mis en demeure la société Renoval de lui livrer les châssis bombés avant la fin de la semaine et rappelé qu’elle était redevable de 500 euros par jour de retard.

Le 30 mars 2018, le procès-verbal de réception des travaux a été dressé, assorti de réserves, notamment concernant les châssis.

Le 11 avril 2018, la société Renoval a livré les derniers châssis.

Le 19 juillet 2018, la société Renoval a vainement mis en demeure la société Menuiserie Tiquet de lui régler les factures impayées à hauteur de 20 571,60 euros TTC.

Le 7 juillet 2020, le décompte général définitif était dressé.

Par ordonnance du 25 septembre 2020, le président du tribunal de commerce de Carcassonne a enjoint à la SARL Menuiserie Tiquet d’avoir à payer à la SAS Renoval la somme de 20 571,60 euros en principal outre les intérêts et 35,21 euros de dépens.

Le 3 novembre 2020, la société Menuiserie Tiquet a formé opposition.

Par ordonnance du 18 décembre 2020, suivant la requête en abstention du tribunal de commerce de Carcassonne, le premier président de la cour d’appel de Montpellier a désigné le tribunal de commerce de Narbonne.

Par jugement du 16 mars 2021, le tribunal de commerce de Narbonne a radié l’instance.

Par exploit du 22 septembre 2021, la société Renoval a assigné la société Menuiserie Tiquet devant le tribunal de commerce de Nantes en paiement des factures impayées.

Le 8 juillet 2022, la société Menuiserie Tiquet a sollicité la réinscription de l’affaire devant le tribunal de commerce de Narbonne.

Par jugement du 28 novembre 2022, le tribunal de commerce de Nantes s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Narbonne.

Les affaires ont été jointes.

Par jugement contradictoire du 19 décembre 2023, le tribunal de commerce de Narbonne a :

dit que le jugement se substitue à l’ordonnance portant injonction de payer en date du 25 septembre 2020 ;

dit que les conditions générales de vente de la société Renoval ne sont pas affectées d’un déséquilibre significatif entre les parties ;

dit que la clause des conditions générales de vente relative aux délais ne vide pas l’obligation de délivrance de sa substance ;

dit que les conditions générales de vente n’ont pas été modifiées par la commune intention des parties ;

dit que la société Renoval n’a pas engagé sa responsabilité contractuelle ;

en conséquence,

condamné la société Menuiserie Tiquet à payer à la société Rénoval la somme de 20 571,60 euros TTC au titre des factures restées impayées, outre les intérêts de retard fixés à 10 points de pourcentage en sus du taux de refinancement de la BCE et ce, à compter de la date d’échéance de chaque facture impayée, soit le 31 mai 2018 pour la facture n°0180400069 d’un montant de 2 796 euros TTC et le 12 avril 2018 pour la facture n°180400070 d’un montant de 17 775,60 euros TTC ;

condamné la société Menuiserie Tiquet à payer à la société Renoval la somme de 4 114,32 euros au titre de la clause pénale contractuelle, la somme de 80 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement ;

débouté la société Menuiserie Tiquet de ses demandes ;

et condamné la société Menuiserie Tiquet à payer à la société Renoval la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par déclaration du 13 février 2024, la société Menuiserie Tiquet a relevé appel de ce jugement.

Par conclusions du 13 mai 2024, elle demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

à titre principal,

 juger que les conditions générales de vente de Rénoval sont affectées d’un déséquilibre significatif entre les parties ; qu’elles ont été modifiées en l’espèce par la commune intention des parties ; et que la société Renoval a engagé sa responsabilité contractuelle au sens de l’article 1231-1 du code civil ;

condamner en conséquence et reconventionnellement la société Renoval à lui payer une somme de 31 343,97 euros à titre de dommages et intérêts ;

ordonner la compensation judiciaire avec les sommes qui sont susceptibles d’être dues par elle à la société Renoval d’un montant de 2 796 euros et 17 775,60 euros ;

subsidiairement,

réduire la clause pénale contractuelle à l’euro symbolique au visa de l’article 1231-5 du code civil ;

juger que toutes les sommes dues au titre d’éventuels intérêts de retard majorés, d’indemnités forfaitaires de recouvrement et de clause pénale contractuelle ne sont que la résultante des fautes contractuelles de la société Renoval ;

débouter en conséquence cette société de telles demandes ;

si par impossible, des sommes étaient accordées à la société Renoval au titre de la clause pénale contractuelle, des intérêts de retard majorés et des indemnités forfaitaires, condamner dans cette hypothèse la société Renoval à des dommages et intérêts d’un montant équivalent, de telles sommes n’étant que le résultat de ses fautes contractuelles ;

débouter la société Renoval de sa demande d’article 700 du code de procédure civile ;

et la condamner reconventionnellement à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de 1ère instance et d’appel.

Par conclusions du 4 juin 2024, la société Renoval demande à la cour, au visa des articles 1103, 1104 et 1153 ancien du code civil et des articles L. 441-10 et D. 441-5 du code de commerce, de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, ajoutant, de condamner la société Menuiserie Tiquet à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel, et de débouter la société Menuiserie Tiquet de toutes demandes.

Il est renvoyé, pour l’exposé exhaustif des moyens des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est datée du 18 décembre 2024.

MOTIFS :

Sur le déséquilibre significatif

Sur le fondement de l’article L.442-1 du code de commerce, la société Menuiserie Tiquet estime que les conditions générales de vente de la société Renoval, engendrent un déséquilibre significatif à son égard, au regard notamment de la clause concernant les délais de livraisons et celle prévoyant des pénalités en cas de retard de paiement.

A la date de conclusion du contrat litigieux, le texte applicable était l’article L. 442-6 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016, selon lequel le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé.

La société Menuiserie Tiquet ne rapporte pas la preuve de ce qu’elle aurait été victime d’un rapport de force imposé par la société Renoval. Il n’est pas davantage établi que le contrat qu’elle a accepté de signer le 12 mai 2017 serait un contrat-type, comportant un ensemble de clauses qu’elle n’aurait pu négocier avec son partenaire commercial, notamment la clause relative aux délais.

Faute de soumission ou tentative de soumission au sens des dispositions précitées, le moyen de la société Menuiserie Tiquet sera écarté.

Sur la responsabilité contractuelle de la société Renoval

La société Menuiserie Tiquet soutient que la clause des conditions générales de vente ne stipulant aucun délai précis vide l’obligation de délivrance de sa substance.

Or, la clause relative aux délais figurant aux conditions générales de vente est ainsi rédigée :

« DELAIS : les délais de livraison indiqués sur l’accusé de réception de commande sont donnés à titre indicatif et peuvent évoluer en cas de force majeure, y compris en cas de retard d’un fournisseur de Renoval. Toute modification de la commande originale implique une révision du délai et du prix. Le dépassement du délai ne pourra en aucun cas justifier l’annulation de la commande, ni donner lieu à des pénalités. En cas de non-conformité du produit, Renoval s’engage à refaire le produit dans le délai le plus court en fonction des impératifs d’approvisionnements ».

Le délai de livraison figurant sur l’accusé de réception de commande daté du 7 décembre 2017 annexée au mail du 18 décembre 2017 adressé à la société Menuiserie Tiquet prévoit une date d’expédition au 16 mars 2018, soit trois mois plus tard.

Selon l’article 3 des conditions générales de vente portant sur la confirmation de commande, « le client dispose d’un délai de 48 heures pour renvoyer cet Accusé de Réception validé ou pour faire part de ses remarques, par courrier ou par télécopie. [‘] l’Accusé de Réception non contesté dans un délai de 48 heures vaut vente. ».

Or, l’Accusé de Réception, précisant une expédition au 16 mars 2018, a été adressé par la société Renoval le 18 décembre 2017 et celui-ci n’a été contesté par la société Menuiserie Tiquet que par e-mail du jeudi 21 décembre 2017, soit après l’expiration du délai contractuel de 48 heures.

La société Menuiserie Tiquet invoque la lettre du 23 mars 2018 par laquelle la société Renoval lui a indiqué : « suite à une erreur de coloris dont Renoval est responsable, le délai prévu en livraison le 22 mars 2018 a été décalé début avril (date exacte à confirmer, nous sommes actuellement au 10 avril 2018), nous sommes responsables de cette erreur, et assumeront les conséquences financières » puis à la fin de sa lettre « Renoval prendra à sa charge les pénalités de retard du 22 mars 2018 à la date de livraison des châssis ».

Ainsi, la société Renoval a reconnu sa faute, soit l’erreur sur le coloris des châssis, et s’est engagée à en assumer les conséquences financières, les conditions générales prévoyant que le délai indiqué soit « indicatif et pouvant évoluer en cas de force majeure » ne pouvant priver le cocontractant d’une indemnisation lorsqu’au contraire le dépassement du délai est imputable à faute du fabricant.

Par conséquent, il n’en résulte aucune modification des conditions générales par la commune intention des parties, contrairement à ce qui soutenu.

L’article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

La société Menuiserie Tiquet fait valoir que la société Renoval a engagé sa responsabilité contractuelle en raison du retard dans la livraison des châssis lui causant divers préjudices, à savoir le paiement de factures d’entreprises tierces pour la mise en place de châssis provisoires ainsi que des pénalités de retard auprès du CHU de [Localité 5]. Elle précise que la livraison était attendue au plus tard le 22 décembre 2017 alors qu’elle n’a été effective qu’au 11 avril 2018.

En premier lieu, la société Menuiserie Tiquet ne saurait soutenir que la livraison aurait dû avoir lieu au plus tard le 22 décembre 2017 et que la société Renoval aurait dû commencer l’élaboration des châssis en amont alors qu’aucune commande n’avait été définitivement validée avant l’accusé de réception valant bon de commande du 18 décembre 2017 et que les parties étaient alors encore en cours de négociation, la société Menuiserie Tiquet ayant fait plusieurs modifications sur les divers devis adressés par la société Renoval.

L’expédition comme il est dit supra était prévue au 16 mars 2018, soit 3 mois après la validation de la commande, délai raisonnable pour la réalisation d’une cinquantaine de menuiseries.

Néanmoins, la société Renoval dans sa lettre du 23 mars 2018 admet avoir commis une erreur de coloris sur 4 châssis bombés. Elle s’est engagée à les refaire, ce qui a engendré un retard à la livraison prévue initialement le 22 mars 2018. Ils ont été effectivement livrés le 11 avril 2018.

Tout d’abord, la société Menuiserie Tiquet qui doit démontrer le dommage issu de la faute contractuelle, s’appuie sur les pénalités de retard qu’elle a dû régler au CHU de [Localité 5]. Elle verse aux débats des justificatifs concernant des pénalités subies en raison du retard de chantier à compter du 22 décembre 2017 au 23 février 2018 ainsi que des erreurs de calcul et report.

Celles-ci sont dépourvues de lien de causalité avec le retard de la société Renoval.

L’appelante verse également aux débats le procès-verbal de réception partielle des travaux en date du 30 mars 2018.

Or, selon cette réception partielle, et les réserves émises à l’égard de la société Tiquet ne concernent pas uniquement le manque de châssis vitrés courbes, mais également d’autres postes (plinthes et portes d’accès) travaux non affectés à la société Renoval.

Selon un e-mail du 2 décembre 2019 adressé à la société Menuiserie Tiquet, le CHU de [Localité 5] lui a indiqué que la somme de 34 000 euros € au titre des pénalités pour les retards sur la livraison de la phase 1 lui serait finalement restituée, sauf un montant de 16 125,55 euros au titre des pénalités dans le retard dans la levée des réserves de la phase 1, sans détailler quelle partie de ce montant pourrait concerner précisément le manque de châssis vitrés courbes.

Par ailleurs, les factures d’entreprises tierces versées aux débats par l’appelante mentionnant des « réserves en heures » et « traitement UV 2 » ne peuvent être suffisamment reliés au retard de livraison des 4 châssis courbés litigieux.

De même, le devis unilatéral de la société Menuiserie Tiquet ayant pour objet « coût supplémentaire consécutif au retard de livraison Renoval » daté du 31 août 2018 établi par elle-même postérieurement au litige, ne peut être retenu.

Par conséquent, la société Menuiserie Tiquet étant défaillante à rapporter la preuve du dommage et des pénalités causées par le retard de Renoval, le jugement qui a rejeté ses prétentions indemnitaires sera confirmé de ce chef.

Sur la demande en paiement de la société Renoval

La société Renoval réclame à la société Menuiserie Tiquet le paiement, au principal, de la somme de 20 571,60 euros au titre de deux factures impayées, dont le montant n’est pas contesté :

– la facture n°180400069 du 12 avril 2018 d’un montant de 2 796 euros ;

– la facture n°180400070 du 12 avril 2018 d’un montant de 17 775,60 euros.

A cette somme, elle ajoute droit les intérêts contractuels de retard, l’indemnité forfaitaire de recouvrement ainsi qu’une indemnité au titre de la clause pénale contractuelle, en application de l’article 9 « Retard de paiement » des conditions générales de vente, (« les pénalités de retard seront calculées au taux « REFI » de la BCE majoré de 10% »), et de l’article 10 stipulant que « le défaut de paiement entrainera également une majoration de 20% à titre de clause pénale, afin de compenser les frais engagés pour le recouvrement de la créance (article 1153 du code civil) ».

En effet aux termes de l’article L. 441-10 du code de commerce, dans sa version applicable au litige, les conditions générales de vente peuvent tout à fait prévoir des pénalités de retard ainsi qu’une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement.

Ainsi, il y a lieu de condamner la société Menuiserie Tiquet au paiement de la somme de 20 571,60 euros au titre des factures impayées, outre les intérêts de retard fixés au taux de refinancement de la BCE majoré de 10%.

En application de l’article D.441-5 du code de commerce fixant à 40 euros le montant de l’indemnité forfaitaire, il y a lieu de faire droit à la demande de la société Renoval qui sollicite une somme de 80 euros au titre de ses deux factures impayées.

Concernant la clause pénale contractuelle de 20%, la société Menuiserie Tiquet ne démontre pas en quoi cette indemnité aurait un caractère manifestement excessif eu égard de l’ancienneté de la dette et de son montant, étant rappelé que la société Renoval a adressé vainement deux mises en demeure (le 19 juillet 2018 et le 16 mars 2020), de sorte qu’elle sera condamnée au paiement de la somme de 4 114,32 euros de ce.

En définitive le jugement déféré sera entièrement confirmé.

Sur les frais et les dépens

La société Menuiserie Tiquet, succombant, devra supporter la charge des entiers dépens, et verser en équité la somme de 2 000 euros à la société Renoval au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ne pouvant elle-même prétendre au bénéfice de ce texte.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Menuiserie Tiquet aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer à la société Renoval la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


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