Cautionnement et loyers impayés : enjeux de preuve et de procédure.
Cautionnement et loyers impayés : enjeux de preuve et de procédure.

Recevabilité de l’opposition à l’injonction de payer

L’article 1416 du code de procédure civile stipule que l’opposition à une injonction de payer doit être formée dans le mois suivant la signification de l’ordonnance. Toutefois, si la signification n’a pas été faite à personne, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration d’un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.

Dans le cas présent, la cour a constaté qu’aucun acte n’avait été signifié à M. [K] à personne, ce qui a permis de juger son opposition recevable.

Réparations locatives et état des lieux

L’article 1732 du code civil impose que le preneur est responsable des dégradations survenues pendant sa jouissance, sauf preuve qu’elles ont eu lieu sans sa faute. En vertu de l’article 3-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, un état des lieux doit être établi contradictoirement lors de la remise et de la restitution des clés. Si cet état des lieux ne peut être établi dans les conditions prévues, il doit être réalisé par un huissier de justice, à frais partagés.

L’article 1731 du code civil précise que, en l’absence d’état des lieux, le preneur est présumé avoir reçu le bien en bon état, sauf preuve du contraire. La cour a jugé que, faute d’un état des lieux contradictoire, la bailleresse ne pouvait pas prouver l’existence de dégradations locatives.

Frais irrépétibles et dépens

L’article 700 du code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. La cour a confirmé la décision de première instance en ce qui concerne la condamnation de M. [K] aux dépens et à verser une somme à Mme [Z] au titre de l’article 700, tout en déboutant Mme [Z] de sa demande au titre des frais irrépétibles en appel.

L’Essentiel : L’opposition à une injonction de payer doit être formée dans le mois suivant la signification de l’ordonnance. Si la signification n’a pas été faite à personne, l’opposition est recevable jusqu’à un mois suivant le premier acte signifié à personne. La cour a constaté qu’aucun acte n’avait été signifié à M. [K], rendant son opposition recevable. En matière de réparations locatives, l’absence d’état des lieux contradictoire empêche la bailleresse de prouver des dégradations.
Résumé de l’affaire : L’affaire concerne un litige locatif entre une bailleresse, une locataire et une caution. En janvier 2016, la bailleresse a loué une maison à la locataire avec un loyer mensuel de 700 euros, garantis par la caution. En septembre 2019, la locataire a donné son congé, effectif fin octobre 2019. En janvier 2021, la bailleresse a engagé une procédure d’injonction de payer contre la locataire et la caution pour des loyers impayés et des frais de remise en état, totalisant 5 039,60 euros.

Le tribunal a rendu une ordonnance en janvier 2021, ordonnant à la locataire et à la caution de verser les sommes dues. Cette ordonnance a été signifiée à la caution en février 2021. En juin 2021, la caution a formé opposition à l’injonction de payer. Entre-temps, en avril 2022, la locataire a été placée en rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, ce qui a conduit la bailleresse à se désister de ses demandes à son égard.

En novembre 2023, le tribunal a déclaré l’opposition de la caution recevable, annulant l’ordonnance d’injonction de payer à son encontre. Il a également constaté que la locataire n’avait pas formé opposition et a condamné la caution à verser 2 290 euros pour les loyers impayés, tout en rejetant la demande de la bailleresse concernant les frais de remise en état, faute d’état des lieux contradictoire.

La bailleresse a interjeté appel, demandant la réintégration de ses demandes initiales, notamment pour les frais de remise en état. En janvier 2025, la cour a confirmé le jugement de première instance concernant l’opposition de la caution, tout en rejetant les demandes de la bailleresse pour les dégradations locatives, en raison de l’absence de preuve. La cour a également condamné la bailleresse aux dépens d’appel.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de l’opposition à l’injonction de payer de la caution ?

L’opposition à l’injonction de payer de la caution est fondée sur l’article 1416 du code de procédure civile. Cet article stipule que l’opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l’ordonnance.

Cependant, si la signification n’a pas été faite à personne, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration du délai d’un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.

Dans cette affaire, la cour a constaté que l’ordonnance d’injonction de payer a été signifiée à la caution, mais qu’aucun acte n’a été signifié à personne, ce qui a permis à la caution de former opposition dans le délai imparti.

Quel est le régime de responsabilité du preneur en matière de dégradations locatives ?

Le régime de responsabilité du preneur en matière de dégradations locatives est régi par l’article 1732 du code civil. Cet article précise que le preneur est responsable des dégradations ou des pertes qui surviennent pendant sa jouissance, sauf s’il prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute.

De plus, l’article 3-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 impose qu’un état des lieux soit établi contradictoirement lors de la remise et de la restitution des clés. En l’absence d’état des lieux, l’article 1731 du code civil prévoit que le preneur est présumé avoir reçu les lieux en bon état et doit les rendre tels, sauf preuve du contraire.

Dans cette affaire, la cour a noté qu’aucun état des lieux contradictoire n’a été établi, ce qui a conduit à la présomption que le logement a été rendu en bon état par la locataire.

Quel est le rôle de l’état des lieux dans la détermination des dégradations locatives ?

L’état des lieux joue un rôle crucial dans la détermination des dégradations locatives, comme le stipule l’article 3-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989. Cet article impose que l’état des lieux soit établi contradictoirement et amiablement par les parties ou par un tiers mandaté, et qu’il soit joint au contrat de location.

En l’absence d’un état des lieux, l’article 1731 du code civil indique que le preneur est présumé avoir reçu les lieux en bon état. Cela signifie que, sans preuve de dégradations, le bailleur ne peut pas réclamer de réparations.

Dans le cas présent, la cour a constaté que l’état des lieux a été établi unilatéralement par la bailleresse, sans la présence de la locataire ni d’un huissier, ce qui a conduit à l’absence de preuve des dégradations.

Quel est le principe de la condamnation aux dépens et aux frais irrépétibles ?

Le principe de la condamnation aux dépens est énoncé dans l’article 696 du code de procédure civile, qui stipule que la partie perdante est condamnée aux dépens. En ce qui concerne les frais irrépétibles, l’article 700 du même code prévoit que le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais non compris dans les dépens.

Dans cette affaire, la cour a confirmé la condamnation de la caution aux dépens et a également accordé une somme de 500 euros à la bailleresse au titre de l’article 700, tout en déboutant la bailleresse de sa demande d’augmentation de cette somme en appel.

La cour a également noté que la bailleresse, ayant succombé en partie à son appel, devait supporter les dépens d’appel.

Le copies exécutoires et conformes délivrées à

MW/FA

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Minute n°

N° de rôle : N° RG 24/00693 – N° Portalis DBVG-V-B7I-EYQW

COUR D’APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale

ARRÊT DU 02 AVRIL 2025

Décision déférée à la Cour : jugement du 07 novembre 2023 – RG N°1121000542 – TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE BESANCON

Code affaire : 51A – Demande en paiement des loyers et des charges et/ou tendant à faire prononcer ou constater la résiliation pour défaut de paiement ou défaut d’assurance et ordonner l’expulsion

COMPOSITION DE LA COUR :

M. Michel WACHTER, Président de chambre.

Cédric Saunier et Anne-Sophie Willm, Conseillers.

Greffier : Mme Fabienne ARNOUX, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DEBATS :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 février 2025, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés devant M. Michel WACHTER, président, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour aux autres magistrats :

– Cédric Saunier et Anne-Sophie Willm, conseillers.

L’affaire oppose :

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [G] [D] née [Z]

née le 17 Septembre 1945 à [Localité 6] (ALGÉRIE) ([Localité 6]), de nationalité française, retraitée, demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Claude VICAIRE, avocat au barreau de BESANCON

ET :

INTIMÉ

Monsieur [W] [K]

né le 28 Décembre 1981 à [Localité 7],

demeurant [Adresse 2] (CH)

Défaillant, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 01 août 2024

ARRÊT :

– DEFAUT

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Mme Fabienne ARNOUX, greffier lors du prononcé.

*************

EXPOSE DU LITIGE, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS

Par acte du 18 janvier 2016, Mme [G] [Z] veuve [D] a donné à bail à Mme [E] [P] une maison d’habitation sise à [Localité 5] moyennant un loyer mensuel de 700 euros et avec le cautionnement de M. [W] [K].

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 27 septembre 2019, Mme [P] a donné son congé avec effet au 31 octobre 2019.

Le 11 janvier 2021, Mme [Z] a déposé une requête en injonction de payer à l’encontre de Mme [P] et M. [K] pour notamment, les sommes de 2 290 euros au titre des loyers impayés et 2 749,60 euros au titre des frais de remise en état.

Par ordonnance du 25 janvier 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Besançon a enjoint à Mme [P] et M. [K] de verser à Mme [Z] la somme de 2 290 euros au titre des loyers et charges et celle de 2 749,60 euros au titre des frais de remise en état.

L’ordonnance a été signifiée le 17 février 2021 à étude pour M. [K].

Le 4 juin 2021, une signification d’injonction de payer avec commandement aux fins de saisie-vente a été délivrée à M. [K] à étude.

Par courrier arrivé au tribunal judiciaire de Besançon le 22 juillet 2021 et établi le 19 juillet, M. [K] a formé opposition à l’encontre de l’ordonnance d’injonction de payer.

Entre temps, par jugement du 7 avril 2022, le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire de Mme [P] a été prononcé. Mme [Z] s’est alors désistée de ses demandes à l’égard de cette dernière.

Par jugement rendu le 7 novembre 2023, le tribunal judiciaire de Besançon a :

– déclaré l’opposition de M. [K] recevable et mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer à son égard,

– constaté que Mme [P] n’a pas formé opposition à l’injonction de payer,

Statuant à nouveau :

– constaté le désistement en date du 15 novembre 2022 de Mme [Z] de ses demandes à l’égard de Mme [P] au regard du jugement de surendettement,

– condamné M. [K], en sa qualité de caution, à verser à Mme [Z] la somme de 2 290 euros avec intérêts à compter de la sommation de payer du 22 octobre 2020,

– dit y avoir lieu à capitalisation des intérêts,

– rejeté la demande en paiement de Mme [Z] au titre des dégradations locatives,

– condamné M. [K], à verser à Mme [Z] une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté M. [K] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [K] aux dépens qui comprendront l’intégralité des frais afférents à la procédure d’injonction de payer ainsi que des sommations de payer des 12 novembre 2020 et 22 octobre 2020,

– rejeté les demandes de M. [K] pour le surplus,

– rejeté les demandes de Mme [Z] pour le surplus.

Le tribunal a notamment considéré que :

– l’opposition de M. [K] était recevable au regard de l’article 1416 du code civil tandis que Mme [P] n’avait pas formé opposition.

– eu égard aux sommes versées par la locataire et par la CAF à la bailleresse, vu la déduction du dépôt de garantie à hauteur de 700 euros et vu par ailleurs le contrat de bail et le cautionnement de M. [K], la créance de loyers était justifiée à hauteur de 2 290 euros et incombait à M. [K] en sa qualité de caution.

– en l’absence d’état des lieux d’entrée et de sortie établis contradictoirement, dans la mesure où l’état de sortie a été établi par la bailleresse sans la locataire et sans commissaire de justice, le logement sera présumé avoir été rendu en bon état par la locataire si bien qu’aucun frais de remise en état ne pouvait lui être demandé.

-oOo-

Par déclaration du 6 mai 2024, Mme [Z] a relevé appel du jugement en ce qu’il a :

– déclaré l’opposition de M. [K] recevable et mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer à son égard,

– rejeté la demande en paiement de Mme [Z] au titre des dégradations locatives,

– condamné M. [K], à verser à Mme [Z] une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 18 juillet 2024, Mme [Z] demande à la cour de :

Vu notamment les articles 1416 du code de procédure civile, 3-2 et 7 de la loi du 6 juillet 1989, 1731 et 1732 du code civil,

– Déclarer son appel recevable et bien fondé,

– Confirmer le jugement en ce qu’il a :

* condamné M. [K], en sa qualité de caution, à verser à Mme [Z] la somme de 2 290 euros avec intérêts à compter de la sommation de payer du 22 octobre 2020,

* dit y avoir lieu à capitalisation des intérêts,

* condamné M. [K] aux dépens qui comprendront l’intégralité des frais afférents à la procédure d’injonction de payer ainsi que des sommations de payer des 12 novembre 2020 et 22 octobre 2020,

– Infirmer le jugement en ce qu’il a déclaré l’opposition de M. [K] recevable et mis à néant l’injonction de payer,

Statuant à nouveau, condamner M. [K] à lui payer la somme de 2 749,60 euros au titre des réparations locatives avec intérêts à compter de la sommation de payer du 22 octobre 2020 avec capitalisation des intérêts,

– Infirmer le jugement en ce qu’il a limité les montant des frais irrépétibles à la somme de 500 euros et condamner M. [K] au paiement de la somme de 2 500 euros,

– Complémentairement, condamner M. [K] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ainsi qu’aux dépens qui comprendront l’intégralité des frais afférents à la procédure d’injonction de payer ainsi que des sommations de payer des 12 novembre 2020 et 22 octobre 2020, et aux entiers dépens d’appel dont distraction au profit de Me Vicaire.

-oOo-

L’ordonnance de clôture a été rendue le 15 janvier 2025 et l’affaire a été appelée à l’audience du 5 février 2025.

Elle a été mise en délibéré au 2 avril 2025.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l’exposé des moyens de Mme [Z] à ses conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

La déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiées à étude à M. [K] le 1er août 2024.

M. [K] n’a pas constitué avocat.

En application de l’article 473 du code de procédure civile, le présent arrêt est rendu par défaut.

SUR CE, LA COUR

I. Sur l’irrecevabilité de l’opposition à injonction de payer de M. [K]

Le jugement déféré a déclaré l’opposition de M. [K] recevable et mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer. Mme [Z] demande l’infirmation de ce chef de dispositif et la condamnation de M. [K] aux sommes couvertes par l’injonction de payer et pour laquelle elle n’a pas obtenu satisfaction en première instance, à savoir 2 749,60 euros.

Dans cette perspective, elle rappelle que l’opposition a été jugée recevable car M. [K] n’aurait pas été touché par la signification, habitant en Suisse et non à [Localité 3]. Elle précise que la domiciliation de M. [K] à [Localité 3] ressortait de nombreux éléments tandis que la domiciliation à [Localité 4] de M. [K] ne ressortirait que d’un accord parental de M. [K].

Réponse de la cour :

Selon l’article 1416 du code de procédure civile, l’opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l’ordonnance. Toutefois, si la signification n’a pas été faite à personne, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration du délai d’un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.

La cour relève que :

– Par ordonnance du 25 janvier 2021, Mme [P] et M. [K] ont été solidairement condamnés à verser à Mme [Z] la somme de 2 290 euros en principal et 2 749,60 euros au titre des frais de remise en état. L’ordonnance a été signifiée le 17 février 2021 à étude pour M. [K].

– Le 4 juin 2021, une signification d’injonction de payer avec commandement aux fins de saisie-vente a été signifiée à M. [K], à nouveau, à étude.

– il n’est justifié d’aucun acte signifié à personne ou de mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens de M. [K].

– Par courrier arrivé au tribunal judiciaire de Besançon le 22 juillet 2021 et établi le 19 juillet, M. [K] a formé opposition contre cette ordonnance d’injonction de payer rendue le 25 janvier 2021.

La cour observe que les moyens tirés de la réalité du domicile de M. [K] sont inopérants. La cour constate que le délai pour former opposition n’avait pas commencé à courir en l’absence de signification à personne et de mesure d’exécution et que, par conséquent, l’opposition de M. [K] était recevable.

Par conséquent, la cour confirme le jugement déféré en ce qu’il a déclaré l’opposition de M. [K] recevable et mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer.

II. Sur les réparations locatives

Le jugement déféré a rejeté la demande en paiement de Mme [Z] au titre des dégradations locatives. L’appelante demande l’infirmation de ce chef de dispositif et sollicite la condamnation de M. [K] à lui payer la somme de 2 749,60 euros au titre des réparations locatives avec intérêts à compter de la sommation de payer du 22 octobre 2020 avec capitalisation des intérêts.

Dans cette perspective, l’appelante rappelle que Mme [P] a fait obstacle à la régularisation d’un état des lieux de sortie au 31 décembre 2019 et que celle-ci s’est bornée à indiquer qu’elle ne pouvait se déplacer pour procéder à l’état des lieux. Mme [Z] soutient que son ancienne locataire n’a pas fait connaître sa nouvelle adresse, empêchant le contradictoire de l’état des lieux même avec un huissier de justice. Elle précise que Mme [P] a déposé les clés dans une poste à seulement 6,7km de la maison objet du bail et aurait donc pu s’y rendre.

Réponse de la cour :

L’article 9 du code de procédure civile impose à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. En vertu de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Aux termes de l’article 1732 du code civil, le preneur répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute.

En application de l’article 3-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, en sa version applicable, un état des lieux est établi dans les mêmes formes et en autant d’exemplaires que de parties lors de la remise et de la restitution des clés. Il est établi contradictoirement et amiablement par les parties ou par un tiers mandaté par elles et joint au contrat de location. Si l’état des lieux ne peut être établi dans les conditions précitées, il est établi par un huissier de justice, sur l’initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire et à un coût fixé par décret en Conseil d’Etat. A défaut d’état des lieux ou de la remise d’un exemplaire de l’état des lieux à l’une des parties, la présomption établie par l’article 1731 du code civil ne peut être invoquée par celle des parties qui a fait obstacle à l’établissement de l’acte ou à sa remise à l’une des parties.

L’article 1731 du code civil dispose que s’il n’a pas été fait d’état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire.

La cour relève qu’il ne s’agit pas en l’espèce, contrairement à ce que soutient la bailleresse d’appliquer au profit de la locataire la présomption de l’article 1731 du code civil.

En application des dispositions susvisées, il appartient au bailleur qui se prétend créancier d’une créance de réparation locative de prouver l’existence de dégradations locatives. Dans cette perspective, il appartient au bailleur de faire procéder à un état des lieux, soit de manière amiable, soit avec le concours d’un huissier de justice.

En l’espèce, la bailleresse allègue de dégradations locatives à travers un état des lieux de sortie qu’elle a dressé elle-même, en l’absence de tiers et de manière non contradictoire. La cour observe au demeurant que cet état des lieux n’est ni daté ni signé, y compris par la bailleresse elle-même.

Le fait que la locataire ait fait obstacle à la tenue d’un état des lieux contradictoire amiable en refusant de se présenter est indifférent alors que les dispositions susvisées prévoient expréssement qu’en tel cas, il appartient au bailleur de procéder à un état des lieux avec le concours d’un huissier, ce qui ne lui était pas impossible.

Le fait que cet état des lieux strictement unilatéral serait corroboré par des pièces complémentaires est indifférent et ne permet pas de pallier la violation des dispositions précitées. Au demeurant, aucun élément ne permet de rattacher les photographies invoquées au soutien de cet état des lieux à la maison objet du bail et à la période postérieure à la sortie des lieux (fin 2019). Mme [Z] produit une copie d’écran partielle montrant l’horodatage de fichiers jpeg mais, outre que certains des fichiers ont été générés en octobre 2020 et en mars 2023, soit largement après la sortie des lieux de la locataire, rien ne permet de rattacher les photos produites à ces données d’horodatage.

Par conséquent, à défaut pour Mme [Z] de démontrer l’existence de dégradations locatives et leur imputabilité à Mme [P], la cour confirme le jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de paiement à l’encontre de M. [K].

II. Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile

Eu égard aux faits ayant présidé à la saisine de la juridiction, aux demandes des parties et à l’issue du litige à hauteur de cour, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a condamné M. [K] aux dépens et à verser à Mme [Z] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Mme [Z], qui succombe à hauteur de l’appel qu’elle a initié, sera condamnée aux dépens d’appel et sera déboutée de sa demande formée au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu par défaut, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME, dans les limites de l’appel, le jugement rendu le 7 novembre 2023 par le tribunal judiciaire de Besançon ;

Y AJOUTANT,

CONDAMNE Mme [G] [Z] veuve [D] aux dépens d’appel ;

DEBOUTE Mme [G] [Z] veuve [D] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par M. Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Fabienne Arnoux , greffier.

Le greffier Le président


Votre avis sur ce point juridique ? Une actualité ? Une recommandation ?

Merci pour votre retour ! Partagez votre point de vue, une info ou une ressource utile.

Chat Icon