Réponse de la Cour
Vu les articles 29 et 53 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse :
4. Aux termes du premier de ces textes, toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation et, selon le second, la citation doit, à peine de nullité, préciser et qualifier le fait incriminé, et indiquer le texte de loi applicable à la poursuite.
5. Les abus de la liberté d’expression prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le fondement de l’article 1240 du code civil.
6. Pour débouter la fédération et les syndicats CGT de leur demande de nullité de l’assignation, l’arrêt constate d’abord que la demande est formée par M. [K], salarié de la société Altran, et le syndicat CFDT à l’encontre d’autres organisations syndicales et relève que les faits dénoncés résultent exclusivement de publications intitulées « Le Consultant Enchaîné », émanant de la CGT, que des tracts visant expressément M. [K] ou sa fonction de médiateur le qualifient de « médiator », renvoyant directement à quelque chose qui tue, comme l’amiante ou au médicament, et allèguent l’existence d’une corruption de certains délégués syndicaux en établissant un lien entre, d’une part la signature d’accords collectifs défavorables aux salariés, d’autre part une augmentation de rémunération des représentants syndicaux les ayant signés et l’attribution d’emplois fictifs « médiators ».
7. L’arrêt retient ensuite que si toute atteinte à une personne déterminée commise par la voie de la presse est susceptible d’être poursuivie sur le fondement de la loi sur la presse, il n’en résulte pas que seule cette voie procédurale puisse être suivie, que si toute diffamation constitue une atteinte à la vie privée et cause un préjudice à celui qui en est la victime, toute atteinte à la vie privée ne constitue pas nécessairement une diffamation, qu’une personne s’estimant victime d’une atteinte à sa vie privée dispose du droit de saisir le juge judiciaire sur le fondement de l’article 9 du code civil, quand bien même l’atteinte trouverait son origine dans un ou plusieurs articles d’une ou plusieurs autres publications.
8. Enfin, l’arrêt retient que l’action de M. [K], à laquelle s’associe le syndicat CFDT, tend à obtenir réparation des préjudices qu’il estime avoir subis pour deux motifs distincts, une atteinte à la vie privée et un harcèlement, et qu’il en résulte que M. [K] n’avait pas à respecter les dispositions de la loi sur la presse pour délivrer son assignation, que ce soit en termes de délais, de signification au ministère public ou de visa précis de la loi du 29 juillet 1881.
9. En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que les faits incriminés, de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération du demandeur, pouvaient être constitutifs de diffamation ou d’injure au sens de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles susvisés.