Brevet sur un dispositif d’encaissage : enjeux de nouveauté et d’activité inventive.

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Brevet sur un dispositif d’encaissage : enjeux de nouveauté et d’activité inventive.

Conditions de brevetabilité

La brevetabilité d’une invention est régie par les articles L.611-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. Selon l’article L.611-11, une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique, qui est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet. L’état de la technique inclut également le contenu de demandes de brevet antérieures.

Défaut de nouveauté

Pour qu’une invention soit considérée comme nouvelle, elle doit être entièrement décrite dans une seule antériorité, avec les mêmes éléments, agencement et fonctionnement en vue du même résultat technique. L’article L.611-11 précise que l’invention doit être distincte de l’état de la technique, ce qui implique que les caractéristiques essentielles de l’invention ne doivent pas être divulguées dans les documents antérieurs.

Activité inventive

L’article L.611-14 du Code de la propriété intellectuelle stipule qu’une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour une personne du métier, elle ne découle pas de manière évidente de l’état de la technique. Cela signifie que l’invention doit apporter une solution technique qui n’est pas évidente pour un professionnel du domaine concerné.

Nullité des revendications

La nullité d’un brevet peut être demandée sur la base de l’absence de nouveauté ou d’activité inventive, conformément à l’article L.613-1 du Code de la propriété intellectuelle. Les revendications d’un brevet doivent être claires et concises, et leur validité peut être contestée si elles ne respectent pas ces critères.

Concurrence déloyale

La concurrence déloyale est régie par les articles 1382 et suivants du Code civil, qui prévoient que toute faute causant un dommage à autrui oblige son auteur à réparer ce dommage. La jurisprudence a établi que des actes de concurrence déloyale peuvent inclure des pratiques telles que le dénigrement, l’imitation ou l’exploitation des efforts d’autrui sans autorisation.

Indemnisation

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge d’accorder une indemnité à la partie qui a gagné le procès pour couvrir les frais non compris dans les dépens. Cette disposition est souvent utilisée pour compenser les frais d’avocat et autres coûts liés à la procédure judiciaire.

Exécution provisoire

L’article 514 du Code de procédure civile permet au juge d’ordonner l’exécution provisoire d’une décision, même en cas d’appel, sauf disposition contraire. Cela signifie que les effets de la décision peuvent être appliqués immédiatement, ce qui est particulièrement pertinent dans les affaires de contrefaçon où des dommages peuvent se produire rapidement.

L’Essentiel : La brevetabilité d’une invention est déterminée par sa nouveauté, qui exige qu’elle ne soit pas comprise dans l’état de la technique accessible au public avant le dépôt de la demande. Pour être considérée comme nouvelle, l’invention doit être entièrement décrite dans une seule antériorité. De plus, elle doit impliquer une activité inventive, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas découler de manière évidente de l’état de la technique pour un professionnel du domaine.
Résumé de l’affaire : La SAS Smurfit Westrock France, filiale du groupe Smurfit Kappa, et la SAS Smurfit Westrock Distribution, également filiale de la première, sont engagées dans un litige avec la SAS Maubrac, spécialisée dans la production de cartons d’emballage. Ce conflit découle de la contrefaçon alléguée d’un brevet détenu par la société Maubrac, intitulé « Dispositif et procédé de mise en caisse de bouteilles », et d’une demande de brevet déposée par Smurfit Kappa France.

En 2015, Smurfit Kappa France a constaté lors d’un salon que la société Maubrac présentait un produit qu’elle considérait comme contrefaisant son brevet. En février 2016, Smurfit Kappa France a mis en demeure Maubrac de cesser l’exploitation de ce produit. En réponse, Maubrac a contesté la validité du brevet de Smurfit Kappa, arguant d’antériorités existantes, y compris son propre brevet.

En 2019, Smurfit Kappa France a obtenu une ordonnance de saisie-contrefaçon sur le stand de Maubrac lors d’une foire-exposition. Par la suite, Smurfit Kappa France et Smurfit Kappa Distribution ont assigné Maubrac en contrefaçon de brevet et en concurrence déloyale. Le tribunal judiciaire de Paris a rendu un jugement en février 2023, déclarant Maubrac irrecevable à contester certaines revendications du brevet de Smurfit, mais prononçant la nullité d’autres revendications et déboutant Smurfit de ses demandes.

Les sociétés Smurfit ont interjeté appel, demandant la confirmation de certaines décisions tout en contestant la nullité prononcée sur d’autres revendications. Maubrac, en réponse, a également demandé la confirmation du jugement initial et a soulevé des demandes reconventionnelles. Le litige se concentre sur la validité des brevets et les allégations de contrefaçon et de concurrence déloyale, avec des implications financières significatives pour les parties impliquées.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la recevabilité de la demande reconventionnelle en nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet FR 16 53072 ?

La société intimée soutient être recevable à agir en nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet, en vertu de l’article 71 du code de procédure civile, qui stipule que « les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. »

Elle fait valoir que ces revendications sont dépendantes des revendications opposées et qu’il existe un lien de connexité suffisant. En effet, pour interpréter les revendications opposées, il est nécessaire de se référer au contenu des revendications non opposées.

Les sociétés appelantes, quant à elles, soutiennent que la société intimée est irrecevable à soulever la nullité des revendications 3, 5, 6 et 7, car elles ne sont pas directement opposées au titre de la contrefaçon.

La cour, en se fondant sur l’article 31 du même code, qui précise que « l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention », conclut que la société intimée a un intérêt légitime à agir en nullité, étant donné qu’elle est directement concurrente sur le même marché.

Ainsi, la cour rejette la fin de non-recevoir soulevée par les sociétés appelantes et déclare la société intimée recevable à solliciter la nullité des revendications du brevet FR 072.

Quel est le critère de nouveauté selon le Code de la propriété intellectuelle ?

Selon l’article L.611-11 du Code de la propriété intellectuelle, « Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique. L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen. »

Pour qu’une invention soit considérée comme non nouvelle, elle doit être entièrement comprise dans une seule antériorité, avec les mêmes éléments, dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique.

Dans le cas présent, la société intimée soutient que le brevet opposé ne remplit pas les conditions de brevetabilité car il n’est pas nouveau, en se basant sur plusieurs antériorités, notamment la demande de brevet internationale WO 2010/048680 A1.

La cour doit donc examiner si cette antériorité divulgue toutes les caractéristiques de l’invention revendiquée, conformément aux exigences de nouveauté établies par le Code de la propriété intellectuelle.

Quel est le fondement de la nullité des revendications du brevet FR 16 53072 pour défaut d’activité inventive ?

La nullité des revendications du brevet pour défaut d’activité inventive est fondée sur l’article L.611-14 du Code de la propriété intellectuelle, qui stipule qu’une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour une personne du métier, elle ne découle pas de manière évidente de l’état de la technique.

La société intimée soutient que les revendications du brevet ne présentent pas d’activité inventive, car elles ne sont qu’une simple combinaison d’éléments connus dans le domaine technique.

La cour doit donc évaluer si les caractéristiques techniques revendiquées apportent une contribution technique significative par rapport à l’état de la technique, ou si elles sont évidentes pour une personne du métier.

En cas de constatation d’un défaut d’activité inventive, la cour pourrait prononcer la nullité des revendications concernées, conformément aux dispositions du Code de la propriété intellectuelle.

Quel est le régime juridique applicable aux actes de contrefaçon de brevet selon le Code de la propriété intellectuelle ?

Les actes de contrefaçon de brevet sont régis par les articles L613-3 et L615-1 du Code de la propriété intellectuelle. L’article L613-3 précise que « sont considérés comme contrefaisants, au sens de la présente section, ceux qui, sans le consentement du titulaire du brevet, fabriquent, offrent, mettent dans le commerce, utilisent ou détiennent à des fins commerciales un produit ou un procédé faisant l’objet d’un brevet. »

L’article L615-1, quant à lui, énonce que « le titulaire d’un brevet peut agir en contrefaçon contre toute personne qui commet des actes de contrefaçon. »

Dans le cadre de l’affaire, la société appelante soutient que la société intimée a commis des actes de contrefaçon en fabriquant et en mettant en commerce un ensemble d’encaissage reproduisant les revendications du brevet.

La cour devra donc examiner si les actes reprochés à la société intimée entrent dans le champ d’application des dispositions précitées et si les conditions de la contrefaçon sont réunies.

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 1

ARRÊT DU 12 MARS 2025

(n° 033/2025 , 30 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/05258 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHKB2

Décision déférée à la Cour : jugement du 10 février 2023 du tribunal judiciaire de PARIS – 3ème chambre 2ème section – RG n° 19/14617

APPELANTES

SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement dénommée SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION)

Société par actions simplifiée immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 300 883 378

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement dénommée SMURFIT KAPPA FRANCE)

Société par actions simplifiée immatriculée au RCS de Créteil sous le n° 493 254 908 agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentées en tant qu’avocat postulant par Me François TEYTAUD de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J 125

Ayant pour avocat plaidant Me Virginie LEHOUX du cabinet BENECH Selarl, avocat au barreau de PARIS, toque P 324

INTIMÉE

SAS MAUBRAC

Société par actions simplifiée immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 343 679 072, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée en tant qu’avocat postulant par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2477

Ayant pour avocat plaidant Me Gwendal BARBAUT de la SELARL IPSIDE AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque E 1489

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 janvier 2025, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre, et Mme Déborah BOHEE, conseillère chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.

Mmes Isabelle DOUILLET et Déborah BOHEE ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

– Mme Isabelle DOUILLET, présidente,

– Mme Françoise BARUTEL, conseillère,

– Mme Déborah BOHEE, conseillère.

Greffier lors des débats : M. Damien GOVINDARETTY

ARRÊT :

contradictoire ;

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

signé par Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre, et par M. Soufiane HASSAOUI, greffier présent lors de la mise à disposition et auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Smurfit Westrock France, anciennement dénommée Smurfit Kappa France (ci-après Smurfit Kappa France) filiale du groupe international Smurfit Kappa, a pour activité la fabrication, la transformation et la commercialisation de matériaux pour emballage à base de papier et/ou carton.

La SAS Smurfit Westrock Distribution anciennement Smurfit Kappa Distribution (ci-après Smurfit Kappa Distribution), exerçant sous le nom commercial Smurfit Kappa Distribution Vin, domiciliée en Gironde, est une filiale de la société Smurfit Kappa France. Elle indique avoir pour activité la fabrication et la commercialisation d’emballages en carton.

La SAS Maubrac est une entreprise familiale spécialisée dans la réalisation et la production de cartons d’emballage et de systèmes d’encaissement, en particulier pour le vin.

Elle est titulaire du brevet français FR 2 947 532 (ci-après désigné par FR 532) intitulé ‘Dispositif et procédé de mise en caisse de bouteilles’ déposé le 1er juillet 2009, publié le 7 janvier 2011 et délivré le 11 septembre 2015. Il est régulièrement maintenu en vigueur par le paiement des annuités.

Le 2 août 2013, la société Smurfit Kappa France a déposé une demande de brevet français n°13 57697 ayant pour titre « Ensemble d’emballage et de bâti de formage dudit emballage » publiée le 6 février 2015 et délivré 17 juin 2017, dont la description mentionne le brevet FR 532 et qui explique qu’il existe « un besoin pour une manipulation plus aisée. »

Par procès-verbal de constat du 25 novembre 2015, la société Smurfit Kappa France a fait constater sur le salon SITEVI que la société Maubrac présentait un bâti de formage contrefaisant, selon elle, son brevet.

Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 2 février 2016, la société Smurfit Kappa France a mis en demeure la société Maubrac de cesser d’exploiter le bâti de formage et le procédé de montage d’un emballage en ce qu’ils seraient contrefaisants des revendications 1, 2, 3, 4, 7, 8 et 9 de sa demande de brevet.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 février 2016, la société Maubrac a contesté la validité de la demande de brevet opposée au regard d’antériorités existantes et notamment de son propre brevet, déplorant « une campagne d’intimidation et de dénigrement » de la part de la société Smurfit Kappa France.

Le 7 avril 2016, la société Smurfit Kappa France a déposé une demande de brevet français, divisionnaire de la demande de brevet FR 13 57697, enregistrée sous le n° 16 53072 (ci-après FR 072) publiée le 14 octobre 2016 sous le n° 03034 756 ayant pour titre « ensemble d’emballage et de bâti de formage dudit emballage » et le brevet a été délivré le 15 juin 2017.

Il est régulièrement maintenu en vigueur par le paiement des annuités.

Le 26 novembre 2019, la société Smurfit Kappa France a obtenu une ordonnance aux fins de saisie-contrefaçon sur le stand de la société Maubrac à la même foire-exposition SITEVI qui a eu lieu le 28 novembre 2019.

Par acte du 16 décembre 2019, la société Smurfit Kappa France et la société Smurfit Kappa Distribution ont fait assigner la société Maubrac devant le tribunal judiciaire de Paris en contrefaçon de brevet et concurrence déloyale.

Par jugement contradictoire du 10 février 2023 dont appel, le tribunal judiciaire de Paris a statué en ces termes :

Déclare la SAS Maubrac irrecevable à soulever la nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet français n°16 53072 ;

Prononce la nullité des revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 du brevet français n°16 53072 ;

Déboute la SAS Smurfit Kappa France de ses demandes au titre de la contrefaçon de brevet et du parasitisme ;

Dit que la décision, une fois devenue définitive, sera transmise à l’Institut National de la Propriété Industrielle par la partie la plus diligente aux fins d’inscription au Registre National des Brevets ;

Déboute la SAS Smurfit Kappa Distribution de ses demandes au titre de la concurrence déloyale ;

Déboute la SAS Maubrac de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts;

Condamne la SAS Smurfit Kappa France et la SAS Smurfit Kappa Distribution aux dépens de l’instance ;

Condamne la SAS Smurfit Kappa France et la SAS Smurfit Kappa Distribution à payer à la SAS Maubrac la somme de 35.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne l’exécution provisoire.

Par déclaration en date du 16 mars 2023, les sociétés Smurfit Kappa France et Smurfit Kappa Distribution ont interjeté appel de ce jugement.

Dans leur dernières conclusions, transmises le 28 octobre 2024, les sociétés Smurfit Kappa France et Smurfit Kappa Distribution, appelantes, demandent à la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu’il a :

– Déclaré la société SAS MAUBRAC irrecevable à soulever la nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet français n°16 53072 ;

– Jugé suffisamment décrites les revendications 1 et 2 du brevet français n°16 53072;

– Jugé que la revendications 1 telle que délivrée n’a pas été étendue au-delà de l’objet du brevet français n°16 53072 ;

– Jugé que les revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 sont nouvelles ;

– Débouté la société SAS MAUBRAC de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Infirmer le jugement en ce qu’il a :

– Prononcé la nullité des revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 du brevet français n°16 53072 pour défaut d’activité inventive ;

– Débouté la société SMURFIT KAPPA FRANCE de ses demandes au titre de la contrefaçon de brevet et du parasitisme ;

– Dit que la décision, une fois devenue définitive, sera transmise à l’Institut National de la Propriété Industrielle par la partie la plus diligente aux fins d’inscription au Registre National des Brevets ;

– Débouté la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION de ses demandes au titre de la concurrence déloyale ;

– Condamné la société SMURFIT KAPPA FRANCE et la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION aux dépens de l’instance ;

– Condamné la société SMURFIT KAPPA FRANCE et la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION à payer à la société SAS MAUBRAC la somme de 35.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Ordonné l’exécution provisoire.

Et statuant à nouveau :

– Juger que les sociétés SMURFIT KAPPA FRANCE et SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION sont recevables et bien fondées en leurs appel, demandes et prétentions ;

– Juger que la société SAS MAUBRAC est mal fondée dans son action reconventionnelle en nullité des revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 du brevet français n°16 53072 ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire, l’irrecevabilité de la demande en nullité des revendications 3 et 5 à 7 du brevet français n°16 53072 n’était pas confirmée,

– Juger que les revendications 3 et 5 à 7 du brevet français n°16 53072 sont valides;

– Juger que la société SAS MAUBRAC en fabriquant, offrant, mettant dans le commerce, utilisant sur le territoire français un ensemble d’encaissage, en utilisant et en offrant d’utiliser sur le territoire français un procédé reproduisant les revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 du brevet français n°16 53072 commet des actes de contrefaçon à l’égard de la société SMURFIT KAPPA FRANCE au sens des articles L613-3 a), b) et c) et L615-1 et suivant du Code de la propriété intellectuelle;

– Juger que la société SAS MAUBRAC a commis ce faisant des actes de concurrence déloyale à l’égard de la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire les revendications du brevet n° 16 53072 étaient jugées nulles,

– Juger que la société SAS MAUBRAC a commis ce faisant des actes de concurrence déloyale et parasitaire à l’égard de la société SMURFIT KAPPA France et de la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION ;

– Débouter la société SAS MAUBRAC de toutes ses demandes, fins et prétentions;

En conséquence,

– Faire interdiction à la société SAS MAUBRAC, directement ou indirectement de poursuivre la fabrication, l’offre à la vente, la mise dans le commerce, l’utilisation, la détention, l’offre d’utilisation de tout ensemble et/ou procédé portant atteinte au brevet français n°16 53072, sous astreinte de 2.000 euros par infraction constatée, à compter de la signification de la décision à intervenir et pendant une période de trois mois à l’issue de laquelle il sera à nouveau fait droit;

– Ordonner la confiscation et la remise à la société SMURFIT KAPPA FRANCE des ensembles d’encaissage qui se trouveraient en possession de la société SAS MAUBRAC à la date de la décision à intervenir ;

– Juger que la cour se réservera la liquidation des astreintes prononcées et la fixation éventuelle de nouvelles astreintes ;

– Condamner la société SAS MAUBRAC à réparer l’ensemble des préjudices causés par elle à la société SMURFIT KAPPA FRANCE pour les faits de contrefaçon non prescrits au jour de l’assignation et ceux commis jusqu’à la décision à intervenir ;

– Condamner la société SAS MAUBRAC à réparer l’ensemble des préjudices causés par elle à la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION pour les faits de concurrence déloyale non prescrits au jour de l’assignation et ceux commis jusqu’à la décision à intervenir ;

– Condamner la société SAS MAUBRAC à verser à la société SMURFIT KAPPA FRANCE à titre d’indemnisation en réparation du préjudice moral causé par les actes de contrefaçon du brevet français n°16 53072 la somme de 50.000 euros, quitte à parfaire ;

– Condamner la société SAS MAUBRAC à verser à la société SMURFIT KAPPA FRANCE la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation du préjudice économique subi du fait des actes de contrefaçon du brevet français n°16 53072 et réserver les droits de la société SMURFIT KAPPA FRANCE sur l’évaluation définitive du préjudice économique subi ;

A titre subsidiaire,

– Condamner la société SAS MAUBRAC à verser à la société SMURFIT KAPPA FRANCE la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation du préjudice économique subi du fait des actes de parasitisme de l’intimée et réserver les droits de la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION sur l’évaluation définitive dudit préjudice ;

– Condamner la société SAS MAUBRAC à verser à la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation du préjudice que lui a causé les actes de concurrence déloyale de l’intimée et réserver les droits de la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION sur l’évaluation définitive dudit préjudice ;

Avant-dire droit sur l’évaluation du préjudice :

– Ordonner une mesure d’expertise et nommer tel expert qu’il plaira à la Cour de désigner avec pour mission d’apporter tout élément utile à la détermination de l’entier préjudice réellement subi par la société SMURFIT KAPPA FRANCE du fait des actes de contrefaçon et par la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION du fait des actes de concurrence déloyale et notamment à requérir tout renseignement et consulter toute comptabilité, correspondance et archives commerciales de la société SAS MAUBRAC, et à entendre les parties en leurs dires et explications ;

– Déclarer que la cour statuera sur le préjudice économique subi par la société SMURFIT KAPPA FRANCE et par le préjudice subi par la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION au vu du rapport de l’expert ;

Subsidiairement,

– Ordonner à la société SAS MAUBRAC de communiquer aux sociétés SMURFIT KAPPA FRANCE et SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION un état certifié par son commissaire aux comptes attestant des quantités de bâtis de formage et de flans correspondants vendues et détenues en stock, ainsi que du chiffre d’affaires et du bénéfice réalisés à ce titre depuis leur première commercialisation, accompagné de l’ensemble des éléments comptables justificatifs (bons de commande, bon de livraison, factures d’achat, factures de vente ‘) et ce sous astreinte provisoire de 1.500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et pendant une période de trois mois à l’issue de laquelle il sera à nouveau fait droit ;

– Juger que la cour se réservera la liquidation des astreintes prononcées et la fixation éventuelle de nouvelles astreintes ;

– Déclarer que la cour statuera sur le préjudice économique subi par la société SMURFIT KAPPA FRANCE et par le préjudice subi par la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION au vu des pièces qui seront produites par la société SAS MAUBRAC en exécution de la condamnation à production de pièces prononcée sous astreinte ;

– Renvoyer l’affaire à une audience de mise en état pour conclusions des sociétés SMURFIT KAPPA FRANCE et SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION sur le montant de leur préjudice économique au regard des éléments fournis par la société MAUBRAC ;

– Déclarer que les sociétés SMURFIT KAPPA FRANCE et SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION pourront saisir à nouveau par voie de conclusions la Cour en cas de difficultés survenues entre les parties s’agissant de cette communication à production de pièces et pour évaluer l’indemnité due au titre de leur préjudice économique ;

Sur les autres mesures :

– Ordonner la publication en entier ou par extrait de la décision à intervenir dans trois revues ou journaux au choix de la société SMURFIT KAPPA FRANCE et aux frais de la société SAS MAUBRAC, à concurrence de 6.000 euros HT par insertion et ce, au besoin à titre de dommages et intérêts complémentaires ;

– Condamner la société SAS MAUBRAC à payer à chacune des sociétés SMURFIT KAPPA FRANCE et SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION la somme de 70.000 euros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société SAS MAUBRAC aux entiers dépens, en ce compris les frais de saisie-contrefaçon du 28 novembre 2019 et de constats des 27 novembre 2019, qui seront recouvrés par Maître TEYTAUD (AARPI TEYTAUD ‘ SALEH) dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile ;

– Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir en toutes ses dispositions nonobstant appel et sans constitution de garantie.

Dans ses dernières conclusions numérotées 4, transmises le 18 octobre 2024, la société Maubrac, intimée, demande à la cour de :

A titre principal :

– Juger recevable la société MAUBRAC en ses demandes, fins et conclusions.

– Débouter les sociétés SMURFIT KAPPA FRANCE et SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION de leurs demandes, fin et conclusions.

– Confirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de Paris en date du 10 février 2023 en ce qu’il a :

Prononcé la nullité des revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 du brevet français n°16 53072 pour défaut d’activité inventive ;

Débouté la SAS Smurfit Kappa France de ses demandes au titre de la contrefaçon de brevet et du parasitisme ;

Dit que la décision, une fois devenue définitive, sera transmise à l’Institut National de la Propriété Industrielle par la partie la plus diligente aux fins d’inscription au Registre National des Brevets ;

Débouté la SAS Smurfit Kappa Distribution de ses demandes au titre de la concurrence déloyale ;

Condamné la SAS Smurfit Kappa France et la SAS Smurfit Kappa Distribution aux dépens de l’instance ;

Condamné la SAS Smurfit Kappa France et la SAS Smurfit Kappa Distribution à payer à la SAS Maubrac la somme de 35.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ordonné l’exécution provisoire.

– Infirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de Paris en date 10 février 2023 en ce qu’il n’a pas :

Jugé recevable la SAS Maubrac à soulever la nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet français n°16 53072 ;

Prononcé la nullité du brevet français n°16 53072 sur le fondement de l’absence de nouveauté et sur le fondement de l’insuffisance de description ;

Jugé irrecevable la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION à agir sur le fondement de la concurrence déloyale.

Et en ce qu’il a débouté la SAS Maubrac de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts.

Et statuant à nouveau :

– Juger recevable la SAS MAUBRAC à soulever la nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet français n°16 53072 ;

– Juger que le brevet français n°16 53072 est nul pour défaut de nouveauté et insuffisance de description (outre le défaut d’activité inventive) ;

– Condamner solidairement la société SMURFIT KAPPA FRANCE et la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION à verser à titre de dommages et intérêts la somme de 15.000 euros à la société MAUBRAC du fait du caractère abusif de la présente procédure.

A titre subsidiaire, si la SAS MAUBRAC n’était pas jugée recevable à soulever la nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet français n°16 53072,

– Juger que les revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 du brevet français n°16 53072 sont nulles pour défaut de nouveauté et sur le fondement de l’insuffisance de description (outre le défaut d’activité inventive) ;

– Juger irrecevable la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION à agir sur le fondement de la concurrence déloyale.

A titre subsidiaire, si le jugement du 10 février 2023 n’était pas confirmé en ce qu’il a prononcé la nullité du brevet français n°16 53072 :

– Juger que la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION est irrecevable en sa demande au titre de la concurrence déloyale ou à défaut si elle n’était pas jugée irrecevable,

– Juger que la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION est mal fondée en sa demande au titre de la concurrence déloyale ;

– Débouter la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION et la société SMURFIT KAPPA FRANCE de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

En tout état de cause,

– Condamner solidairement la société SMURFIT KAPPA FRANCE et la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTIONT au paiement de la somme de 90.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

– Condamner solidairement la société SMURFIT KAPPA FRANCE et la société SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION aux entiers dépens d’instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 26 novembre 2024.

Postérieurement à la clôture, par conclusions signifiées le 11 décembre 2024, les sociétés appelantes ont modifié leurs écritures pour intégrer leur changement de dénomination sociale, soit la société Smurfit Westrock France, anciennement, Smurfit Kappa France, et la société Smurfit Westrock Distribution, anciennement société Smurfit Kappa Distribution, et demandent à la cour de :

CONFIRMER le jugement en ce qu’il a :

– Déclaré la société SAS MAUBRAC irrecevable à soulever la nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet français n°16 53072 ;

– Jugé suffisamment décrites les revendications 1 et 2 du brevet français n°16 53072;

– Jugé que la revendications 1 telle que délivrée n’a pas été étendue au-delà de l’objet du brevet français n°16 53072 ;

– Jugé que les revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 sont nouvelles ;

– Débouté la société SAS MAUBRAC de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive ;

INFIRMER le jugement en ce qu’il a :

– Prononcé la nullité des revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 du brevet français n°16 53072 pour défaut d’activité inventive ;

– Débouté la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) de ses demandes au titre de la contrefaçon de brevet et du parasitisme ;

– Dit que la décision, une fois devenue définitive, sera transmise à l’Institut National de la Propriété Industrielle par la partie la plus diligente aux fins d’inscription au Registre National des Brevets ;

– Débouté la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) de ses demandes au titre de la concurrence déloyale ;

– Condamné la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) aux dépens de l’instance ;

– Condamné la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) à payer à la société SAS MAUBRAC la somme de 35.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Ordonné l’exécution provisoire.

Et statuant à nouveau :

– JUGER que les sociétés SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) sont recevables et bien ondées en leurs appel, demandes et prétentions ;

– JUGER que la société SAS MAUBRAC est mal fondée dans son action reconventionnelle en nullité des revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 du brevet français n°16 53072 ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire, l’irrecevabilité de la demande en nullité des revendications 3 et 5 à 7 du brevet français n°16 53072 n’était pas confirmée, JUGER que les revendications 3 et 5 à 7 du brevet français n°16 53072 sont valides;

– JUGER que la société SAS MAUBRAC en fabriquant, offrant, mettant dans le commerce, utilisant sur le territoire français un ensemble d’encaissage, en utilisant et en offrant d’utiliser sur le territoire français un procédé reproduisant les revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 du brevet français n°16 53072 commet des actes de contrefaçon à l’égard de la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) au sens des articles L613-3 a), b) et c) et L615-1 et suivant du Code de la propriété intellectuelle ;

– JUGER que la société SAS MAUBRAC a commis ce faisant des actes de concurrence déloyale à l’égard de la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire les revendications du brevet n° 16 53072 étaient jugées nulles,

– JUGER que la société SAS MAUBRAC a commis ce faisant des actes de concurrence déloyale et parasitaire à l’égard de la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA France) et de la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) ;

– DEBOUTER la société SAS MAUBRAC de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

En conséquence,

– FAIRE INTERDICTION à la société SAS MAUBRAC, directement ou indirectement de poursuivre la fabrication, l’offre à la vente, la mise dans le commerce, l’utilisation, la détention, l’offre d’utilisation de tout ensemble et/ou procédé portant atteinte au brevet français n°16 53072, sous astreinte de 2.000 euros par infraction constatée, à compter de la signification de la décision à intervenir et pendant une période de trois mois à l’issue de laquelle il sera à nouveau fait droit;

– ORDONNER la confiscation et la remise à la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) des ensembles d’encaissage qui se trouveraient en possession de la société SAS MAUBRAC à la date de la décision à intervenir ;

– JUGER que la Cour se réservera la liquidation des astreintes prononcées et la fixation éventuelle de nouvelles astreintes ;

– CONDAMNER la société SAS MAUBRAC à réparer l’ensemble des préjudices causés par elle à la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) pour les faits de contrefaçon non prescrits au jour de l’assignation et ceux commis jusqu’à la décision à intervenir ;

– CONDAMNER la société SAS MAUBRAC à réparer l’ensemble des préjudices causés par elle à la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) pour les faits de concurrence déloyale non prescrits au jour de l’assignation et ceux commis jusqu’à la décision à intervenir ;

– CONDAMNER la société SAS MAUBRAC à verser à la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) à titre d’indemnisation en réparation du préjudice moral causé par les actes de contrefaçon du brevet français n°16 53072 la somme de 50.000 euros, quitte à parfaire ;

– CONDAMNER la société SAS MAUBRAC à verser à la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation du préjudice économique subi du fait des actes de contrefaçon du brevet français n°16 53072 et RESERVER les droits de la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) sur l’évaluation définitive du préjudice économique subi ;

A titre subsidiaire,

– CONDAMNER la société SAS MAUBRAC à verser à la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation du préjudice économique subi du fait des actes de parasitisme de l’intimée et RESERVER les droits de la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) sur l’évaluation définitive dudit préjudice ;

– CONDAMNER la société SAS MAUBRAC à verser à la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation du préjudice que lui a causé les actes de concurrence déloyale de l’intimée et RESERVER les droits de la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) sur l’évaluation définitive dudit préjudice ;

Avant-dire droit sur l’évaluation du préjudice :

– ORDONNER une mesure d’expertise et NOMMER tel expert qu’il plaira à la Cour de désigner avec pour mission d’apporter tout élément utile à la détermination de l’entier préjudice réellement subi par la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) du fait des actes de contrefaçon et par la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) du fait des actes de concurrence déloyale et notamment à requérir tout renseignement et consulter toute comptabilité, correspondance et archives commerciales de la société SAS MAUBRAC, et à entendre les parties en leurs dires et explications ;

– DECLARER que la Cour statuera sur le préjudice économique subi par la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et par le préjudice subi par la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) au vu du rapport de l’expert;

Subsidiairement,

– ORDONNER à la société SAS MAUBRAC de communiquer aux sociétés SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) un état certifié par son commissaire aux comptes attestant des quantités de bâtis de formage et de flans correspondants vendues et détenues en stock, ainsi que du chiffre d’affaires et du bénéfice réalisés à ce titre depuis leur première commercialisation, accompagné de l’ensemble des éléments comptables justificatifs (bons de commande, bon de livraison, factures d’achat, factures de vente ‘) et ce sous astreinte provisoire de 1.500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et pendant une période de trois mois à l’issue de laquelle il sera à nouveau fait droit ;

– JUGER que la Cour se réservera la liquidation des astreintes prononcées et la fixation éventuelle de nouvelles astreintes ;

– DECLARER que la Cour statuera sur le préjudice économique subi par la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et par le préjudice subi par la société SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) au vu des pièces qui seront produites par la société SAS MAUBRAC en exécution de la condamnation à production de pièces prononcée sous astreinte;

– RENVOYER l’affaire à une audience de mise en état pour conclusions des sociétés SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) sur le montant de leur préjudice économique au regard des éléments fournis par la société MAUBRAC ;

– DECLARER que les sociétés SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) pourront saisir à nouveau par voie de conclusions la Cour en cas de difficultés survenues entre les parties s’agissant de cette communication à production de pièces et pour évaluer l’indemnité due au titre de leur préjudice économique ;

Sur les autres mesures :

– ORDONNER la publication en entier ou par extrait de la décision à intervenir dans trois revues ou journaux au choix de la société SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et aux frais de la société SAS MAUBRAC, à concurrence de 6.000 euros HT par insertion et ce, au besoin à titre de dommages et intérêts complémentaires;

– CONDAMNER la société SAS MAUBRAC à payer à chacune des sociétés SMURFIT WESTROCK FRANCE (anciennement SMURFIT KAPPA FRANCE) et SMURFIT WESTROCK DISTRIBUTION (anciennement SMURFIT KAPPA DISTRIBUTION) la somme de 70.000 euros, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– CONDAMNER la société SAS MAUBRAC aux entiers dépens, en ce compris les frais de saisie-contrefaçon du 28 novembre 2019 et de constats des 27 novembre 2019, qui seront recouvrés par Maître TEYTAUD (AARPI TEYTAUD ‘ SALEH) dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile ;

– ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir en toutes ses dispositions nonobstant appel et sans constitution de garantie.

Avec l’accord des parties, il a été prononcé, à l’audience, la révocation de l’ordonnance de clôture afin d’accueillir ces écritures, la clôture étant prononcée à la date du 15 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.

Présentation du brevet FR 16 53072

Contenu du brevet

Le brevet FR 072 intitulé « ensemble d’emballage et de bâti de formage dudit emballage » porte sur un ensemble d’encaissage comprenant un flan (tel un carton), un bâti de formage et un procédé de montage.

Selon la description, l’invention se rapporte à l’encaissage dans des emballages en matériau semi-rigide tel que le carton ou le carton ondulé, au moyen d’un bâti de formage.

Il est précisé qu’il est connu de fabriquer des caisses contenant des bouteilles de vin de façon semi-manuelle au moyen d’un bâti de formage, le dispositif comprenant des moyens de formage pour dresser des parois d’un flan en carton lorsque l’opérateur appuie sur le fond du flan.

Au titre de l’art antérieur est cité le brevet FR 2 947 532, dont est titulaire l’intimée, qui divulgue un tel « exemple de bâti, avec des moyens de formage pour dresser trois des quatre parois par rapport au fond de l’emballage. L’opérateur effectue-lui-même le dressage de la quatrième paroi et évacue l’emballage ainsi mis en volume par le côté du bâti correspondant à cette quatrième paroi et dénué de moyens de formage susceptibles d’empêcher le passage de l’emballage. Des tiges permettent de replier les rabats lors du passage de l’emballage. L’opérateur applique alors un ruban adhésif pour assurer le maintien en place de l’emballage monté, rempli et fermé. 

Il existe un besoin pour une manipulation plus aisée. »

Il est ainsi proposé un ensemble d’encaissage comprenant un flan en un matériau semi-rigide et un bâti de formage pour une mise en volume semi-manuelle d’un emballage à partir de ce flan.

Toujours selon la description, « L’emballage ainsi mis en volume reste ainsi mis en volume, de sorte que l’opérateur n’est pas tenu de sceller immédiatement l’emballage au moyen d’un ruban adhésif, comme dans le document discuté ci-dessus. On peut par exemple prévoir de stocker en dehors du bâti de formage l’emballage mis en volume, avant de sceller l’emballage. Ceci peut permettre de conférer plus de liberté à l’opérateur. Cette stabilité de l’emballage peut aussi permettre de conférer davantage de liberté pour concevoir le procédé d’encaissage : du fait de cette possibilité de stockage, on pourra par exemple prévoir un poste de formage et un poste de scellage distinct, ce qui peut permettre d’améliorer la productivité. »

Le brevet comporte dix revendications, les huit premières portant sur l’ensemble d’encaissage ( revendication 1 puis 2 à 7 dépendantes) et les deux dernières sur le procédé, ainsi rédigées :

1. Ensemble d’encaissage comprenant

un flan (1) en un matériau semi-rigide tel que le carton ou le carton ondulé, comprenant une partie de fond (10) à quatre côtés, de part et d’autre de cette partie de fond, deux premières parois (11, 11′) articulées par des lignes de pliage (31, 31′) à ladite partie de fond sur deux côtés respectifs, aptes à être dressées par rapport à ladite partie de fond, et sur les deux autres côtés de la partie de fond, deux deuxièmes parois (12, 12′) articulées par des lignes de pliage (32, 32′) à ladite partie de fond, aptes à être dressées par rapport à ladite partie de fond, et

un bâti de formage (200), pour une mise en volume semi-manuelle d’un l’emballage à partir dudit flan, ce bâti comprenant des moyens de formage (204, 207, 208, 209, 210) pour dresser au moins deux des quatre parois par rapport à la partie de fond,

dans lequel

à au moins une première paroi du flan est articulé un volet d’extrémité (14, 15, 16, 17) par une ligne de pliage latérale (41, 42, 42′, 41′),

le flan est agencé pour que ledit volet d’extrémité soit apte à coopérer avec une deuxième paroi adjacente à la première paroi articulée au volet d’extrémité, lorsque les première et deuxième parois sont dressées, afin de maintenir ces première et deuxième parois dressées par rapport à la partie de fond,

au moins une deuxième paroi (12, 12′) est articulée à un élément de rembordement (18, 19) destiné à être replié contre cette deuxième paroi et à venir en butée contre les volets d’extrémité (14, 15, 16, 17) adjacents à cette deuxième paroi afin de maintenir les parois (11, 11′, 12, 12′) dressées,

le bâti de formage (200) est agencé de façon à autoriser une évacuation latérale de l’emballage mis en volume, selon au moins une direction d’évacuation correspondant à au moins une deuxième paroi respective, et

les moyens de formage comprennent des moyens pour dresser au moins une deuxième paroi articulée à un élément de rembordement correspondant, sur un côté correspondant à cette direction d’évacuation, lesdits moyens ne s’opposant pas à l’évacuation de l’emballage mis en volume lorsque ledit élément de rembordement est replié contre ladite deuxième paroi.
1: Subdivisions des caractéristiques telles que reprises par les parties dans leurs écritures et mise en gras ajoutée par la cour.

2. Ensemble selon la revendication 1, dans lequel l’emballage est agencé de façon à permettre un verrouillage d’au moins un élément de rembordement .

3. Ensemble selon la revendication 2 dans lequel l’élément de rembordement définit au moins un tenon sur son bord opposé à la ligne de pliure articulant ledit élément à la deuxième paroi correspondante, et la partie de fond de l’emballage définit au moins un orifice disposé et agencé pour recevoir ledit au moins un tenon respectif lorsque l’élément de rembordement est replié contre ladite deuxième paroi.

4. Ensemble selon l’une quelconque des revendications 1 à 3, dans lequel au moins un élément de rembordement (18,19) définit des bords latéraux légèrement obliques.

5. Ensemble selon la revendication 4, dans lequel les premières parois définissent des découpes disposées et agencées pour recevoir les bords latéraux légèrement obliques de l’élément de rembordement.

6. Ensemble selon l’une quelconque des revendications 1 à 5, dans lequel au moins un volet destiné à coopérer avec au moins une deuxième paroi comprend un tenon (119,120,121,122), et le flan définit au moins une découpe (129, 130, 131, 132), dans une deuxième paroi (111,111′) ou dans un volet articulé à une deuxième paroi, disposée et agencée pour recevoir ledit au moins un tenon.

7. Ensemble selon l’une quelconque des revendications 1 à 6, dans lequel le bâti de formage (200) est agencé de sorte que les moyens de formage (209,210) pour dresser les premières parois laissent ces parois légèrement évasées par rapport à la verticale.

8. Ensemble selon l’une quelconque des revendications 1 à 7, dans lequel le bâti de formage (200) est agencé de façon à autoriser une évacuation latérale selon deux directions d’évacuation opposées.

9. Procédé de montage d’un emballage de type plateau ou barquette, à partir d’un flan en un matériau semi-rigide, comprenant une partie de fond à quatre côtés, de part et d’autre de cette partie de fond, deux premières parois articulées par des lignes de pliage à ladite partie de fond sur deux côtés respectifs, sur les deux autres côtés de la partie de fond, deux deuxièmes parois articulées par des lignes de pliage à ladite partie de fond, au moins un volet d’extrémité articulé par une ligne de pliage latérale à moins une première paroi, Le flan étant agencé pour que ledit volet d’extrémité puisse coopérer avec une deuxième paroi adjacente à la première paroi articulée au volet, lorsque les première et deuxième parois sont dressées, afin de maintenir ces première et deuxième parois dressées par rapport à la partie de fond,

dans lequel au moins une deuxième paroi (12, 12′) est articulée à un élément de rembordement (18, 19) destiné à être replié contre cette deuxième paroi et à venir en butée contre des volets d’extrémité (14, 15, 16, 17) adjacents à cette deuxième paroi afin de maintenir les parois (11, 11′, 12, 12′) dressées,

le procédé comprenant :

étape a) installer ledit flan sur un bâti de formage comprenant des moyens de formage pour dresser au moins deux des quatre parois par rapport à la partie de fond, ledit bâti de formage (200) étant agencé de façon, à autoriser une évacuation latérale de l’emballage mis en volume, selon au moins une direction d’évacuation correspondant à au moins une deuxième paroi respective, et les moyens de formage comprenant des moyens pour dresser au moins une deuxième paroi articulée à un élément de rembordement correspondant, sur un côté correspondant à cette direction d’évacuation, lesdits moyens ne s’opposant pas à l’évacuation de l’emballage mis en volume lorsque ledit élément de rembordement est replié contre ladite deuxième paroi,

étape b) exercer un appui sur la partie de fond pour dresser lesdites au moins deux parois du fait de la coopération avec les moyens de formage,

étape c) replier ledit au moins un élément de rembordement contre la deuxième paroi dressée correspondante, et

étape d) évacuer l’emballage du bâti, par un côté correspondant à la direction d’évacuation.

10. Procédé selon la revendication 9, comprenant en outre l’étape consistant à installer au moins une bouteille dans l’emballage ainsi mis en volume ».

Les revendications 1, 2, 4, 8, 9 et 10 sont opposées par les sociétés Smurfit dans la présente instance en contrefaçon.

Art antérieur pertinent

L’état de la technique le plus proche à sélectionner doit être pertinent, c’est-à-dire qu’il doit correspondre à une utilisation semblable et appeler le moins de modifications structurelles et fonctionnelles pour parvenir à l’invention revendiquée. Cet état de la technique le plus proche doit donc viser à atteindre le même objectif ou à obtenir le même effet que l’invention ou au moins appartenir au même domaine technique que l’invention revendiquée ou à un domaine qui lui est étroitement lié.

Comme il a été vu, dans sa description, le brevet mentionne le brevet français FR 532 de la société Maubrac, portant également sur un dispositif de mise en volume d’emballages en carton et d’encaissage manuel à l’aide d’un bâti de formage dont il se propose de rendre « la manipulation plus aisée ».

Par ailleurs, le rapport de recherche de l’INPI annexé au brevet FR 072 cite quatre brevets antérieurs susceptibles d’être pris en considération pour apprécier la brevetabilité de l’invention dont les trois qui suivent :

– WO 2010/048680 A1 ( ci-après D1) : demande de brevet internationale publiée le 6 mai 2010 portant sur un « assemblage d’un plateau en carton », (l’examinateur de l’Office européen des brevets ayant réalisé la recherche pour le compte de l’INPI a considéré, dans son opinion écrite, que les revendications 1 à 9 du brevet étaient dépourvues de nouveauté par rapport à cette antériorité ;

– US 5 971 906 A (ci-après D2) : demande de brevet américain publiée le 26 octobre 1999 intitulé « tray forming apparatus and method », soit « appareil et procédé de formage de plateaux » ;

– US 4 273 548 A (ci-après D3) : demande de brevet américain publiée le 16 juin 1981 intitulée « method and device for holding blanks to form boxes », soit « procédé et dispositif de pliage d’ébauches pour former des boîtes ».

Dans le rapport de recherche de l’Inpi concernant la demande de brevet français n° 13 57697 (et qui a fait l’objet de la demande divisionnaire FR 1653072, opposée par les sociétés Smurfit), il est également mentionné (pièce 3 des sociétés Smurfit) :

DE 2615042 A1 : demande de brevet allemand du 20 octobre 1977 portant sur un « dispositif de pliage pour plier une coupe brevetée de carton ondulé ou similaire à insérer dans ce dispositif à plat » ;

US 4 273 548 : demande de brevet US du 16 juin 1981 ;

US 3 800 681 : demande de brevet US du 2 avril 1974 ;

FR 2 679 823 : demande de brevet français du 5 février 1993, intitulé « machine de mise en volume de plateaux comportant un fond plat ainsi qu’une bordure périphérique » ;

FR 2 554 417 : demande de brevet français du 10 mai 1985.

La société Maubrac fait en outre référence aux antériorités suivantes :

une vidéo provenant de YouTube intitulée « XPAK – FOLD and LOCK TRAY and BOX ERECTOR model XP-F3100 » mise en ligne le 14 octobre 2010, selon le procès-verbal établi le 8 juillet 2020 et sur le site playtube.pk. (ci-après D4) ;

un plan de flan pour emballage édité le 21 janvier 2013, (ci-après D5) ;

une vidéo provenant de YouTube intitulée « Master Series MTE-1200 Tray Erector » mise en ligne le 18 février 2010 selon le procès-verbal de constat établi le 11 février 2021 (ci-après D6).

S’agissant des deux vidéos opposées, les sociétés Smurfit considèrent qu’elles ne peuvent être retenues, ne constituant pas une antériorité certaine, point qui sera examiné dans l’examen sur la nouveauté.

La personne du métier

La cour rappelle que la personne du métier est celle qui possède les connaissances normales du domaine technique en cause et est capable, à l’aide de ses seules connaissances et aptitudes professionnelles, de concevoir la solution du problème que propose de résoudre l’invention.

Au vu du domaine technique en cause, la cour retient, comme le tribunal, que la personne du métier est un technicien ou ingénieur mécanicien spécialisé dans la conception d’emballages, notamment en carton.

La portée du brevet

Les parties débattent sur l’objet et la portée du brevet et plus particulièrement s’agissant des caractéristiques b), f) et g).

Selon les sociétés Smurfit, le brevet porte sur un ensemble d’encaissage, c’est-à-dire un ensemble permettant de mettre dans une caisse mise en volume des objets, comme des bouteilles de vin, avant son évacuation.

S’agissant de la notion de bâti de formage mentionné dans la caractéristique b), elles le définissent comme une structure formée de pièces rigidement reliées entre elles et dans une position relative fixe, ne comprenant pas de parties mobiles, comme cela ressort de la documentation et d’un rapport d’expertise privée. Ainsi, selon elles, un bâti de formage constitue une structure monobloc qui définit un volume constant. Elles ajoutent que c’est parce qu’il est une structure monobloc qu’un bâti de formage permet de dresser les parois du flan lorsque l’opérateur enfonce le flan dans le bâti, car il résiste à la pression exercée par l’opérateur, alors que si certains moyens de formage étaient articulés par rapport à d’autres, le bâti s’ouvrirait sous l’effet de cette pression et ne pourrait pas dresser les parois du flan.

S’agissant de la notion de mise en volume semi-manuelle mentionné dans la caractéristique b), elles rappellent qu’une telle mise en volume n’est pas complètement manuelle et nécessite l’intervention d’un opérateur dont les tâches sont facilitées grâce au bâti qui préforme certains côtés du flan, tel que cela ressort de la description.

S’agissant de la caractéristique f) qui mentionne une évacuation latérale selon une direction correspondant à une deuxième paroi, elles expliquent que le bâti permet l’évacuation latérale du flan mis en volume, cette évacuation étant réalisée en direction de la deuxième paroi de l’emballage, c’est-à-dire perpendiculairement à cette deuxième paroi. Ainsi, selon elles, le bâti permet d’évacuer l’emballage par un de ses côtés, ce qui le distingue d’autres bâtis connus pour lesquels l’emballage (vide) est évacué par le fond ou par le haut, l’évacuation latérale facilitant la manipulation par l’opérateur de l’emballage une fois rempli, puisqu’il n’a pas à le soulever pour le faire sortir du bâti. Elles ajoutent que cette caractéristique précise également dans quelle direction l’emballage est évacué ou encore la paroi de l’emballage qui sort la première du bâti, en se référant à la structure du flan, le brevet précisant que l’emballage est évacué en direction d’une deuxième paroi de l’emballage (c’est-à-dire une paroi articulée à un élément de rembordement) et, donc, parallèlement aux premières parois et que l’évacuation se fait donc en passant sous un tube de formage d’une deuxième paroi et ainsi vers une deuxième paroi qu’il permet de dresser et qu’en d’autres termes, la direction d’évacuation est perpendiculaire à une deuxième paroi.

Enfin, s’agissant de la caractéristique g) mentionnant la présence d’un moyen de formage sur le côté du bâti par lequel l’emballage est évacué, elle confirme que l’évacuation de l’emballage est réalisée vers une deuxième paroi, ou encore perpendiculairement à une deuxième paroi et que l’évacuation latérale est possible malgré la présence d’un moyen de formage d’une deuxième paroi de l’emballage.

Selon la société Maubrac, le débat instauré sur la notion de bâti n’est pas pertinent car la notion de bâti tel qu’employé dans le brevet s’entend comme un gabarit qui n’a pas de définition technique et qu’il ne peut recevoir la définition proposée par les appelantes. Elle considère qu’en soutenant qu’un bâti ne serait constitué que de pièces fixes, les sociétés Smurfit opèrent une généralisation intermédiaire en déformant les termes de leur brevet et en procédant à une limitation ayant pour effet d’étendre son objet au-delà du contenu de la demande telle que déposée.

Elle considère que la notion de mise en volume semi-manuelle doit être définie comme un procédé qui comprend à la fois des opérations manuelles et des opérations automatiques .

S’agissant de la caractéristique f), elle retient que rien ne permet de retenir l’interprétation donnée par les appelantes, le brevet décrivant uniquement que le bâti permet une évacuation latérale du flan mis en volume, parallèle ou perpendiculaire à une deuxième paroi, la société Maubrac rappelant qu’il n’est pas possible de se référer à la description pour ajouter un élément que la revendication ne contient pas.

– Sur la notion de bâti

Il est constant que le brevet ne définit pas précisément la notion de bâti, (soit « un support sur lequel sont assemblées les diverses pièces d’une machine », selon le dictionnaire Larousse) les parties s’accordant pour le définir comme un gabarit, soit un dispositif permettant d’obtenir des emballages de dimensions identiques qui constitue donc une structure rigide.

Cependant, la cour retient, comme le tribunal, que rien n’exclut, au sens du brevet, que dans ce gabarit, il puisse exister des éléments mobiles, tant que la fonction du gabarit n’est pas remise en cause.

Ainsi, dans la description du brevet (page 10 lignes13 et suivantes), il est mentionné que le « bâti 200 représenté sur cette figure 3 comprend deux joues ou flasques 202, en regard l’une de l’autre et séparées par des rouleaux formant entretoise. Ces rouleaux sont montés rotatifs sur des axes respectifs fixes et peuvent tourner librement. » Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les sociétés Smurfit, ces rouleaux rotatifs sont effectivement intégrés au bâti comme l’illustrent les figures 3 et 6 et s’ils ne participent pas au formage du flan, ils contribuent à permettre son évacuation latérale au sens de la revendication 1.

Cette hypothèse n’est au demeurant pas écartée par l’expert consulté à titre amiable par les sociétés Smurfit qui retient qu’un bâti peut « supporter » des parties mobiles.

Ainsi, dans l’ouvrage « Elément de construction à l’usage de l’ingénieur » cité par l’expert, dont seule une page est reproduite dans son rapport, il est mentionné que le bâti peut prévoir des « panneaux mobiles ».

– Sur la notion de mise en volume semi-manuelle

Cette notion n’est pas définie par le brevet mais se comprend aisément comme partiellement manuelle et partiellement automatique, soit un procédé en partie automatisé qui, pour être mis en ‘uvre, nécessite l’intervention d’un opérateur et, précisément au cas présent, l’intervention de l’opérateur est facilitée par le bâti, qui préforme certains côtés du flan, comme cela ressort de la description.

– Sur l’évacuation latérale

Ce point est évoqué dans les caractéristiques f) et g) du brevet qui se lisent comme suit :  f) « le bâti de formage (200) est agencé de façon à autoriser une évacuation latérale de l’emballage mis en volume, selon au moins une direction d’évacuation correspondant à au moins une deuxième paroi respective, » et g) « les moyens de formage comprennent des moyens pour dresser au moins une deuxième paroi articulée à un élément de rembordement correspondant, sur un côté correspondant à cette direction d’évacuation, lesdits moyens ne s’opposant pas à l’évacuation de l’emballage mis en volume lorsque ledit élément de rembordement est replié contre ladite deuxième paroi. »

Il s’en évince que ces caractéristiques signifient que le bâti permet une évacuation latérale de l’emballage par un de ses côtés, la direction latérale correspondant à la deuxième paroi, le brevet ne mentionnant nullement, contrairement à ce que soutiennent les sociétés Smurfit, que cette direction soit « perpendiculaire » à cette deuxième paroi ou parallèle à la première.

Sur la recevabilité de la demande reconventionnelle en nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet FR 072

La société Maubrac soutient être recevable à agir en nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet dans la mesure où elles sont dépendantes des revendications qui lui sont opposées et que certaines des revendications opposées dépendent, elles-mêmes, de ces revendications et qu’elles présentent ainsi un lien de connexité et de dépendance suffisant avec celles-ci au sens de l’article 71 du code de procédure civile. Elle constate à cet égard que, pour interpréter les revendications opposées et leur portée, les sociétés Smurfit elles-mêmes ont dû développer et analyser le contenu des revendications non opposées, de même que le tribunal.

Les sociétés Smurfit rappellent que seules les revendications 1, 2, 4 et 8 à 10 sont opposées au titre de la contrefaçon, de sorte que la société Maubrac est irrecevable à soulever la nullité des revendications 3, 5, 6 et 7 du brevet, demande qui ne présente pas de lien suffisant avec la demande originelle en contrefaçon. Elles ajoutent que le fait que les revendications 4 et 8 puissent dépendre de revendications non opposées au titre de la contrefaçon est indifférent pour apprécier leur validité, dès lors qu’elles dépendent respectivement des autres revendications qui font l’objet de l’action en contrefaçon.

En vertu de l’article 70 du code de procédure civile, « les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables qui si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. »

Puis selon l’article 31 du même code, « l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention (‘) »

Et en application de l’article 122 du même code, « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande , sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »

Sur ce, la société Maubrac démontre, au cas d’espèce, qu’au regard de la rédaction des différentes revendications du brevet, il existe un lien de connexité entre l’ensemble des revendications, car, notamment pour analyser et interpréter les revendications opposées et leur portée, il convient de se référer au contenu de certaines revendications non opposées; il en est ainsi de la revendication 4 qui s’analyse au regard de la revendication 3, de la revendication 5 qui permet de comprendre l’usage des bords légèrement obliques de la revendication 4, des revendications 6, 7 et 8 qui se réfèrent aux précédentes, le tribunal ayant ainsi été amené à examiner la validité de la revendication 5 au regard de l’insuffisance de description alléguée.

Au surplus, la cour relève que, dans le dispositif de leurs conclusions, les sociétés Smurfit lui demandent expressément qu’il soit fait interdiction à la société Maubrac «directement ou indirectement de poursuivre la fabrication, l’offre à la vente, la mise dans le commerce, l’utilisation, la détention, l’offre d’utilisation de tout ensemble et/ou procédé portant atteinte au brevet français n°16 53072 », sans limiter leur demande aux seules revendications mentionnées au titre de la contrefaçon, de sorte que s’agissant d’une entrave potentielle à l’exercice de son activité et alors qu’il n’est pas contesté que les sociétés sont directement concurrentes sur le même marché, les sociétés Smurfit ayant déjà, dans le passé, mis en demeure l’intimée de cesser d’exploiter le même dispositif, comme le dénonce la société Maubrac, celle-ci est bien fondée à solliciter reconventionnellement la nullité de l’ensemble des revendications opposées.

Aussi, il convient de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par les sociétés Smurfit sur ce point et de dire que la société Maubrac est recevable à solliciter la nullité de l’ensemble des revendications du brevet FR 072, le jugement déféré étant infirmé de ce chef.

Sur la validité du brevet FR 16 53072

A titre liminaire, il convient de constater que le jugement n’est pas contesté en ce qu’il a écarté le moyen de nullité tiré de l’extension de l’objet du brevet.

Sur le défaut de nouveauté

La société Maubrac soutient que le brevet opposé ne remplit pas les conditions de brevetabilité car il n’est pas nouveau.

– Par rapport à la demande de brevet internationale WO 2010/048680 – D1

La société Maubrac soutient notamment que :

la demande de brevet internationale WO 2010/048680 A1 intitulée ‘assemblage d’un plateau en carton’, faisant partie du même domaine technique, est bien un dispositif d’encaissage, les cartons étant destinés à être remplis, qui n’exclut pas l’intervention d’un opérateur pour la mise en volume et a bien le même objet que le brevet opposé, et divulgue la caractéristique a) ;

la notion de bâti n’exclut pas la présence de pièces mobiles (les rouleaux 203 du brevet querellé étant eux-mêmes mobiles) ;

D1 convient à une mise en volume semi-manuelle, de sorte que la caractéristique b) de la revendication 1 est présente, contrairement à ce qu’a retenu le tribunal ;

il n’est pas contesté que D1 divulgue les caractéristiques c), d) et e) de la revendication 1 ;

D1 divulgue aussi la caractéristique f) dès lors qu’elle permet l’évacuation latérale du flan, la direction d’évacuation latérale n’ayant aucun effet sur la brevetabilité car, quel que soit le sens donné au terme ‘correspondant’, il suffit d’intervertir le nom des parois ‘première’ et ‘deuxième’ pour se retrouver aussi bien dans le cas perpendiculaire que dans le cas parallèle,

D1 divulgue aussi la caractéristique g) car les moyens de formage ne s’opposent pas à l’évacuation de l’emballage mis en volume.

Les sociétés Smurfit estiment, comme le tribunal, que l’antériorité D1 ne peut détruire la nouveauté de leur brevet. Elles font valoir que :

D1 décrit une machine entièrement automatisée conçue comme une table pour réaliser des plateaux à partir de flans, de sorte que ce n’est pas un dispositif d’encaissage alliant un bâti et une mise en forme semi-manuelle (caractéristique b) de la revendication 1), et qu’elle est dépourvue des caractéristiques f) et g) de la revendication 1 car elle ne permet pas une évacuation latérale du flan mis en volume dans la direction de la paroi comportant un élément de rembordement, soit la deuxième paroi ;

la revendication 9 est également nouvelle car elle mentionne un bâti de formage présentant les caractéristiques b), f) et g );

la même conclusion s’impose donc pour les revendications 2 à 8 et 10.

La cour rappelle qu’en vertu de l’article L.611-11 du code de la propriété intellectuelle, « Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique.

L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen.

Est également considéré comme compris dans l’état de la technique le contenu de demandes de brevet français et de demandes de brevet européen ou international désignant la France, telles qu’elles ont été déposées, qui ont une date de dépôt antérieure à celle mentionnée au second alinéa du présent article et qui n’ont été publiées qu’à cette date ou qu’à une date postérieure. (…)»

Pour être comprise dans l’état de la technique et être privée de nouveauté, l’invention doit s’y trouver toute entière dans une seule antériorité au caractère certain, avec les mêmes éléments qui la constituent, dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique.

Le brevet D1 porte sur ‘une machine pour plier une découpe de carton dans un plateau ouvert la machine comprenant des moyens pour déplacer une découpe d’une pile de découpes vers un convoyeur, le convoyeur étant apte à transférer le flan sur une table, des moyens pour serrer le flan dans une position fixe sur la table, des moyens de pliage pour replier les côtés et les extrémités du flan en parois s’étendant verticalement, des moyens de consolidation pour presser les rabats se chevauchant des côtés ou des extrémités dans des fentes à la base de la découpe et, un moyen d’éjecter le plateau ouvert de la machine’.

La cour considère, comme les premiers juges, que si D1 décrit un modèle de flan, un dispositif de formage et de mise en place des rabats et l’évacuation de l’emballage mis en forme, il envisage le pliage sur une table avec des éléments distincts, soit des bras articulés, et non sur un bâti de formage, et ne permet pas de réaliser l’encaissage selon la revendication 1, soit la mise en place d’un produit ou objet dans le carton avant son évacuation, D1 évoquant uniquement une machine permettant « de plier rapidement et efficacement des flans en barquette », la classification internationale du brevet invoquée par la société Maubrac ne permettant nullement de retenir cette destination. Il y a seulement lieu pour la cour d’ajouter que D1 décrit en outre une machine entièrement automatisée, la mise en volume de l’emballage n’étant donc nullement semi-manuelle, mais rendue possible par un « élément de pression » actionné par un vérin pneumatique.

C’est en conséquence à juste titre que le tribunal a retenu que D1 ne constitue pas une antériorité de toute pièce du brevet FR 072 destructrice de nouveauté.


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